(Décision commentée)
La divulgation d’informations confidentielles peut contribuer au débat public, s’agissant en l’espèce de données sur les pratiques fiscales des sociétés multinationales portant sur d’importants enjeux économiques et sociaux.
Une infirmière employée en gériatrie (maison de repos) entame une action pénale contre son employeur pour abus de confiance (annonces mensongères quant à la qualité des soins) vu les graves carences de l’institution. Pour la Cour, il s’agit d’une alerte (c’est-à-dire divulgation par un salarié de carences dans l’entreprise ou l’institution où il travaille), qui relève de l’article 10 C.E.D.H. ; la Cour relève que l’action pénale en cause a certes causé préjudice à son employeur et à ses intérêts commerciaux. Cependant, l’intérêt public à être informé de carences dans les soins institutionnels apportés à des personnes âgées par une société appartenant à l’Etat revêt une telle importance dans une société démocratique qu’il l’emporte sur la nécessité de protéger la réputation et les intérêts de cette société. Le licenciement sans préavis intervenu est une sanction exagérément sévère. En ne ménageant pas un juste équilibre entre la nécessité de protéger la réputation de l’employeur et celle de protéger celui de l’intéressée à la liberté d’expression, il y a eu violation de l’article 10.
L’article 38, § 3, 2e phrase, du Règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la Directive n° 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’un responsable du traitement ou un sous-traitant ne peut licencier un délégué à la protection des données qui est membre de son personnel que pour un motif grave, même si le licenciement n’est pas lié à l’exercice des missions de ce délégué, pour autant qu’une telle réglementation ne compromette pas la réalisation des objectifs de ce règlement. (Dispositif)
L’article 10, point 1, de la Directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16, § 1er, de la directive 89/391/CEE), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale permettant le licenciement d’une travailleuse enceinte en raison d’un licenciement collectif, au sens de l’article 1er, point 1, sous a), de la Directive 98/59/CE du Conseil, du 20 juillet 1998, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs.
L’article 10, point 2, de la Directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale permettant à l’employeur de licencier une travailleuse enceinte dans le cadre d’un licenciement collectif, sans lui fournir d’autres motifs que ceux qui justifient ce licenciement collectif, pour autant que sont indiqués les critères objectifs qui ont été retenus pour désigner les travailleurs à licencier.
L’article 10, point 1, de la Directive 92/85 doit être interprété en ce sens que cette disposition s’oppose à une réglementation nationale qui n’interdit pas, en principe, le licenciement d’une travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante à titre préventif, et qui prévoit uniquement la nullité de ce licenciement lorsque celui-ci est illégal, à titre de réparation.
L’article 10, point 1, de la Directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui, dans le cadre d’un licenciement collectif, au sens de la Directive 98/59, ne prévoit ni une priorité de maintien des postes ni une priorité de reclassement applicables préalablement à ce licenciement, pour les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes, sans que soit exclue, cependant, la faculté pour les États membres de garantir une protection plus élevée aux travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes (dispositif).
Rémunération de base de l’indemnité d’un travailleur bénéficiant d’un congé parental à temps partiel - rémunération complète
L’article 45 T.F.U.E. doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation d’une entité fédérée d’un État membre qui impose à tout employeur ayant son siège d’exploitation sur le territoire de cette entité de rédiger les contrats de travail à caractère transfrontalier exclusivement dans la langue officielle de cette entité fédérée sous peine de nullité de ces contrats, relevée d’office par le juge - Lié à C. trav. Bruxelles, 4 juin 2013, R.G. 2012/AB/765 ci-dessus.
Congé parental à temps partiel - droits acquis ou en cours d’acquisition - principe de droit social communautaire
Interdiction de licenciement depuis le début de la grossesse jusqu’au terme du congé de maternité - décision prise au cours de la période et mise en oeuvre après l’expiration de celle-ci
L’article 38, paragraphe 3, deuxième phrase, du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’un responsable du traitement ou un sous-traitant ne peut révoquer un délégué à la protection des données qui est membre de son personnel que pour un motif grave, même si la révocation n’est pas liée à l’exercice des missions de ce délégué, pour autant qu’une telle réglementation ne compromette pas la réalisation des objectifs de ce règlement. (Dispositif)
L’article 39 de la loi du 3 juillet 1978 « relative aux contrats de travail », dans sa version applicable à un licenciement survenu le 5 mars 2019, et les articles 103bis à 103quinquies de la loi de redressement du 22 janvier 1985 contenant des dispositions sociales ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l’article 2, paragraphe 2, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 « portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ». Les mêmes dispositions ne violent pas l’article 23 de la Constitution. (dispositif)
(Réponse de la Cour constitutionnelle à C. trav. Liège (div. Liège), 7 mars 2023, R.G. 2021/AL/267)
L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 « relative aux contrats de travail », en ce qu’il ne garantit pas à l’employé du secteur privé à qui l’employeur envisage de notifier un congé pour motif grave en application de cette disposition le droit d’être entendu par son employeur avant de recevoir ce congé, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution. (Dispositif)
La Cour constitutionnelle souligne que le principe audi alteram partem ne crée d’obligations que pour les autorités publiques et ne vaut pas dans les rapports entre personnes de droit privé. Ce principe s’impose aux autorités publiques en raison de leur nature particulière et des devoirs qui leur incombent de s’informer complètement avant d’agir et de protéger contre le risque d’arbitraire des actes administratifs de portée individuelle. La différence de traitement entre les deux catégories de travailleurs repose dès lors sur une justification raisonnable. Il ne peut en outre être déduit du fait que le principe audi alteram partem ne vaut pas pour un employeur du secteur privé qu’un tel employeur ne peut en aucune circonstance être tenu d’entendre préalablement l’employé à qui il envisage de donner congé.
L’article 19bis de l’arrêté royal du 25 octobre 1971 « fixant le statut des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite, orthodoxe et islamique des établissements d’enseignement de la Communauté française », tel qu’il a été inséré par le décret de la Communauté française du 10 mars 2006 « relatif aux statuts des maîtres de religion et professeurs de religion » et tel qu’il était rédigé avant sa modification par le décret de la Communauté française du 11 juillet 2018 « portant diverses mesures en matière de statut des membres du personnel de l’enseignement », viole les articles 10, 11 et 24 de la Constitution, en ce qu’il ne permet pas aux maîtres et professeurs de religion stagiaires de l’enseignement organisé par la Communauté française de saisir la chambre de recours pour contester la décision de licenciement pour faute grave dont ils font l’objet. (Dispositif)
(Décision commentée)
Interrogée sur le droit pour le travailleur en service avant le 1er janvier 2014 à l’indemnité en compensation du licenciement si une convention de rupture du contrat de travail d’un commun accord intervient pendant la durée du préavis, la Cour constitutionnelle retient deux interprétations possibles du mécanisme légal.
Les 2244, 2246 et 2247 de l’ancien Code civil, interprétés en ce sens que le commandement irrégulier ou l’acte qui y est assimilé, telle la contrainte irrégulière, interrompt le délai de prescription, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution. (Extrait du dispositif)
L’article 38/1 de la loi du 12 avril 2011 modifiant la loi du 1er février 2011 portant la prolongation de mesures de crise et l’exécution de l’accord interprofessionnel et exécutant le compromis du Gouvernement relatif au projet d’accord interprofessionnel viole les articles 10 et 11 de la Constitution dans l’interprétation selon laquelle il ne peut être tenu compte de l’occupation directement antérieure en qualité de travailleur intérimaire dans la même entreprise lorsqu’il s’agit de déterminer ‘la date de début de son contrat de travail ininterrompu’. La même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution dans l’interprétation selon laquelle il peut être tenu compte de l’occupation directement antérieure en qualité de travailleur intérimaire dans la même entreprise lorsqu’il s’agit de déterminer cette date. Compte tenu de l’objectif du législateur de prendre en compte la période d’occupation en qualité de travailleur intérimaire pour calculer l’ancienneté, on peut raisonnablement considérer qu’il entendait également tenir compte de la période d’occupation en qualité de travailleur intérimaire pour déterminer la date de début de l’occupation. (Calcul de l’ancienneté pour la détermination de l’allocation de licenciement).
L’article 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, lu en combinaison avec l’article 105, § 3, de la loi de redressement du 22 janvier 1985 contenant des dispositions sociales, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, dans l’interprétation selon laquelle, en cas de licenciement d’un travailleur qui a réduit ses prestations de travail, il convient de se baser sur la rémunération en cours correspondant aux activités réduites pour fixer le montant de l’indemnité de congé. (L’affaire vise le travailleur qui a réduit ses prestations de travail pour prendre soin de son enfant jusqu’à l’âge de 8 ans, dans le cadre de l’article 4, § 1er, 1°, a°, de la C.C.T. n° 103 du 27 juin 2012 instaurant un système de crédit-temps, de diminution de carrière et d’emplois de fin de carrière).
L’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’à l’égard des employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l’application d’une clause de préavis valable à cette date. (Dispositif)
L’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, pour les employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l’application d’une clause de préavis qui était valable à cette date. (Dispositif).
L’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, pour les employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l’application d’une clause de préavis qui était valable à cette date. (Dispositif).
Dans l’interprétation selon laquelle elle ne s’applique pas au licenciement des contractuels de la fonction publique, la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Par son arrêt n° 101/2016 du 30 juin 2016, la Cour a dit pour droit que l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, combiné avec l’article 38, 2°, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il s’applique aux ouvriers du secteur public licenciés après le 31 mars 2014. Dans cet arrêt, elle a également jugé que « dans l’attente de l’intervention du législateur, il appartient aux juridictions, en application du droit commun des obligations, de garantir sans discrimination les droits de tous les travailleurs du secteur public en cas de licenciement manifestement déraisonnable, en s’inspirant, le cas échéant, de la convention collective de travail n° 109 ».
Saisie par la Cour de cassation par son arrêt du 29 mai 2017 (ci-dessous), la Cour constitutionnelle conclut que l’article 4, 3°, de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
L’article 7, § 1ersexies, alinéa 2, 2°, de l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu’il a été inséré par la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, avant sa modification par la loi du 23 avril 2015 concernant la promotion de l’emploi, il exclut du droit à une indemnité compensatoire de licenciement les travailleurs qui, au 31 décembre 2013, étaient occupés sous le statut d’ouvrier, mais qui, après cette date, furent occupés sous le statut d’employé (dispositif).
L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, interprété comme faisant obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs graves liés à sa personne ou à son comportement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution.
La même disposition, interprétée comme ne faisant pas obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs graves liés à sa personne ou à son comportement, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution (Dispositif).
Les articles 32, 3°, et 37, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, interprétés comme faisant obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement, violent les articles 10 et 11 de la Constitution.
Les mêmes dispositions, interprétées comme ne faisant pas obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution. (dispositif)
Les effets juridiques de l’article 82, § 3, de la loi relative aux contrats de travail, avant son abrogation par l’article 50 de la loi du 26 décembre 2013, doivent être maintenus jusqu’au 31 décembre 2013 (la Cour renvoyant notamment à son arrêt n° 86/2016 du 2 juin 2016).
L’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, combiné avec l’article 38, 2° de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il s’applique aux ouvriers du secteur public licenciés après le 31 mars 2014 (secteur public).
Les effets des articles 59 et 82 LCT tels qu’ils s‘appliquaient avant leur abrogation respective par les articles 34 et 50 de la loi du 26 décembre 2013 doivent être maintenus jusqu’au 31 décembre 2013.
Avant les modifications introduites par la loi du 26 décembre 2013, bien que des conventions relatives aux délais de préavis pour les employés ‘supérieurs’ ne pouvaient être conclues avant la notification du congé, la faculté d’invoquer la nullité de telles conventions appartenait exclusivement à l’employé, celle-ci n’étant pas autorisée à l’employeur (renvoi à Cass., 7 avril 2008, S. 07.0098.F). Cette règle doit être considérée comme s’appliquant également à l’ouvrier, l’article 59 de la loi du 3 juillet 1978 étant seulement impératif en faveur de celui-ci. Ceci valait tant pour les conventions collectives de travail que pour les conventions individuelles dérogeant aux préavis prévus par ou en vertu de la loi et cette faculté n’était pas donnée aux employeurs. Il en découle que l’article 82, § 3 de la loi ne violait pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Les effets de l’article 59 de la loi du 3 juillet 1978, dont l’inconstitutionnalité a été décrétée par l’arrêt 125/2011 de la Cour constitutionnelle, ont été maintenus jusqu’au 8 juillet 2013 au plus tard. L’article 86/2, § 1er (introduit par la loi du 12 avril 2011) concernant les employés engagés à partir du 1er janvier 2012 et dont la rémunération annuelle dépassait 16.100 € a été abrogé avec effet au 1er janvier 2014 par la loi du 26 décembre 2013. Une discrimination a ainsi persisté pendant une courte durée en cas de licenciement d’un tel employé entre le 9 juillet 2013 et le 31 décembre 2013 par rapport aux ouvriers jouissant de la même ancienneté (12 ans en l’espèce). Il faut cependant mettre en balance l’avantage tiré de l’effet du constat d’inconstitutionnalité non modulé et la perturbation qu’il impliquerait pour l’ordre juridique. Aussi, les effets des articles 59 et 86/2, § 1er de la loi doivent-ils être maintenus jusqu’au 31 décembre 2013.
En vertu du régime actuel de l’article 70, § 1er, de la loi sur le statut unique, une différence substantielle entre les ouvriers et les employés persiste encore en ce qui concerne les délais de préavis, mais cette différence cesse à tout le moins d’exister le 1er janvier 2018.
S’il est (...) raisonnablement justifié que, dans les secteurs où les partenaires sociaux et le législateur ont réalisé dans l’intervalle des efforts pour réduire les différences entre les ouvriers et les employés en matière de délais de préavis par le biais de la C.C.T. n° 75 précitée et de la loi du 12 avril 2011 qui a modifié celle du 1er février 2011, ledit article aménage un régime transitoire qui achève l’harmonisation entre ouvriers et employés en matière de délais de préavis au 1er janvier 2018, il ne peut toutefois être admis de maintenir, en ce qui concerne la catégorie des ouvriers visée par l’article 70, § 4, de la même loi, une discrimination illimitée dans le temps de ces travailleurs en matière de délais de préavis, sans qu’il existe pour ce faire une justification raisonnable.
Son annulation non modulée entraînerait néanmoins une insécurité juridique considérable et pourrait engendrer des difficultés financières graves pour un grand nombre d’employeurs qui, du fait de cette annulation, seraient immédiatement confrontés à l’obligation de respecter des délais de préavis bien plus importants que ceux qui sont fixés par la disposition attaquée, dont les effets sont dès lors maintenus jusqu’au 31 décembre 2017.
Le reclassement professionnel continue de relever de la compétence de l’autorité fédérale. Les travaux préparatoires de la loi spéciale du 6 janvier 2014 sur la Sixième Réforme de l’Etat font eux aussi apparaître que le législateur spécial n’a attribué aux régions que certains aspects du placement des travailleurs. Les aspects du reclassement professionnel touchant au droit du travail continuent de ressortir à la compétence de l’autorité fédérale.
Dans l’article 6, § 1er, IX, 1° de la loi spéciale du 8 août 1980, le législateur spéciale entend par « placement des travailleurs », outre certaines interventions financières, le placement de travailleurs au sens strict du terme, en particulier le régime des activités des bureaux de placement de travailleurs et, en ce qui concerne le placement de travailleurs au sens large, seulement l’agrément des entreprises de travail intérimaire.
Pour le surplus, le législateur spécial n’a pas voulu confier aux régions les aspects du reclassement professionnel qui touchent au droit du travail et, plus particulièrement, le droit au reclassement professionnel, étant donné que cette matière doit être considérée comme un régime de protection du travail qui est réservé à l’autorité fédérale en tant qu’élément du droit du travail au sens de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12° de la loi spéciale du 8 août 1980.
Vu l’harmonisation progressive des statuts d’employé et d’ouvrier (réf. à l’arrêt n° 125/2011), il ne se justifie plus que ce critère de distinction soit maintenu à l’heure actuelle notamment en ce qui concerne la limitation des motifs admissibles de licenciement, le renversement de la charge de la preuve et la fixation forfaitaire de l’indemnité - il y a violation mais les effets de cette disposition sont maintenus jusqu’au 1er avril 2014 (secteur privé).
Délai pour citer selon les formes du référé - délégué du personnel - délai de l’art. 6 - délai prescrit à peine de déchéance - droit d’accès pour l’employeur à un juge - point de départ du délai de 3 jours ouvrables (jour qui suit celui de la décision visée à l’art. 5, § 3) - délai distinct de celui prévu pour le candidat non élu (jour qui suit celui où la décision notifiée par le greffe) - violation
Base : prestations non réduites - motif extrinsèque au travailleur - raisons d’humanité et de dignité humaine
Non applicable
(Art. 103 /105 de la loi du 22 janvier 1985 et accord cadre sur le congé parental du 14 décembre 1995) - travailleur en crédit-temps à temps partiel comparé au congé parental - rémunération en cours correspondant aux activités réduites - pas d’assimilation au congé parental
L’article 39 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, dans l’interprétation selon laquelle, en cas de licenciement d’un travailleur qui a réduit ses prestations de travail en vertu de l’article 3, alinéa 1er, de l’arrêté royal du 10 août 1998 instaurant un droit à l’interruption de carrière pour l’assistance ou l’octroi de soins à un membre du ménage ou de la famille gravement malade, il faut, pour fixer le montant de l’indemnité de congé, se fonder sur la rémunération en cours qui correspond aux activités réduites.
(Art. 39 LCT) Réduction de travail dans le cadre du crédit-temps (C.C.T. n° 77bis) - comparé au congé parental rémunération réduite
(Art. 39 LCT - 103/105, §3 de la loi du 22 janvier 1985) - travailleur de 50 ans ou plus avec réduction de prestations dans le cadre de l’art. 9 de la CCT 77bis, c-à-d. sans durée maximum - comparé au congé parental d’une période limitée - rémunération en cours correspondant aux activités réduites - appréciation du législateur non manifestement déraisonnable
(Art. 39 LCT) - réduction des prestations en dehors du cadre du congé parental - base de l’indemnité de congé en cas de réduction de prestations (art. 103 de la loi sur le redressement du 22 janvier 1985) : rémunération réduite
La Cour est interrogée sur la différence de traitement entre deux catégories de travailleurs délégués du personnel, en ce qui concerne la protection des délégués du personnel prévue par l’article 2 de la loi du 19 mars 1991, selon qu’ils ont ou non atteint l’âge de 65 ans. Contrairement au travailleur délégué du personnel qui n’a pas encore atteint l’âge de 65 ans, le travailleur délégué du personnel qui a atteint cet âge ne peut bénéficier de cette protection.
Elle juge que la différence de traitement en cause est fondée sur un critère objectif, à savoir le fait que le travailleur délégué du personnel qui est congédié atteint ou non l’âge de 65 ans. La mesure en cause n’est pas incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution et que la lecture combinée de ces dispositions constitutionnelles avec la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ne conduit pas à une autre conclusion, relevant qu’aux termes de l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive, les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires (avec renvoi à CJCE, grande chambre, 16 octobre 2007, C-411/05, Palacios de la Villa, et CJCE, 5 mars 2009, C-388/07, Age Concern England).
Protection contre le licenciement déterminée - licenciement manifestement déraisonnable
Inconstitutionnalité de la distinction - délai donné au législateur jusqu’au 8 juillet 2013 (la cour ayant été saisie de questions relatives aux délais de préavis et au jour de carence)
La différence de traitement qui résulte de l’article 83, § 1er, de la loi relative aux contrats de travail est fondée sur un critère objectif, à savoir le fait que l’employé congédié atteint ou non l’âge de 65 ans.
Le régime des délais de préavis réduits à partir de l’âge de 65 ans est étroitement lié au fait que l’âge normal de la retraite est atteint, à savoir l’âge auquel le travailleur peut en principe prétendre à une pension de retraite complète dans le régime de la sécurité sociale.
Cette différence de traitement est fondée sur des objectifs légitimes de nature sociale. Le législateur entendait, en instaurant la nullité de la clause de résiliation mettant fin au contrat de travail lorsque l’employé atteint l’âge de 65 ans, mieux protéger l’employé qui allait atteindre sous peu l’âge de la retraite. Du fait de l’introduction de la nullité de la clause de résiliation précitée, le congé ne pourrait être donné à un travailleur qui atteint l’âge de la retraite et qui travaille depuis longtemps dans la même entreprise qu’en observant l’article 82 de la loi relative aux contrats de travail. Ceci aurait pour conséquence qu’un employeur, en cas d’application des délais de préavis normaux, devrait parfois décider plusieurs années auparavant du maintien au travail ou non d’un employé qui atteint l’âge de la retraite.
Cette disposition en cause est aussi raisonnablement justifiée. L’application de délais de préavis réduits n’est possible que lorsque le travailleur approche de l’âge de la retraite de 65 ans. Le choix de l’âge de 65 ans n’est pas arbitraire, mais correspond à l’âge de la retraite, à savoir l’âge auquel le travailleur a droit à une pension de retraite complète.
En outre, l’employeur n’est pas obligé d’appliquer l’article 83, § 1er, de la loi relative aux contrats de travail. Compte tenu de l’article 1134 du Code civil, les délais de préavis réduits peuvent être remplacés par des délais de préavis plus favorables au travailleur. Ces délais de préavis plus avantageux peuvent découler soit d’une convention collective de travail, soit d’une convention individuelle.
Par ailleurs, la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail n’exclut pas un régime tel que celui contenu dans la disposition en cause. Il suffit de relever à cet égard qu’aux termes de l’article 6, § 1er, premier alinéa, de cette directive, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires (CJUE, grande chambre, 16 octobre 2007, C-411/05, Palacios de la Villa, et CJUE, 5 mars 2009, C-388/07, Age Concern England).
Période de service effectuée dans le cadre d’un statut - réponse à C. trav. Brux., 17 juillet 2009
Intérêts dus sur le brut au travailleur et intérêts dus aux institutions publiques - intérêts de retard payés en une seule fois à un créancier pour une période déterminée - intérêts de retard se succédant dans le temps
Démission du mandat - perte de la protection liée à celui-ci mais maintien de la protection des candidats
Absence de violation si l’article 3, § 1er de la loi du 19 mars 1991 est interprété comme n’obligeant pas le curateur d’une faillite qui licencie collectivement le personnel par suite du jugement déclaratif de faillite à saisir la commission paritaire afin que celle-ci reconnaisse l’existence des motifs économiques
Le fait de cesser d’appartenir à l’organisation syndicale qui a présenté la candidature ne fait par perdre la protection légale du candidat mais uniquement celle attachée au mandat
Début de la protection : début de la mission légale
Obligation pour le travailleur qui conteste le licenciement d’en établir le caractère discriminatoire
Fondement de la protection - suspicion légitime quant au motif de licenciement des représentants du personnel
Le congé est l’acte par lequel une partie notifie à l’autre sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Aucune disposition légale ne soumet la validité du congé à des formes spécifiques. L’expression de la volonté de rompre, la notification du congé, peut se faire verbalement, par écrit ou de manière implicite.
Lorsque le dommage consiste en la perte d’une chance d’obtenir un avantage espéré, ce dommage est certain lorsque la perte, en relation causale avec la faute, porte sur un avantage probable. Il appartient à celui qui demande la réparation d’un tel dommage d’établir que l’avantage perdu était probable.
Le travailleur ayant en l’espèce été réengagé dans une autre commune après son licenciement, la cour du travail s’est fondée non sur cet élément mais sur la circonstance que la procédure de recrutement avait été initiée avant celui-ci et sur le fait que le travailleur ne démontre pas qu’il eut refusé ce nouvel emploi. La probabilité qu’il conserve son emploi au sein de la défenderesse en l’absence de licenciement n’était donc dès lors pas établie.
En vertu de l’article 2244, § 2, alinéa 1er, de l’ancien Code civil, sans préjudice de l’article 1146, la mise en demeure envoyée par l’avocat du créancier, par l’huissier de justice désigné à cette fin par le créancier ou par la personne pouvant ester en justice au nom du créancier en vertu de l’article 728, § 3, du Code judiciaire, par envoi recommandé avec accusé de réception, au débiteur dont le domicile, le lieu de résidence ou le siège social est situé en Belgique interrompt la prescription dans la mesure et aux conditions prévues audit § 2.
Dès lors qu’aucune disposition ne règle autrement la manière dont doit être rapportée la preuve du fait juridique de l’envoi de ce pli recommandé avec accusé de réception, cette preuve peut être faite par toutes voies de droit, présomptions comprises.
La protection instaurée par les articles 26 et 28 de la convention collective de travail du 21 septembre 2015 fixant le statut des délégations syndicales, conclue au sein de la commission paritaire n° 311 des grandes entreprises de détail et rendue obligatoire par l’arrêté royal du 8 novembre 2016 ne s’étend au délégué suppléant que s’il remplace un délégué effectif.
(Cassation de C. trav. Liège (div. Liège), 21 avril 2022, R.G. 2021/AL/108)
L’article 2, § 1, alinéa 2, 2° de la loi du 19 mars 1991 ne vise pas uniquement la rupture du contrat par le travailleur protégé, en application de l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978, au motif de faits qui constituent un motif grave dans le chef de l’employeur mais également la résolution judiciaire du contrat à la demande du travailleur en cas de manquement contractuel grave dans le chef de l’employeur justifiant que ce travailleur protégé a pu constater la rupture irrégulière du contrat de travail par l’employeur au sens de l’article 2, § 1, 1er alinéa, 1°, de la loi du 19 mars 1991.
Le manquement contractuel de l’employeur sur la base duquel le travailleur protégé se fonde aux fins de demander la résolution judiciaire du contrat peut constituer un motif grave au sens de l’article 18 de la loi du 19 mars 1991.
Lorsque le représentant du personnel sollicite la résolution judiciaire du contrat sur la base d’un manquement contractuel qui constitue un motif grave au sens de l’article 18, celui-ci peut prétendre, s’il est fait droit à sa demande, aux indemnités visées à l’article 17 de la loi, sans qu’il doive solliciter sa réintégration.
Dans les autres cas, lorsque la résolution judiciaire est prononcée sur la base d’un manquement contractuel grave de l’employeur tel que le travailleur protégé aurait pu, sur leur base, constater la rupture irrégulière du contrat de travail au sens de l’article 2, § 1, 1er alinéa, 1°, de la loi du 19 mars 1991, l’octroi de l’indemnité complémentaire visée à l’article 17 est subordonnée à l’introduction d’une demande valable de réintégration.
L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 n’exige pas que l’employeur ait subi un préjudice en conséquence de la faute grave du travailleur. Toutefois, rien n’empêche le juge, dans l’appréciation du manquement allégué, de vérifier également si celui-ci a causé un préjudice à l’employeur ou si ce dernier a subi un dommage.
Il ressort de la genèse de l’article 17, 3°, a) et b), de la loi du 3 juillet 1978 que l’action introduite contre un ex-travailleur du fait de concurrence déloyale ou de participation à de tels actes après la fin du contrat de travail, alors qu’aucune clause de non-concurrence valable ne figurait dans le contrat, ne peut être considérée comme une action découlant du contrat de travail au sens de l’article 15 de la loi, mais comme une demande extracontractuelle au sens de l’article 2262bis, § 1er, de l’ancien Code civil.
La C.C.T. n° 109 ne contient pas en elle-même d’interdiction de licenciement manifestement déraisonnable et l’employeur n’est susceptible d’enfreindre l’obligation de paiement (total ou partiel) de l’indemnité visée que si le juge, statuant sur la demande du travailleur licencié, décide que le licenciement est manifestement déraisonnable et qu’il alloue au travailleur sur cette base l’indemnité qu’il fixe et qui variera entre 3 et 17 semaines de rémunération. Le travailleur qui soutient avoir été victime d’un licenciement manifestement déraisonnable et qui sur cette base postule la condamnation d’une indemnité dans le cadre de l’article 9, § 2, de la C.C.T. n° 109, n’introduit pas une action suite à une infraction à cette C.C.T. mais demande uniquement l’application de cette convention collective de sorte que son action n’est pas fondée sur l’article 189 C.P.S.
Dès lors que l’employeur qui envisage de licencier pour motif grave un travailleur bénéficiant de la protection de la loi du 19 mars 1991 dépose avant l’expiration du délai prévu à l’article 4, § 1er, de la loi la requête prévue à l’article 4, § 2, et que cette requête est nulle pour contravention à l’article 40, alinéa 1er, de la loi sur l’emploi des langues en matière judiciaire, ce dépôt a un effet interruptif, de telle sorte que l’employeur dispose d’un nouveau délai, égal à celui dont il bénéficiait originairement pour saisir le président du tribunal dans le respect de la législation sur l’emploi des langues.
La notion de fermeture est définie à l’article 1er, § 2, 6°, de la loi du 19 mars 1991 comme visant toute cessation définitive de l’activité principale de l’entreprise ou d’une division de celle-ci. Ne constitue pas une fermeture au sens de cette disposition le fait qu’une division de l’entreprise (à laquelle appartenait la travailleuse concernée) n’existe plus, que tous les travailleurs qui étaient occupés dans celle-ci ont été licenciés et que l’activité antérieure a été absorbée et intégrée dans le fonctionnement général de la société. Dès lors que l’activité principale de cette division n’a pas été stoppée mais a été poursuivie par d’autres travailleurs de l’entreprise, l’on ne peut conclure que la liquidation de cette division constitue une fermeture d’une division de l’entreprise au sens des articles 1er, § 2, 6° et 3, § 1er, 3e et 4e alinéas, de la loi. (Cassation de C. trav. Bruxelles, 14 janvier 2020, R.G. 2018/AB/953).
