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Accident du travail et AMI : évaluation de l’incapacité

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 5 février 2014, R.G. 2009/AB/52.196

Mis en ligne le mercredi 21 mai 2014


Cour du travail de Bruxelles, 5 février 2014, R.G. n° 2009/AB/52.196

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 5 février 2014, la Cour du travail de Bruxelles reprend les règles en matière d’indemnisation AMI en présence de séquelles d’un accident du travail.

Les faits

Un membre du personnel d’une institution médicale est l’objet d’une agression de la part d’un patient. Cet événement a lieu en 1997 et l’intéressée est en incapacité de travail depuis lors. Deux ans plus tard, la Commission régionale du Conseil médical de l’Invalidité décide qu’elle ne présente plus une réduction de capacité de gain de plus des 2/3, décision qu’elle conteste par requête adressée au Tribunal du travail de Bruxelles en janvier 2000.

Par ailleurs, une procédure est diligentée, en matière d’accident du travail et un taux d’incapacité permanente lui est reconnu, taux dont la cour précise qu’elle ne peut déterminer s’il est de 5 ou de 8%.

Le tribunal du travail rend, ultérieurement, un jugement en date du 22 avril 2009, statuant en AMI et concluant au non fondement de la demande.

Appel est interjeté par l’intéressée.

Décision de la cour du travail

La cour constate qu’elle est amenée à statuer sur la notion d’incapacité de travail en AMI vu le taux retenu en accident du travail.

Elle relève que, à cet égard, le tribunal semble avoir retenu qu’un taux d’indemnisation au titre d’incapacité permanente de travail en accident du travail faible, couplé à l’absence d’éléments médicaux circonstanciés, ne pouvait établir l’existence d’une contestation médicale suffisante.

La cour se penche dès lors sur le lien entre l’incapacité de travail AMI et dans le régime d’accident du travail. Elle pose le principe que l’indemnisation retenue en matière d’accident du travail ne fait pas en tant que telle obstacle à la reconnaissance de l’incapacité.

Elle rappelle un arrêt de la Cour de cassation (Cass., 1er octobre 1990, Pas., 1991, I, p. 101) qui a énoncé les règles en matière d’évaluation de l’incapacité de travail, étant qu’il faut déterminer la réduction de la capacité de gain en fonction de l’ensemble des lésions et des troubles fonctionnels dont le bénéficiaire est victime au moment de l’interruption du travail, et non uniquement en fonction de nouvelles lésions ou de troubles fonctionnels ou d’aggravation de lésions ou de troubles qui ont entraîné l’interruption de travail. Il s’agit dès lors d’examiner la capacité restante, ce qui signifie de ne pas distinguer entre ce qui est imputable à l’accident ou non : c’est l’ensemble qui doit être pris en compte.

Ce n’est dès lors qu’au stade de l’indemnisation qu’il faut se référer à l’article 136, § 2, alinéa 1er de la loi coordonnée pour déterminer - en tenant éventuellement compte d’une rente perçue en accident du travail - si une partie de l’incapacité est imputable à ce dernier. La cour renvoie à diverses décisions rendues en ce sens, dans lesquelles elle a précisé que l’incapacité de travail de 66% doit être appréciée en tenant compte de l’ensemble des lésions et troubles fonctionnels présentés par l’assuré social, et ce quelle qu’en soit la cause. S’il faut tenir compte de pathologies autres que celles liées aux séquelles d’un accident, la personne peut cumuler la rente en accident du travail et les indemnités AMI. Par contre si le taux de 66% n’est atteint qu’en tenant compte des séquelles de l’accident du travail, la rente versée en accident doit venir en déduction des indemnités AMI.

Pour la cour, qui fait siennes les décisions citées, c’est le sens de l’article 136, § 2 de la loi coordonnée.

Elle ajoute un commentaire utile, eu égard à la notion de consolidation : si en accident du travail, à partir de la consolidation l’incapacité n’est en principe indemnisée que si elle a un caractère permanent (sous réserve des possibilités ouvertes dans le cadre d’une action en revision), il n’y a pas superposition des conséquences des lésions dans les deux régimes, la cour soulignant que ceci vaut d’autant plus lorsque l’on se trouve à une date éloignée de la date de consolidation.

Tout en regrettant le temps mis au règlement du litige, la cour constate qu’il y a une contestation d’ordre médical et elle désigne, dès lors, un expert aux fins de donner un avis sur celle-ci.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles apporte un éclairage complémentaire quant aux relations parfois complexes de l’indemnisation de l’incapacité de travail dans le secteur AMI et dans le cadre d’un accident du travail. La cour rend un arrêt conforme à la jurisprudence constante sur cette question. Son intérêt est de rappeler les règles, eu égard à la complexité de la matière et à la fréquence de telles espèces soumises aux juridictions du travail.


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