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Décision de fin d’incapacité de travail : pas d’examen médical obligatoire

Commentaire de C. trav. Mons, 26 avril 2017, R.G. 2016/AM/63

Mis en ligne le lundi 18 décembre 2017


Cour du travail de Mons, 26 avril 2017, R.G. 2016/AM/63

Terra Laboris

Par arrêt du 26 avril 2017, la Cour du travail de Mons rappelle que l’article 100 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 ne prévoit pas d’obligation, préalablement à la décision de fin d’incapacité, de procéder à un examen médical du titulaire.

Les faits

Un assuré social est en incapacité de travail depuis mai 2011. Il fait l’objet d’une décision de fin d’incapacité en novembre de la même année et ne conteste pas celle-ci.

Une nouvelle période d’incapacité débute rapidement (dépression et hépatite C).

Dix mois plus tard, son organisme assureur lui notifie qu’une décision a été prise, mettant un terme à l’incapacité avec effet quinze jours plus tard. La décision précise qu’un contact a été pris avec le service médical de l’établissement pénitentiaire où l’intéressé est incarcéré.

Suite au recours introduit devant le Tribunal du travail du Hainaut, et ayant été débouté de celui-ci, l’intéressé interjette appel.

Les arguments des parties devant la cour

L’appelant fait essentiellement valoir qu’il n’y a pas eu d’examen médical et que la décision ne repose sur aucun critère objectif, les éléments médicaux de son dossier confirmant la poursuite de l’incapacité. Il demande en conséquence de réformer le jugement et d’annuler la décision du médecin-conseil.

La décision de la cour

La cour va confirmer le jugement, et ce après avoir effectué un rappel des règles de l’article 100 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994. Dans le cadre de l’incapacité primaire, c’est le médecin-conseil de l’organisme assureur qui prend la décision de la reconnaissance ainsi que de la durée de l’incapacité. Le conseil médical de l’invalidité interviendra quant à lui pour ce qui est de l’état d’invalidité et de sa durée.

Les deux types de décisions, et de même celles qui mettent un terme à l’incapacité, sont des décisions de nature médicale.

Ne figure cependant ni dans la loi coordonnée ni dans son arrêté d’exécution du 3 juillet 1996 l’obligation de faire précéder le constat de reconnaissance ou la notification de la fin d’incapacité d’un examen médical.

Ceci est confirmé dans le Règlement du 16 avril 1997 (article 7, § 1er) portant exécution de l’article 80, 5°, de la loi coordonnée, qui prévoit que le médecin-conseil peut avoir recours à diverses investigations d’ordre médical ou à des renseignements complémentaires.

La cour relève qu’il peut s’agir, au titre de données médicales collectées, de rapports médicaux, de diagnostics, de la symptomatologie, de la durée mentionnée sur le certificat, d’un examen médical, ainsi que d’autres renseignements complémentaires…

En l’espèce, il est dûment avéré qu’un contact a eu lieu entre le médecin-conseil de l’organisme assureur et le médecin de la prison.

L’article 100 contient trois conditions pour qu’il y ait reconnaissance d’une incapacité de travail, étant (i) que le travailleur doit avoir cessé toute activité, (ii) que cette cessation doit être la conséquence directe du début ou de l’aggravation des lésions (ou troubles fonctionnels) et (iii) que cette incapacité doit réduire la capacité de gain de deux tiers au moins.

Par « activité », il faut entendre toute activité procurant un enrichissement du patrimoine et permettant directement ou indirectement de retirer un profit économique.

Pour ce qui est des détenus, le travail en milieu pénitentiaire est de nature à rentrer dans cette définition, puisqu’il a un objectif économique (réinsertion, indemnisation des victimes ou acquisition de ressources). En cas d’incapacité de travail dûment reconnue au sens de la législation A.M.I., il y a incompatibilité avec l’exercice d’une telle activité. Cependant, les éléments du dossier médical indiquent, pour la cour, qu’il y a eu une évolution favorable de son état de santé, et ce même si l’intéressé a dû subir un traitement par le passé.

La cour constate encore qu’il n’y a pas d’élément permettant de conclure qu’un traitement qui serait suivi au moment des faits à examiner serait de nature à entraîner une perte de capacité de gain de deux tiers. Elle relève, par ailleurs, qu’aucune demande de nouvelle prise en charge n’a été introduite.

Dès lors, vu que la décision a été légalement prise et qu’aucun élément n’est apporté permettant d’infirmer les conclusions de celle-ci, la cour constate que l’intéressé échoue dans la charge de la preuve. Il aurait certes pu – dans la mesure où il a, à titre subsidiaire, demandé la désignation d’un expert – produire un commencement de preuve de ses affirmations, mais tel n’est pas le cas.

La cour relève encore que le coût d’une expertise est important et que celle-ci doit rester une mesure exceptionnelle. Vu la situation de l’intéressé (incarcération), l’intérêt de celle-ci serait d’ailleurs très limité, vu la suspension des indemnités d’incapacité pendant cette période, et ce ainsi que prévu à l’article 233, § 1er, alinéa 1er, de l’arrêté royal du 3 juillet 1996.

Intérêt de la décision

Le point intéressant de l’arrêt rendu par la Cour du travail de Mons en cette affaire est d’avoir rappelé qu’il n’y a pas d’obligation dans la réglementation (ni dans la loi du 14 juillet 1994 ni dans son arrêté d’exécution du 3 juillet 1996) de faire précéder le constat (médical) de reconnaissance d’incapacité ou de fin de celle-ci d’un examen médical.

Si tel est bien souvent le cas, l’on notera que tant le tribunal que la cour du travail ont admis que satisfont aux conditions réglementaires les éléments produits au dossier, étant l’examen des pièces médicales figurant dans celui-ci, ainsi que des contacts pris auprès des services de l’administration (en l’occurrence le médecin de l’administration pénitentiaire) aux fins de compléter l’information quant aux éléments du dossier.


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