La Cour de cassation donne, dans un arrêt du 12 avril 2021 (S.20.0022.N), la portée de la dérogation autorisée en vertu de l’article 60 de la loi relative aux contrats de travail aux règles fixées en son article 59.
Il découle des articles 3, 4 et 10 de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention qu’en cas de licenciement pour motif grave non admis par le tribunal ou la cour du travail, l’indemnité de protection visée à l’article 10 de la loi est due si le juge constate soit que les motifs invoqués par l’employeur pour licencier ne sont pas étrangers à l’indépendance du conseiller en prévention, soit, lorsqu’a été avancée comme motif du licenciement l’incompétence du conseiller en prévention à exercer ses missions, que l’employeur n’établit pas ce manque de compétence.
La sanction de l’abus de droit réside non dans la perte du droit mais dans sa réduction à son exercice normal ou dans l’obligation de réparer le dommage causé par celui-ci. La réduction du droit à son exercice normal peut comprendre l’interdiction faite par le juge au titulaire du droit de faire usage de celui-ci dans de telles circonstances. Ainsi, si le juge d’appel a valablement constaté (ce point n’étant pas contesté) que le demandeur a commis un abus de droit en faisant valoir juste à l’expiration du délai de prescription d’un an prévu à l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 que l’organisation syndicale dont il est le président-secrétaire est dépourvue de la personnalité juridique, il a valablement pu décider que la sanction de cet abus pouvait consister en la privation pour le demandeur du droit de se prévaloir in casu de la prescription de la demande. Ce faisant, le juge du fond ne méconnaît pas le principe général de droit d’interdiction de l’abus de droit.
Conclusions de M. l’Avocat général GENICOT (avec renvoi à Cass., 11 mai 2020, n° S.19.0012.N rendu en matière de rémunération de base en accidents du travail).
En considérant que la règle de calcul des indemnités de préavis et de protection ne constitue pas une discrimination indirecte sur la base du sexe, au motif que les dispositions légales en cause et, de manière générale, les règles relatives à la réduction des prestations de travail dans le cadre d’un crédit temps pour prendre soin d’un enfant de moins de huit ans valent tout autant pour les femmes que pour les hommes, que la décision de solliciter un crédit-temps pour ce motif « relève d’un choix personnel du travailleur » et que « [juger] discriminatoire la prise de crédit-temps majoritairement par les femmes [crée] une possible discrimination à l’égard des hommes », sans vérifier si, comme l’affirmaient les demandeurs, un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes choisissent de bénéficier de la réduction des prestations de travail pour ce motif et si la différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins qui serait ainsi engendrée est susceptible d’être justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, l’arrêt attaqué viole l’article 157 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. (cassation de C. trav. Mons, 23 novembre 2018, R.G. 2017/AM/364)
L’indemnité compensatoire de préavis prévue à l’article 39, § 1 de la loi relative aux contrats de travail n’est due qu’en cas de rupture irrégulière du contrat de travail. Elle n’est pas due en cas de congé régulier. En conséquence, en cas de licenciement avec préavis assorti d’une dispense de prestation et paiement aux échéances mensuelles, l’on ne peut en cas de paiement incomplet (commissions en l’espèce), solliciter un complément d’indemnité compensatoire, le délai de préavis n’étant pas insuffisant.
La Cour casse dès lors un arrêt de la cour du travail d’Anvers, qui a alloué un tel complément, pour violation de l’article 39, § 1 de la loi.
L’article 32tredecies de la loi Bien-être, qui interdit en ses § 1er, al. 1er, al. 2, § 1er/1, 1° et § 2, al. 2, à l’employeur de mettre un terme à la relation de travail ou de prendre une mesure préjudiciable à l’égard du travailleur qui a déposé une plainte formelle du fait de harcèlement, n’exclut pas que le licenciement ou la mesure préjudiciable puisse être justifié par des motifs déduits de faits qui dans la demande d’intervention sont repris en tant que harcèlement.
L’article 2244, § 2, du Code civil n’accorde d’effet interruptif de prescription à une mise en demeure extrajudiciaire que s’il est satisfait à l’ensemble des conditions strictes prévues à la disposition légale. En conséquence, une mise en demeure adressée par voie recommandée mais sans accusé de réception, même à supposer qu’elle a atteint son destinataire, ne satisfait pas à ces conditions et n’a dès lors pas d’effet interruptif.
(Décision commentée)
La Cour de Cassation confirme l’interprétation à donner à l’article 32tredecies, § 1er de la loi du 4 août 1996 : si l’employeur ne peut mettre fin à la relation de travail en raison du dépôt de la plainte, le licenciement peut être justifié par des motifs déduits de faits invoqués dans celle-ci.
Lorsque le fait susceptible d’entraîner la rupture du contrat de travail pour motif grave consiste en un manquement continu, l’employeur détermine le moment à partir duquel le manquement rend impossible de manière immédiate et définitive la poursuite de la collaboration professionnelle. Lorsqu’il examine la régularité du délai dans lequel est intervenu le licenciement pour motif grave, le juge vérifie si le fait reproché a persisté, et ce jusqu’à trois jours avant le licenciement. Lorsque le juge considère que les manquements continus du travailleur constituent un motif grave, le licenciement sur le champ, notifié dans les trois jours ouvrables après la constatation des manquements pris en considération, est régulier même si l’employeur avait, à l’estime du juge, la possibilité de dénoncer ces manquements auparavant au titre de motif grave.
Si le juge doit tenir compte de l’ensemble des faits et circonstances visés à l’article 4, § 1er, de la loi du 19 mars 1991, ainsi que de faits antérieurs repris dans cette lettre comme éclairant les faits ou constituant des circonstances aggravantes, ni l’article 4 ni l’article 7 de la loi ne lui permettent de prendre en compte, dans l’appréciation du fait susceptible d’entraîner le licenciement sans préavis, des faits et circonstances qui n’ont pas été mentionnés dans la lettre visée à l’article 4, § 1er, au titre de faits antérieurs susceptibles d’éclairer les faits en cause ou de constituer des circonstances aggravantes.
En cas de résolution judiciaire du contrat de travail à la demande du membre du personnel de l’enseignement libre subsidié, vu un manquement contractuel sérieux dans le chef du pouvoir organisateur, le licenciement est irrégulier dans le chef de l’employeur, de telle sorte qu’il y a lieu d’appliquer l’article 28, § 2, du Pacte scolaire (paiement de la rémunération pour la totalité ou la partie dont il se trouve ainsi privé du fait de la cessation d’activité).
Le droit à l’indemnité prévue à l’article 10 de la loi sur la protection des conseillers en prévention existe dès que l’employeur procède à la rupture du contrat sans respecter les procédures prévues par la loi. Il existe dès le licenciement du conseiller en prévention, et ce indépendamment du fait qu’il sera mis fin ultérieurement au contrat par le travailleur, conformément à l’article 84, L.C.T. (contre-préavis).
L’article 63, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 dispose qu’en cas de contestation, la charge de la preuve des motifs du licenciement invoqués incombe à l’employeur. La Cour de cassation contrôle si son appréciation ne méconnaît pas la notion légale de licenciement abusif. L’appréciation du caractère manifestement déraisonnable du motif du licenciement ne peut être liée à l’exigence que la conduite de l’ouvrier susceptible de constituer ce motif soit fautive. Il y a violation de l’article 63, alinéas 1er et 2, dès lors que l’appréciation du caractère manifestement déraisonnable du motif du licenciement est liée à l’exigence que la conduite de l’ouvrier susceptible de constituer ce motif soit fautive et qu’il est imposé à l’employeur d’apporter la preuve que le motif du licenciement est imputable à celui-ci.
Dans le cadre de son contrôle du respect de l’article 63, alinéa 1er, de la loi du 3 juillet 1978, le juge est tenu d’apprécier si le motif du licenciement n’est pas manifestement déraisonnable. La Cour de cassation contrôle si son appréciation ne méconnaît pas la notion légale de licenciement abusif. En liant l’appréciation du caractère manifestement déraisonnable du motif du licenciement à l’exigence que la conduite de l’ouvrier susceptible de constituer ce motif soit fautive, le juge du fond viole l’article 63.
Dans le cadre de l’examen des nécessités de fonctionnement de l’entreprise, la preuve du motif économique invoqué peut passer par la vérification des mouvements de personnel survenus au sein de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’un contrôle de l’opportunité des mesures prises mais de la vérification par le juge que l’employeur établit, comme il en a la charge, que le licenciement est en lien avec celles-ci.
L’obligation d’apurer les réserves acquises manquantes ainsi que le déficit par rapport aux garanties visées à l’article 24 de la loi du 28 avril 2003 (relative aux pensions complémentaires et au régime fiscal de celles-ci et de certains avantages complémentaires en matière de sécurité sociale), imposée à l’employeur par l’article 30 de la même loi, ne prend pas fin au moment de la sortie du travailleur mais subsiste jusqu’au transfert des réserves en application de l’article 32, § 3, alinéa 3, de la loi ou, en l’absence d’un tel transfert, jusqu’à la mise à la retraite ou l’abrogation de l’engagement de pension.
En vertu de l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, combiné à l’article 2257 du Code civil, les demandes tendant au respect d’une obligation qui naît d’un contrat de travail mais s’éteint après la fin de ce contrat sont prescrites un an après l’extinction de ladite obligation.
La loi du 19 mars 1991 exclut la résolution judiciaire à la demande de l’employeur en tant que mode de cessation du contrat de travail d’un délégué du personnel ou d’un candidat délégué du personnel, mais elle n’empêche pas la résolution judiciaire d’un tel contrat de travail à la demande du délégué du personnel (ou du candidat délégué du personnel) lui-même.
L’article 2, § 1er, alinéa 2, 2°, de la loi du 19 mars 1991, selon lequel toute rupture du contrat de travail par le travailleur en raison de faits qui constituent un motif imputable à l’employeur est considérée comme un licenciement pour l’application dudit article, n’a pas exclusivement trait à la démission remise par le travailleur en application de l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail en raison de faits qui constituent un motif grave dans le chef de l’employeur. Cette disposition concerne également la résolution judiciaire du contrat à la demande d’un délégué du personnel, prononcée en raison d’un manquement contractuel grave de la part de l’employeur, d’une nature telle que le délégué du personnel aurait pu constater légalement, sur la base de ces faits, la rupture irrégulière du contrat de travail par l’employeur visée à l’article 2, § 1er, alinéa 1er , 1°, de la loi du 19 mars 1991.
La notion de « même employeur » au sens de l’article 82, § 2, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, encore applicable aux faits, vise l’unité économique d’exploitation que constitue l’entreprise, sans égard aux changements de direction ou à la modification de sa nature juridique.
Les samedis durant lesquels le travailleur occupé dans un régime de travail à temps plein ne doit pas travailler en fonction du régime ou de l’horaire de travail qui lui est applicable constituent des jours durant lesquels il n’est pas habituellement travaillé au sens de l’article 14, alinéa 2, de l’arrêté royal du 18 avril 1974 déterminant les modalités générales d’exécution de la loi du 4 janvier 1974 relative aux jours fériés et ne sont donc pas des interruptions de travail attribuables au travailleur au sens de l’article 14, alinéa 1er, 1°, du même texte, même si le régime de travail de 6 jours par semaine est en principe d’application dans l’entreprise et si d’autres travailleurs travaillent le samedi. Il y a dès lors lieu de vérifier s’il était habituellement travaillé le samedi dans le régime ou l’horaire de travail applicable au travailleur afin de déterminer si, pour l’application de l’article 14, alinéas 1er, 1°, et 2, les samedis durant lesquels celui-ci n’a pas travaillé ont interrompu la période pendant laquelle il est resté au service de l’employeur.
Le fait qui justifie le congé sans préavis est le manquement accompagné de toutes les circonstances de nature à lui conférer le caractère de motif grave. Le juge doit tenir compte des circonstances invoquées dans la lettre de congé pour éclairer le motif grave indiqué. Des faits antérieurs peuvent préciser le grief invoqué à ce titre. Pour tenir compte des circonstances invoquées, il n’est pas requis que les faits invoqués en tant que motifs graves constituent en soi un manquement grave rendant impossible toute collaboration professionnelle ultérieure, lorsqu’il est précisément allégué que ces faits ne constituent un motif grave de licenciement immédiat que s’ils sont considérés à la lumière des faits antérieurs invoqués comme circonstance aggravante.
(Décision commentée)
Aux termes de l’article 105 de la loi du 3 juillet 1978, la clause de non-concurrence crée en faveur du représentant de commerce une présomption d’avoir apporté une clientèle. La circonstance qu’une telle clause ne satisfait pas aux conditions légales de validité relatives à la durée d’application et aux activités prohibées ne porte pas atteinte à cette présomption.
Il découle de l’arrêt n° 57/93 du 8 juillet 1993 de la Cour constitutionnelle que le travailleur ou l’employeur doivent pouvoir soumettre la décision de l’organe paritaire au juge. Lorsque, dans le cadre d’une demande formée par le travailleur d’obtenir une indemnité de protection eu égard à l’irrégularité du licenciement pour des motifs économiques ou techniques, la juridiction du travail doit examiner la décision de l’organe paritaire qui a admis ceux-ci, elle exerce un contrôle de pleine juridiction sur l’existence de ces motifs. Ce contrôle n’implique pas d’apprécier l’opportunité des mesures prises par l’employeur pour les rencontrer. Les mesures à prendre dans de telles situations ne doivent par ailleurs pas être limitées aux hypothèses de fermeture de l’entreprise ou d’une division de celle-ci ou de licenciement d’une catégorie déterminée de personnel.
L’article 8 du Décret de la Communauté française du 1er février 1993 (qui contient la règle de prescription annale de l’action en justice) s’applique aux actions tendant à l’exécution d’obligations qui prennent leur source dans le contrat de travail telles que l’action du membre du personnel en paiement des sommes dues en raison de l’irrégularité du licenciement.
Elle s’applique à l’action fondée sur l’article 36, § 3, du même Décret, en vertu duquel lorsque le P.O. a mis fin à la charge d’un membre du personnel engagé à titre définitif et que cette décision est déclarée contraire à celui-ci par un jugement ou un arrêt définitif d’une juridiction du travail, le membre reçoit directement la subvention traitement à laquelle il aurait eu droit et ce jusqu’à son rétablissement dans ses fonctions (ou la réalisation d’une autre condition).
Dès lors qu’il est dûment constaté par le juge du fond qu’une société n’a pas totalement mis fin à son activité mais qu’elle a poursuivi celle-ci dans le cadre d’une procédure d’administration provisoire et que quelqu’un a été désigné à cet effet en vue de l’administrer et de gérer ses biens (compagnie d’aviation ayant signé un accord avec une autre société en vue non seulement de la cession de son activité mais également d’un redémarrage de celle-ci dans le cadre de la seconde, avec transfert d’actifs et d’une partie du passif), la procédure de reconnaissance de raisons d’ordre économique et technique aurait dû être respectée.
La Cour de cassation pose deux questions à la Cour constitutionnelle :
• L’article 4, 3°, de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en excluant à l’égard du conseiller en prévention licencié dans le cas d’un licenciement collectif, auquel s’appliquent les procédures fixées en vertu du chapitre VII de la loi du 13 février 1998 portant des dispositions en faveur de l’emploi, l’application des procédures prévues par la loi du 20 décembre 2002 pour le conseiller en prévention dont le licenciement individuel est envisagé ?
• L’article 4, 3°, de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en excluant l’application de ces procédures de protection à l’égard de tout conseiller en prévention dans le cas précité de licenciement collectif, sans distinguer selon que l’employeur reste ou non tenu de disposer d’un conseiller en prévention au sein du personnel après le licenciement collectif, suivant qu’il occupe à ce moment au moins vingt ou, au contraire, moins de vingt travailleurs ?
(Décision commentée)
L’article 38, § 2, 2e alinéa, de la loi du 3 juillet 1978, disposition impérative, instaure en faveur du travailleur une protection à laquelle ce dernier ne peut renoncer aussi longtemps que subsiste sa raison d’être. Il s’ensuit que le travailleur ne peut renoncer à la suspension du préavis qu’une fois qu’elle s’est produite et uniquement pour le temps déjà couru de cette suspension.
La relation de travail entre un membre du personnel subsidié de l’enseignement libre subventionné et le pouvoir organisateur résulte d’un contrat de travail. L’article 8 du décret du 1er février 1993 fixant le statut des membres du personnel subsidié de l’enseignement libre subventionné dispose que les actions naissant du contrat sont prescrites un an après la cessation de celui-ci ou cinq ans après le fait qui a donné naissance à l’action sans que ce dernier délai puisse excéder un an après la cessation du contrat. Ceci vise l’action en dommages et intérêts formée par un membre du personnel contre le P.O. pour défaut d’exécution d’une des obligations imposées en matière d’engagement définitif (articles 40, 42, 43 et 46 du décret), qui est une action naissant du contrat de travail.
L’action fondée sur les articles 1235, 1236 et 1376 à 1381 C.C. tendant au remboursement par le travailleur de montants payés indûment par l’employeur n’est pas une action née du contrat de travail et est soumise à la prescription ordinaire.
Dans l’appréciation du respect du délai pour licencier pour motif grave, le fait invoqué peut être un manquement continu ou un manquement instantané. Le juge apprécie en fait s’il s’agit de l’un ou de l’autre. Dès lors qu’il est constaté que le manquement consiste dans le fait d’avoir entrepris une activité concurrente alors que le contrat de travail était toujours en cours et d’être actif en tant que gérant dans cette entreprise concurrente que le travailleur avait mise sur pied, l’on ne peut conclure qu’il ne s’agit pas d’un manquement continu.
(Décision commentée)
Sous peine de violer l’article 35, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978, l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles malgré la faute grave commise, qui constitue le critère légal de la notion de motif grave, ne peut être liée au critère, qui lui est étranger, de la disproportion entre cette faute et la perte de son emploi.
(Décision commentée)
S’il revient à l’employeur d’apprécier si le motif de licenciement n’est pas manifestement déraisonnable, le juge ne peut déduire le caractère abusif de celui-ci de la circonstance que l’inaptitude du travailleur n’a pas affecté le fonctionnement de l’entreprise de l’établissement ou du service. Ce faisant, l’arrêt attaqué n’a pas justifié légalement sa décision que le licenciement ne peut être mis en relation avec l’absentéisme de la travailleuse et qu’il est dès lors abusif. Le motif de licenciement tiré de l’aptitude du travailleur ne peut donc s’apprécier au regard des perturbations de l’organisation du service auquel il était affecté (art. 63 LCT).
Si le travailleur poursuit l’exécution du contrat de travail après avoir constaté la rupture sur le champ de celui-ci du fait d’une modification unilatérale d’une condition essentielle, ceci peut signifier que ce faisant il a renoncé à se prévaloir de la rupture irrégulière à charge de l’employeur et qu’il y a accord tacite sur les nouvelles conditions de travail. La renonciation tacite ne peut se présumer et ne peut être déduite que de faits qui ne peuvent faire l’objet d’une autre interprétation.
Si une autorité administrative décide de mettre un terme au contrat de travail d’un agent contractuel, elle n’est pas tenue de motiver formellement le licenciement. La réglementation relative à la rupture des contrats de travail à durée indéterminée n’impose par ailleurs pas à l’employeur d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement. Les travailleurs contractuels (donc hors situation statutaire) au service des communes sont soumis à l’article 1er, 2e alinéa de la loi sur les contrats de travail et il ne peut y être fait exception sur la base du principe général de droit de bonne administration.
(Décision commentée)
Un arrêt décisif de la Cour de cassation sur le licenciement d’un contractuel par un employeur public : si une autorité administrative décide de mettre un terme au contrat de travail d’un agent contractuel, elle n’est pas tenue de motiver formellement le licenciement. La réglementation relative à la rupture des contrats de travail à durée indéterminée n’impose par ailleurs pas à l’employeur d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement. Les travailleurs contractuels (donc hors situation statutaire) au service des communes sont soumis à l’article 1er, 2e alinéa de la loi sur les contrats de travail et il ne peut y être fait exception sur la base du principe général de droit de bonne administration.
Le délai de trois jours fixé à l’article 35, 3e alinéa de la loi du 3 juillet 1978 commence à courir lorsque le fait est connu de la partie qui se prévaut du motif grave et non lorsqu’il aurait pu ou aurait dû l’être. N’est dès lors pas tardif le licenciement notifié plus de trois jours après l’audition du travailleur (un mardi) mais dans le respect du délai après l’audition d’un autre membre du personnel sur les circonstances des faits invoqués (le vendredi). Il ne peut être décidé que la connaissance certaine des faits devait être acquise le lendemain de l’audition du travailleur licencié au motif que l’employeur aurait dû auditionner les témoins immédiatement.
(Décision commentée)
Demande de réintégration adressée à une autre entreprise faisant partie de l’UTE
(Décision commentée)
Etendue du contrôle judiciaire : le juge ne peut substituer ses propres critères d’organisation du fonctionnement de l’entreprise à ceux de l’employeur
(Décision commentée)
Attitude du travailleur et date de cessation du contrat de travail
La notification du motif grave peut se faire au domicile élu par celui à qui elle est destinée (art. 35, al 5 de la LCT)
(Décision commentée)
Art. 63 de la loi du 3 juillet 1978 et art. 2 de la loi du 29 juillet 1991
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
(Décision commentée)
Incendie de l’entreprise – moment où le constat de force majeure doit être posé
(Décision commentée)
Début de la protection avant la loi du 10 janvier 2007
Faits devant être à peine de nullité mentionnés dans la lettre elle-même, mais non dans la requête
(Décision commentée)
Preuve de l’effet négatif d’absences sur l’organisation de l’entreprise
Rupture avant prise de cours de l’essai - durée du préavis normal - pas d’application du préavis écourté
Rejet du pourvoi contre C. trav. Brux., 8 déc. 2010 - entretien préalable avant la décision de licencier et non avant le congé - notion de « salaire courant »
Si, avant de traiter avec un mandataire, le tiers a le droit d’exiger de celui-ci la production d’une procuration, il ne peut, s’il s’en abstient, nier ultérieurement l’existence du mandat que ne contestent ni le mandant ni le mandataire.
La partie qui modifie unilatéralement de manière importante un élément essentiel du contrat de travail met immédiatement fin à celui-ci de manière illicite.
La nature de la fonction exercée par le travailleur constitue en principe un élément essentiel du contrat de travail, à moins que le contraire puisse être déduit de la convention ou de l’exécution que les parties lui ont donnée.
La convention collective de travail du 30 juin 1980 conclue au sein de la C.P. de la construction, concernant le statut des délégations syndicales, prévoit qu’un délégué ne peut être licencié pour quelque motif que ce soit, sauf pour motif grave, que si la procédure qu’elle institue a été observée. Si, en cas de licenciement collectif en raison de la fermeture de l’entreprise, tout risque de discrimination par l’employeur entre les travailleurs licenciés se trouve écarté, l’article 17 de la convention collective doit néanmoins être respecté. En cas de non-respect, les indemnités de protection sont dues, le pourvoi introduit par les curateurs à la faillite de la société devant être rejeté.
Possibilité pour l’employé de trouver rapidement un emploi approprié et équivalent eu égard à son ancienneté, son âge, sa fonction et sa rémunération ainsi qu’aux éléments propres à la cause – prise en compte des circonstances existant au moment de la notification du congé, dans la mesure où ces circonstances influencent la possibilité pour l’employé de trouver un emploi équivalent
Notion d’organisation qui a présenté la candidature - organisation interprofessionnelle
Une division d’entreprise est une partie de l’entreprise qui présente une certaine cohésion et se distingue du reste de l’entreprise par une autonomie technique, une activité distincte et durable et un personnel propre (avec renvoi à Cass., 4 février 2002, n° S.00.0179.N).
(Décision commentée)
Plan social – C.C.T. d’entreprise
La partie à un contrat de travail qui se prétend libérée de son obligation d’exécuter ce contrat par la circonstance que l’autre partie a, en manquant à ses obligations contractuelles, révélé sa volonté de modifier le contrat et, partant, d’y mettre fin, a, conformément au second alinéa de l’article 1315 du Code civil, l’obligation de prouver cette volonté de l’autre partie
(Décision commentée)
Reprise de société – prise en compte du comportement auprès de l’employeur précédent
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
Licenciement fondé sur le comportement (non fautif) - obligation de respecter les procédures et mesures prévues à l’article 4 de la CCT du 9 novembre 1987 - cumul de l’indemnité avec celle prévue à la loi du 19 mars 1991
(Décision commentée)
Cumul autorisé avec l’indemnité de sécurité d’emploi dans le secteur des assurances – indemnités ne réparant pas le même dommage
Jugement déclaratif de faillite - raison économique - preuve du caractère discriminatoire du licenciement à charge du travailleur
Caractère d’ordre public - droits non susceptibles d’une renonciation - dès lors cependant que la protection n’a pas atteint son but (non-respect de la procédure et/ou absence de réintégration), seuls les intérêts particuliers du travailleur restent protégés
Vu le caractère d’ordre public de la protection, les droits découlant de celle-ci ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’une renonciation par le travailleur
Arrêt de la procédure électorale - pas de protection de l’élu - modification par la loi du 28 juillet 2011
(Décision commentée)
Licenciement par un employeur public – Code wallon de la Démocratie locale – absence de mention des voies de recours – point de départ de la prescription – lié à C. trav. Bruxelles 24 juin 2013, R.G. 2011/AB/781 ci-dessus
Vol - élément intentionnel non établi
(Décision commentée)
Contrôle judiciaire – licenciement manifestement déraisonnable – conduite légitime – motif valable
(Décision commentée)
Comportement légitime non constitutif de motif lié à la conduite – Cass. 27 septembre 2010
Voir C. trav. Bruxelles, 9 novembre 2012, R.G. 2011/AB/648 - ci-dessus
La circonstance que l’employeur pouvait raisonnablement présumer que l’ouvrier avait commis le fait invoqué à titre de motif grave et disposait de motifs précis pour procéder au licenciement est sans incidence sur le caractère abusif du licenciement au sens de l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978. Si le vol invoqué à l’égard du demandeur à titre de motif grave justifiant le licenciement n’est pas établi, l’on ne peut admettre que l’employeur pouvait raisonnablement présumer que le travailleur était impliqué dans le vol et qu’il disposait de motifs précis pour procéder au licenciement.
Caractère forfaitaire de l’indemnité - non prise en compte de circonstances ultérieures au congé
Rémunération dont le droit au paiement naît à partir du 1er juillet 2005 - confirmation de l’arrêté royal du 3 juillet 2005 par la loi du 8 juin 2008
Lorsque l’employeur fonde à tort la rupture de contrat de travail sur la force majeure, le travailleur peut considérer qu’il s’agit d’une résiliation irrégulière de ce contrat. S’il conteste la force majeure, le travailleur est tenu de constater l’irrégularité de la rupture unilatérale du contrat de travail dans le chef de l’employeur. A défaut, le contrat de travail subsiste en principe.
Assiette des intérêts dus sur la rémunération - application de la loi en vigueur au moment où est né le droit au paiement de celle-ci
Licenciement pendant la période de protection - obligation pour l’employeur de prouver le motif : motif grave ou motif étranger (nature et origine)
Point de départ du délai d’un an : jour où la période d’application de la clause arrive à expiration et où l’obligation prend fin
Conséquences du caractère rémunératoire : intérêts légaux (depuis le licenciement)
Loi du 22 janvier 1985 - prestations réduites
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
Obligation du contrat de travail dont l’échéance est postérieure à la cessation du contrat - délai d’un an - article 2257 CC : la prescription ne court point à l’égard d’une créance à jour fixe jusqu’à ce que ce jour soit arrivé - capital de pension complémentaire
Défaut de contestation immédiatement après le licenciement - congé régulier - secrétariat social
Exercice du droit d’une manière qui dépasse manifestement les limites de l’exercice normal par un employeur prudent et diligent - accusations très graves sans rapport avec les faits - pouvoir souverain d’appréciation des circonstances de la cause par le juge du fond
Faillite - liquidation de la faillite impliquant le maintien en service de certains travailleurs - absence d’obligation de saisir la commission paritaire pour obtenir la reconnaissance de motifs d’ordre économique ou technique
Entreprise de moins de 50 travailleurs - membres de la délégation syndicale chargés de plein droit des missions du CPPT à partir de leur désignation en tant que délégué syndical - article 52 de la loi du 4 août 1996
Délégué syndical suppléant - non visé s’il n’exerce pas les missions du délégué syndical
C.P. des services de santé - statut de la délégation syndicale prévu par convention collective d’entreprise - conditions d’institution fixée en dehors de celles prévues par la C.C.T. sectorielle - appréciation en fait par le juge du fond du caractère inconciliable des termes de celle-ci avec l’article 1er, alinéa 2 de la C.C.T. n° 5 du 24 mai 1971 (autorisant la conclusion d’une C.C.T. d’entreprise pourvu qu’elle ne soit pas contraire aux conventions sectorielles ayant le même objet
Protection d’ordre public - conclusion d’une transaction par laquelle le travailleur retire sa candidature - transaction pouvant avoir des effets juridiques (candidat ne figurant pas sur la liste définitive, vu le retrait de sa candidature)
Seuls bénéficient de la protection les candidats délégués du personnel mentionnés sur la liste définitive des candidats pour les élections
But de la protection : d’une part permettre aux délégués d’exercer leur mission dans l’entreprise et, d’autre part, assurer l’entière liberté des travailleurs de se porter candidat à l’exercice de ces fonctions - protection instituée dans l’intérêt général
Vu le caractère d’ordre public de la protection légale, le bénéficiaire ne peut valablement y renoncer
La protection spéciale des délégués et des candidats non élus est instituée dans l’intérêt général et est d’ordre public
Le candidat aux élections pour les conseils d’entreprise et comités de sécurité et d’hygiène bénéficie de la protection spéciale contre le licenciement, non pas à partir de l’introduction des listes des candidats, mais à partir du trentième jour précédant l’affichage de l’avis fixant la date des élections.
