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Etrangers en possession d’une attestation d’immatriculation et droit à des prestations familiales garanties

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 14 août 2017, R.G. 2016/AB/19

Mis en ligne le jeudi 15 février 2018


Cour du travail de Bruxelles, 14 août 2017, R.G. 2016/AB/19

Terra Laboris

Par arrêt du 14 août 2017, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que la délivrance d’une attestation d’immatriculation – document de séjour – ouvre le droit aux prestations de sécurité sociale en ce qui concerne la condition de régularité du séjour.

Les faits

Ayant sollicité une régularisation de séjour dans le cadre de l’article 9ter de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, l’établissement et l’éloignement des étrangers, une maman reçoit une décision de refus en novembre 2013. Elle introduit un recours devant le Conseil du Contentieux des Etrangers et celui-ci annule l’ordre de quitter le territoire qui avait été délivré. L’intéressée bénéficie en conséquence d’une attestation d’immatriculation. Les prestations familiales garanties prévues par la loi du 20 juillet 1971 en la matière sont versées pour les enfants.

FAMIFED notifie cependant une décision en juillet 2014, considérant que la délivrance de l’attestation d’immatriculation ne signifie pas l’admission ou l’autorisation à séjourner sur le territoire et qu’il y a dès lors lieu de revoir le droit aux prestations familiales. Celui-ci prend ainsi fin, pour FAMIFED, avec effet rétroactif à la fin du mois de mai précédent.

Le recours introduit par l’intéressée devant le tribunal du travail est accueilli, FAMIFED étant condamné à payer les prestations en cause tant que la mère sera en possession de l’attestation d’immatriculation en cours de validité (ou d’un titre de séjour autre). La décision du premier juge en droit est que l’étranger en possession d’une telle attestation d’immatriculation est autorisé au séjour au sens de la loi du 20 juillet 1971 (article 1er, alinéa 8).

FAMIFED forme appel de cette décision.

La décision de la cour

La cour examine la portée de l’article 1er, alinéas 1er et 8, de la loi du 20 juillet 1971, dont elle reprend les termes. Est visée (alinéa 8) la condition d’admission ou d’autorisation à séjourner en Belgique ou à s’y établir. Le renvoi est fait à la loi du 15 décembre 1980.

La doctrine a examiné la question dans le cadre de l’aide sociale. La cour rappelle cet enseignement (P. HUBERT, C. MAES, J. MARTENS et K. STANGHERLIN, « La condition de nationalité ou de séjour », Aide sociale – intégration sociale, le droit en pratique, La Charte, 2011, p. 151) : lorsque l’Office des Etrangers donne instruction à la commune d’inscrire une personne et de lui délivrer un titre de séjour, ce séjour devient légal, l’aide sociale pouvant être obtenue à ce moment sous toutes ses formes. La recevabilité est acquise dès l’information à la commune que la demande est déclarée recevable et que l’instruction est donnée de délivrer le titre de séjour.

La même doctrine fait la distinction entre le séjour irrégulier (étant celui où l’étranger séjourne légalement en Belgique mais contrevient à l’obligation d’inscription et n’est par conséquent pas titulaire d’un document ou titre de séjour) et le séjour illégal (étant celui de l’étranger qui séjourne en Belgique sans autorisation d’entrée, de séjour ou d’établissement, ou qui n’est pas admis au séjour de plein droit). Le premier ne peut faire l’objet d’une mesure d’éloignement, au contraire du second.

Pour la cour, il y a lieu d’adopter le même raisonnement en matière de prestations familiales garanties et d’admettre que l’attestation d’immatriculation atteste, pour la durée de sa validité, de la légalité et de la régularité du séjour.

En l’espèce, la cour estime ne pas voir la disposition légale qui permettrait d’exclure du séjour l’étranger titulaire d’une attestation d’immatriculation tant que sa demande de régularisation n’aurait pas été déclarée fondée et de le priver ainsi de droits en matière de prestations familiales garanties. Il n’y a pas de distinction entre « document de séjour » et « titre de séjour ». Le caractère précaire ou provisoire du séjour n’a par ailleurs pas d’incidence et il n’y a pas lieu d’ajouter à la loi des conditions qu’elle ne contient pas.

Intérêt de la décision

Cet arrêt permet à la Cour du travail de Bruxelles de rappeler les pleins et entiers effets de l’attestation d’immatriculation en matière de droit aux prestations de sécurité sociale. La doctrine citée par la cour avait examiné la question sous l’angle du droit à l’aide sociale et elle considère que ce raisonnement doit être appliqué à la matière dont elle est saisie, étant celle des prestations familiales garanties.

L’on notera également la distinction faite par la doctrine – et rappelée par la cour – entre le séjour irrégulier et le séjour illégal.


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