Commentaire de C. trav. Liège (div. Liège), chbre 2-C, 4 octobre 2023, R.G. 2021/AL/647
Mis en ligne le lundi 15 avril 2024
C. trav. Liège (div. Liège), chbre 2-C, 4 octobre 2023, R.G. 2021/AL/647
Terra Laboris
Dans un arrêt du 4 octobre 2023, la Cour du travail de Liège retient la responsabilité de l’organisme de paiement des allocations de chômage dans l’instruction d’un dossier de demande de dispense pour formation IFAPME et confirme la décision du tribunal du travail quant à la condamnation de celui-ci à payer des dommages-intérêts correspondant à l’indû que le chômeur doit rembourser.
Faits de la cause
M. C. a obtenu l’autorisation du FOREm pour suivre une formation d’agent immobilier en étant dispensé des obligations de disponibilité sur le marché de l’emploi et de recherche active d’un emploi, sur la base de l’article 92 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 et a suivi les trois années de cette formation à partir de 2013.
Il a ensuite demandé le 19 août 2016, via son organisme de paiement, une dispense du FOREm pour suivre, du 1er septembre 2016 au 31 août 2017, une formation IFAPME d’expert en biens immobiliers, toujours sur la base de cet article 92, et donc par le formulaire D92.
Le FOREm a sollicité des informations complémentaires de la FGTB, via un formulaire de renvoi à l’organisme de paiement, en lui demandant de préciser si le stage était rémunéré, ce qui impliquait l’introduction de la demande par le formulaire D94.6 ou de fournir une attestation de stage non rémunéré.
N’ayant pas reçu de réponse de l’organisme de paiement, le FOREm a traité le dossier sur la base de l’article 92, ce qui impliquait, étant donné que la convention de stage rémunéré en entreprise conclue dans le cadre de cette formation portait sur la période du 1er septembre 2016 au 30 septembre 2017, une nouvelle demande de dispense pour ce mois de septembre, ce qui n’a pas été fait.
Constatant que Mr C. avait cumulé son travail d’apprenti en formation et les allocations de chômage sans être couvert par une dispense, l’ONEm, après avoir entendu le chômeur, a, par une décision du 17 juillet 2018, exclu M. C. des allocations de chômage pour ce mois, décidé de la récupération des allocations et lui a infligé une sanction d’avertissement pour avoir omis de faire une déclaration requise.
Rétroactes de la procédure
M. C. a mis en cause devant le tribunal du travail l’ONEm, le FOREm et la FGTB.
Par un jugement du 19 novembre 2021, le tribunal a :
Les arrêts de la cour du travail
Par un premier arrêt du 16 novembre 2022 la cour du travail a dit que l’ONEm et le FOREm ne sont pas parties à la procédure devant la cour et dit l’appel de la FGTB recevable. La cour a ordonné la réouverture des débats sur les questions qu’elle formule et notamment sur celle de savoir si c’est bien l’article 92 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 qui s’appliquait à la situation précise de M. C. pour l’année de formation en alternance 2016-2017 ou plutôt l’article 94 de cet arrêté royal.
La cour invite le ministère public à demander l’avis du FOREm sur cette question.
D’autres questions plus techniques ne sont pas exposées dans le présent commentaire. La cour du travail entend notamment vérifier si, sans la faute de la FGTB, M. C. aurait eu droit aux allocations de chômage pour ce mois de septembre.
Dans l’arrêt commenté, la cour du travail relève que le FOREm précise que c’est bien l’article 94 de l’arrêté royal qui aurait dû s’appliquer mais que la FGTB a introduit la demande sur le formulaire D92 ; le FOREm lui a réclamé un formulaire D94.6 mais, celui-ci ne lui ayant été renvoyé que le 26 juillet 2018, la demande avait entretemps été instruite conformément à l’article 92 et il n’y a pas eu de révision.
La FGTB ne dit pas autre chose, précisant qu’en juillet 2018 une demande de révision avait été envisagée mais sans jamais aboutir.
La cour conclut que « La faute de la FGTB reste donc bien établie sans qu’il soit démontré que la gestion de la demande par le FOREm ait eu un impact dans la chaîne de causalité qui conduit au dommage de monsieur C. : pas plus que face à une décision d’octroi trop courte sur base de l’article 92, la FGTB n’a réagi face au défaut d’application de l’article 94 qui permettait pourtant de couvrir l’intégralité de la période de formation visée par la demande sachant que cette disposition ne limite en effet pas la durée d’octroi de la dispense à celle d’une année (renouvelable) ».
Dès lors qu’il ressort des explications de M. C. qu’il aurait, sans la faute de l’organisme de paiement, eu droit aux allocations de chômage pour ce mois de septembre, le jugement condamnant la FGTB au paiement de dommages et intérêts correspondant aux allocations de ce mois est confirmé.
Intérêt de la décision
La question si c’était l’article 92 de l’arrêté royal organique ou son article 94 qui était applicable à l’année de formation en alternance 2016-2017 s’est révélée pertinente, puisque l’application de ce dernier article aurait permis de couvrir toute la période de formation.
Vu les multiples possibilités de formation, il est donc essentiel que l’organisme de paiement introduise la demande de dispense sur la base du bon formulaire. En l’espèce, le FOREm a informé cet organisme de l’utilisation erronée du formulaire D92 et de la nécessité d’utiliser le formulaire D94.
C’est dès lors l’absence de réaction en temps utile à cette information qui caractérise la faute de l’organisme de paiement.