Lors de la candidature valable d’un travailleur licencié auparavant pour motif grave au cours de la période protégée, l’employeur, pour ne pas violer les dispositions organisant la protection, doit, immédiatement après la candidature et la demande de réintégration dans l’entreprise du travailleur licencié, procéder à cette réintégration, sous réserve de l’introduction dans les trois jours ouvrables et de la poursuite d’une procédure tendant à faire reconnaître le motif grave. Dans ces circonstances, la réintégration du travailleur licencié dans l’entreprise n’implique aucune renonciation au droit d’invoquer le motif grave pour justifier un licenciement sur-le-champ.
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
(Décision commentée)
Dans son arrêt du 12 octobre 2015, la Cour de cassation a jugé que ni la loi du 29 juillet 1991 ni les principes généraux de bonne administration, et plus particulièrement celui de l’audition préalable, ne s’appliquent au licenciement de l’agent contractuel au service d’un employeur public. Elle a également précisé qu’un principe général de bonne administration ne saurait faire obstacle à l’application des dispositions de la loi du 3 juillet 1978 LCT. Le principe « audi alteram partem » n’impose dès lors pas à l’employeur d’entendre avant de le licencier un agent contractuel d’une intercommunale.
(Décision commentée)
Dans son arrêt du 12 octobre 2015, la Cour de cassation a jugé que ni la loi du 29 juillet 1991 ni les principes généraux de bonne administration, et plus particulièrement celui de l’audition préalable, ne s’appliquent au licenciement de l’agent contractuel au service d’un employeur public. Elle a également précisé qu’un principe général de bonne administration ne saurait faire obstacle à l’application des dispositions de la loi du 3 juillet 1978 LCT. Le principe « audi alteram partem » n’impose dès lors pas à l’employeur d’entendre avant de le licencier un agent contractuel d’une intercommunale.
La notion de « lettre recommandée à la poste » n’étant pas définie dans la loi du 3 juillet 1978, il y a lieu de se référer aux dispositions de celle du 26 janvier 2018 relative aux services postaux, et plus particulièrement à son article 27 qui précise que ces termes – ou toute autre référence du même type – doivent être compris au sens d’« envoi recommandé », et ce quel que soit le prestataire de services postaux par lequel cet envoi a été délivré. L’envoi recommandé prévu par l’article 37, § 1er, alinéa 4, L.C.T. ne doit donc pas nécessairement être opéré par Bpost, mais peut également l’être par un service postal étranger (en l’espèce, la Poste suisse).
Par ailleurs, ce qui compte, dans le cadre de la notification du préavis, c’est la preuve de l’envoi (et sa date). Il n’est dès lors pas nécessairement requis qu’une preuve de la distribution du courrier au destinataire soit fournie, preuve que l’employeur peut toutefois se ménager en sollicitant l’envoi recommandé avec accusé de réception, ce qui est une exigence non prévue audit article 37, § 1er.
La réalité du motif étranger à la demande de congé parental est établie dès lors que les différentes évaluations effectuées depuis l’engagement de la travailleuse confirment les reproches formulés à son égard concernant sa manière d’exécuter ses prestations, qui ne présentait pas le niveau de qualité requis et posait problème à l’équipe commerciale de l’entreprise.
Conformément à l’article 5.65, 5°, du Livre 5 du Code civil, une clause stipulant que « l’employeur s’engage, via ce contrat, à la reprise de l’ancienneté contractuelle acquise chez l’ancien employeur du travailleur » ne peut, en raison de la généralité de ses termes, mener à conclure que cette ancienneté viserait tout ce qui concerne les droits issus du contrat (sa rupture, la durée du préavis ou le montant de l’indemnité compensatoire), qu’elle ne mentionne nullement, et encore moins expressément.
Commet sans doute une faute le travailleur qui, alors que la car policy de l’entreprise le prévoit, ne fournit pas à son employeur une copie lisible de son permis de conduire et ne lui signale pas immédiatement que celui-ci lui a été retiré. Il y va cependant d’un manquement qui ne justifie pas la rupture immédiate de son contrat, la possession d’un permis de conduire ne rendant pas impossible l’exercice de ses fonctions d’employé logistique, en manière telle que son retrait ne présente aucun inconvénient pour son employeur.
Le fait qu’une ancienneté conventionnelle remontant avant le 1er janvier 2014 ait été octroyée au travailleur est sans incidence sur la prise de cours de son contrat. Cette clause vise le calcul de l’ancienneté qui, pour déterminer le délai de préavis, prend cours non pas à la date de conclusion du contrat, mais à une date antérieure, sans modifier le mode de calcul de ce délai tel que désormais prévu, pour les contrats conclus à partir de cette date par la loi du 26 décembre 2013 sur la base de l’unique critère de l’ancienneté.
Le fait de faire usage de son droit de rompre le contrat de travail n’est pas en soi constitutif d’une faute ; il faut pouvoir établir que ce droit a été utilisé de manière abusive. Le licenciement du travailleur revêt un caractère abusif notamment lorsqu’il est détourné de sa finalité, donné sans intérêt (suffisant, légitime, raisonnable) pour l’employeur ou en en retirant un avantage disproportionné par rapport à la charge corrélative pour le travailleur, dans l’intention de nuire, au titre de sanction disproportionnée par rapport au dommage causé, avec légèreté ou dans des circonstances fautives, ou encore exercé dans un but autre que celui pour lequel il a été créé.
Une indemnité équivalente au maximum prévu de dix-sept semaines de rémunération est proportionnée et adéquate dès lors (i) que l’employeur soit n’établit pas la réalité de ce qu’il avance, soit arrange fallacieusement celle qui sous-tend le motif qu’il invoque, (ii) que le motif allégué au titre de faute grave (soutenir que le travailleur a harcelé sexuellement une cliente) n’est pas neutre, mais de nature à porter sérieusement atteinte à son honneur et sa réputation, et (iii) que tout indique qu’il a constitué un dossier pour licencier celui-ci pour de faux motifs.
Le fait que le travailleur n’aurait pas eu connaissance de la décision de la commission paritaire n’a pas d’incidence sur son opposabilité à l’intéressé : la loi du 19 mars 1991 ne prévoit pas d’obligation d’information du personnel concernant la demande de reconnaissance et la décision rendue par celle-ci. Elle lui est donc parfaitement opposable, sans préjudice de la possibilité pour lui de la soumettre au contrôle judiciaire dans le cadre de son licenciement.
Il convient, en la matière, de dissocier le débat judiciaire (qui porte sur une situation individuelle concrète, impliquant la preuve d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité dans le cadre de la relation de travail entre les parties) de la question de la prévention et de la gestion des risques psycho-sociaux au sein d’une entreprise (qui porte sur des relations collectives et globales). Une éventuelle négligence dans ce cadre n’implique pas automatiquement l’existence d’une faute commise à l’égard d’un travailleur individuellement, dont celui-ci pourrait réclamer la réparation à titre personnel.
Ainsi, ne commet pas de faute l’employeur qui, confronté au burn-out d’un travailleur dont l’investissement professionnel a pu paraître excessif au cours de nombreuses années de collaboration professionnelle et dont le médecin traitant autorise une reprise de travail dans le cadre d’un temps partiel médical, conditionne cette reprise à une visite préalable chez le médecin du travail et à des conditions strictes destinées à l’encadrer et à prévenir tout nouveau surinvestissement de l’intéressé.
Le fait que ce dernier ait perçu ces conditions comme une entrave à sa reprise d’activité n’implique pas que son employeur aurait, en fixant ce cadre, eu des intentions malveillantes à son égard, qui dépasseraient les limites de l’exercice de son autorité patronale et seraient dès lors fautives.
Le fait qu’un employeur estime que des difficultés de collaboration, latentes depuis plusieurs années, justifient un licenciement précisément au moment où le travailleur est absent pour cause d’incapacité de travail de longue durée, pour disproportionné qu’il soit, relève davantage de l’erreur d’appréciation que d’une faute intentionnelle. L’état de santé du travailleur au moment de son licenciement n’étant, pas plus que son âge, un critère pertinent pour fixer le quantum de l’indemnité qui lui est due, il y a lieu, en présence de motifs répondant aux critères de légalité, de réalité et de causalité, de limiter celui-ci au minimum prévu par la C.C.T. n° 109.
La sanction de la violation du principe d’audition préalable est indemnitaire : l’autorité qui commet une faute en n’entendant pas le travailleur et/ou en ne respectant pas les garanties destinées à assurer l’effectivité de ce droit est redevable d’une indemnisation si et dans la mesure où ce dernier parvient à justifier que cette faute lui a causé un dommage. Concrètement, il revient dès lors à l’intéressé de démontrer que, s’il avait pu être entendu dans des conditions acceptables, il aurait eu une chance de conserver son emploi.
Dès lors que le travailleur n’était, à ce moment, pas informé de la mesure qui pourrait être prise à son égard – laquelle ne sera envisagée qu’ultérieurement –, l’audition réalisée dans le cadre d’une enquête administrative ne peut être assimilée à l’audition préalable au licenciement qui s’impose en vertu du principe audi alteram partem. Un employeur public ne peut donc se retrancher derrière le fait que le travailleur a déjà été entendu à propos de ce qui lui est reproché ; il doit, en principe, le convoquer à nouveau pour lui permettre de s’expliquer également sur la mesure de licenciement qu’il envisage désormais d’adopter.
Un Collège communal valablement compétent pour engager un agent sur la base d’une délégation du Conseil communal l’est également pour le licencier sur la base de cette même délégation, et ce en application du principe du parallélisme des compétences en vertu duquel on induit le pouvoir de défaire ce que l’on a fait.
Une délégation explicite du pouvoir de licencier n’implique, pour sa part, pas qu’une délégation spéciale soit adoptée pour chaque dossier et ne doit, par ailleurs, pas viser le mode de rupture envisagé, cette délégation expresse englobant tous types de licenciement, en ce compris le licenciement pour motif grave.
Pour déterminer la hauteur de l’indemnité, il n’y a lieu de se référer ni à un critère lié aux circonstances du licenciement (en l’espèce, la brutalité de celui-ci) ni à des développements intervenus par la suite (en l’espèce, des accusations infondées concernant des manœuvres dolosives en vue d’obtenir indûment des allocations de chômage temporaire).
La délégation générale donnée par le Conseil au Collège communal de son pouvoir de nomination et de licenciement de certaines catégories d’agents contractuels nommément spécifiées est valable sans qu’il soit nécessaire d’accorder, ensuite, une délégation expresse pour chaque engagement ou licenciement à intervenir.
Des faits pouvant être qualifiés d’agression sexuelle commis à l’égard d’une personne en état de grande dépendance et non susceptible de se défendre constituent une faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle, ce sans que la circonstance que leur auteur se soit, dans un premier temps, vu proposer une rupture d’un commun accord comme alternative à son licenciement pour motif grave n’en contredise l’existence.
Un employeur, confronté à un comportement constitutif d’un motif grave, peut vouloir éviter le licenciement fondé sur ce motif pour diverses raisons avouées ou non – comme, par exemple, les aléas d’une longue procédure en justice représentant un coût important pour une A.S.B.L. Quel qu’en soit le motif réel, cette alternative ne l’empêche en tout cas pas de licencier l’auteur des faits pour un tel motif, après que celui-ci a refusé une rupture d’un commun accord.
Un employeur normal et raisonnable ne licencierait pas un travailleur au seul motif qu’il exprime le souhait de recevoir des commissions non prévues au contrat mais ayant fait l’objet d’une promesse verbale attestée dans un document établi par le responsable des ressources humaines.
La circonstance que la directrice de l’institution au sein de laquelle ils ont été commis était déjà au courant de certains faits portant atteinte au bien-être de bénéficiaires handicapés (pour lesquels elle s’est contentée d’adresser des lettres de reproche à leur auteur, sans juger utile de le recadrer plus sévèrement, et, par cette mauvaise gestion, a favorisé le silence des victimes) n’est aucunement de nature à priver ladite institution de son droit de licencier l’intéressé pour motif grave après que son organe compétent a pour ce faire été mis au courant de plusieurs lettres de plainte, dont l’une à tout le moins mettant en lumière des faits d’une toute autre nature que ceux évoqués dans les lettres de griefs adressées par la directrice, à savoir des comportements à caractère sexuel.
Constitue une modification importante d’un élément essentiel du contrat – et justifie la rupture de celui-ci en raison de l’acte équipollent à rupture ainsi posé – le fait pour l’employeur d’imposer à un travailleur, en chômage temporaire pour cause de force majeure Coronavirus, de continuer à exercer son travail de représentant de commerce depuis son domicile tout en ne percevant plus sa rémunération normale, mais des allocations de chômage temporaire équivalant à 70% de celui-ci.
On ne peut qualifier de « normal et raisonnable » l’employeur qui, dans le contexte de la crise sanitaire due au COVID-19 et de la fermeture des commerces non essentiels qui a durement impacté son chiffre d’affaires, impose à un travailleur, en chômage temporaire pour cause de force majeure Coronavirus, de continuer à exercer son travail de représentant de commerce depuis son domicile tout en ne percevant plus sa rémunération normale, mais des allocations de chômage temporaire équivalant à 70% de celui-ci.
Ce faisant, il se rend non seulement coupable d’un usage impropre et abusif du régime de chômage temporaire pour force majeure Coronavirus – pratique du reste susceptible de constituer une infraction au Code pénal social –, mais encore modifie unilatéralement et de manière importante un élément essentiel du contrat, ce qui justifie la rupture de celui-ci à ses torts et, vu la gravité de ce manquement, justifie que l’indemnité due au travailleur soit fixée à la sanction maximale due au titre de la C.C.T. n° 109.
Il n’est pas déraisonnable pour un employeur qui exploite une entreprise à finalité commerciale de procéder au licenciement d’un représentant de commerce qui ne réalise pas les objectifs qui lui ont été impartis.
Le conseiller en prévention qui n’est pas désigné régulièrement (soit après accord préalable du comité pour la prévention et la protection au travail) bénéficie également de la protection. Celui qui n’est chargé que d’une partie des missions du conseiller en prévention bénéficie tout autant de celle-ci. L’indemnité est en effet susceptible d’être réduite au prorata de la durée minimale des prestations pour une occupation à temps partiel en tant que conseiller en prévention.
Dans une entreprise du domaine de la sécurité et du gardiennage, il est admissible de retenir une durée de 30 % du temps de travail consacré à cette fonction.
On ne peut qualifier de « management toxique » le comportement d’une personne qui ne montre pas toujours aux membres de son équipe le respect qu’ils méritent, n’hésitant pas à adopter avec eux un mode de communication à la limite de la politesse. Cette manière d’être pourrait sans doute justifier que, à terme, l’intéressée ne puisse continuer à travailler dans l’entreprise, à tout le moins pas dans ses fonctions actuelles ; elle ne rend, pour autant, pas immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail avec celle-ci, dont l’attention n’a pas été attirée sur son comportement et qui ne s’est pas vu proposer de suivre une formation afin de l’améliorer.
S’il est incontestable que le travailleur n’a pas fait preuve de diligence dans le cadre du processus de restitution des outils de travail appartenant à son employeur, pareil comportement, même s’il peut être qualifié de fautif, n’est pas revêtu de la gravité requise pour justifier son licenciement pour motif grave, dès lors qu’il peut se justifier par le contexte tendu des relations de travail, susceptible – notamment – de trouver sa source dans le non-respect par la société de ses propres obligations.
Il ressort de la rédaction de l’article 17, 3°, a), de la loi du 3 juillet 1978 que la divulgation de toute affaire à caractère personnel ou confidentiel dont le travailleur aurait eu connaissance dans l’exercice de son activité professionnelle est interdite, sans qu’il soit nécessairement requis que cette divulgation viole les dispositions du Code de droit économique relatives à la protection des secrets d’affaires, ni que les conditions d’existence de l’infraction de calomnie et/ou de diffamation soient rencontrées.
Ainsi, un gérant d’une petite entreprise à caractère familial devant pouvoir parler librement devant les membres de son personnel des problèmes rencontrés avec l’un ou l’autre fournisseur sans avoir à craindre d’être trahi par ceux-ci, commet une faute la travailleuse qui, entendant fortuitement le mécontentement de son employeur à l’égard d’un fournisseur ou assistant aux discussions que celui-ci tient avec un concurrent à son propos, fait état de ces informations dans une attestation destinée à servir en justice. Et la cour, estimant que la divulgation des informations obtenues dans ce contexte – accompagnée d’impressions personnelles – constitue un manquement au devoir de loyauté qui s’impose dans le cadre de l’exécution d’un contrat de travail, de conclure à la réalité du motif grave de rupture.
La décision qu’une entreprise prend, après mûre réflexion (audit mené par deux de ses administrateurs, discussion avec les représentants du personnel au sein du conseil d’entreprise, décision en conseil d’administration et nouvelle présentation au conseil d’entreprise), de modifier sa structure organisationnelle, avec suppression du niveau hiérarchique dont relève un travailleur, est un choix de gestion qui relève de sa liberté organisationnelle et qu’un employeur normal et raisonnable aurait pu prendre.
La loi du 13 mars 2024 sur la motivation des licenciements et des licenciements manifestement déraisonnables des travailleurs contractuels du secteur public met fin, à compter du 1er mai 2024, aux controverses relatives à la motivation du licenciement et à l’application, par « analogie », de la C.C.T. n° 109 aux travailleurs du secteur public. En effet, son article 3, alinéas 2 et 3, contient désormais une obligation de motivation du licenciement en faveur des travailleurs du secteur public. Si l’employeur omet d’entendre préalablement le travailleur ou de communiquer les motifs concrets qui ont conduit au licenciement, son article 3, alinéa 4, prévoit qu’il lui est redevable d’une indemnité correspondant à deux semaines de rémunération. Par ailleurs, son article 4 introduit la notion de licenciement manifestement déraisonnable en faveur des travailleurs sous contrat de travail dont l’employeur ne relève pas du champ d’application de la loi du 5 décembre 1968. Le licenciement manifestement déraisonnable est défini de manière identique à la C.C.T. n° 109. L’indemnisation du travailleur correspond aussi au minimum à trois semaines et au maximum à dix-sept semaines de rémunération.
Dès lors, s’il ne peut être fait application de la C.C.T. n° 109 au licenciement d’un agent contractuel d’un service public, il est possible et légitime pour les licenciements antérieurs à la loi du 13 mars 2024 d’appliquer le droit commun de l’abus de droit en se référant, comme le suggère la Cour constitutionnelle (arrêt n° 101/2016 du 30 juin 2016), aux critères de la C.C.T. n° 109, en vérifiant si le licenciement est justifié soit par des motifs en lien avec l’aptitude ou la conduite du travailleur, soit par les nécessités du service, et en vérifiant s’il n’aurait pas été décidé par un employeur normal et raisonnable. Cette référence à la C.C.T. n° 109 ne dispense cependant pas le travailleur du secteur public, conformément au droit commun des obligations, de prouver son dommage, tant dans son principe que dans son ampleur.
(Décision commentée)
En vertu de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle (et des termes de la loi du 13 mars 2024 sur la motivation des licenciements et des licenciements manifestement déraisonnables des travailleurs contractuels du secteur public, en vigueur le 1er mai 2024), l’administration doit procéder à l’audition préalable de la personne avant de procéder à son licenciement pour des motifs « liés à la personne ou son comportement ».
Il ne paraît pas douteux que le licenciement fondé sur le comportement du travailleur est soumis à l’obligation d’audition préalable. Il pourrait également être considéré que l’incapacité de travail de longue durée désorganisant le service pourrait être assimilée à un « motif lié à la personne » (ainsi lorsque le licenciement résulte de longues absences liées à trois grossesses successives).
Commet une faute qui, bien que relevant d’un fait de vie privée, a un retentissement sur la confiance de son employeur le travailleur, connu pour ses difficultés financières, qui adresse différentes demandes d’argent (qu’on les qualifie de prêts ou d’extorsion) à un collègue sur lequel il dispose d’une position hiérarchique.
Le fait que des explications aient été données par téléphone à l’occasion du licenciement, voire après celui-ci, ne dispense pas l’employeur de donner suite à une demande de communication des motifs concrets de celui-ci formulée conformément à l’article 4 de la C.C.T. n° 109 en faisant connaître ces motifs par lettre recommandée. Des entretiens téléphoniques ne sont pas une lettre recommandée.
De même que les juridictions du travail ne sont pas compétentes pour déterminer le caractère imposable ou non de l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable (voy. la jurisprudence citée sous Indemnité > Nature), il ne leur appartient pas de déterminer le caractère imposable ou non de l’amende civile. C’est à l’administration fiscale de tirer les conséquences de la qualification d’amende civile en termes d’imposition, un recours administratif puis judiciaire étant ouvert sur ce point pour le contribuable. Partant, lorsqu’aucune des parties n’a mis l’administration fiscale à la cause pour débattre de cette question dans le cadre d’un débat contradictoire, le montant sollicité sera alloué sous déduction des retenues légales éventuellement applicables, les parties étant, pour le reste, invitées à soumettre cette question à l’administration fiscale lors du paiement de l’amende civile et, le cas échéant, à introduire les recours qu’elles estimeraient utiles.
Quant aux intérêts, l’amende civile constitue de la rémunération au sens de la loi relative à la protection de la rémunération et porte intérêt de plein droit en application de l’article 10 de cette loi. Les intérêts sont donc dus à partir de la date d’exigibilité, c’est-à-dire à partir du lendemain de l’expiration du délai de deux mois dans lequel l’employeur était tenu de répondre à la demande de communication des motifs concrets du licenciement.
(Décision commentée)
Il appartient à la personne morale qui modifie son siège social de mettre en place les mesures nécessaires pour recevoir ou faire suivre son courrier en attendant que le changement de celui-ci soit opposable aux tiers. À défaut, elle supporte les conséquences de sa propre négligence et ne peut soutenir, pour prétendre que le courrier recommandé par lequel un travailleur a demandé les motifs concrets de son licenciement ne lui est pas parvenu, que son changement d’adresse devait être connu de tous avant la date de publication aux Annexes du Moniteur belge.
Le juge confronté à un problème d’application du Décret de septembre dans un dossier comportant des éléments d’extranéité ne peut prononcer la sanction de nullité prévue par l’article 10, alinéa 1er, de celui-ci. Il s’ensuit que la règle de son article 10, alinéa 4, ne peut non plus trouver application.
S’agissant d’une décision de peu d’importance qui nécessite une prompte solution au regard du double délai de trois jours prescrit par l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978, la décision de licencier un travailleur pour motif grave relève de la gestion journalière d’une société anonyme. Il n’est nullement requis que cette décision soit confirmée par le conseil d’administration de la société.
Des divergences de vue entre employeur et travailleur peuvent pousser ce dernier à présenter sa démission, sans pour autant justifier après coup de retenir que tel ou tel autre fait isolé suffise à prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail à une date antérieure à la rupture opérée à son initiative.
Dès lors que le travailleur avait clairement fait savoir à son employeur qu’il souhaitait être licencié, ce dernier peut légitimement interpréter la reprise par lui d’un commerce à titre d’activité accessoire autorisée par le médecin-conseil comme traduisant sa volonté de réorienter sa carrière. Dans ce contexte, le licenciement de l’intéressé n’est pas manifestement déraisonnable.
Un employeur qui a pu avoir connaissance de certains éléments lui permettant de soupçonner l’exercice effectif d’une activité accessoire par son travailleur en consultant le compte Facebook de ce dernier peut néanmoins raisonnablement estimer que cette seule publication constitue une information trop précaire pour décider d’un licenciement pour motif grave et souhaiter en avoir le cœur net en confiant, par prudence, à un huissier le soin de mener une enquête afin de corroborer l’information diffusée par ce canal. Le délai de trois jours commence alors à courir à la date à laquelle le constat d’huissier a été porté à sa connaissance et lui a permis d’acquérir une connaissance suffisante des faits invoqués à l’appui du licenciement pour motif grave.
Le partage de la preuve doit s’opérer en deux temps, étant que (i) l’employeur doit prouver la réalité des motifs allégués et leur lien causal avec sa décision de licencier (ils sont alors présumés ne pas être déraisonnables) et que (ii) le travailleur doit prouver que la décision prise est déraisonnable ou que le licenciement se fonde en réalité sur d’autres motifs que ceux invoqués (et prouvés) par l’employeur. En conséquence, l’article 10, premier tiret, de la C.C.T. n° 109 ne dispense pas l’employeur de démontrer les motifs de rupture allégués ainsi que le lien de causalité entre ces motifs et le licenciement dans le cas où il l’a effectivement motivé : il lui incombe de démontrer le bien-fondé de cette motivation, tandis que le travailleur peut établir que le licenciement est tout de même manifestement déraisonnable.
Commet manifestement un dol – et peut, de ce fait, être condamné à des dommages et intérêts – le travailleur qui ne restitue pas le matériel appartenant à l’employeur alors que celui-ci le lui a réclamé à plusieurs reprises et a accepté sa demande de restitution dans un endroit neutre. S’agissant de la voiture, le dommage réclamé par l’employeur est justifié par les factures de la société de leasing ; l’évaluation de la perte de jouissance des autres biens (smartphone, carte Sim, laptop, etc.) qui n’ont été restitués que plus d’un an après la rupture du contrat peut, quant à elle, adéquatement être évaluée ex aequo et bono à un montant de 700 euros.
Le principe audi alteram partem impose l’audition du travailleur du secteur public par l’organe compétent pour adopter la décision de licenciement. Le travailleur invoquant la perte d’une chance de conserver son emploi, la cour relève que pour que le dommage existe il faut que la chance soit réelle, ce qui est le cas en l’espèce. Elle évalue ex aequo et bono l’indemnisation à 3.000 euros bruts.
Pour pouvoir soutenir que le contrat a pris fin par la force majeure, il faut que l’événement imprévu entraine lui-même la rupture, impose de manière directe la fin de la relation contractuelle. La destruction du contrat doit être l’œuvre de l’événement imprévisible.
En l’espèce, la rupture du contrat n’est pas directement le fait des inondations (juillet 2021) invoquées par l’employeur. Celles-ci n’ont pas empêché, dès le mois d’octobre 2021, la réouverture du magasin où prestait l’employée. La rupture du contrat est le fait du choix opéré par l’employeur de ne pas la conserver à son service alors qu’elle poursuivait son activité. A partir du moment où il a posé un choix, il ne peut pas être question de force majeure.
La protection contre le licenciement doit être interprétée à la lumière de l’article 101 de la loi de redressement du 22 janvier 1985, ce qui signifie que, lorsque sa demande ne répond pas à toutes les conditions de forme de l’article 6, § 1er, de l’arrêté royal du 29 octobre 1997, le travailleur ne sera protégé que si son employeur a néanmoins expressément accédé à celle-ci. Elle prendra alors cours, non à la date d’introduction de la demande, mais à celle de son acceptation.
Le contrôle judiciaire s’effectue en plusieurs étapes. Le tribunal vérifie d’abord si les motifs avancés rentrent dans une des trois catégories de motifs légitimes définis par la CCT (= critère de légalité) ; il contrôle ensuite l’exactitude des motifs (= critère de réalité) ; le juge examine si les faits dont se prévaut l’employeur sont la cause réelle du licenciement (= critère de causalité) et exerce enfin un contrôle marginal de la pertinence des motifs (= critère de proportionnalité).
Si, dans le cadre de cet examen, il répond par l’affirmative à une question, il doit examiner la suivante. Par contre, s’il y répond par la négative, il devra considérer que le licenciement est manifestement déraisonnable, sans devoir examiner les suivantes.
Lorsque l’employeur invoque plusieurs motifs à l’appui de sa décision de licenciement, il faut – mais il suffit – qu’il démontre la validité de l’un des motifs avancés, au regard des quatre questions précitées.
Corrélativement, le travailleur ne peut se contenter de démontrer qu’un des motifs invoqués est manifestement déraisonnable pour que le licenciement, considéré au regard de l’ensemble des motifs invoqués, puisse être qualifié de manifestement déraisonnable.
Le juge doit examiner si un employeur normal et raisonnable, placé dans les mêmes circonstances et tenant compte du contexte de licenciement, aurait également procédé au licenciement, sans pour autant apprécier l’opportunité de la décision.
