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Chômage : notion de travailleur à temps partiel volontaire et étendue du droit aux allocations

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 17 décembre 2015, R.G. 2013/AB/762

Mis en ligne le lundi 30 mai 2016


Cour du travail de Bruxelles, 17 décembre 2015, R.G. 2013/AB/762

Terra Laboris

Dans un arrêt du 17 décembre 2015, la cour du travail de Bruxelles rappelle que la notion de travailleur à temps partiel volontaire n’est pas circonscrite de manière précise, afin de tenir compte de la multiplicité des situations possibles et que, s’il n’y a pas de statut spécifique pour ces travailleurs, des droits leur sont cependant garantis, droits proportionnels à ceux des travailleurs à temps plein.

Les faits

Lors de son inscription au chômage, un travailleur dépose un document C4 faisant état de prestations à temps plein pour une durée d’un mois, étant celui précédant la demande d’allocations.

Il s’avérera ultérieurement que cette activité a été fictive, de telle sorte que l’ONSS procèdera à une annulation des prestations déclarées en faveur du travailleur pour le trimestre correspondant.

En conséquence, le secteur chômage est alerté et une décision est prise par l’ONEm d’exclusion ainsi que de récupération pendant une période de cinq ans. Une sanction sur pied de l’article 153 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 est également décidée, étant une exclusion pour une période de 26 semaines.

L’exclusion définitive se fonde sur la non réalisation de la condition d’admissibilité que constitue le stage, et ce vu l’annulation d’une partie des prestations. La non prise en compte du mois concerné amène en effet l’intéressé en-deçà du nombre de jours de travail requis au cours de la période de référence.

Un recours est introduit devant le tribunal du travail en contestation du caractère fictif des prestations.

Le tribunal rejette ce recours par jugement du 14 juin 2013, faisant dans celui-ci droit à la demande reconventionnelle de l’ONEm de récupérer un montant de l’ordre de 56.500€.

Position des parties devant la cour

L’assuré social interjette appel mais ne conteste plus le caractère fictif des prestations. Il considère cependant qu’il pouvait bénéficier d’allocations de chômage sur une autre base réglementaire, étant l’article 33 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991. Il fait en effet état de sa qualité de travailleur à temps partiel volontaire depuis plus de 7 mois avant l’inscription au chômage. La période de référence devait, en conséquence, être allongée et passer de 18 à 24 mois. En prenant cette durée en compte, il était admissible.

L’ONEm se cantonne, pour sa part, sur sa position initiale, considérant que les conditions pour bénéficier des allocations de chômage à temps plein ne sont pas remplies et que ne le sont pas davantage celles permettant l’admissibilité dans le régime du travailleur à temps partiel volontaire, et ce au motif que cette éventualité suppose que le travailleur ait presté à temps partiel pendant un tiers au moins de la période de référence prévue à l’article 30 de l’arrêté royal.

Décision de la cour

La cour constate, rapidement, que l’intéressé ne peut prétendre aux allocations de chômage à temps plein, le C4 étant un faux et le nombre de journées requis dans la période de référence de 18 mois (312 journées) n’étant pas atteint.

La question essentielle à examiner est l’application de l’article 33, concernant le travailleur à temps partiel volontaire. Celui-ci doit remplir certaines conditions relatives à son occupation ainsi qu’au stage.

Sur l’occupation, dans le cadre du temps partiel, celle-ci doit comporter en moyenne au moins 12 heures de travail par semaine ou un tiers au moins du temps de travail de la personne de référence. La durée hebdomadaire de travail est calculée en tenant compte de la dernière période de quatre semaines au moins pendant laquelle le travailleur était en service auprès du même employeur dans le cadre de ce temps partiel volontaire. Il y a lieu de retenir le nombre d’heures situées pendant la période entière d’occupation, sans cependant prendre en compte la période précédant les douze derniers mois.

En ce qui concerne le stage, celui-ci doit être constitué du même nombre de demi-journées que celui requis dans le régime général. La période de référence est cependant, dans cette hypothèse de travailleur volontaire à temps partiel, prolongée de six mois.

En application de la réglementation, il faut, pour la cour, considérer toutes les périodes de travail des douze derniers mois, dans la mesure où il n’y pas eu occupation à temps partiel d’une durée consécutive de quatre semaines pendant cette période et examiner si l’intéressé a pu acquérir le statut de travailleur à temps partiel sur la base de la dernière période d’occupation réelle. Avant le mois rejeté (prestations fictives), il a presté pour une société d’intérim pendant quatre semaines environ, prestant chaque fois à temps partiel. Pour toutes les autres périodes de travail prises en compte, soit il n’a pas travaillé, soit il a été occupé à temps plein. Se pose dès lors la question de savoir si la qualité de travailleur à temps partiel volontaire peut lui être donnée sur cette base.

L’arrêté royal du 25 novembre 1991 prévoit en son article 29, §4 qu’il faut entendre par là le travailleur qui n’est pas à temps plein (au sens de l’article 28 §1er) et à qui ne s’applique pas la notion de travailleur à temps partiel avec maintien des droits (article 29 §2 et 2bis).

Le travailleur à temps plein est celui dont la durée contractuelle normale de travail correspond à la durée de travail maximale en vigueur dans l’entreprise et qui reçoit une rémunération correspondante sur base hebdomadaire.

La notion de travailleur à temps partiel n’est pas définie comme telle et la cour renvoie à la doctrine (J. DEUMER, « Les droits et obligations des travailleurs à temps partiel en matière de chômage », in J. NEVEN et ST. GILSON, « La réglementation du chômage. 25 ans d’application de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 », Wolters Kluwer, p. 355 et s.), qui confirme que la notion n’est pas circonscrite de manière précise, et ce afin de tenir compte de la multiplicité des situations possibles. Il n’y a dès lors pas de statut spécifique accordé à ces travailleurs mais des droits leur sont garantis, droits proportionnels à ceux des travailleurs à temps plein.

La cour renvoie alors à l’article 103 de l’arrêté royal selon lequel, si le travailleur à temps partiel remplit les conditions d’admissibilité, il peut bénéficier de demi-allocations pour les heures où il était habituellement occupé. Le nombre de demi-journées de travail pour le travailleur à temps partiel volontaire s’obtient en multipliant par deux le nombre de journées calculées du 26 novembre 1991 avec un maximum de 78 demi-journées par trimestre. L’intéressé peut dès lors, en fonction de sa dernière occupation effective, être considéré comme chômeur à temps partiel volontaire.

La cour ordonne la réouverture des débats sur les montants.

Intérêt de la décision

La première partie de la discussion est classique, étant qu’une fois apparu le caractère fictif des prestations de travail, l’ONSS prend une décision de désassujettissement et des conséquences sont attendues dans un délai (indéterminé toutefois) au niveau du chômage. En l’espèce, la situation aura perduré plus de cinq ans et l’indu demandé par l’ONEm est très important.

Cette situation n’empêche cependant pas l’examen du dossier sur une autre base, étant celle du travailleur à temps partiel volontaire. La cour rappelle ici que cette notion n’a pas de définition précise, si ce n’est par opposition à celle du chômeur admis sur la base d’un temps complet, étant le travailleur à temps plein bénéficiant contractuellement d’une durée normale de travail correspondant à la durée maximale admise dans l’entreprise et percevant une rémunération correspondante. Elle est également distincte de celle de travailleur à temps partiel avec maintien des droits.


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