Il ne pourra dès lors pas fonder son jugement sur son appréciation subjective de la mesure qu’il estime la plus opportune au regard des alternatives s’offrant à l’employeur ou de la valeur de chaque travailleur mais devra s’appuyer sur des éléments objectifs conférant au licenciement, de manière patente, un caractère déraisonnable. En outre, les termes utilisés dans la CCT n° 109 plaident en faveur d’une interprétation restrictive de la compétence d’appréciation du juge. L’association du mot « manifestement » au caractère déraisonnable du licenciement tend d’ailleurs à souligner ce caractère particulièrement marginal du contrôle judiciaire au regard de la liberté d’action de l’employeur. De même, l’utilisation du terme « jamais » dans la définition du licenciement manifestement déraisonnable (entendu comme le licenciement « qui n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable » – CCT n° 109, art. 8) renforce encore le caractère marginal du contrôle du juge.
Le transfert conventionnel d’entreprise engendre une interdiction de licenciement des travailleurs concernés par celui-ci. Les nécessités de l’entreprise ne peuvent, par conséquent, justifier un licenciement en violation de cette interdiction.
La condamnation de l’employeur à délivrer les documents sociaux peut être assortie de celle à payer une astreinte en cas d’inexécution, l’obligation de délivrer ceux-ci constituant une obligation légale accessoire au contrat de travail, née à l’occasion de celui-ci et mise à charge de l’employeur par des dispositions légales sanctionnées pénalement. Seul le juge qui l’a prononcée peut la modifier, qui plus est dans la seule hypothèse de l’impossibilité avérée de satisfaire à la condamnation principale.
Les divergences de vue et l’attitude négative ou passive d’une directrice par rapport aux décisions et à la stratégie mises en place par le haut management de l’entreprise sont des éléments liés à la conduite du travailleur qui justifient qu’un employeur normal et raisonnable décide de la licencier.
On ne peut soutenir qu’il faudrait considérer qu’une lecture combinée des articles 4 et 10 de la CCT 109 serait contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.
La différence de traitement quant à la charge de la preuve entre le travailleur qui a demandé la communication des motifs de son licenciement dans les deux mois suivant la fin de son contrat de travail et celui qui n’a pas formulé cette demande repose sur un critère objectif – le délai de deux mois – qui est identique pour tous les travailleurs, sans aucune distinction.
Il ressort du préambule de la CCT 109 que les partenaires sociaux n’ont pas voulu donner au travailleur un droit absolu et illimité dans le temps de connaître les motifs de son licenciement. Il s’agit d’un droit conféré « pendant une période donnée après son licenciement ». Les partenaires sociaux voient dans ce droit « un effet préventif à l’égard des procédures de contestation d’un licenciement ». En outre « le droit du travailleur de connaître les motifs concrets qui ont conduit à son licenciement aura également pour conséquence qu’il disposera de davantage d’éléments concrets s’il conteste son licenciement. Cela facilitera ainsi l’accès à la justice en vue de la contestation du licenciement pour le travailleur qui a activé son droit en adressant une demande à l’employeur ».
La distinction poursuit ainsi un but légitime expressément énoncé par les auteurs de la CCT 109. Le délai de deux mois n’apparaît pas « excessivement court » au regard de ce but, de sorte que la différence de traitement, qui repose sur un critère objectif, apparaît proportionnée au but poursuivi.
La mention du « motif précis du chômage » telle qu’elle figure sur le formulaire C4 ne répond pas à la définition visée à l’article 6 de la CCT 109, (i) en ce qu’il ne s’agit pas d’une communication faite au travailleur, mais bien d’une communication destinée à l’ONEm, (ii) en ce qu’il ne s’agit pas d’une communication faite de la propre initiative de l’employeur, mais bien d’une obligation légale imposée à l’employeur quel que soit le mode de rupture du contrat de travail et, enfin, (iii) en ce qu’une telle mention, du seul fait de sa brièveté, ne peut contenir « les éléments qui permettent au travailleur de connaître les motifs concrets qui ont conduit à son licenciement » au sens de l’article 6 de la CCT 109.
Tout au plus peut-on admettre que la mention du motif du chômage sur le formulaire C4 est un indice du motif du licenciement, qui devra être corroboré par une communication faite et/ou demandée conformément à la CCT 109.
Admettre que le motif mentionné sur le formulaire C4 répondrait aux conditions prescrites par l’article 6 de la CCT 109 reviendrait à priver les deuxième et troisième tirets de l’article 10 de la CCT de leur substance, dès lors que tout employeur est toujours tenu de délivrer un formulaire C4 comportant le motif précis du chômage. Suivre cette thèse reviendrait à dire que l’employeur qui délivre un formulaire C4 conformément à ses obligations légales se trouverait toujours visé par l’article 6 de la CCT 109 et que c’est toujours la règle de preuve visée à l’article 10, premier tiret, de la CCT 109 qui s’appliquerait.
Telle n’a pas pu être la volonté des partenaires sociaux qui ont établi des règles de preuve spécifiques et précises qui trouvent leur sens dans l’architecture générale de demande et de communication des motifs concrets du licenciement telle qu’organisée et sanctionnée par la CCT 109.
Que la prise d’antidépresseurs (combinée ou non avec des doses modérées d’alcool) ait pu conduire à des moments de somnolence est possible, voire probable, mais explique difficilement que le discernement de la travailleuse, responsable des caisses auprès de son employeur, ait été influencé à plusieurs reprises et n’explique pas les stratagèmes qu’elle a mis en place pour détourner l’attention des détournements auxquels elle procédait lors du paiement de ses achats. Dès lors que ces faits se sont déroulés à plusieurs reprises, la circonstance que son intégrité n’ait jamais été prise en défaut depuis près de trente ans n’est pas plus décisif que celle qu’il s’agisse de comportements relevant de la vie privée, ceux-ci pouvant en effet être invoqués lorsqu’ils ont un retentissement sur la vie professionnelle, comme en l’espèce.
Un employeur normal et raisonnable peut légitimement décider de licencier un directeur général qui n’a pas établi le plan d’action qui lui avait été expressément demandé, ce alors que ce plan constituait pour lui une dernière chance d’éviter son licenciement. Le fait qu’aucun délai précis ne lui ait été fixé pour rendre celui-ci est sans incidence, dès lors qu’il connaissait l’importance de cette demande et qu’un nouveau conseil d’administration était prévu 15 jours plus tard. Cette attitude, qui s’analyse comme une absence, soit de volonté, soit de capacité, à établir le plan d’action qui lui était demandé, est, en effet, de nature à faire estimer que, malgré ses qualités professionnelles, l’intéressé n’était pas ou plus à même de restaurer une atmosphère de travail sereine entre lui-même et tous les membres du personnel qui lui étaient subordonnés.
La réparation du préjudice lié à la perte d’une chance de conserver son emploi consiste en une fraction (taux de probabilité exprimant la chance d’obtenir l’avantage espéré) de la rémunération que le travailleur aurait continué à percevoir s’il était resté en service au vu de ses perspectives concrètes de carrière (préjudice final effectivement subi déduit de la perte d’emploi). Il s’ensuit que la réparation du préjudice lié à la perte d’une chance de conserver son emploi ne couvre en définitive rien d’autre qu’une partie du dommage entier lié à la perte du travail. On ne voit pas à quel titre il en irait autrement, à quel titre la perte d’une chance de conserver son emploi serait soustraite de l’ensemble du dommage déjà réparé forfaitairement par l’indemnité de préavis. La réparation procurée par l’indemnité de préavis est forfaitaire et fixée au jour de la rupture, sans qu’il faille se soucier de la question de savoir si le travailleur était en incapacité de travail ou s’il a retrouvé un emploi par la suite, mais cela ne change rien à la nature du dommage qui n’est alors fondamentalement pas différente de celle du dommage lié à la perte d’une chance de conserver son emploi.
La circonstance que les motifs communiqués se rapportent à des faits qui ne sont pas situés dans l’espace et dans le temps, des faits désincarnés, livrés à l’état brut sans contextualisation et, pour certains, construits sur des appréciations subjectives, des faits qui somme toute restent vagues, si elle ne préjuge pas de leur réalité, ne permet néanmoins ni de les identifier concrètement, ni, ensuite, de vérifier que ce sont bien ces faits qui sont à la base de la décision de licencier.
Dès lors que le travailleur a demandé le paiement d’une indemnité de préavis « complète » sans déduction des quatre semaines visées par l’article 11/5 de la loi du 5 septembre 2001, le dommage résultant de l’absence de reclassement professionnel est suffisamment réparé, en l’absence de preuve d’un dommage distinct. Sa demande de dommages et intérêts pour absence de reclassement professionnel doit donc être déclarée non fondée.
À partir du moment où le travailleur ne dresse aucune liste des documents qu’il sollicite, la condamnation de l’employeur à leur délivrance ne peut être assortie d’une astreinte dès lors que, faute de cette précision, il sera impossible pour le juge chargé du contentieux de l’exécution de vérifier si la condamnation a été correctement et complètement exécutée, de sorte qu’il lui sera impossible de vérifier si les conditions d’exigibilité d’une astreinte sont réunies.
Le fait pour un directeur commercial d’avoir des divergences de vue avec le haut management de l’entreprise, cumulées à un comportement désinvolte quant aux évaluations et aux objectifs des membres de son équipe, justifie que l’employeur ait pu procéder au licenciement. Un employeur normal et raisonnable peut en effet considérer que pareille attitude de négligence et de désinvolture dans le chef d’un cadre dirigeant justifie son licenciement.
En l’absence de motif dûment avéré, le licenciement est manifestement déraisonnable au sens de la CCT n° 109 dès lors qu’il doit être admis, dans l’hypothèse d’un motif dont la matérialité-même n’est pas établie, que l’employeur, à qui incombe la charge de la preuve en l’espèce, ne prouve pas que le licenciement serait lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur ou aux nécessités de fonctionnement de l’entreprise, ni qu’il aurait été décidé par un employeur normal et raisonnable.
(Décision commentée)
La prestation de gardes faisant partie de ses obligations déontologiques, il n’est pas fautif pour un médecin généraliste d’avoir accepté d’accomplir ce type d’intervention, sans en avoir averti son employeur, alors qu’il était en incapacité de travail.
Pour la cour, il n’y va, en effet, pas d’une activité concurrente à celles exercées à son service. Elle semble plutôt leur être complémentaire dès lors que celui-ci, qui n’organise jamais ce type de prestations tandis que la structure à laquelle l’intéressée est affiliée n’assure que de telles interventions (la nuit, le week-end et les jours fériés), à l’exclusion de toute consultation ou visite en journée, renseigne les coordonnées dudit service de garde pour toute demande en dehors de ses propres heures de consultation. Aucune concurrence n’est donc possible, puisqu’un même patient n’est, dans ces circonstances, jamais susceptible de préférer un service à l’autre, mais obligé de s’adresser à l’un, à l’exclusion de l’autre (en fonction du moment où il estime devoir être examiné par un médecin généraliste).
À son estime, le seul fait de la prestation d’une (ou même de plusieurs) garde(s) ne suffit, par ailleurs, pas, à dénier la réalité de l’incapacité de travail, ni à faire craindre à l’employeur un rétablissement plus lent. Celui d’avoir perçu un salaire garanti au moment où la garde litigieuse a été accomplie ne peut non plus être retenu comme fautif. L’incapacité de travail n’ayant pas été remise en cause médicalement, elle est justifiée par des certificats médicaux, ce qui impliquait la débition du salaire garanti. En outre, la prestation d’une garde s’effectue nécessairement, non seulement en dehors des heures de travail convenues, mais également en dehors du cadre même des prestations salariées, puisque celles-ci étaient accomplies en qualité de travailleur indépendant à titre complémentaire. Les rémunérations perçues pour l’un ou l’autre travail sont donc strictement distinctes et ne peuvent pas générer un quelconque cumul.
Et la cour, qui retient comme seul manquement le fait que le prestataire n’ait pas informé son employeur de son activité rémunérée de garde – ce qui constitue, en l’espèce, une violation d’une (partie d’une) disposition de son contrat de travail –, de poursuivre en relevant que ce seul manquement aurait pu donner lieu à une clarification des règles en vigueur et à un rappel à l’ordre mais ne constitue cependant pas une faute grave, ni a fortiori, un motif grave de licenciement, dans la mesure où cette faute n’est pas de nature à rompre de manière immédiate et définitive la confiance entre les parties.
Échoue à apporter la preuve de la réorganisation qui, à ses dires, justifierait le licenciement du travailleur, la société qui, lorsque la demande de l’intéressé a été évoquée en conseil d’entreprise, a demandé un report de celle-ci de six mois ─ et refusé le compromis sollicité par les représentants du personnel ─ au motif que sa fonction ne pouvait être exercée que par un temps plein qu’elle ne pouvait pourvoir autrement et, lors d’un entretien tenu avec l’intéressé peu avant son licenciement, lui a signalé qu’il serait bon qu’il puisse apporter son aide à l’accomplissement d’autres tâches, à côté des siennes propres. Ce d’autant que rien n’établit que la situation aurait évolué au point d’impliquer réorganisation et licenciement.
L’indemnité prévue par la CCT n° 109 ne peut être cumulée avec celle octroyée sur pied de la CCT n° 103 pour cause de crédit-temps.
L’employeur qui met fin au contrat pour motif grave doit établir la réalité des motifs reprochés. Il y a cependant lieu de distinguer les notions de charge de la preuve et d’administration de celle-ci. Sur ce point, la loyauté impose à chaque partie de joindre au dossier toutes les pièces dont elle dispose et qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité : aucun plaideur ne peut se retrancher dans le silence et l’abstention, sous le prétexte que la charge de la preuve incombe à son adversaire, s’il dispose d’éléments de preuve dont ce dernier pourrait utilement se prévaloir.
Est de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle le fait qu’un travailleur use volontairement de sa position pour obtenir des avantages non autorisés, pour lui ou sa famille. Même si ceux-ci peuvent paraître insignifiants au regard de l’importance de l’entreprise, ils ne peuvent, bien qu’aucun avertissement ne lui ait été adressé au cours de sa carrière, être cautionnés sous peine d’avaliser un non-respect des procédures instituées et nécessitées tant par l’organisation de la société que par la fonction de confiance exercée. Il en va d’autant plus ainsi (i) que, compte tenu de cette ancienneté, l’intéressé ne pouvait ignorer ces procédures et devait avoir à l’esprit les conséquences de ses manipulations pour l’entreprise et (ii) qu’il a bénéficié d’une promotion, ce qui témoigne de la confiance qui lui était accordée par son employeur, supposant une probité accrue.
La circonstance que la société ait gardé le silence pendant vingt-quatre ans sur les manquements de son travailleur ne traduit pas nécessairement dans son chef la volonté de renoncer à son droit d’exiger pour le futur le respect des obligations contractuelles et encore moins que les parties se seraient accordées pour exempter l’intéressé de l’obligation de tenir son employeur dûment informé de chaque prolongation de son incapacité de travail. Pour autant, la cour ne juge pas, dans les circonstances de la cause, que le manquement continu, sur la même période de 24 ans, d’informer la société des prolongations successives de son incapacité de travail, conjugué à l’absence de réaction à des mises en demeure répétées, manifesterait dans son chef une volonté définitive et non équivoque de mettre fin à son contrat de travail.
Pour la cour, l’employeur ne pouvait, en l’espèce, sérieusement déduire de l’absence de réaction du travailleur à ses mises en demeure successives qu’il manifestait de la sorte sa volonté de rompre le contrat, alors qu’il savait pertinemment que l’intéressé n’avait pas eu connaissance de la teneur de ces mises en demeure et que son silence était donc insignifiant. Dans ces circonstances précises, le soin pris par l’employeur à faire précéder de plusieurs mises en demeure le constat d’un abandon volontaire de travail a été privé d’effet utile, dès lors que le travailleur n’a jamais pris connaissance des envois. Et la cour d’ajouter que, s’il est vrai que des négligences peuvent lui être reprochées tant au niveau du suivi de sa correspondance que de l’information de son employeur quant à son lieu de résidence provisoire et s’il est tout aussi exact que ce sont ces négligences qui l’ont empêché de prendre connaissance des mises en demeure adressées par l’employeur, cela ne conduit pas pour autant au constat d’une volonté de rupture dans son chef. Tout au plus l’employeur peut-il lui faire grief d’un manquement supplémentaire à ses obligations contractuelles, lequel n’est pas plus révélateur en soi de la volonté de mettre fin au contrat.
Le choix d’une partie au contrat de travail d’imputer à l’autre partie un acte équipollent à rupture doit être mûrement réfléchi, pesé et sous-pesé à la lumière de l’ensemble des circonstances particulières de la cause. L’émergence d’un doute doit inciter à rechercher une solution plus sûre. La moindre erreur d’appréciation se retournera inexorablement vers celui qui s’est prévalu de l’acte équipollent à rupture. Ce dernier doit surtout se garder de penser que l’observance d’un certain formalisme d’usage lui procurera un sauve-conduit le mettant infailliblement à l’abri de toute surprise. Ainsi, la mise en demeure du cocontractant défaillant constitue certes une précaution avisée pour celui qui veut invoquer l’acte équipollent à rupture, mais ce n’est pas une fin en soi. L’intérêt de la démarche ne tient pas à ce qu’elle est, mais à ce qu’elle tend à révéler.
L’employeur qui invoque à tort un acte équipollent à rupture dans le chef du travailleur, dès lors qu’il se révèle être en ce cas lui-même l’auteur de la rupture, procède nécessairement à un licenciement irrégulier sans préavis ni indemnité. Son comportement équivalant dans cette hypothèse à un licenciement, la CCT n° 109 s’applique.
Si l’employeur dispose du pouvoir de proposer une modification du contrat de travail, le refus d’une travailleuse de cette modification, consistant en la conversion de son régime de travail à temps plein en un régime de travail à temps partiel, ne constitue pas un acte d’insubordination susceptible de justifier un licenciement pour motif grave. L’employeur qui souhaite modifier de façon substantielle le régime de travail ne peut, en effet, imposer cette modification à la travailleuse, de sorte que le refus de celle-ci d’accepter cette modification n’est pas fautif. À supposer même que l’intéressée eut réagi avec émotion – voire même avec colère – lorsque cette proposition lui a été soumise, une telle réaction, exprimée lors d’un entretien avec la DRH de l’entreprise et à laquelle il n’est pas établi qu’elle aurait donné une publicité malveillante en interne ou auprès de tiers, ne saurait justifier à elle seule un licenciement pour motif grave.
(Décision commentée)
Au vu de l’interdiction de cumul visée à l’article 9, § 3, de la C.C.T. n° 109, la demande de paiement d’une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable est non fondée lorsqu’il a été fait droit la demande de paiement de l’indemnité de protection de la femme enceinte visée à l’article 40 de la loi du 16 mars 1971.
L’exercice d’une autre activité par le travailleur en incapacité de travail ne contredit pas nécessairement la réalité de cette incapacité, particulièrement lorsque, comme en l’espèce, cette activité était clairement comprise dans l’activité pour laquelle le travailleur avait reçu une autorisation du médecin-conseil de sa mutualité (étant la location de voiture avec chauffeur). Par ailleurs, la seule circonstance que l’intéressé était apte à assumer les tâches d’un travail de chauffeur de taxi à mi-temps, qui plus est avec un véhicule dont nul ne dit s’il était automatique ou avec boîte de vitesse, n’induit pas ipso facto qu’il était alors aussi apte, à plein temps, à accomplir les tâches propres à sa fonction en cuisine auprès de son employeur, lequel ne dispose d’aucune compétence dans le domaine médical et ne dépose en l’espèce aucune pièce médicale au soutien de sa thèse.
L’indemnité due en réparation du préjudice causé par l’employeur qui aurait abusé de son droit de licencier constitue bel et bien une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la CCT n° 109 ; pareille indemnité (i) n’en est pas moins « due à l’occasion de la fin du contrat » par la circonstance qu’elle répare le préjudice causé par une faute commise par l’employeur à l’occasion de la rupture et donc de la fin du contrat ou par le fait que l’employeur ne serait pas tenu de la verser spontanément et (ii) ne peut être assimilée à aucune des quatre indemnités pour lesquelles le cumul serait permis en application dudit article. Il s’ensuit que l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable sollicitée par un travailleur devrait s’effacer devant l’indemnité qu’il obtiendrait en raison d’un abus de droit de licencier. Cette approche se concilie parfaitement avec la hiérarchie des sources des obligations dans les relations de travail entre employeurs et travailleurs telle que fixée par l’article 51 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires.
Que l’indemnité pour licenciement abusif puisse sanctionner un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise aussi un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier une autre lecture de l’article 9, § 3, précité, dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation. De ce point de vue, il ne peut non plus être tiré aucune déduction quant à la règle anti-cumul énoncée audit article du fait que le commentaire de l’article 8 de la CCT n°109 souligne que le contrôle du caractère déraisonnable du licenciement « ne porte pas sur les circonstances du licenciement », mais sur la question de savoir si les motifs ont ou non un lien avec l’un des trois motifs autorisés.
C’est en définitive au travailleur qu’il appartient d’articuler ses demandes au mieux de ses intérêts en tenant compte de la règle énoncée par l’article 9, § 3, susdit. L’idée d’un choix à assumer est aussi entretenue par le commentaire de cet article, qui indique précisément qu’en « lieu et place de la sanction visée par le présent article, il reste loisible au travailleur de demander la réparation de son dommage réel, conformément aux dispositions du Code civil ».
La restitution du véhicule de société en bon état est une obligation née du contrat de travail. Le fait que ce véhicule soit endommagé ou ne soit pas restitué relève de la responsabilité contractuelle du travailleur. L’action en dommages et intérêts en vue d’obtenir la réparation de dommages causés au véhicule n’aurait pas pu naître sans l’existence du contrat. Il s’agit donc d’une action en responsabilité contractuelle, soumise au délai de prescription annale de l’article 15 L.C.T. La circonstance que l’accident ait eu lieu après la fin du contrat n’est pas de nature à conduire à une autre conclusion, ce fait ne modifiant pas la cause pour laquelle le travailleur disposait d’un véhicule : il s’agissait bien d’un véhicule de société mis à sa disposition dans le cadre de l’exécution de son contrat. Dès lors que l’usage privé dudit véhicule est expressément autorisé et que cet usage privé fait ainsi partie de la convention avenue entre parties dans le cadre de leurs relations de travail, est, de même, sans incidence le fait que l’accident soit intervenu lors de cette utilisation privée.
(Décision commentée)
L’attitude consistant à diffuser auprès des professeurs d’une école privée des différends personnels entre une sous-directrice d’école et son employeur constitue un acte d’insubordination et déloyal par lequel la travailleuse, investie d’une fonction dirigeante et de coordination au sein de l’école, décrédibilise ouvertement son employeur auprès de ses employés et provoque un climat de suspicion au sein de l’école.
Cette attitude fautive est d’autant plus grave qu’elle a lieu dans une école et que l’intéressée ne pouvait ignorer que ses communications étaient de nature à perturber des enseignants, des parents et, surtout, des élèves mineurs amenés à présenter des examens importants dans les semaines suivantes.
Le caractère répétitif des communications constitue également une circonstance aggravante.
Ce faisant, la travailleuse a commis une faute grave qui a rompu immédiatement et irrévocablement la confiance que son employeur devait pouvoir avoir en elle. La fonction de sous-direction et de coordination exercée par elle est un élément déterminant de l’appréciation de la gravité de cette faute.
Dès lors qu’un horaire alternatif a été appliqué pendant plus de sept mois, un employeur ne peut s’appuyer sur le non-respect d’un nouvel horaire, imposé pendant le délai de préavis et à propos duquel le travailleur a fait savoir, à plusieurs reprises, qu’il lui était impossible de le respecter tous les jours de la semaine, pour considérer que la collaboration professionnelle deviendrait immédiatement et définitivement impossible, ce même si ce nouvel horaire correspond à un horaire précédemment appliqué. Il y va, dans son chef, d’un manquement à son obligation d’exécution de bonne foi, laquelle subsiste pendant l’écoulement du délai de préavis.
Dès lors que le document a été établi dans les deux langues conformément au prescrit des lois coordonnées, ne le rend pas caduc le seul fait que, dans la version néerlandaise, date et lieu soient renseignés en français.
Des arguments relatifs à la violation du secret de l’information pénale et de l’instruction ne sont pas pertinents dès lors que seule une procédure administrative a été entamée à l’encontre d’un employé communal pour troubles à l’ordre public, sans qu’aucune procédure judiciaire n’ait été envisagée ni, a fortiori, entamée, auquel cas la décision que prend l’autorité communale une fois informée des faits litigieux ne viole ni la présomption d’innocence ni le droit de cet agent à un procès équitable. La circonstance que le fonctionnaire sanctionnateur ait finalement classé sans suite le dossier relatif à l’instruction administrative ne prive, quant à elle, pas cette dernière de son droit de licencier l’intéressé, ce d’autant que la faute retenue à son encontre est d’avoir commis une violation du statut du personnel administratif et non d’avoir écopé d’une amende administrative.
Raisonner autrement conduirait en réalité à exclure la possibilité pour un employeur de procéder à un licenciement pour tout fait lié au comportement du travailleur qui n’aurait pas abouti à une sanction judiciaire, cette restriction n’étant, évidemment, pas admissible dès lors que la très grande majorité des motifs de licenciement sont étrangers à toute infraction pénale ou administrative.
Eu égard à ses évaluations positives dans leur ensemble, plus spécialement concernant le development business, il est contradictoire de licencier un travailleur en lui reprochant de n’avoir pas développé son portefeuille de clients en n’y ajoutant pas de nouveaux prospects, ce d’autant que, lors de sa dernière année de travail, il avait été sollicité pour représenter la société lors de négociations commerciales difficiles qui ne relevaient pas strictement de ses attributions.
La sanction prévue par la loi pour l’employeur qui fait une offre de reclassement non conforme à ses exigences ou qui, après avoir fait une offre de reclassement conforme, ne la met pas effectivement en œuvre, consiste en ce que le travailleur recouvre le droit à l’indemnité compensatoire de préavis correspondant à l’entièreté du délai de préavis (L. du 5 sept. 2001, art. 11/11). Dans ces cas, l’employeur ne peut donc pas déduire quatre semaines de la période couverte par l’indemnité compensatoire.
N’a pas manifesté tacitement son accord sur la modification du système de commissionnement le travailleur qui, s’il a continué à travailler pendant trois ans après cette modification, n’a, durant ce temps, cessé de contester celle-ci, en particulier la suppression de sa commission trimestrielle, de manière claire et répétée, le fait qu’il n’ait pas agi plus tôt en justice pouvant s’expliquer par de nombreuses raisons, dont la crainte de perdre son emploi avec probabilité élevée de ne pas en retrouver un autre eu égard à son âge.
La faute commise par un travailleur qui s’en prend physiquement à un de ses collègues ne présente pas le caractère d’un motif grave lorsque ce dernier n’a pas estimé utile de s’en plaindre pendant deux ans et trois mois et, dans le cadre de la plainte qu’il a déposée alors qu’il ne travaille plus pour l’entreprise, a signalé qu’il n’avait pas été blessé et n’avait pas vu un médecin. Ce long délai tend à fortement relativiser l’impact qu’a pu avoir sur lui le comportement de son agresseur. Le fait que leur employeur n’ait pas été mis au courant des faits pendant toute cette période contredit, par ailleurs, que ce comportement violent ait réellement nui à l’image de l’entreprise dont les clients, éventuels témoins de la scène, auraient pu être choqués et se plaindre à l’exploitant, ce qui ne fut pas le cas.
Porte une responsabilité certaine dans le fait que son assistante n’ait pu accomplir son travail dans des conditions convenables au point de vue de sa santé et de sa sécurité, la gérante d’une S.P.R.L. qui a laissé sa relation privée avec son compagnon déborder dans la sphère professionnelle et a tardé à porter plainte contre lui du chef de coups et blessures à son encontre et de menaces verbales (dont certaines proférées à l’endroit de cette assistante tant au sein des locaux professionnels que sur le trottoir face à ceux-ci). Il y a là un manquement suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire du contrat de l’intéressée aux torts exclusifs de l’employeur.
Il est incontestable qu’en s’abstenant volontairement de réserver suite à une entrevue au terme de laquelle il avait été décidé de rompre le contrat de travail avenu entre les parties, un employeur se rend coupable d’un comportement fautif constitutif d’une violation de l’article 16 LCT en manquant des plus élémentaires égards qu’il devait à son cocontractant dès lors qu’il a été impossible à ce dernier de se projeter vers un nouvel avenir professionnel.
Il en est d’autant plus ainsi que, non content de laisser le travailleur sans information précise sur la suite concrète qu’il entendait réserver à leurs relations contractuelles, il n’a pas hésité, après que l’intéressé eut repris le travail, à persévérer dans cette conduite fautive en s’abstenant délibérément, au motif qu’il cherchait à créer une fonction nouvelle, de lui confier la moindre tâche à effectuer, prenant ainsi le contre-pied de la décision qui avait été prise de se séparer de lui.
En laissant ce dernier sans aucune instruction précise sur la teneur de leurs relations contractuelles en dépit de cette décision de rupture, il a manqué de la plus élémentaire considération à l’égard du travailleur, situation qui a engendré une dégradation de son état de santé pour avoir été privé de toute perspective professionnelle.
Il est exclu de raisonner par analogie avec la C.C.T. n° 109 pour apprécier si le licenciement signifié par une autorité publique à un de ses travailleurs présente un caractère abusif en s’inspirant des critères définis par l’article 8 de celle-ci, qui ont trait au licenciement manifestement déraisonnable des travailleurs du secteur privé.
(Décision commentée)
L’article 1184, al. 3, de l’ancien Code civil ne fait pas obstacle à ce qu’en cas d’inexécution suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire, le créancier décide à ses risques et périls de résoudre le contrat par une notification au débiteur. Cet acte unilatéral de résolution produit effet tant qu’il n’a pas été déclaré inefficace par un juge.
Une telle analyse excédant son pouvoir de contrôle marginal, il n’appartient pas au juge d’apprécier si les investissements matériels ou financiers réalisés par la société étaient nécessaires et compatibles avec les difficultés économiques et financières qu’elle rencontre. Celles-ci étant établies et dès lors qu’est constatée la suppression de postes (de même que l’absence de réengagements significatifs avant un an), les nécessités de fonctionnement sont avérées.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Verviers), 22 février 2023, R.G. 22/105/A - ci-dessous.
Il ne peut être remédié à l’absence de précision des motifs du licenciement pour motif grave par voie de témoignages, d’autant si un long délai s’est écoulé depuis les faits qui ont amené au licenciement.
En décidant de déplacer son domicile à l’étranger sans avoir égard aux intérêts de l’entreprise et sans aucune discussion ou négociation préalable, le travailleur place son employeur devant le fait accompli de la délocalisation de son lieu de travail qui s’ensuit et commet ainsi un manquement caractérisé aux exigences les plus élémentaires de respect et d’égards mutuels qui doivent présider aux relations de travail. Un comportement à ce point désinvolte constitue une faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail.
Le fait pour un chauffeur occupé par une entreprise de location de limousines ou autres véhicules de standing d’avoir un accident, en pleine circulation, alors qu’il transporte des clients ne constitue aucunement un motif grave, ce quand bien même il aurait reçu un avertissement antérieur pour avoir déjà endommagé un véhicule de l’entreprise et aurait contraint celle-ci à envoyer un autre chauffeur, avec un autre véhicule, pour achever une mission que les clients transportés estimaient ne pouvoir poursuivre dans un véhicule légèrement endommagé, qui, à leurs yeux, ne correspondait plus aux critères d’un véhicule de représentation.
La question est débattue de savoir si, lorsque la créance porte sur une somme d’argent, l’exigence énoncée à l’article 2244, § 2, alinéa 4, 4°, de l’ancien Code civil, de la mention de la « justification », de manière « complète et explicite », de « tous les montants réclamés au débiteur, y compris les dommages et intérêts et les intérêts de retard », peut se satisfaire de l’indication d’un montant provisionnel. Il faudrait, pour certains, que le débiteur puisse connaître non seulement le montant qui lui est réclamé, mais encore les raisons pour lesquelles ce montant serait dû et jusqu’aux calculs qui ont permis au créancier de le déterminer, avec pour conséquence que l’effet interruptif de la mise en demeure ad hoc ne s’étendra à aucune réclamation complémentaire implicite ; d’autres, plus souplement, semblent admettre que cette condition ne signifie pas qu’un montant précis doit être indiqué et que l’indication d’une indemnité exprimée en semaines peut suffire.
Si la première solution a le mérite de s’inscrire dans la droite ligne du respect d’un formalisme strict que paraît appuyer l’enseignement de la Cour de cassation (arrêt du 15 juin 2020, n° S.19.0055.N, ci-dessus) et qui trouve même écho dans les travaux préparatoires, l’autre voie proposée semble pouvoir s’autoriser d’une approche plus téléologique et systémique mise en exergue par la Cour constitutionnelle (arrêt n° 44/2021 du 11 mars 2021, dont l’enseignement paraît pouvoir être transposé à l’espèce) et qui se nourrit également des travaux préparatoires.
Vu cette dualité, la cour estime devoir interroger la Cour constitutionnelle sur la question de savoir si la « justification de tous les montants réclamés » requise par l’article précité, (i) interprétée comme exigeant de voir chiffrer avec précision la créance qui porte sur une somme d’argent, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, en cela qu’un créancier d’une somme d’argent qui se limiterait à ne mentionner, dans sa mise en demeure, qu’une créance chiffrée provisoirement à 1 euro ne remplirait pas la condition posée, avec pour suite que l’acte serait dépourvu d’effet interruptif de prescription, alors qu’un autre créancier, détenteur d’une même créance, qui en réclamerait le paiement en justice par citation ou par une requête contradictoire et qui se limiterait à n’y mentionner qu’une créance chiffrée provisoirement à 1 euro bénéficierait pleinement de l’effet interruptif de prescription attaché à l’acte introductif d’instance par l’article 2244, § 1er, ou (ii) est conforme aux articles 10 et 11 de la Constitution dans l’interprétation selon laquelle elle ne pose pas l’exigence de voir chiffrer avec précision la créance qui porte sur une somme d’argent et s’accommode de la mention d’une créance chiffrée provisoirement à 1 euro.
Suivant l’article 14 de la loi du 19 mars 1991, la réintégration doit être demandée soit par le travailleur, soit par l’organisation qui a présenté sa candidature. Comme la plupart des dispositions de cette loi, instituée dans l’intérêt général, cet article relève de l’ordre public et doit donc être interprété strictement. Il est dès lors exclu que cette demande soit introduite par le mandataire (soit le représentant de la centrale professionnelle) que cette organisation a désigné pour le dépôt des listes de candidats, mandat limité à cet acte et, éventuellement, aux opérations électorales.
Apparaît comme dépourvue de motif suffisant au sens de l’article 101 de la loi de redressement du 22 janvier 1985 la décision de licenciement intervenue, près de deux mois après que la travailleuse avait manifesté quelques réticences au cours de discussions à propos de la réorganisation du département au sein duquel elle était occupée, sans fait nouveau lui imputable et sans lui avoir donné l’occasion de participer à la recherche d’une solution constructive.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 18 novembre 2022, R.G. 16/7.065/A ci-dessous.
Lorsqu’il a décidé d’agir sur la base de la CCT n° 109, compte tenu de l’interdiction de cumul énoncée par son article 9, le travailleur licencié ne peut invoquer la base civiliste de l’abus de droit pour solliciter des dommages et intérêts qu’à la condition que la faute invoquée ne concerne pas les motifs du licenciement, mais qu’elle ait trait aux circonstances dans lesquelles il a été donné, ces circonstances n’étant pas visées par ladite CCT.
Adopter à plusieurs reprises, dans le cadre professionnel, des comportements indésirables à caractère sexuel envers des membres du personnel, collègues ou subordonnées, constitue un motif grave. Il y va d’un manquement à l’obligation d’assurer et d’observer le respect des convenances pendant l’exécution du contrat, dont la gravité n’est pas atténuée par l’existence de relations intimes entretenues avec certaines des victimes de ces comportements, dès lors que ces derniers n’étaient pas consentis ; la position hiérarchique élevée de l’intéressé au sein de la société, qui l’obligeait à observer une attitude exemplaire, constitue en revanche une circonstance aggravante : l’autorité implique, en effet, d’autant plus de faire preuve d’exemplarité qu’elle est susceptible d’ouvrir la porte à des formes plus ou moins détournées d’abus.
Selon l’article 11/3 de la loi, le droit au reclassement professionnel n’est pas accordé lorsque le travailleur est licencié pour motif grave. Le fait que le licenciement pour motif grave n’ait pas été validé ne donne toutefois pas automatiquement droit à des dommages et intérêts pour absence de reclassement professionnel.
Il résulte de la lecture l’article 35, alinéas 5 à 7, que le congé pour motif grave n’est, en tant que tel, pas soumis à des conditions de forme. Seules sont prévues des formalités pour la notification des motifs qui justifient le congé immédiat. Le congé pour motif grave peut, quant à lui, être donné verbalement.
Le fait qu’une ancienneté conventionnelle remontant avant le 1er janvier 2014 ait été octroyée est sans incidence sur la prise de cours du contrat. Elle vise le calcul de l’ancienneté qui, pour déterminer le délai de préavis, prend cours, non pas à la date de conclusion du contrat mais à une date antérieure, sans modifier le mode de calcul de celui-ci, qui est prévu par la loi du 26 décembre 2013 sur la base de l’unique critère de l’ancienneté pour les contrats conclus à partir du 1er janvier 2014.
Un licenciement fondé à la légère sur des faits graves mais non démontrés qui mettent en cause la probité du travailleur justifie le paiement d’une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable égale à dix-sept semaines de rémunération.
Il y a violence morale viciant le consentement du travailleur dès lors que celui-ci a été contraint de participer, dans l’ignorance du motif de sa convocation – ce qui implique, dans son chef, une absence de possibilité de préparation de sa défense –, à un entretien improvisé au terme duquel il a été amené à signer, sans se voir donner le temps de la réflexion, ni la possibilité de se faire assister, un document préétabli actant une rupture d’un commun accord avec renonciation à tous droits. Ce faisant, l’employeur a exercé à son égard une violence dont le caractère injuste ou illicite procède des conditions dans lesquelles il a soumis la convention litigieuse à sa signature, entraînant ainsi la nullité de l’accord obtenu, ce qui le rend responsable de la rupture du contrat et débiteur d’une indemnité compensatoire de préavis.
En renvoyant à une formulation vague, floue et abstraite (en l’espèce manque flagrant de motivation et d’implication dans les fonctions confiées), l’employeur n’identifie pas clairement les motifs qui devraient satisfaire aux exigences de l’article 101 de la loi de redressement du 22 janvier 1985 et n’apporte pas la preuve de l’existence de motifs étrangers à la diminution des prestations du fait de l’exercice par le travailleur de son droit au congé parental.
S’apparente à une quittance pour solde de tout compte la clause d’une convention transactionnelle disposant que « moyennant l’exécution de la convention, le travailleur marque son accord exprès pour que la présente convention vaille pour solde de tout compte et déclare renoncer à toute contestation ultérieure (arriérés de salaires, conditions de travail, etc.) à la date de signature de celle-ci ». Elle fait apparaître une renonciation claire à réclamer des arriérés de salaires ou des éléments relatifs aux conditions de travail. Le « etc. » pourrait éventuellement être interprété comme visant le délai de préavis faisant l’objet d’une dispense de prestation. En revanche, à défaut de mention dans cette convention que le travailleur aurait fait état de sa volonté de renoncer à réclamer une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable et/ou une indemnité pour licenciement abusif et qu’elle avait aussi pour objet de trancher ce genre de contestation, on peut difficilement conclure à l’irrecevabilité de ses demandes relativement à ces droits.
On rappelle en effet (i) que les renonciations à un droit ne se présument pas, sont de stricte interprétation et ne peuvent se déduire que de faits non susceptibles d’une autre interprétation et (ii) que, en vertu de l’article 2048 du Code civil, la renonciation qui est faite dans une transaction à tous droits, actions et prétentions, ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu.
Commet un motif grave rendant impossible la poursuite de la collaboration entre les parties le travailleur qui a exercé une activité professionnelle identique, ou à tout le moins similaire, à celle qu’il exerçait pour le compte de son employeur, pendant les horaires normaux de travail pour son employeur, alors qu’il était censé être en incapacité de travail, et donc incapable d’exercer des prestations dans le cadre de son contrat de travail, et percevait un salaire garanti à charge de son employeur.
(Décision commentée)
Le caractère peu détaillé des motifs invoqués (étant, en l’espèce, des « actes répétés d’agression et de menaces verbales et écrites » constituant un « comportement inadéquat sur une longue durée de temps ») peut être pallié en annexant à la lettre de congé des extraits d’e-mails échangés, via leur adresse professionnelle, entre l’auteur de ces actes et leur destinataire, qui permettent, eux, à la fois, de déterminer le (type de) contenu incriminé et, ces e-mails étant tous datés, de les situer dans le temps, en manière telle que le travailleur ne pouvait ignorer ce qui lui était reproché.
(Décision commentée)
Dès lors que le travailleur lui-même a sollicité une seconde entrevue, il ne peut invoquer le fait que, en lui accordant ce nouvel entretien, son employeur a artificiellement tenté de postposer la prise de cours du délai de notification du congé pour motif grave jusqu’à la date de celui-ci, puisque, ce faisant, l’intéressé n’a fait qu’accéder à sa demande, lui permettant ainsi d’apporter toute précision ou élément complémentaire utile. Dans ces circonstances, à supposer même que ce second entretien n’ait apporté aucun élément nouveau de connaissance des faits qui seraient invoqués au titre de motif grave, son employeur ne pouvait le deviner avant cette nouvelle audition, qui ne constitue donc pas une mesure d’instruction d’emblée inutile, mais aurait, au contraire, pu lui permettre de disposer de tous les éléments nécessaires à asseoir sa conviction.
(Décision commentée)
Le délai écoulé entre le jour du dépôt d’une plainte par la victime de faits de harcèlement et la date de la notification, à l’auteur de ces faits, de son congé pour motif grave est sans incidence quant à la détermination du moment auquel l’employeur a eu une connaissance effective des faits, seul point de départ du délai de notification du motif grave.
De même, la connaissance (partielle) des faits que pouvaient avoir eue d’autres travailleurs de l’entreprise (dont la personne ayant mené des tentatives de conciliation entre les parties) au cours des années précédentes, pas plus que les dates auxquelles les messages litigieux ont été envoyés, n’impliquent, en soi, que la personne ayant le pouvoir de licencier en aurait eu connaissance à une date antérieure de plus de trois jours ouvrables à celle de la notification du congé.
Il peut difficilement être question de rupture de confiance dès lors que le système frauduleux auquel le travailleur a reconnu avoir participé a été mis en place par les dirigeants de l’entreprise.
La personne compétente pour donner congé peut difficilement reprocher à un travailleur d’avoir agi selon ses instructions, quand bien même elles seraient illégales. La preuve doit donc être rapportée que la rupture est étrangère aux faits reprochés à l’intéressé.
Le fichier de clientèle d’une entreprise n’est pas strictement comparable à un secret de fabrication ou à un procédé technique, dans la mesure où il n’est pas exclu ─ et même hautement probable ─ que des clients d’un courtier en assurances se retrouvent également dans les bases de données d’autres courtiers en raison de contrats passés avec d’autres compagnies, antérieurement ou simultanément au contrat en cause. La clientèle étant une res nullius ─ un bien qui n’appartient à personne et qui est susceptible d’être convoité par n’importe qui ─, il ne suffit donc pas de démontrer que son ancien travailleur a été contacté par ou a contacté un(e) de ses client(e)s pour conclure à l’utilisation illicite d’un secret d’affaires.
Le fait pour un travailleur d’adopter une attitude verbale et non-verbale grossière et menaçante à l’égard d’un autre conducteur alors qu’il est au volant d’un véhicule floqué à l’enseigne de la société et représente dès lors celle-ci au regard des tiers ruine immédiatement et définitivement la confiance envers celui-ci dès lors qu’il porte atteinte de manière sérieuse (et, en l’espèce, répétée) à l’image de marque et à la réputation de son employeur.
La C.C.T. conclue le 6 décembre 2010 au sein de la C.P. 306 relativement à la sécurité d’emploi met à charge de la société différentes obligations dont celles (i) d’informer la délégation syndicale ou la délégation du personnel de l’existence des reproches visés à l’article 4, a), susceptibles d’être invoqués ultérieurement à l’appui d’une procédure de licenciement et (ii) d’organiser, entre le travailleur (éventuellement assisté par un ou deux délégués syndicaux) et sa hiérarchie ainsi qu’une personne en charge des ressources humaines, un entretien au cours duquel les éléments reprochés transcrits dans la lettre d’avertissement seront abordés et des points d’amélioration en relation avec les résultats attendus seront convenus (art. 4bis, § 1er, 2°, a, b et c).
Les articles 4 et 4bis contiennent des obligations distinctes, dont le non-respect des unes ou des autres entraîne la débition de l’indemnité de sécurité d’emploi. Le fait que la C.C.T. ne prévoit pas que l’avertissement soit précédé d’un certain nombre d’écrits ne le contredit pas : d’une part, le texte de l’article 4, a), n’oblige pas que les reproches soient faits par écrit, en manière telle qu’une information verbale donnée au travailleur suffit ; d’autre part, il n’est pas exclu qu’en présence d’éléments de reproches tout récents, un employeur entame la procédure décrite à l’article 4bis sans, par hypothèse, s’être retrouvé en présence d’éléments de comportement antérieurs ayant nécessité le respect de l’article 4 de la C.C.T.
Quant à l’entretien, il ne peut pas être concomitant à l’envoi ou la remise de l’avertissement écrit prescrit au § 1er, 1°, de ce même article.
Cette conclusion n’est pas remise en question par la circonstance que la délégation syndicale ne se serait jamais plainte auprès de l’employeur du non-respect de la procédure ou de la motivation du licenciement, comme le prévoit l’article 4, d), de la C.C.T.
(Décision commentée)
Les motifs de licenciement doivent être totalement étrangers à l’état de grossesse. En conséquence, le licenciement qui interviendrait pour des motifs pour partie liés à l’état de grossesse et pour partie étrangers à cet état est interdit par la loi.
Des reproches tels que « un manque de fiabilité » ou encore le fait de ne pas avoir « adhéré à l’esprit d’équipe » constituent des allégations subjectives, la cour relevant encore que s’il y a eu des absences « inopinées », il s’agit de périodes d’incapacité de travail, pouvant elles-mêmes être imprévisibles dans le chef de l’intéressée, celles-ci étant liées à la grossesse.
A partir du moment où le travailleur a refusé de signer l’avenant réduisant la durée hebdomadaire de ses prestations et a réclamé le respect de ses heures contractuelles (ou, si cela s’avérait impossible, sa mise en chômage économique), le fait qu’il ait ultérieurement continué à effectuer ses prestations de travail, sans acter un acte équipollent à rupture dans le chef de son employeur, ne constitue pas une preuve suffisante de ce qu’il aurait finalement marqué son accord sur cette réduction et renoncé à réclamer la réparation du dommage en lien de causalité avec la faute liée à cette diminution.
Un travailleur a tout à fait le droit de refuser, sans avoir à se justifier, la modification d’un des éléments essentiels de son contrat proposée par son employeur en conséquence de la réorganisation de ses services. Ce dernier, confronté au refus persistant de l’intéressé d’accepter aucune des solutions envisagées pour qu’il puisse rester à son service, peut, pour sa part, estimer que son attitude rend impossible la poursuite des relations contractuelles et demander la résolution judiciaire de son contrat.
Chaque personne disposant de la liberté thérapeutique, le fait qu’un travailleur remette un certificat n’émanant pas de son médecin traitant ne permet pas de le remettre en cause. Si, pour ce simple motif, l’employeur suspecte qu’il s’agit là d’un certificat de complaisance, il doit faire contrôler la réalité de l’incapacité de travail par son médecin contrôleur.
Lorsque les nécessités du fonctionnement de l’entreprise sont invoquées, le juge n’exerce qu’un contrôle marginal sur le caractère nécessaire du licenciement au regard du fonctionnement de l’entreprise. Il doit cependant vérifier (i) si les faits invoqués sont établis, (ii) s’il existe un rapport entre ces faits et le fonctionnement de l’entreprise et (iii) s’il existe un lien causal entre ces faits et le licenciement.
Le principe général de bonne administration audi alteram partem impose à l’autorité publique d’entendre préalablement la personne à l’égard de laquelle est envisagée une mesure grave pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement. Son respect doit permettre à l’intéressé de faire valoir utilement son point de vue sur les faits en question et sur la mesure envisagée. Cela implique qu’il ait été préalablement informé de ces faits, qu’il ait eu accès au dossier, qu’il se voie accorder un délai raisonnable pour préparer sa défense et qu’il puisse être assisté du conseil de son choix. Si tant est que ces préalables aient été respectés, ce n’est pas parce que l’employeur n’a finalement pas suivi la position du travailleur (visant à conserver son emploi) que l’audition était de « pure forme » et qu’elle n’a pas eu d’effet utile.
Commet une faute constitutive de motif grave au sens de l’article 35 L.C.T. ─ et rend, de ce fait, définitivement impossible la poursuite des relations de travail ─ la travailleuse, œuvrant au sein d’une crèche, qui trafique le registre de présence de son enfant pour bénéficier d’un tarif plus avantageux et offre à d’autres collègues de participer à ce système frauduleux. Son ancienneté de service, tout comme la qualité de son travail et la participation éventuelle d’autres travailleurs à ce trafic, ne constituent, bien évidemment, pas des éléments de nature à amoindrir sa responsabilité en disqualifiant la faute grave en simple comportement déviant dépourvu de toute gravité alors même que l’honnêteté constitue une valeur essentielle qui doit présider aux relations de travail nouées entre un employeur et son personnel.
Un travailleur clairement investi d’un poste de confiance en sa qualité de pharmacien titulaire d’une officine et de chef d’équipe trahit manifestement la confiance que la société devait avoir en lui dès lors qu’il adopte un comportement colérique, voire agressif, envers ses assistantes auxquelles il se permet, en outre, de tenir des propos grossiers et outrageants.
Une explication concise peut constituer un aperçu des motifs à la base du licenciement et permettre au travailleur d’en apprécier le caractère raisonnable.
L’examen des motifs doit se faire en plusieurs étapes, impliquant de vérifier (i) la réalité des motifs invoqués, (ii) leur adéquation à l’une des trois catégories prévues par la CCT n° 109, (iii) le fait que ces motifs constituent la cause réelle du licenciement et (iv) dans l’affirmative, si la décision de licencier sur leur base aurait été prise par un employeur normal et prudent. Il s’agit d’un contrôle strict, non marginal sinon pour ce qui est, lorsqu’elles sont invoquées, de l’examen des nécessités de fonctionnement de l’entreprise.
Le fait pour un travailleur d’avoir massé, contre la volonté de cette dernière, les épaules d’une personne de sexe féminin porteuse d’un handicap sur laquelle il disposait d’un pouvoir d’autorité, constitue une faute grave de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible toute poursuite de la collaboration professionnelle.
Pour apprécier si la preuve est rapportée de ce que le licenciement contesté n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable, il n’y a pas lieu de se demander si un autre employeur placé dans les mêmes circonstances aurait nécessairement procédé au licenciement, mais si aucun employeur normal et raisonnable n’y aurait procédé.
Lorsqu’aucun horaire de travail n’a été convenu entre parties au motif que le travailleur occupait un poste de direction ou de confiance, il ne peut, en soi, lui être fait grief d’avoir encodé dans un système d’enregistrement du temps de travail des prestations qui n’auraient pas correspondu aux heures réellement prestées, cet encodage d’un horaire, théorique par définition, ne pouvant être considéré comme une tentative de frauder un horaire inexistant, mais pouvant s’expliquer par d’autres motifs tels que l’indication de jours de congé ou d’absence.
Un employeur reste en défaut d’établir un motif suffisant dont la nature et l’origine seraient étrangères à la réduction des prestations de travail du fait de l’exercice du droit au congé parental, lorsqu’il n’avance, à l’appui du licenciement, aucun autre élément qu’un motif grave dont la matérialité du fait n’a pas été reconnue.
À partir du moment où la car policy de la société ne reprend pas l’usage occasionnel de ses véhicules au nombre des limites posées à leur utilisation, on ne peut conclure au motif grave dans le chef d’un travailleur qui, au cours d’une période limitée (7 mois) utilise un véhicule de l’entreprise pour laquelle il travaille afin d’effectuer quelques livraisons (5 au total) de biens commandés par des clients du webshop de son épouse.
Dès lors que les actions identifiées sur les images vidéos en sa possession étaient susceptibles d’être expliquées par un autre motif qu’un vol et ne permettaient donc pas d’avoir une connaissance suffisante des faits, il ne peut être reproché à l’employeur d’avoir attendu, pour prendre position, de pouvoir prendre connaissance des éléments du dossier pénal ouvert à l’encontre du travailleur, en particulier de ses deux auditions au cours desquelles il s’est contredit et n’a pu donner aucune explication suffisante au fait qu’il avait glissé dans sa poche certains bons de récupération de matériel à restituer aux fournisseurs.
La référence à une réunion dont les notes n’ont, à son issue, pas été soumises à la contradiction du travailleur - à qui aucun avertissement n’a, en outre, été adressé - ne constitue pas plus un motif concret que le fait de soutenir que le travail n’était pas satisfaisant ou qu’il y a eu des rappels à l’ordre, ceci ne permettant pas d’identifier les faits reprochés.
Le fait de se servir d’un certificat médical de complaisance pour prendre quelques jours de vacances tout en étant payée par l’employeur via le salaire garanti et sans épuiser ses jours de congé, est une attitude déloyale, d’autant plus constitutive d’un manquement grave lorsqu’il s’agit d’une démarche concertée avec une collègue, ce que tend à établir la coïncidence de la même période d’incapacité sous couverture d’un certificat obtenu auprès du même médecin. Ce constat n’est pas remis en cause par le motif thérapeutique que l’une de ces travailleuses invoque ultérieurement en s’appuyant sur deux attestations complémentaires de son médecin traitant qui lui aurait conseillé à l’époque de voyager pour se changer les idées, alors que le but de cette démarche était simplement d’aller fêter, ensemble, leurs anniversaires respectifs à l’étranger.
Même si, pris isolément, aucun des faits reprochés au travailleur ne peut, à lui seul, justifier son licenciement pour motif grave, ces mêmes faits, pris dans leur ensemble, peuvent, au vu de la diversité de leur nature et de leur succession en un laps de temps très court (2 jours en l’espèce) et en considération aussi des manquements multiples qui ont émaillé la relation de travail ─ accompagnés, pour certains, d’avertissements ou de recadrements ─ rendre immédiatement et définitivement impossible toute poursuite de la relation de travail.
Si, en vertu des articles 32, 3°, et 35, alinéa 1er, de la loi du 3 juillet 1978, la résiliation du contrat par une partie met immédiatement fin à ce contrat, conformément au principe de l’autonomie de la volonté consacré par l’article 1134 de l’ancien Code civil, il reste toujours loisible aux parties de décider, d’un commun accord, de tenir le congé pour non avenu, de sorte que le contrat peut, alors, encore faire l’objet d’un autre mode de rupture. Ainsi, lorsque les parties usent de leur liberté de révoquer le congé d’un commun accord, le contrat reprend son cours et peut, par la suite, donner lieu à une rupture par un tout autre mode.
Concrètement, le constat d’un tel accord des parties doit correspondre à la manifestation d’une renonciation certaine de celles-ci à se prévaloir des effets du congé intervenu. Elle doit être interprétée de manière restrictive et ne peut se déduire que de faits et d’attitudes non susceptibles d’une autre interprétation.
Le délai de trois jours ouvrables peut, dans certains cas, ne commencer à courir qu’à partir de l’audition du travailleur. Ainsi, notamment, lorsque cette audition est nécessaire à l’employeur pour évaluer la gravité du motif grave invoqué et pouvoir prendre une décision en connaissance de cause. Le caractère de gravité de la faute pouvant ne ressortir que de cet entretien, il ne peut être déduit, de la circonstance que le licenciement est intervenu après un entretien au sujet de données dont l’employeur avait déjà connaissance, que, au moment de l’audition, il détenait déjà tous les éléments pour prendre sa décision.
(Décision commentée)
Lorsque, en application du statut du personnel, un employeur du secteur public est tenu d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement pour motif grave, le délai de 3 jours ouvrables ne commence à courir qu’à partir de cette audition. Il est à cet égard sans incidence que des membres du personnel dont aucun n’avait le pouvoir de licencier l’intéressé aient eu antérieurement connaissance des faits reprochés, ce qui implique, par corollaire, que le fait de l’avoir laissé travailler plusieurs jours après leur commission est également de nul effet. De même la circonstance que l’organe qualifié pour donner congé ait pu ou dû être informé de ces faits plus tôt ou que chacun de ses membres ait eu la possibilité de consulter le dossier les reprenant, cette seule possibilité n’établissant nullement une prise de connaissance effective de ceux-ci par tous.
Commet une faute grave de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle, le travailleur qui persiste à violer les règles s’imposant à lui en matière de conflit d’intérêt, alors que celles-ci lui avaient déjà été rappelées.
Lorsque les motifs invoqués ont été inventés de toutes pièces pour permettre un licenciement à moindre coût envisagé depuis plusieurs mois et que les deux premiers d’entre eux mettent en cause la probité du travailleur, on peut considérer que l’on se trouve en présence d’un licenciement « fortement » manifestement déraisonnable et qu’il se justifie d’accorder le montant maximal de l’indemnité, soit 17 semaines.
Pose un acte qui dépasse manifestement ses prérogatives et, en ce qu’il met en danger la vie d’autrui, entraîne irrémédiablement la perte de confiance qu’une MRS doit pouvoir accorder à un personnel amené à exécuter seul des ordres médicaux en faveur des résidents qu’elle héberge l’infirmière qui, alors qu’elle était en service a décidé de ne pas placer la perfusion sous-cutanée à une résidente ─ et donc cesser de l’alimenter et de l’hydrater ─, sans en référer ni à l’équipe pluridisciplinaire de la maison de repos et de soins, ni au médecin traitant de la résidente (qui avait donné l’ordre de placer une telle perfusion) ou à un autre médecin, et d’avoir transmis, verbalement, cette décision à une aide-soignante et à l’infirmier qui lui succédait (sans toutefois la consigner par écrit dans la feuille de soins infirmiers). L’accord obtenu du fils de la résidente ne permet pas d’atténuer la gravité du manquement, compte tenu essentiellement de l’état de trouble dans lequel celui-ci se trouvait et de ce qu’il pensait, selon ses déclarations non contredites, qu’une telle décision avait reçu l’aval de l’équipe pluridisciplinaire (qui s’était réunie plus tôt dans la journée), ce qui n’était pourtant pas le cas.
Dès lors que ─ à la supposer légitime ─ aucune interdiction de demander pareils témoignages ne lui avait été faite, il ne peut être conclu à l’insubordination dans le chef de qui sollicite de ses anciens collègues de préciser les fonctions qu’il avait exercées au sein de l’entreprise ou d’évaluer ses compétences. Un licenciement pour ce motif est donc sans lien avec un fait de conduite établi dans son chef.
Face à des demandes répétées, mais parfaitement légitimes, auxquelles il n’entendait pas donner suite, un employeur normal et diligent n’aurait pas pris la décision de licencier leur auteur ; il aurait, pour éviter d’apparaître comme ayant agi en représailles à celles-ci, reconsidéré sa position de bonne foi.
L’employeur qui rompt le contrat d’un de ses travailleurs pour un motif inconsistant, voire fallacieux en l’absence de tout élément objectif, commet une faute engageant sa responsabilité, un tel exercice du droit de rupture dépassant manifestement les limites normales qu’en ferait un employeur prudent et diligent, et manifestant également une légèreté coupable dans son chef, ce qui le rend redevable de dommages et intérêts (que la cour fixe à quelque 14.000,00 € compte tenu des circonstances inutilement vexatoires ayant entouré la rupture ainsi que des désagréments occasionnés au travailleur, la plainte déposée auprès des autorités de police ayant fait l’objet d’un classement sans suite après audition).
Le fait de rédiger sciemment un faux rapport de prestations est une faute grave (et ce d’autant plus que l’intéressé y a apposé la signature d’un client), dont l’employeur pouvait légitimement considérer que la relation de confiance était rompue, le formulaire en cause étant ici le seul moyen de contrôle dont il disposait pour vérifier la réalité des prestations (aide familiale à domicile) et constituant le noyau de cette relation de confiance.
Si l’employeur doit prouver que l’autorité compétente pour licencier a eu connaissance des faits invoqués au titre de motif grave depuis moins de trois jours ouvrables, il ne peut cependant être exigé qu’elle aurait dû le savoir plus tôt (avec renvoi à Cass., 7 décembre 1998, n° S.97.0166.F et 13 mai 1991, n° 9080). Dès lors, si le responsable hiérarchique a eu connaissance des faits auparavant (n’en n’ayant cependant pas été le témoin direct), il ne peut lui être reproché d’avoir procédé à des devoirs d’enquête avant d’établir un rapport circonstancié adressé au responsable du service.
Réforme Trib. trav. Liège (div. Liège), 7 juin 2022, R.G. 19/3.672/A ci-dessous. En effet, la cour relève que s’il est exact que le règlement de travail prévoit qu’aucune sanction ne peut être décidée sans que le travailleur ait, au préalable, été appelé et entendu par son responsable, au besoin accompagné de la personne de son choix, cette disposition n’est assortie d’aucune sanction et, plus fondamentalement, estime que, même à supposer que l’employeur aurait commis une faute distincte dans le déroulement de la procédure de licenciement, aucun dommage distinct n’est établi.
Une journaliste, rompue à l’art de la communication, doit, mieux que quiconque, mesurer l’impact que peut avoir le partage, sur son compte Facebook, d’un article de presse consacré à son licenciement dans lequel l’auteur de celui-ci reproduit entre guillemets les propos critiques qu’elle a tenus, fût-ce sous le coup de l’émotion, à l’encontre de son ex-employeur.
Il n’y a rien d’anormal à ce qu’un employeur invite les travailleurs en incapacité de travail - qu’elle soit de courte ou de longue durée - à couvrir celle-ci de manière ininterrompue et qu’il leur adresse des rappels en cas de carence. La circonstance qu’après plusieurs lettres de rappel un licenciement intervienne ne constitue pas la démonstration d’une pratique discriminatoire - même indirecte.
La cour écarte dès lors que le licenciement puisse être intervenu en infraction à la loi du 10 mai 2007 et déboute la travailleuse de ce chef de demande.
Pour ce qui est du licenciement manifestement déraisonnable, en revanche, la cour confirme la décision du tribunal quand bien même l’ouvrière a tardé à justifier son incapacité (chose qui s’était déjà produite par le passé). L’employeur, qui lui reprochait une absence injustifiée, était en possession du certificat et ne s’est pas comporté comme un employeur normal et raisonnable en adressant un troisième rappel et en la licenciant ensuite pour ce motif.
Le juge du vice du consentement doit se limiter à un contrôle marginal en appréciant si la violence alléguée, soit la menace d’un licenciement pour motif grave, ayant amené le travailleur à signer la convention de rupture, présente ou non un caractère injuste ou illicite. Il lui suffit de constater que les faits auxquels l’employeur a été confronté (en l’espèce, tentative de vol) étaient sérieux et ont pu raisonnablement être interprétés par lui comme comme constitutifs de motif grave, sans qu’il ait à se prononcer sur la question de savoir si un licenciement pour motif grave aurait été admis par les juridictions du travail.
L’application de l’article 35, alinéa 8, LCT ne déroge pas aux règles de l’administration de la preuve en droit commun visées aux articles 8.4. du Livre VIII du nouveau Code civil introduit par la loi du 19 avril 2019 et 870 du Code judiciaire. Ainsi, lorsque l’employeur prouve des faits susceptibles d’être considérés comme motif grave, il appartient au travailleur de rapporter la preuve de faits qui leur ôteraient le caractère de gravité vanté.
Le juge doit examiner d’office si les conditions de légalité du congé ont été respectées et doit dès lors soulever d’office les irrégularités éventuelles dans la notification du motif grave. Il doit procéder à cet examen même en l’absence de moyens soulevés par l’une ou l’autre partie, sauf à vérifier au préalable si les dispositions légales n’ont pas fait l’objet d’une renonciation valable de la part du demandeur, et ce dans le respect des droits de la défense et du principe du contradictoire (en ce sens, voy. Cass., 22 mai 2000, S.99.0046.F).
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 20 avril 2022, R.G. 20/699/A ci-après.
Le droit à la liberté d’expression n’autorise pas un travailleur à adopter sur son lieu de travail une conduite consistant à tenir des propos déplacés, vulgaires et à connotation sexuelle devant et à l’égard d’autres membres du personnel. Le licencier pour ce motif est en lien avec une conduite excédant largement les limites d’un droit qui est tout sauf absolu, limité qu’il est par le devoir de respecter les convenances et les bonnes mœurs dans la relation de travail (LCT, art. 16).
Dès lors que l’état délétère de la relation de travail ne peut lui être imputé et en l’absence du moindre élément de preuve d’aucune des accusations portées à son encontre, le quantum de l’indemnité revenant au travailleur pour licenciement manifestement déraisonnable peut être fixé au maximum prévu par la CCT n° 109.
L’indemnité forfaitaire due par le travailleur en cas de violation de la clause de non-concurrence contractuellement prévue ne peut dépasser une somme égale à 3 mois de rémunération, sauf à l’employeur à prouver l’existence d’un préjudice dont l’étendue justifie une réparation supérieure, ce qui ne peut être défini sur la base de la diminution de son chiffre d’affaires et, si cette diminution est inférieure audit forfait de 3 mois, ne justifie nullement un cumul entre celui-ci et une indemnité due pour préjudice réel.
Lorsqu’un travailleur invoque devant le juge que son licenciement est manifestement déraisonnable, Il y a lieu de contrôler, à la lumière de ce que serait l’exercice du droit de licencier par un employeur normal et raisonnable (contrôle de proportionnalité), (i) si les motifs invoqués ont un lien avec l’aptitude ou la conduite du travailleur ou sont fondés sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise (contrôle de légalité), (ii) si ces motifs sont avérés (contrôle de réalité) et (iii) s’ils constituent bien la cause réelle du licenciement (contrôle de causalité). Et la cour d’estimer à ce dernier titre qu’il ne peut être déduit de ce que le remplaçant d’un travailleur disposait d’un diplôme supérieur au sien et du fait que la candidature d’une personne également dotée d’une qualification supérieure à la sienne fut ensuite retenue, que l’intéressé a été licencié en raison de ce qu’il ne remplissait plus les exigences liées à sa fonction, ce d’autant que l’employeur reconnaît occuper depuis lors une personne moins qualifiée.
(Décision commentée)
Le contrôle du motif du licenciement suppose la vérification successive de plusieurs points, à savoir si les motifs allégués entrent dans une des trois catégories de motifs admissibles, s’ils sont établis, s’ils constituent la cause du licenciement et, enfin, si le licenciement n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable.
Même si le choix de faire prester ou non un préavis relève du pouvoir de gestion de l’employeur et si le contrôle juridictionnel des modalités du licenciement reste marginal à cet égard, ce choix n’est pas neutre ou insignifiant pour autant, mais peut parfaitement alimenter un doute dans le chef du juge sur la réalité des motifs invoqués pour licencier. Il peut, en effet, paraître étonnant de laisser prester son préavis par un travailleur auquel on reproche tant son inaptitude professionnelle que son mauvais comportement.
Une indemnité d’un montant équivalent à 3 semaines de rémunération est appropriée lorsque la décision de licencier, prise à l’égard d’un travailleur de peu d’ancienneté et à qui des avertissements oraux ont été donnés, ne paraît pas être marquée par la mauvaise foi ni par un quelconque dessein répréhensible.
Même si le choix de faire prester ou non un préavis relève du pouvoir de gestion de l’employeur et si le contrôle juridictionnel des modalités du licenciement reste marginal à cet égard, ce choix n’est pas neutre ou insignifiant pour autant, mais peut parfaitement alimenter un doute dans le chef du juge sur la réalité des motifs invoqués pour licencier. Il peut, en effet, paraître étonnant de laisser prester son préavis par un travailleur auquel on reproche tant son inaptitude professionnelle que son mauvais comportement.
Même si le choix de faire prester ou non un préavis relève du pouvoir de gestion de l’employeur et si le contrôle juridictionnel des modalités du licenciement reste marginal à cet égard, ce choix n’est pas neutre ou insignifiant pour autant, mais peut parfaitement alimenter un doute dans le chef du juge sur la réalité des motifs invoqués pour licencier. Il peut, en effet, paraître étonnant de laisser prester son préavis par un travailleur auquel on reproche tant son inaptitude professionnelle que son mauvais comportement.
Conformément au § 6, alinéa 4, de l’article 32tredecies de la loi du 4 août 1996, la protection prend cours dès le moment où la plainte pour harcèlement à l’auditorat du travail a été réceptionnée par l’employeur. Cette protection n’est, de ce fait, pas acquise au travailleur dont la plainte, déposée le jour de son licenciement, a été réceptionnée ultérieurement à celui-ci.
Lorsqu’il n’est pas établi que la candidature n’est pas la première candidature infructueuse, le candidat ne peut pas bénéficier de la protection prévue à l’article 2, § 3, 1, de la loi, mais uniquement de celle prévue à l’article 2, § 3, 2, soit d’une protection couvrant la période comprise entre le trentième jour précédant l’affichage de l’avis fixant la date des élections et se terminant deux ans après l’affichage du résultat de celles-ci.
S’il met à charge du travailleur qui n’a pas demandé à connaître les motifs de son licenciement de prouver les éléments qui indiquent son caractère manifestement déraisonnable, l’article 10 de la CCT n° 109 ne dispense pour autant pas l’employeur d’expliquer les raisons pour lesquelles il a licencié l’intéressé, et ce dans le cadre de son obligation de collaboration à l’administration de la preuve.
(Décision commentée)
Est non fondée la demande d’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable introduite par un travailleur dont le poste a été supprimé mais que son employeur a, compte tenu de son importante ancienneté dans l’entreprise et du fait qu’il ne souhaitait pas le licencier sans qu’il ait disposé d’une réelle opportunité de reclassement, placé en disponibilité pendant une certaine période (plus de 2 ans) en le dispensant de toute prestation tout en lui maintenant le bénéfice de sa rémunération et des avantages extra-légaux dont il bénéficiait dans le cadre de son travail.
L’indemnité de protection ne sanctionne pas le harcèlement lui-même, mais bien le licenciement après une demande d’intervention psychosociale formelle ou une plainte pour harcèlement. Le juge saisi ne doit dès lors pas examiner si le travailleur a été victime de harcèlement ou de violence au travail, mais si l’employeur justifie de motifs de licenciement étrangers à la demande d’intervention et/ou à la plainte.
En l’absence d’éléments particuliers plaidant pour une indemnité plus ou moins élevée, il y a lieu de la fixer au montant médian, soit dix semaines.
(Décision commentée)
Lorsqu’une entreprise décide de proposer un plan de départ volontaire aux cadres de l’une de ses filiales, elle a le droit de soumettre cette possibilité à l’accord de la hiérarchie et de fixer une période ferme durant laquelle les intéressés peuvent se porter candidats et leur candidature sera acceptée ou refusée par celle-ci. Pour relever du pouvoir de gestion de l’employeur, ne constitue pas un abus de droit le fait que, suite à un refus de candidature, il ait finalement été décidé de relocaliser le poste du cadre concerné au siège central et, par voie de conséquence, de licencier l’intéressé, ce même si ceci peut entrainer une frustration certaine dans le chef de ce dernier, qui n’a pas eu droit à l’indemnité de départ à laquelle il aurait pu prétendre si sa candidature au plan de départ volontaire avait été acceptée.
Dès lors qu’il est dûment établi que la travailleuse n’avait, en raison d’une incapacité de travail qui la rendait suffisamment disponible pour assurer à son enfant handicapé les soins que requérait son état, pas demandé de prolongation de son crédit-temps avec motif (crédit-temps CCT n° 103) et n’exerçait donc plus de droit en la matière au moment où son licenciement lui fut signifié, elle est légitimement en droit de voir son indemnité compensatoire de préavis calculée sur la base de son occupation à temps plein (38 h/semaine) et, partant, de se voir accorder le bénéfice d’une indemnité de rupture complémentaire d’un montant égal à celui déjà versé sur la base d’une occupation à temps partiel (19 h/semaine), ce indépendamment de l’indemnité protectionnelle qui lui revient, faute pour son employeur de prouver que son licenciement est étranger au crédit-temps dont elle a bénéficié antérieurement à celui-ci.
Manque à ses obligations professionnelles le chauffeur de bus qui écourte le parcours régulier de la ligne dont il est chargé en ne finissant pas sa tournée et, ce faisant, abandonne un enfant de 13 ans, sans possibilité de communication ni d’aide, en un endroit inconnu de celui-ci et éloigné de sa destination. Il s’agit d’une faute professionnelle, commise de façon délibérée, qui témoigne d’une forme de malhonnêteté à l’égard de son employeur.
Une indemnité modérée de 9 semaines peut être retenue lorsque les motifs invoqués, quoique non prouvés, ne paraissent, pour autant, pas complètement fantaisistes et qu’il est possible de retenir une simple mauvaise appréciation de la situation.
Statue dans le même sens que C. trav. Bruxelles, 10 janvier 2023, R.G. 2021/AB/693 ci-dessous quant à la manière dont un employeur normal et raisonnable eût dû appréhender l’impact potentiel sur son chiffre d’affaires de la crise économique liée à la pandémie de Covid-19.
(Décision commentée)
Il y a lieu de prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur dès lors qu’il est constaté que, en sa qualité d’employeur, la société a commis plusieurs manquements graves à ses obligations : faits de violence d’un collègue auxquels l’employeur a apporté une réaction inadéquate, interdiction d’effectuer des prestations de travail (manquement qui a perduré dans le temps), non-paiement de la rémunération et obligation pour l’employée d’introduire une action judiciaire afin d’obtenir le rapport du conseiller en prévention suite à la plainte déposée. Ces manquements sont en l’espèce considérés, dans leur ensemble, comme suffisamment graves pour justifier la résolution judiciaire.
Même s’il n’a eu connaissance du congé que par la suite, le fait que le travailleur ait pu entamer et poursuivre ses prestations après que son employeur lui eut envoyé sa lettre de licenciement est en contradiction avec l’essence même du licenciement pour motif grave, lequel doit sortir immédiatement ses effets et rendre la collaboration professionnelle immédiatement et définitivement impossible en raison de la faute commise. Il en va de même du fait pour l’employeur d’avoir, après l’envoi de ladite lettre, laissé l’intéressé poursuivre ses prestations durant plus de 5 heures, ce qui prouve également que la collaboration était encore possible. On doit, dans ces circonstances, conclure que les conditions de gravité du motif avancé font défaut.
N’est pas fautif le fait qu’un travailleur, tenu par les heures d’ouverture du service juridique de son syndicat, passe cette communication privée, au demeurant très brève, pendant les heures de bureau, ce que ne contredit du reste pas le règlement de travail de l’entreprise, lequel ne considère comme faute grave que l’abus de communications téléphoniques privées pendant les heures de travail.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 27 juin 2022, R.G. 20/677/A ci-dessous.
Le juge n’est pas tenu par les termes du rapport du conseiller en prévention, ce d’autant moins lorsque ce rapport recense une série de propos et d’attitudes attribués au travailleur totalement sortis de leur contexte, impossibles à vérifier et ne se prêtant pas à la contradiction, vu que les témoins ne sont pas identifiés et que les circonstances de temps et de lieu ne sont pas connues.
(Décision commentée)
Le consentement du travailleur a été vicié par une erreur excusable dès lors (i) qu’il a signé la convention litigieuse dans la représentation erronée qu’un licenciement pour motif grave aurait des conséquences plus lourdes sur son droit aux allocations de chômage qu’une rupture du contrat d’un commun accord (alors qu’en réalité le travailleur licencié pour motif grave encourt une exclusion du bénéfice des allocations de 4 à 26 semaines, tandis qu’en cas de rupture d’un commun accord l’exclusion porte sur une période de 4 à 52 semaines), (ii) que cette idée erronée a été expressément mise en exergue par son employeur pour le convaincre d’opter pour une rupture d’un commun accord, (iii) que ce dernier ne lui a pas laissé le temps de la réflexion et l’a incité à se décider sur-le-champ, sans pouvoir recueillir un autre avis, (iv) que l’intéressé pouvait légitimement croire que l’information était correcte, puisqu’elle émanait de son employeur, que celui-ci était représenté par la responsable RH ayant une qualité de juriste et qu’au surplus la proposition faite lui été présentée sous les traits d’un geste de bienveillance à son égard et (v) qu’il s’agissait là de l’élément décisif de son consentement sans lequel la convention litigieuse n’aurait pas été signée, ce que l’employeur ne pouvait pas sérieusement ignorer.
En renvoyant à une généralité abstraite de faits présentés comme constituant « une raison légitime pour un licenciement », l’employeur n’identifie pas clairement les motifs qui devraient satisfaire aux exigences de l’article 101 de la loi de redressement du 22 janvier 1985, ne dit pas non plus en quoi ces motifs devraient être admis et, in fine, n’apporte pas à suffisance de droit la preuve de la réalité des motifs qui ont présidé à sa décision de mettre fin au contrat.
Est manifestement déraisonnable le licenciement décidé sur la seule base d’un courriel obtenu en violation de l’article 124 de la loi du 13 juin 2005 et du propre règlement de travail de l’entreprise.
Un travailleur chargé des manœuvres d’une écluse, de la sécurité des usagers de celle-ci et du gardiennage des installations est clairement investi d’un poste de confiance. En quittant – ou en restant indûment éloigné de – son poste de travail pour participer aux faits incriminés (détournement de matériel), il a manifestement trahi la confiance que son employeur devait avoir en lui en sa qualité, et ce tant sur le plan opérationnel que dans le cadre de ses missions de sécurité et de gardiennage, rendant ainsi immédiatement et définitivement impossible la poursuite de toute collaboration professionnelle.
Le fait que, alors qu’elle se trouvait sur son lieu de travail, la gérante d’une boutique a été conviée à se présenter au siège de l’entreprise sans avoir reçu d’explication quant à la nature de cette convocation n’est pas de nature à vicier le consentement de l’intéressée dès lors que, à son arrivée à la centrale, la raison de sa convocation lui a été expliquée, qu’elle était assistée d’une déléguée syndicale et qu’elle a eu le temps de réflexion après cet entretien.
Ne sont pas non plus de nature à vicier son consentement le fait que la déléguée syndicale qui l’assistait relève d’une autre région que celle du lieu de travail de la travailleuse ou celui qu’elle représente les « travailleurs juniors » alors que l’intéressée relève de la catégorie « seniors ». Cette considération est, en effet, étrangère à sa capacité d’informer et de défendre la personne assistée et ne l’empêche nullement de remplir correctement son rôle de déléguée syndicale, ce qu’elle a fait en indiquant à la travailleuse les tenants et aboutissants de son choix entre la rupture de son contrat de travail pour motif grave et sa propre démission.
Ayant nécessairement, causé des désagréments, du stress et une perte de temps au travailleur, la circonstance que l’employeur a commis de nombreuses erreurs dans les décomptes de sortie et lors de la délivrance des documents sociaux (erreurs dans les fiches de paie et retards dans la délivrance de fiches de paie correctes, erreurs de calcul de l’indemnité compensatoire de préavis, retards dans le paiement des sommes dues, délivrance tardive de l’attestation de vacances, de l’attestation d’emploi et du formulaire C4 correctement complété) justifie la condamnation de ce dernier au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi (en l’espèce, estimé à 300,00 € ex aequo et bono).
Confirme Trib. trav. Liège (div. Huy), 9 mars 2022, R.G. 19/275/A commenté ci-dessus.
Le fait que, à l’exception d’un manquement, la totalité des autres griefs prouvés et reprochés au travailleur aux termes de la lettre qui lui a été adressée pour répondre à sa demande de motivation du licenciement soient antérieurs à sa demande de congé parental ─ et étaient parfaitement connus de l’employeur avant cette demande ─ rompt incontestablement tout lien causal entre ces motifs invoqués et prouvés et le licenciement. En effet, si le temps qui s’écoule entre la faute et le congé n’est pas de nature à effacer la conduite reprochée, il affecte en tout état de cause le lien de causalité entre ces fautes anciennes et le licenciement.
Le travailleur indemnisé pour cause de licenciement manifestement déraisonnable mais qui, en raison des circonstances de celui-ci, a subi un préjudice distinct, largement supérieur à celui causé par le congé en tant que tel, est en droit de prétendre en être dédommagé (en l’espèce : réparation forfaitaire de l’ordre de 5.000,00 €).
Le caractère mensonger et infamant des motifs du licenciement justifie l’octroi de l’indemnité maximale.
Même si c’était peut-être interdit (le règlement de travail n’indiquant rien à ce sujet), on peut difficilement parler de vol pour qualifier le simple fait de manger des restes de produits alimentaires qui auraient plus que probablement été jetés. Ne démontre pas non plus une intention frauduleuse le fait d’oublier de payer une boisson de façon isolée.
La règle de l’article 38, § 3, L.C.T., ne joue pas lorsque la rupture en cours d’incapacité de travail intervient moyennant paiement d’une indemnité, le cours d’un préavis qui ne doit pas être presté ne pouvant, par définition, être suspendu. Il y va d’une situation à propos de laquelle il n’y a pas lieu d’interroger la Cour constitutionnelle.
Les « actions découlant du contrat » au sens de l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail se réfèrent également aux actions qui découlent indirectement du contrat de travail. Celles fondées sur des lois autres que la loi relative aux contrats de travail ou sur un contrat autre qu’un contrat de travail peuvent également être des actions auxquelles l’article 15 s’applique, à la condition qu’elles découlent indirectement du contrat de travail. Il suffit que l’action n’ait pas pu naître sans le contrat de travail.
L’expression « découlant du contrat » doit être interprétée de manière large. Si l’article 15 de la loi relative aux contrats de travail ne couvre que les chefs de demande découlant d’un contrat de travail et qu’il ne s’applique donc pas aux actions qui n’ont pas pris naissance dans celui-ci, il ne fait pas d’autre distinction selon que la demande est fondée sur la législation en matière de contrat de travail ou sur d’autres dispositions légales. Il suffit donc que l’action n’ait pu naître sans l’existence du contrat de travail.
Les actions en dommages-intérêts fondées sur la responsabilité contractuelle sont des actions découlant du contrat de travail au sens de l’art. 15. Le travailleur qui n’exécute pas ou exécute mal les obligations découlant de son contrat de travail engage sa responsabilité. Une action par laquelle l’employeur demande réparation du préjudice subi de ce fait ne peut naître sans l’existence du contrat de travail.
On ne peut considérer que le formulaire C4, destiné à l’ONEm en vue de la détermination des droits du travailleur aux allocations de chômage, équivaut à la communication dont il est fait état dans la CCT 109, ni que le fait d’y renseigner une réorganisation comme motif du licenciement répond à l’exigence de précision attendue, cette seule mention ne permettant, en effet, pas de comprendre précisément les raisons concrètes ayant mené à la décision prise à son encontre.
Le fait que le licenciement repose sur des motifs non démontrés ne justifie pas, à lui seul, l’octroi de l’indemnité maximale.
Un caissier-réassortisseur dont la fonction n’a pas évolué entre son engagement et son licenciement peut refuser de passer commande de produits sans que ce refus, justifié au vu de sa description de tâches, constitue une faute dans son chef.
Un travailleur qui annonce à son employeur, via un message whatsapp, qu’il est obligé de « demander la maladie », ne se livre pas à une forme de chantage. Il y va, simplement, d’une façon de l’avertir de son état de santé.
Un licenciement, sans lien avec l’aptitude ou la conduite du travailleur et qui n’est pas fondé sur les nécessités de l’entreprise, auquel il est, qui plus est, procédé en accusant le travailleur d’une faute qu’il n’a pas commise, n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable.
On ne peut considérer que le formulaire C4, destiné à l’ONEm en vue de la détermination des droits du travailleur aux allocations de chômage, équivaut à la communication dont il est fait état dans la CCT 109, ni que le fait d’y renseigner une réorganisation comme motif du licenciement répond à l’exigence de précision attendue, cette seule mention ne permettant, en effet, pas à celui-ci de comprendre précisément les raisons concrètes ayant mené à la décision prise à son encontre.
Le fait que le licenciement repose sur des motifs non démontrés ne justifie pas, à lui seul, l’octroi de l’indemnité maximale.
La nature de la fonction est en principe un élément essentiel du contrat de travail, à moins que le contraire puisse être déduit de la convention ou de l’exécution donnée par les parties à celui-ci. Elle n’impose cependant pas nécessairement une liste intangible de tâches et un modus operandi figé. Dans le respect de la fonction du travailleur, les tâches à effectuer ainsi que les modalités d’exécution peuvent être décidées par l’employeur, mais la nature de la fonction et le niveau de responsabilité doivent être maintenus.
L’employeur ne peut, sans manquer à ses obligations contractuelles, modifier ou révoquer unilatéralement les conditions convenues ; il est indifférent à cet égard que la modification soit peu importante ou porte sur un élément accessoire du contrat. Une modification unilatérale même importante d’un élément accessoire du contrat de travail constitue ainsi une faute contractuelle, même si elle n’est pas un acte équipollent à rupture. De même, une modification peu importante d’un élément essentiel du contrat de travail est fautive, même si elle n’entraîne pas la rupture du contrat.
L’article 10 de la convention collective n°109, qui manque de clarté, trouve une cohérence lorsqu’il est structuré en fonction de l’envoi, ou non, par le travailleur, d’une demande régulière de communication des motifs du licenciement (une demande régulière est une demande adressée par lettre recommandée à l’employeur dans le délai fixé à l’article 4 de la CCT). Les deux premiers tirets s’appliquent si le travailleur a fait une demande régulière de communication des motifs du licenciement. Le 3° tiret s’applique en l’absence de demande régulière de motivation émanant du travailleur : il appartient alors au travailleur de prouver les éléments qui indiquent le caractère manifestement déraisonnable du licenciement. Il n’exclut pas le cas où l’employeur a motivé le licenciement d’initiative (avec renvoi à C. trav. Bruxelles, 21 avril 2021, R.G. 2018/AB/445).
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 18 mars 2022, R.G. 20/372/A ci-dessous.
Un employeur ayant sollicité l’aide de son secrétariat social et celle du syndicat du travailleur licencié à l’effet de déterminer de façon cohérente une méthode destinée à rémedier à l’absence de relevé de prestations et à fixer les limites de l’usage du véhicule de société doit, avant de considérer que les relations de travail sont immédiatement et définitivement devenues impossibles, aller au bout de cette démarche et attendre l’aboutissement de celle-ci, démarche dont il avait d’ailleurs annoncé l’intégration dans un règlement de travail à venir dès résolution de cette étape de consultation préalable.
Si certaines juridictions de fond estimaient que la partie qui invoque une modification unilatérale devait mettre en demeure son cocontractant avant de constater la rupture, la Cour de cassation n’a toutefois pas fait de cette mise en demeure une condition préalable. Il en va différemment dans l’hypothèse où la rupture est fondée non sur une modification unilatérale mais sur un manquement d’une partie à ses obligations, pour lequel la mise en demeure reste exigée.
Des relations de travail conflictuelles peuvent mener à un licenciement sans pour autant qu’il doive être considéré comme déraisonnable. Tel n’est pas le cas lorsque la tension existante n’est que la conséquence de conditions de travail difficiles, de revendications légitimes adressées à l’employeur pour les améliorer et de l’absence d’écoute et de prise en compte de celles-ci par l’intéressé : dans cette hypothèse, il n’y a, en effet, aucune causalité entre les relations de travail conflictuelles et le licenciement, qui apparaît plutôt constituer une réaction auxdites revendications.
Pour évaluer la gradation du caractère déraisonnable du licenciement, la juridiction saisie peut avoir égard aux circonstances propres à la cause : absence de preuve des motifs invoqués, licenciement intervenant à la suite de revendications légitimes, motifs invoqués susceptibles de nuire à la réputation du travailleur dans le cadre de sa recherche d’un nouvel emploi, voire, comme en l’espèce, le contexte budgétaire et social particulièrement difficile dans lequel bon nombre de PME se sont retrouvées lors de leur réouverture après le premier confinement.
Une différence fondamentale oppose les travailleurs sous contrat, d’une part, et les travailleurs sous statut, d’autre part, tenant au fait que ces derniers, s’ils sont irrégulièrement écartés de leur fonction de conseiller en prévention, ont la possibilité d’obtenir leur réintégration dans celle-ci (en sollicitant l’annulation de la décision administrative litigieuse auprès du Conseil d’État). Les travailleurs sous contrat n’ont pas cette possibilité, raison pour laquelle le législateur a veillé à prévoir une sanction indemnitaire en leur seule faveur. Ce faisant, il n’a pas violé le principe constitutionnel d’égalité et de non-discrimination.
Un employeur normal et raisonnable, confronté à un travailleur d’une intégrité sujette à discussion qui lui annonce passer à la concurrence, aurait parfaitement pu décider de le licencier, moyennant toutefois une indemnité ou la prestation d’un préavis et sans avoir recours à un motif grave dont il ne peut démontrer la pertinence.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 11 juin 2021, R.G. 20/1.393/A ci-dessous en ce qu’il estime qu’un travailleur peut trouver ridicule la compliance qu’on lui demande à des valeurs qui ne sont pas les siennes : il s’agit de pensées, qui sont libres en toutes circonstances. Cependant, en règle, et sous la réserve essentielle du respect des droits des travailleurs, l’employeur est, pour sa part, en droit d’organiser son entreprise comme il l’entend, en ce compris en insufflant certaines valeurs reflétant la culture de son entreprise, et peut, légitimement, attendre de son personnel un comportement conforme à cette culture. Si un travailleur ne peut avoir un comportement en adéquation avec ces valeurs, son licenciement n’est pas manifestement déraisonnable.
L’envoi de la lettre de licenciement et celui de la notification du motif grave doivent être effectués à l’adresse de résidence communiquée à l’employeur par le travailleur, quand bien même ce ne serait pas celle de son domicile légal.
Si le fait de ne pas répondre à l’invitation du médecin-contrôleur de se présenter chez lui constitue, dans le chef du travailleur, un manquement à l’obligation prescrite par l’article 31, § 3, LCT, il ne peut, comme tel justifier un licenciement pour motif grave. Il peut, en revanche, fonder son licenciement pour un motif autorisé par l’article 8 de la CCT n° 109.
(Décision commentée)
Pour l’application de la C.C.T. sectorielle dans le secteur bancaire relative à la stabilité d’emploi, la question est de déterminer si l’employée relève du champ d’application de la C.C.T. du 2 juillet 2007 (dont la cour rappelle qu’elle a été modifiée par une autre du 9 octobre 2009), dans la mesure où le texte prévoit que ses dispositions (§§ 2 et 3 de l’article 2) ne sont pas d’application (outre le cas du motif grave) aux membres du personnel qui n’entrent pas dans le champ d’application d’une autre convention collective du secteur, étant celle du 3 juillet 2008 relative au système de rémunération. En l’espèce, l’intéressée percevait une rémunération correspondant à une catégorie déterminée au sein de l’entreprise (catégorie 8), étant qu’elle était non barémisée. Elle se trouvait, ainsi, exclue du champ d’application de la C.C.T. du 3 juillet 2008 et, par voie de conséquence, de celle du 2 juillet 2007.
Si la question devait être envisagée sous l’angle de la discrimination, la cour appelle à la prudence, d’autant qu’il s’agirait d’une discrimination dont le motif n’est pas protégé par une base spécifique. Elle rappelle qu’une convention collective est le fruit d’un accord négocié, qui vise à obtenir un équilibre entre les droits et obligations des travailleurs et employeurs et qui transcende dès lors les intérêts individuels des travailleurs.
Est de nature à entraîner une rupture immédiate et définitive de confiance dans son chef, le fait, pour une employée affectée à la gestion du payroll de la société, de modifier unilatéralement, sans autorisation de son employeur, sa date d’entrée en fonction dans l’outil de gestion de paie dans l’intention de voir son délai de préavis augmenter en cas de licenciement.
Dès lors que l’incapacité de travail est évaluée en relation avec le travail convenu, il est possible que le travailleur, tout en étant reconnu incapable d’effectuer son travail, puisse exécuter un autre travail (lucratif ou non). En d’autres termes, toute activité ou tout travail réalisé durant la période d’incapacité ne démontre pas (forcément) l’aptitude du travailleur à exercer le travail convenu. À rebours, ce travail ou cette activité n’est envisageable qu’autant que sa pratique ne soit pas de nature à retarder la guérison.
On peut, ainsi, difficilement imaginer qu’un travailleur, souffrant de douleurs au dos (plus spécifiquement ‘dune lombalgie basse localisée au niveau du bas des reins) et à qui il a été recommandé de néanmoins continuer à bouger, interprète cette recommandation comme valant autorisation de se livrer à des activités qui, pour n’être pas légères (port d’échelle, travaux de creusement ou d’égalisation du sol impliquant une posture courbée, conduite d’un tracteur engendrant des tressautements, nettoyage d’une façade au moyen d’un tuyau d’arrosage...), ne sont pas de celles auxquelles se livre une personne atteinte de ce type de pathologie. Leur pratique démontre, au contraire, la fausseté de l’incapacité alléguée ou, à la supposer avérée, est de nature à retarder l’échéance de la guérison.
Les motifs de licenciement doivent être totalement étrangers à l’état de grossesse. Le licenciement en raison de motifs pour partie liés à l’état de grossesse et pour partie étrangers à cet état est interdit par la loi.
Si la travailleuse conteste en justice la légalité du licenciement, l’employeur doit prouver, non seulement (i) l’existence de faits objectifs qui montrent que le licenciement intervient pour des motifs étrangers à la grossesse mais également (i) la sincérité des motifs ainsi que (iii) le lien de causalité entre les faits étrangers et le licenciement.
Une fois que l’employeur a répondu à la demande de la travailleuse en lui précisant les motifs de licenciement, il n’est pas admissible à invoquer ensuite d’autres motifs.
C’est au moment du congé qu’il faut se placer pour apprécier si le motif invoqué est ou non fondé.
N’a pas communiqué d’offre valable, c’est-à-dire conforme aux conditions et modalités prescrites par la loi du 5 septembre 2001, l’entreprise qui, en dehors du délai de quinze jours, se limite, alors que la formalité du recommandé s’impose, à adresser au travailleur un courriel qui ne détaille pas l’offre de reclassement mais se limite à l’inviter à prendre contact avec le CEFORA « afin de discuter les modalités pratiques des services ».
Il incombait toutefois à ce dernier de mettre son employeur en demeure, par écrit et dans les quatre semaines qui suivent l’expiration du terme (article 11/8, § 1er, alinéa 2, de la loi du 5 septembre 2001), obligeant ainsi celui-ci à faire une offre dans un nouveau délai de quatre semaines après la mise en demeure (article 11/8, § 1er, alinéa 3).
A défaut d’avoir envoyé une telle mise en demeure, il ne peut plus faire valoir qu’il n’aurait pas reçu d’offre valable de reclassement. Son employeur était dès lors autorisé par la loi à opérer la déduction de quatre semaines de rémunération prévue par l’article 11/5 de la loi, qu’il a en l’espèce limitée à la déduction du montant de 5.500 euros (inférieur au montant de quatre semaines de rémunération).
Dans un contexte de chômage économique récurrent d’un personnel ouvrier pouvant difficilement se permettre une perte de revenus, le fait d’inciter ses collègues à exercer une activité concurrente ne constitue pas une faute grave, cette pratique étant du reste admise au sein de l’entreprise.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 24 juin 2021, R.G. 20/145/A ci-dessous en ce qu’il estime que le simple fait qu’un travailleur soit licencié alors qu’il était en incapacité de travail ne rend pas cette rupture abusive dès lors que, la vie de l’entreprise étant évolutive, l’employeur a pu considérer, pour plusieurs motifs, que l’intéressé n’avait plus le profil adéquat pour continuer à exercer ses fonctions.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 17 février 2022, R.G. 21/837/A (commenté ci-dessous) en toutes ses dispositions.
Est justifié le licenciement pour motif grave d’un travailleur qui, malgré qu’il se savait cas-contact (COVID-19), choisit de ne pas se mettre en quarantaine et expose ainsi collègues et résidents de la maison de repos dans laquelle il preste au risque de les contaminer.
(Confirme Trib. trav. Liège, div. Liège, 3 mars 2022, R.G. 20/3.212/A – ci-dessous)
On peine à concevoir en quoi la revendication de droits coulés dans des dispositions impératives en faveur du travailleur pourrait être – de près ou de loin – constitutive d’un abus de droit. Commet donc une faute, l’employeur qui utilise l’arme inacceptable des représailles à l’encontre d’un travailleur dont la revendication était parfaitement légitime.
Un licenciement survenu en représailles à des revendications (salariales) légitimes justifie l’octroi de l’indemnité maximale.
L’ancienneté peut être un des critères à prendre en considération pour apprécier le caractère déraisonnable du licenciement et le dommage causé au travailleur. En l’espèce, le fait que, d’une part, le travailleur avait une faible ancienneté et était passé d’ouvrier à conducteur de chantier après quatre mois mais que, d’autre part, on lui reproche, sans l’établir, de ne pas respecter des règles de sécurité, a pu raisonnablement justifier la fixation d’une indemnité relativement réduite de quatre semaines, sans se limiter toutefois au minimum.
Même si la fonction du conseiller en prévention était également relative à l’environnement pour la moitié de son temps, ceci ne signifie pas que l’indemnité de protection en cas de licenciement du conseiller en prévention ne doit pas être calculée à 100 %, n’étant pas établi que la mission de conseiller en environnement ne fait pas partie de celle de conseiller en prévention. La cour renvoie pour ce aux articles 33 et 4, alinéa 2, 7° de la loi du 4 août 1996.
Obéissant à un régime probatoire spécifique, la reconnaissance de l’existence d’une discrimination n’est pas déterminante pour poser le constat d’un licenciement manifestement déraisonnable au sens de la C.C.T. n° 109.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 3 juin 2022, R.G. 20/712/A ci-dessous.
S’il y a incontestablement faute dans le chef d’un travailleur qui, pratiquant lui-même ce contournement, donne à un collègue les lui ayant demandées des informations techniques pour contourner le système de sécurité, celle-ci n’atteint toutefois pas la gravité requise pour constituer un motif grave, dès lors que l’intéressé n’est pas responsable de la décision prise par son collègue de les mettre en œuvre, ce d’autant que, en ce qui le concerne, la société s’est limitée à un avertissement oral.
Le régime temporaire instauré par la loi du 15 juin 2020 ne s’applique qu’à une forme déterminée de suspension de l’exécution du contrat de travail pour cause de force majeure : celle résultant des mesures gouvernementales prises pour limiter la propagation du COVID-19. Dès lors qu’il repose sur un critère objectif, il n’entraîne pas de différence de traitement injustifiée entre les travailleurs sous préavis bénéficiant d’allocations de chômage temporaire liées au COVID-19 dont le délai de préavis a commencé à courir après le 1er mars 2020 et ceux placés dans la même situation, mais dont le délai de préavis a commencé à courir avant cette date. Il en va de même de celle qui résulte de l’absence d’effet rétroactif finalement donné à ses dispositions, laquelle ne viole pas davantage les principes constitutionnels d’égalité et de non-discrimination mais, au contraire, fait suite à l’avis du Conseil d’Etat attirant l’attention sur l’atteinte que la rétroactivité initialement envisagée pourrait potentiellement porter à des situations ou droits acquis.
En cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, la C.C.T. relative à la sécurité d’emploi conclue au sein de la commission paritaire n° 312 prévoit (i) que le travailleur fait d’abord l’objet d’un avertissement écrit et (ii) que, si cet avertissement ne produit aucun effet, l’entreprise s’efforcera, dans toute la mesure du possible, d’améliorer le niveau et les compétences professionnelles de l’intéressé en vue d’essayer de le maintenir dans sa fonction ou de le muter vers une fonction susceptible de mieux rencontrer ses capacités. Le non-respect de ces dispositions, non autrement sanctionné par la C.C.T., fonde le travailleur à postuler, en vertu du droit commun de la responsabilité civile, la condamnation de son employeur à lui payer des dommages et intérêts, fût-ce au titre de la perte d’une chance de conserver son emploi.
Il tombe en effet sous le sens que, si l’employeur avait respecté en tous points la procédure prévue, le travailleur aurait, à tout le moins, bénéficié non seulement d’un délai raisonnable pour tenter de remédier d’initiative aux insuffisances professionnelles qui lui étaient imputées, mais également d’une période au cours de laquelle son employeur aurait dû s’efforcer d’améliorer son niveau et ses compétences professionnelles en vue de son maintien à l’emploi. En le licenciant sans lui offrir cette double possibilité, il a manifestement privé l’intéressé de la chance de conserver son emploi, à tout le moins durant le temps nécessaire à cet effet, avant d’être (éventuellement) licencié (à défaut pour l’avertissement notifié d’avoir produit un effet et pour les efforts à déployer d’avoir abouti).
Il appartient au chef d’entreprise de déterminer les objectifs et les méthodes à appliquer en fonction des nécessités de celle-ci, avec pour possible conséquence que, à terme, un travailleur ne soit plus en phase avec cette évolution. Il ne peut cependant pas être exigé de figer une fonction telle que celle que le travailleur exerçait ; le juge n’exerce sur les décisions de cet ordre qu’un contrôle marginal.
(Décision commentée)
Le fait pour une employée d’accéder, sans la moindre autorisation, au contenu de la boîte mails d’un de ses collègues et de prendre copie de courriels qui ne lui étaient aucunement destinés en vue d’en faire un usage à son profit dans le cadre d’un différend avec son employeur constitue une faute d’une gravité telle qu’elle justifie un congé pour motif grave, un tel manquement étant de nature à rompre de manière immédiate et définitive la confiance de son employeur envers elle. La gravité de la faute ne peut être diminuée ni par la circonstance que l’intéressée aurait entendu se constituer un dossier pour se « défendre », ni par les tensions entre son employeur et elle, ni encore par l’absence d’intention frauduleuse.
Le comportement reproché au travailleur, consistant à avoir suivi une formation de traiteur comportant des cours de cuisine et des cours de gestion/fiscalité durant son incapacité de travail, sans en avoir informé son employeur, n’est pas un fait de conduite ayant pu motiver son licenciement au regard de la C.C.T. n° 109, puisqu’il s’agissait pour l’intéressé de se consacrer à une activité préconisée par son médecin-traitant (et admise par le médecin-conseil de la mutuelle) afin de favoriser sa guérison. Ce fait ne remettait dès lors nullement en cause son incapacité de travail ni ne compromettait en rien sa reprise du travail. Un employeur normal et raisonnable aurait d’abord veillé à s’informer du contexte et de la finalité exacte d’une telle formation, le cas échéant en entendant l’intéressé en ses explications, et n’aurait jamais licencié un de ses travailleurs pour de tels prétendus motifs.
Le critère à l’aune duquel doit être appréciée la gravité du comportement, voire de la faute du travailleur, est celui de la confiance que son employeur place en lui, a fortiori en raison de sa qualité de manager. Dans certaines entreprises comme les grands magasins, l’employeur ne peut se protéger de manière absolue contre les atteintes portées à son patrimoine. Il doit pouvoir compter sur la correction de son personnel et pouvoir lui faire d’autant plus confiance que d’importantes sommes d’argent et de marchandises sont en circulation, sans qu’il ait la possibilité de tout contrôler. Il doit donc pouvoir compter sur l’honnêteté et la transparence absolues de tous ses travailleurs, à plus forte raison s’ils sont chargés d’une fonction de direction.
L’indemnité maximale est due dès lors que l’employeur reste en défaut d’établir la preuve des motifs avancés et que ceux-ci ont, en outre, un caractère offensant.
Sauf à l’employeur de démontrer que la rupture est due à des motifs étrangers au fait de consigner des remarques, une protection contre le licenciement est accordée au travailleur qui a consigné, dans le registre ad hoc, des observations qui concernent (i) les nouveaux horaires résultant de l’application des dérogations à la durée hebdomadaire moyenne de travail ainsi qu’au nombre d’heures à prester sur la période de référence et (ii) la prolongation, à maximum un an, de la période de référence d’un trimestre durant laquelle il ne doit pas être travaillé en moyenne plus de quarante heures par semaine.
Tel est le cas lorsque l’employeur établit que c’est sur recommandation de la police qu’il a, dans un premier temps, pris une mesure d’écartement à l’encontre d’un éducateur contre qui les parents d’une adolescente hébergée avaient déposé plainte pour des faits très sérieux d’abus sexuels, mesure commuée en licenciement lorsqu’il est apparu, au vu de la durée de l’enquête pénale, que cette suspension avec maintien de la rémunération était une solution intenable en termes organisationnels et qu’il ne pouvait, budgétairement, y être répondu par l’engagement d’un remplaçant.
Dès lors que l’employeur n’offre pas au travailleur licencié un outplacement malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, le travailleur recouvre son droit à bénéficier d’une indemnité compensatoire de préavis sans déduction des quatre semaines de rémunération.
Si celui-ci réclame des dommages et intérêts, il doit démontrer que la faute de l’employeur lui a causé un dommage. Le travailleur qui ne bénéficie pas des services auxquels il a droit et qui sont destinés à lui permettre de retrouver le plus rapidement possible un emploi perd effectivement une chance de retrouver un emploi auprès d’un nouvel employeur. L’évaluation du degré de probabilité est un exercice qualifié de « difficile, voire impossible à réaliser ». La cour procède dès lors à une évaluation ex aequo et bono.
En l’absence de toute clause conventionnelle relative à la prise en compte d’une ancienneté fictive (ou basée sur de réels antécédents auprès d’un ou de plusieurs autres employeurs), la seule mention portée sur les fiches de paie relativement à l’ancienneté convenue pour la fixation de la rémunération ne traduit pas l’existence d’un accord sur celle qu’il conviendrait de retenir pour calculer le délai de préavis ou l’indemnité qui y correspond.
Lorsque les nécessités de fonctionnement de l’entreprise sont invoquées, le juge n’exerce qu’un contrôle marginal sur le caractère nécessaire du licenciement. Il doit cependant vérifier (i) si les faits invoqués sont établis, (ii) s’il existe un lien entre ces faits et le fonctionnement de l’entreprise et (iii) s’il existe un lien causal entre ces faits et le licenciement.
L’interprétation à donner à l’article 8 de la C.C.T. n° 109 est que le licenciement manifestement déraisonnable est soit celui qui a lieu pour des motifs qui n’ont aucun lien avec l’aptitude ou la conduite du travailleur ou qui ne sont pas fondés sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise, soit celui qui a lieu pour des motifs qui ont un lien avec la conduite ou l’aptitude du travailleur ou qui sont fondés sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise mais dans pareil cas qui n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable. Cette interprétation revient à considérer que le « et » apparaissant dans la définition doit se comprendre comme un « ou ».
Le fait que l’éventualité du licenciement du travailleur ait déjà été évoquée avant sa demande de congé parental ne dispense pas l’employeur d’établir, la décision une fois prise, que celle-ci l’a été pour un motif suffisant.
(Décision commentée)
Dès lors que le motif « suffisant » invoqué pour justifier la rupture consiste dans des questions de comportement, d’attitude hostile et agressive vis-à-vis de collègues (et ce en présence de clients) ou d’autres manquements, il y a lieu d’établir les faits invoqués. En l’espèce, aucune pièce du dossier ne met objectivement en évidence les étapes chronologiques d’un processus décisionnel en rapport avec les faits imputés à la travailleuse. Le lien causal n’est pas retenu, l’employeur échouant dans la démonstration que la décision de licencier repose sur les motifs invoqués. En outre, selon la cour, même si la société avait apporté cette preuve, il ne pourrait être raisonnablement exclu que les motifs avancés se soient mêlés au moins pour partie à un motif lié au congé parental.
Un licenciement pour motif grave peut revêtir un caractère abusif en raison de sa motivation réelle (en l’espèce, représailles en l’absence manifeste de toute faute) et des circonstances qui l’ont accompagné (accusations infondées, mensonge et demande abusive de dommages et intérêts par l’employeur).
L’examen du caractère manifestement déraisonnable du licenciement suppose le contrôle de quatre critères, étant (i) le contrôle de légalité (lien entre les motifs invoqués et ceux autorisés), (ii) le contrôle de réalité (existence de ces motifs), (iii) le contrôle de causalité (cause réelle du licenciement) et (iv) le contrôle de proportionnalité (exercice du droit par un employeur normal et raisonnable).
Les refus ou réticences d’une travailleuse à exécuter différentes tâches non contractuellement prévues ne peuvent être qualifiés de « motifs étrangers » au sens de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971, vu que leur simple invocation contrevient au principe d’exécution de bonne foi des conventions inscrit à l’article 1134 de l’ancien Code civil et est en même temps contraire à l’objectif de protection que poursuit l’article 10 de la Directive n° 92/85/CEE. Autoriser l’employeur à fonder la décision de licencier la travailleuse enceinte sur pareil motif injustifié reviendrait à priver l’article 40 de son effet utile et pourrait engendrer un risque de contournement de l’interdiction au détriment des droits consacrés par la directive précitée.
Le fait qu’un conseiller en prévention, éprouvant des craintes quant au respect de son indépendance dans le cadre de son rôle, émette des observations critiques par rapport à la (nouvelle) organisation mise en place par son employeur n’est pas constitutif de motif grave lorsque celles-ci n’apparaissent pas avoir été émises avec disproportion, ne témoignent pas davantage d’une volonté de nuire et ne reflètent aucunement une attitude méprisante envers l’employeur, ni des démarches totalement déloyales.
Peut prétendre à une indemnité de protection en application de la loi du 20 décembre 2002 le conseiller en prévention dont le licenciement est notamment en lien avec les remarques critiques qu’il a formulées par rapport à son indépendance (qu’il estimait en péril) d’une manière n’excédant pas les limites du raisonnable (absence de caractère méprisant ou insultant de ses remarques et absence de volonté manifeste de nuire).
L’indemnité due pour licenciement manifestement déraisonnable doit être calculée en tenant compte non seulement de la rémunération déclarée, mais aussi de la rémunération perçue sans avoir fait l’objet des déclarations sociales et fiscales requises.
Dès lors que le motif grave de licenciement reproché à un conseiller en prévention n’a pas été retenu, celui-ci est également en droit de prétendre à l’indemnité spéciale de protection, dans la mesure où le licenciement n’est pas étranger à son indépendance. En l’espèce, il est avéré que l’intéressée a notamment été perçue par l’employeur comme faisant preuve d’une attitude négative et peu constructive parce qu’elle s’interrogeait sur la possibilité de conserver son indépendance en qualité de conseiller en prévention. Cette attitude reprochée découle essentiellement du questionnement exprimé par celle-ci par rapport au fait de perdre l’indépendance requise pour l’exercice de sa fonction. Est également pointée une demande de l’intéressée, relayée en C.P.P.T., tendant à la désignation d’un C.P.A.P. en vue de la gestion des risques psychosociaux dans l’entreprise, demande considérée comme relevant du même souci exprimé de garantie d’indépendance. Si l’intéressée s’est montrée critique vis-à-vis de l’employeur, elle ne s’est pas comportée d’une manière excédant les limites du raisonnable et peut dès lors prétendre à l’indemnité spéciale.
L’indemnité pour licenciement abusif due sur la base de l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 n’a pas la nature de dommages et intérêts octroyés en application du droit de la responsabilité civile. Elle est, en effet, due parce que l’employeur ne prouve pas avoir licencié l’ouvrier pour l’un des motifs de licenciement admis par la loi. Son montant, forfaitaire, qui ne dépend donc ni dans son principe ni dans son étendue de l’existence d’un dommage dans le chef de l’ouvrier, contribue à réparer la perte de l’emploi, perte qui ne constitue pas en soi un préjudice de nature exclusivement ni même principalement morale. Le précompte professionnel doit dès lors être retenu.
(Décision commentée)
La cour pose la question du caractère potentiellement discriminatoire de l’article 39 de la loi du 3 juillet 1978 avant sa modification par la loi du 7 octobre 2022 transposant partiellement la Directive (UE) n° 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 et interroge la Cour constitutionnelle.
En allant reprendre sa boîte à outils sur le chantier, au vu et au su de ses collègues, à un moment où il ignorait qu’il serait licencié quelques heures plus tard, le travailleur n’a pas agi comme le ferait l’auteur d’un vol. En effet, un vol implique une part de dissimulation et un dol spécial. Pour établir l’élément moral de l’infraction, l’employeur aurait à tout le moins dû adresser une mise en demeure à l’intéressé, lui enjoignant de rapporter les outils. Ce n’est qu’à défaut de les restituer, malgré une invitation expresse à le faire, que l’existence d’un vol aurait raisonnablement pu être établie dans son chef.
La confiance que l’employeur doit avoir dans le travailleur est immédiatement et définitivement rompue par la connaissance du fait que, malgré un premier avertissement et des affichages explicites rappelant l’interdiction de cette pratique, ce dernier a continué à prendre et publier sur Snapchat des photographies de pièces fabriquées au sein de l’entreprise, d’autant que la connaissance de ce comportement par un client peut avoir des conséquences graves en termes de publicité (les spécificités desdites pièces ne se retrouvant pas sur internet) et de responsabilité, ce dont il était tout à fait conscient.
En période de crise, il faut accepter, dans l’intérêt de chacun, que l’entreprise puisse prendre des mesures de rationalisation pour assurer sa survie et l’emploi, même lorsque ces mesures entraînent des modifications ou sont, comme en l’espèce où ces modifications n’étaient encore que projetées, susceptibles d’en entraîner. Dans ces conditions, il n’est pas possible de retenir que la société aurait commis un manquement contractuel d’une gravité telle qu’elle justifierait la sanction la plus radicale de la résolution du contrat à ses torts, alors qu’elle ne faisait qu’indiquer ses souhaits, pour des motifs exposés en toute transparence.
(Réforme Trib. trav. Liège, div. Liège, 8 octobre 2021, R.G. 19/3.879/A - décision commentée, ci-dessous).
Viole une clause contractuelle entre parties le travailleur qui, pendant son absence pour incapacité, a participé, à l’insu de son employeur et de concert avec sa compagne, également absente pour incapacité de travail, à la mise en place et à l’exercice d’une activité professionnelle, fût-elle non concurrente, alors que l’article 45 du règlement de travail dispose qu’il est défendu au travailleur d’exécuter un autre travail que celui qui lui a été confié. En outre, en se consacrant, à l’insu de son employeur, à des affaires commerciales continues tout en étant en incapacité de travail, il a trompé la légitime confiance de l’employeur.
Un employeur est libre de l’organisation du travail qu’il veut voir appliquée. Tant qu’il ne modifie pas de façon importante un élément essentiel du contrat d’un travailleur, il peut décider de modifier la manière dont le travail est organisé et la manière dont il est contrôlé. Il peut également décider de promouvoir un travailleur et le placer hiérarchiquement au-dessus d’un autre sans que cet autre travailleur puisse s’en plaindre pour autant que ses propres fonctions ne soient pas modifiées unilatéralement de façon importante et que cette décision ne soit pas abusive. Et ce n’est pas parce qu’il s’avère in fine que ce choix managérial n’était peut-être pas le meilleur (puisque, en l’espèce, le travailleur placé ‘au-dessus’ de lui a en finalement été licencié) qu’il était fautif dans le chef de l’employeur et encore moins qu’il constituait un acte équipollent à rupture.
La notion de faute n’est pas limitée par l’article 35 LCT aux seuls manquements à une obligation légale, réglementaire ou conventionnelle, mais s’entend aussi de toute erreur de conduite que ne commettrait pas un employeur ou un travailleur normalement prudent et avisé.
La jurisprudence Antigone ne permet pas de justifier n’importe quel comportement à l’égard de l’employeur. Il existe, en effet, d’autres moyens d’obtenir des preuves qu’en procédant à l’enregistrement de ses collègues à leur insu pour, ensuite, partager le contenu des enregistrements avec d’autres collègues. Ce comportement est d’autant plus grave que la travailleuse avait déjà reçu un avertissement précisant qu’elle avait été, directement ou indirectement, à l’origine de différents conflits, lesquels se manifestaient surtout par des disputes verbales plus ou moins violentes accompagnées ou non d’insultes, de grossièretés et d’allusions tendancieuses relatives à la vie privée de ses collègues ou supérieurs.
(Décision commentée)
Dès lors que l’incapacité de travail a été évaluée en relation avec le travail convenu, il est possible que le travailleur, tout en étant reconnu incapable d’effectuer son travail, puisse en exécuter un autre (lucratif ou non). Une activité réalisée pendant une période d’incapacité ne démontre dès lors pas forcément l’aptitude du travailleur à exercer le travail convenu. Pour être constitutive de faute grave, l’activité exercée pendant une période d’incapacité doit violer une clause contractuelle, être de nature à retarder l’échéance de la guérison ou être par essence même révélatrice de l’absence de réalité de l’incapacité. Ainsi, si le travailleur exerce un travail identique à celui faisant l’objet du contrat. Un dernier critère est retenu, étant qu’il faut avoir égard à l’ampleur et à la similarité des activités.
N’a pas dépassé les bornes du droit de critique qui participe à sa liberté d’expression le travailleur qui, n’étant plus dans les liens d’un contrat de travail avec l’entreprise et dont le droit à la liberté d’expression n’était, de ce fait, plus limité par une quelconque obligation contractuelle, publie, sur un groupe public Facebook, un commentaire certes négatif pour elle, mais qui reste néanmoins vague, modéré, dépourvu du moindre caractère calomnieux ou diffamatoire, voire simplement offensant, et qui s’enracine au demeurant dans une expérience objectivée par la reconnaissance du caractère manifestement déraisonnable de son licenciement.
La remise à la travailleuse par l’employeur du formulaire C4, établi par celui-ci, vaut notification du congé, l’employeur ayant là manifesté à l’égard de celle-ci sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque plusieurs faits sont invoqués comme motif grave et que le juge considère qu’un de ces faits suffit à justifier le congé pour motif grave, il ne doit plus examiner les autres faits (avec renvoi à Cass., 7 mars 1983, n° 6.546).
Par « employeur », il faut entendre la personne qui, dans l’entreprise, est investie d’une part de l’autorité patronale et dont a travailleuse peut, en raison des usages en vigueur au sein de celle-ci ou d’une apparence suffisante, raisonnablement supposer qu’elle est la personne à prévenir de son état de grossesse. Que cette personne ne soit, en vertu des statuts ou d’un règlement interne à l’entreprise, pas celle qui a compétence pour engager et licencier le personnel est, à cet égard, sans aucune incidence.
La circonstance que l’existence d’un motif grave n’ait pas été reconnue, faute pour l’employeur d’avoir rapporté la preuve des faits qu’il invoque, n’a pas pour effet de rendre le licenciement intervenu sur leur base manifestement déraisonnable dès lors que ceux-ci font suite à divers avertissements adressés au travailleur faisant état, dans son chef, de retards injustifiés, de manque de sérieux et d’insubordination, soit autant de faits relatifs à sa conduite et à son attitude qui n’ont, à l’époque fait l’objet d’aucune contestation de sa part et, pour deux d’entre eux, ont été reconnus par écrit, avec signature de sa main et mention « lu et approuvé ».
Accuser un travailleur de vol de manière infondée constitue une atteinte à son honorabilité et implique réparation, dont le montant, normalement élevé eu égard à la gravité des accusations, doit néanmoins être compensé en tenant compte des éléments dont disposait l’employeur, mais également de la façon dont le travailleur a exercé ses fonctions, à tout le moins la dernière année.
(Réforme Trib. trav. Liège, div. Neufchâteau, 25 octobre 2021, R.G. 20/75/A – ci-dessous).
Le fait pour un travailleur de manquer à ses obligations en matière d’information et de justification de ses absences, déjà fautif en soi, acquiert un caractère de gravité tel que son employeur peut légitimement considérer qu’il rend la poursuite des relations contractuelles immédiatement et définitivement impossible dès lors que ces manquements se répètent nonobstant l’insistance conciliante, didactique, patiente et progressivement plus ferme de ce dernier.
Lorsque les juridictions du travail refusent d’admettre un licenciement pour motif grave, l’indemnité visée à l’article 10 de la loi du 20 décembre 2002 est due si le juge constate soit que les motifs invoqués par l’employeur ne sont pas étrangers à l’indépendance du conseiller en prévention, soit, si le motif invoqué pour le licenciement de l’intéressé est son incompétence à exercer ses missions, que l’employeur ne prouve pas celle-ci (avec renvoi à Cass., 12 avril 2021, n° S.20.0050.N).
Dès lors qu’elle est compatible avec la fonction exercée et qu’elle n’est pas déraisonnable, la circonstance qu’une exigence n’était pas inscrite dans le contrat dès l’origine ne la rend pas abusive. Les nécessités de fonctionnement de l’entreprise pouvant évoluer en cours d’exécution du contrat, il n’est en effet pas abusif de mettre fin à celui-ci lorsque le fait de ne pas remplir cette exigence ne permet plus de rencontrer lesdites nécessités.
Il appartient aux juridictions sociales de vérifier si les motifs invoqués par l’employeur à l’appui d’un licenciement (i) entrent dans une des trois catégories de motifs légitimes définis par la C.C.T., (ii) sont exacts, (iii) constituent la cause réelle du licenciement et (iv) sont suffisamment pertinents pour justifier celui-ci. Le juge doit commencer par déterminer – en tenant compte des mécanismes de la charge de la preuve – si le motif correspond à la réalité. Le contrôle de la réalité du licenciement est un contrôle strict, non marginal. Une simple affirmation d’une des parties ne peut tenir lieu de preuve quant à l’existence d’un fait qu’elle est tenue de démontrer.
Des explications fournies oralement au travailleur quant aux faits qui lui sont reprochés ne peuvent entrer en ligne de compte pour apprécier la précision des motifs notifiés, cette exigence étant également destinée à permettre au juge, par définition absent des entretiens ayant pu avoir lieu entre parties, de statuer en connaissance de cause sur le caractère de gravité desdits motifs.
(Décision commentée)
On ne peut automatiquement postuler qu’en poursuivant l’exécution de son contrat pendant toute la période couverte par un préavis nul, le travailleur, qui n’était pas conscient de cette nullité ou ignorait les conséquences de la notification d’un préavis nul, aurait renoncé à se prévaloir du congé qui lui avait été notifié.
Dès lors que les relations de travail se sont dégradées pendant la période de préavis, on ne peut tirer aucune conclusion du fait que la travailleuse ait été déclarée définitivement inapte au travail par la médecine du travail plus d’un an après avoir été licenciée. En l’absence de mesures d’instruction complémentaires qui auraient pu démontrer que le motif de licenciement n’était pas celui invoqué par l’employeur, il est également indifférent que l’auditorat ait classé sa plainte pour donner priorité à la voie civile.
Lorsqu’il n’est pas établi que l’entretien s’est déroulé dans un contexte de violence verbale ou physique et qu’il n’est pas davantage rapporté que le travailleur a sollicité la présence d’un délégué syndical qui lui aurait été refusée, a demandé la suspension de l’entretien ou encore a requis de pouvoir contacter une tierce personne, on ne peut prétendre qu’il y a eu violation des droits de la défense, que le choix qui lui fut laissé entre la signature de la convention ou le licenciement pour faute grave soit révélateur d’une pression illicite ou injuste exercée à son égard, ni même que le fait de ne pas l’avoir prévenu des motifs de l’entretien soit constitutif d’un abus de droit alors que ce flou s’imposait pour éviter toute concertation entre auteurs du même comportement auxquels l’employeur voulait appliquer le même traitement après s’être assuré d’avoir entendu leur version des faits. Dans ce contexte, l’invitation qui lui fut faite de quitter la société sans avoir la possibilité de leur parler reste également cohérente.
Il importe peu que l’appropriation et le détournement de timbres remis aux clients lors d’actions promotionnelles soient ou non constitutifs d’une infraction de vol au sens de l’article 461 du Code pénal, dès lors que tout fait qui peut être considéré comme une faute est susceptible de constituer le motif grave permettant de résilier le contrat sans préavis ou avant l’expiration de son terme et que l’honnêteté dans les relations de travail constitue une obligation essentielle dont le non-respect est de nature à miner le sentiment de confiance qui doit présider dans les rapports entre parties.
Depuis l’entrée en vigueur de la CCT n° 109, la faute requise pour qu’il puisse être question d’abus de droit ne peut plus être constituée par le motif du licenciement, lequel ne peut plus faire l’objet que du contrôle prévu par ladite CCT (sous réserve du contrôle des motifs qui s’impose par ailleurs en cas de discrimination ou de protection contre le licenciement) mais uniquement par les seules circonstances du licenciement. Le dommage requis doit également se distinguer de celui qui résulte du motif du licenciement.
L’apparition du foyer de contamination au COVID-19 au sein d’une résidence pour personnes âgées ne saurait constituer une circonstance de nature à conférer soudainement aux manquements d’une auxiliaire de soins le caractère d’un motif grave, ce alors même que ces manquements ne rendirent manifestement pas, comme tels et à eux seuls, immédiatement et définitivement impossible la poursuite de ses prestations lorsqu’ils furent constatés à non moins de deux reprises par sa supérieure hiérarchique avant l’apparition de ce foyer de contamination. Le fait que le respect des règles sanitaires en vigueur s’imposait de manière absolue n’y change rien, puisqu’il apparaît que les mesures de contrôle et les sanctions dont ces règles faisaient l’objet sur le terrain n’étaient elles-mêmes pas aussi absolues, à tout le moins jusqu’à l’apparition de ce foyer de contamination, comme en atteste notamment le fait que nonobstant les manquements précédemment constatés dans son chef, l’intéressée ne se vit jamais adresser aucun avertissement écrit ni aucune sanction.
La sanction radicale qui lui fut alors infligée sous la forme d’un licenciement pour motif grave paraît ainsi manifestement disproportionnée, compte tenu de l’indulgence dont elle avait jusqu’alors bénéficié de la part de sa supérieure hiérarchique, comme de l’absence de tout (nouveau) manquement constaté dans son chef, qui aurait effectivement contribué à l’apparition de ce foyer de contamination alors que les règles sanitaires venaient de lui être rappelées à la suite des premiers symptômes qu’elle commença à présenter elle-même, sans pour autant être écartée immédiatement (confirme Trib. trav. Liège, div. Liège, 14 février 2022, R.G. 21/326/A ci-dessous).
Il n’apparaît pas que l’intention du législateur aurait été de garantir au travailleur protégé dont le contrat est suspendu (article 9 de la loi du 19 mars 1991) un revenu fiscal net annuel identique correspondant à la rémunération brute diminuée non seulement des cotisations de sécurité sociale et du précompte professionnel, mais également des impôts proprement dits, ce revenu étant variable en fonction de facteurs étrangers à l’emploi. En outre, la notion de « rémunération nette » vise celle qui subsiste après la déduction des cotisations de sécurité sociale et du précompte professionnel et non après celle de ces cotisations de sécurité sociale et des impôts proprement dits. Le travailleur doit dès lors percevoir un montant net égal à la rémunération mensuelle nette (soit après les retenues de sécurité sociale et du précompte professionnel) et en tenant compte de l’ensemble des avantages nets, conformément à l’arrêté royal du 21 mai 1991, le calcul devant s’opérer en soustrayant de la rémunération nette de référence le montant net de l’allocation de chômage.
En liant l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles malgré la faute grave commise par le travailleur, qui constitue le critère légal de la notion de motif grave, au critère, qui lui est étranger, de la disproportion entre cette faute et la perte de son emploi, le juge violerait l’article 35, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 (avec renvoi à Cass., 6 juin 2016, n° S.15.0067.F)
(Décision commentée)
L’employeur, au sens de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971, est la personne qui, dans l’entreprise, est investie d’un pouvoir d’autorité patronale et dont la travailleuse peut raisonnablement comprendre qu’elle est la personne à informer de sa grossesse, et ce sur la base des usages valant en interne ou de l’apparence donnée. Ce n’est pas parce que le gérant de la société est le représentant fixe de celle-ci et qu’il signe les contrats de travail ou les lettres de licenciement qu’il doit être considéré comme étant la seule personne ayant la qualité d’employeur. En l’espèce, la gérante du magasin peut être considérée comme telle, dans la mesure où elle était investie d’un pouvoir d’autorité dans l’entreprise.
La seule invocation de dispositions légales à l’appui d’une demande de dommages et intérêts pour la perte d’une chance de conserver son emploi ne permet pas d’en déduire qu’une demande d’indemnité pour abus de droit de licencier, à supposer qu’elle repose sur les mêmes dispositions, serait virtuellement comprise dans la première, le(s) fondement(s) juridique(s) invoqué(s) ne se confondant pas avec l’objet d’une demande. Il s’agit ainsi d’une demande nouvelle qui, même fondée sur un fait ou un acte invoqué dans la citation conformément à l’article 807 du Code judiciaire, ne bénéficie pas de l’effet interruptif de la prescription.
(Décision commentée)
Il appartient à un employeur estimant que son travailleur n’a pas à apposer sur son lieu de travail des affiches à caractère humoristique dont le contenu lui paraît offensant ou de nature à décrédibiliser son autorité, dans un premier temps, de faire une mise au point avec lui. Ce n’est que si celle-ci - d’autant plus nécessaire en l’absence de règle précise sur ce plan au sein de l’entreprise - est restée lettre morte qu’une autre mesure aurait, dans un second temps, pu être envisagée.
Une personne peut être engagée sur le fondement d’un mandat apparent si l’apparence lui est imputable, c’est-à-dire si elle a, librement, par son comportement, même non fautif, contribué à créer ou à laisser subsister cette apparence. Le travailleur peut se contenter de démontrer que l’employeur a laissé croire, même sans malice, que l’auteur du congé avait le pouvoir de le licencier. Il en est ainsi notamment lorsque le congé est donné par le responsable du personnel alors qu’il n’a pas reçu mandat pour le faire. La légitimité de la croyance du tiers est une question de fait, la doctrine distinguant la situation du travailleur subalterne et celle de l’administrateur-délégué d’une société (le premier, s’il est licencié par une personne dont l’employeur conteste ultérieurement les pouvoirs, pouvant invoquer à l’appui de sa croyance légitime notamment le fait que cette personne s’est présentée comme « chef du personnel », et le second, eu égard à l’importance de ses fonctions, ne pouvant ignorer le contenu de dispositions statutaires – lorsque celles-ci prévoient que la décision de licencier ne peut être prise que par deux administrateurs ou par l’ensemble du conseil d’administration).
Si le travailleur adresse à son employeur une demande afin de connaître les motifs qui ont conduit à son licenciement et que, soit l’employeur répond adéquatement à sa demande, soit il a déjà communiqué d’initiative les motifs au travailleur, l’article 10, 1er tiret organise un partage de la charge de la preuve, chacun devant prouver les faits qu’il allègue.
Si l’employeur n’y répond pas ou ne répond pas de manière adéquate, l’article 10, 2e tiret opère un renversement de la charge de la preuve et il doit prouver la réalité des motifs qu’il invoque, la correspondance avec l’un des trois motifs autorisés et le lien causal entre ces motifs et la décision de licencier et que, sur la base de tels motifs, un employeur normal et raisonnable aurait pris la décision de licencier.
Si le travailleur ne formule aucune demande régulière, que l’employeur ait ou non communiqué les motifs d’initiative, l’article 10, 3e tiret renoue avec le droit commun de la preuve.
La résiliation d’un contrat par volonté unilatérale d’une partie est un acte juridique unilatéral réceptice qui produit ses effets de plein droit et d’une manière irrévocable dès l’instant où il a été adressé à l’autre partie et que celle-ci l’a reçu ou pouvait en prendre connaissance. La validité du congé n’est pas subordonnée à l’acceptation de son destinataire et ce dernier peut se prévaloir de ses effets dès sa manifestation à son égard. Dans le même ordre d’idée, le congé ne pourra être opposé par son auteur à l’autre partie qu’au moment où celle-ci aura été mise à même d’en prendre connaissance.
(Décision commentée)
En règle, une société anonyme agit par ses organes. Ceux-ci peuvent déléguer des pouvoirs spéciaux, déterminés par leurs soins, à des mandataires spéciaux. Dans une société anonyme, il n’est pas exigé que l’organe de gestion soit expressément autorisé, par les statuts, à conférer un mandat spécial ; cette faculté de donner mandat fait partie de ses pouvoirs ordinaires. Ces délégations de pouvoirs spéciaux sont soumises aux règles ordinaires du mandat.
Le mandataire spécial investi par un organe de la société peut, éventuellement, se voir conférer le pouvoir de désigner lui-même un mandataire pour exécuter le mandat.
Le fait qu’une réceptionniste dont la fonction exige qu’elle manipule quotidiennement de l’argent pour le compte de son employeur se soit approprié, en connaissance de cause, de l’argent que lui avait remis un client en paiement de sa place de parking constitue une faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible la poursuite de la relation de confiance qui doit exister entre employeur et travailleur.
Une indemnité de 10 semaines est retenue, les faits quoique non prouvés n’étant pas ‘complètement fantaisistes’ et s’agissant peut-être simplement d’une mauvaise appréciation de la situation.
Un employeur ne peut plus accorder aucune confiance à un ouvrier qui, non content de refuser d’exécuter le travail qui lui est légitimement assigné par son responsable, profère insultes et menaces et, malgré un rappel à l’ordre dans le cadre d’un avertissement formel, persiste à adopter un comportement sexiste et peu respectueux à l’égard de ses collègues.
Dès lors que le licenciement pour faute grave a été validé, il ne peut être question de considérer qu’il est manifestement déraisonnable. Ce licenciement est, évidemment, fondé sur la conduite du travailleur et aurait été décidé par un employeur normal et raisonnable.
Ni les incertitudes auxquelles la société a été confrontée du fait de la crise économique due à la pandémie de Covid-19, ni l’obligation dans laquelle son management s’est trouvé de devoir maîtriser ses coûts ne peuvent, en tant que tels, suffire à justifier un licenciement. Encore faut-il démontrer un rapport de cause à effet entre cette situation et ce licenciement, ce sous peine que la décision de rupture apparaisse comme ayant été prise de manière inconsidérée et prématurée faute d’avoir attendu de pouvoir mesurer quelles pourraient être les conséquences exactes de cette crise sanitaire dans les mois à venir.
C’est à bon droit qu’un employeur estime ne plus pouvoir collaborer, de manière immédiate et définitive, avec un contrôleur de gestion, membre du comité de direction, enfreignant sciemment les règles qu’il est censé faire appliquer et abusant de son pouvoir pour obtenir un avantage indu.
(Décision commentée)
Les dommages et intérêts dus en réparation du préjudice causé par l’employeur suite à un abus de droit de licencier sont une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » et réparent le préjudice causé par la faute commise par l’employeur à l’occasion de la rupture et donc de la fin du contrat. Que cette indemnité pour abus de droit sanctionne un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise également un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier, pour la cour, une autre lecture de la disposition. Le texte de l’article 9, § 3, est clair et ne prête pas à une autre interprétation.
Elle devrait dès lors s’effacer devant l’indemnité que le travailleur obtiendrait en raison d’un abus de droit de licencier, approche que la cour considère se concilier parfaitement avec la hiérarchie des sources des obligations dans les relations de travail telle que fixée à l’article 51 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires.
Elle en conclut que c’est au travailleur d’articuler ses demandes au mieux de ses intérêts en tenant compte de cette règle. Il faut traiter d’abord la demande d’indemnité pour licenciement abusif et, ensuite, s’il échet, celle pour licenciement manifestement déraisonnable.
(Décision commentée)
L’indemnité de stabilité d’emploi due dans le secteur bancaire en application de la convention collective de travail du 2 juillet 2007 constitue bel et bien une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la CCT n° 109 et ne peut être assimilée à aucune des quatre indemnités pour lesquelles le cumul serait permis en application de celui-ci. Que l’indemnité de stabilité d’emploi puisse sanctionner un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise aussi un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier une autre lecture dudit article, dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation.
L’impact négatif sur la relation de confiance d’actes posés sciemment et en cascade en infraction à une procédure interne (secteur bancaire), précisément mise en place dans un cadre légal contraignant pour prévenir tout dommage, non seulement ne peut être relativisé en considération de l’absence de préjudice, mais apparaît dirimant. La cour conclut en l’espèce que, même prises isolément, les fautes successives constatées dans la gestion d’un dossier ont pu rendre immédiatement et définitivement impossible la poursuite de toute collaboration professionnelle entre les parties.
(Décision commentée)
En soi, il pourrait sans doute être défendu que l’indemnité de stabilité d’emploi propre au secteur bancaire ne constitue pas, à strictement parler, une indemnité prévue « dans le cadre d’une procédure de protection particulière contre le licenciement » au sens de l’article 30, § 4, de la loi du 3 juillet 1978. En effet, elle trouve sa cause, non pas dans le licenciement lui-même, mais plus sûrement, en amont de la décision de licencier, dans le non-respect par l’employeur de la procédure qu’il était tenu de suivre dès lors qu’il envisageait de procéder au licenciement du travailleur. En revanche, l’indemnité de protection liée au congé de paternité constitue bien une (autre) « indemnité de protection » légale avec laquelle l’indemnité de stabilité d’emploi ne peut être cumulée en application de l’article 2, § 3, alinéa 2, de la C.C.T. sectorielle du 2 juillet 2007. Quand bien même les deux indemnités ne poursuivraient pas le même objectif et ne répareraient pas le même dommage, cela ne serait pas de nature à justifier une autre lecture dudit article dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation.
Au demeurant et en tout état de cause, l’indemnité de protection liée au congé de paternité et l’indemnité de stabilité d’emploi du secteur bancaire partagent un objectif commun, celui de protéger l’emploi en incitant à sa conservation. L’existence éventuelle d’un objectif dérivé additionnel propre à l’indemnité de protection liée au congé de paternité ne contredit pas le fait que les deux indemnités poursuivent un même objectif.
Le sentiment d’injustice ressenti par le travailleur licencié, qui est probablement commun à la plupart des ruptures décidées unilatéralement par l’employeur, ne constitue pas en soi un dommage moral distinct de celui déjà couvert par l’indemnité compensatoire de préavis.
Il ne peut être soutenu que les articles 4, 5 et 16 et 17 de la loi du 19 mars 1991 sont contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’ils traitent de manière similaire des catégories d’entreprises différentes par leur taille, en prévoyant le même montant en ce qui concerne l’indemnité de protection à verser, sans tenir compte de leur taille ainsi que de leur capacité financière, faisant peser sur les petites et micro-entreprises un risque disproportionné par rapport au but et à l’esprit de la loi .
Dès lors que le législateur vise un effet dissuasif déterminé par la hauteur des indemnités pour éviter des licenciements injustifiés tant des candidats élus que des candidats non élus, il ne saurait être question d’un risque disproportionné que le législateur ferait courir aux employeurs de plus petite taille par rapport au but et à l’esprit de la loi. Il suffit aux entreprises, quelle que soit leur taille, de respecter la procédure de licenciement prévue par la loi du 19 mars 1991 pour éviter que le risque financier se réalise.
On n’aperçoit pas en quoi l’équivalence de protection dont dispose les candidats non élus et les candidats élus contrevient au droit de travailler et à la liberté d’exercer une profession librement choisie ou acceptée ou à la liberté d’entreprise consacrée par les articles 15 et 16 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Comme l’a jugé la Cour Constitutionnelle (arrêt n° 115/12 du 10 octobre 2012 ), le législateur belge a dans le cadre de son pouvoir d’appréciation en matière socio-économique, élaboré une solution équilibrée quant à la protection à reconnaître aux travailleurs qui, en raison de leurs tâches de représentants du personnel au sein du comité pour la prévention et la protection au travail, risquent d’être l’objet de mesures de représailles de la part des employeurs et a étendu cette protection au bénéfice des candidats non élus, lesquels pourraient également faire l’objet de pareilles mesures. La procédure de licenciement à respecter n’entrave d’aucune manière la liberté d’établissement des entreprises.
(Décision commentée)
Pourvu que le licenciement soit fondé sur des motifs étrangers à la prise du congé de paternité rien n’oblige un employeur à faire précéder sa décision de rompre d’un quelconque avertissement, ni même d’attendre l’écoulement du délai de protection visé à l’article 30, § 4, alinéa 4, de la loi du 3 juillet. Sous cet angle, s’il n’est pas établi que le licenciement est lié à la prise du congé de paternité, il n’y a pas, dans le chef de l’employeur, d’abus de son droit de licencier, même si le travailleur a été licencié avec effet immédiat à son retour de congé de paternité sans avoir jamais reçu le moindre avertissement et que, d’une certaine manière, l’annonce du licenciement a pu lui paraître brutale.
L’indemnité de stabilité d’emploi due dans le secteur bancaire en application de la convention collective de travail du 2 juillet 2007 constitue bel et bien une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la C.C.T. n° 109 et ne peut être assimilée à aucune des quatre indemnités pour lesquelles le cumul serait permis en application de celui-ci. Que l’indemnité de stabilité d’emploi puisse sanctionner un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise aussi un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier une autre lecture dudit article, dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation.
Le fait qu’un travailleur n’ait pas été retenu, au terme de processus de reclassement interne, pour les diverses fonctions pour lesquelles il avait postulé n’est pas fautif en soi, le découragement qu’il a pu connaître à l’issue de ceux-ci ne se confondant pas avec une faute de son employeur qui engagerait la responsabilité de ce dernier.
Compte tenu de leur ancienneté et à défaut d’éléments indiquant que ces griefs auraient encore été d’actualité au moment de son licenciement ou, à tout le moins, qu’il a été motivé par ceux-ci, deux lettres d’avertissement adressées au travailleur ne peuvent suffire à prouver que la cause de la rupture intervenue plusieurs années après leur envoi est étrangère au crédit-temps pris par l’intéressé.
La mise en place par un employeur d’outils servant à évaluer les connaissances de ses travailleurs participe d’une saine gestion des ressources humaines et, plus globalement, de l’entreprise. Ce que fera l’employeur in fine des informations recueillies à travers l’usage de ces outils relève de sa liberté d’entreprendre et ne regarde pas le travailleur, à tout le moins au niveau décisionnel. Dans cette optique, le fait, pour un travailleur, de refuser de se soumettre à un test d’évaluation des connaissances parce qu’il le jugeait inutile au vu de la finalité qu’il percevait, revient à s’immiscer de manière inacceptable dans la direction de l’entreprise et à manquer à son devoir de loyauté. En outre, dès lors que la participation à ce test lui avait été imposée par son responsable, son attitude traduit aussi une contestation ouverte de l’autorité de l’employeur au mépris de l’obligation d’agir conformément aux ordres donnés en vue de l’exécution du contrat. Son licenciement n’apparaît donc pas manifestement déraisonnable.
À la supposer applicable, la loi belge ne contreviendrait pour autant pas à la Convention (OIT) n° 158 puisque cette dernière précise que le droit du travailleur de pouvoir se défendre contre les allégations formulées par son employeur n’existe pas lorsque l’on ne peut raisonnablement attendre de ce dernier qu’il lui offre cette possibilité. Tel est assurément le cas lorsqu’un licenciement est justifié par des motifs économiques s’inscrivant dans le cadre d’un plan d’action sociale conclu avec les organisations syndicales après que le statut d’entreprise en difficulté fut reconnu à la société.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 21 octobre 2022, R.G. 22/820/A ci-dessous en toutes ses dispositions.
En application de l’article 101, alinéa 1er, in fine, de la loi du 3 juillet 1978, l’employeur ne peut échapper au paiement de l’indemnité d’éviction que s’il établit qu’il ne résulte de la rupture aucun préjudice pour le représentant de commerce. Il doit en apporter la preuve. L’absence de préjudice ne peut être admise que s’il est établi que le représentant a conservé, après son licenciement, la clientèle apportée ou s’il a abandonné la valorisation de celle-ci. La seule circonstance qu’il n’ait plus exercé une activité de représentation commerciale ne démontre pas l’absence de préjudice. Le statut du travailleur après la rupture du contrat (chômage, prépension ou mutuelle) n’est pas le fait de son choix mais est en lien avec la rupture du contrat qui a été imposée. L’absence de préjudice en termes de perte de clientèle n’est pas établie de ce fait.
La protection débute au moment du dépôt de la plainte et non de l’information du dépôt donnée à l’employeur, que ce soit par le conseiller en prévention en cas de plainte motivée au sein de l’entreprise ou par les autres personnes ayant reçu la plainte. Elle existe dès le dépôt parce que le législateur imagine à juste titre que l’employeur peut être informé de l’existence d’une telle plainte avant l’annonce officielle par le conseiller en prévention ou les autres acteurs l’ayant reçue. Le législateur a entendu protéger le travailleur contre un licenciement en représailles à ce dépôt.
Si la volonté du législateur avait été de sanctionner un employeur licenciant un travailleur pour des motifs en lien avec les faits invoqués dans la plainte, il n’aurait pu faire débuter la protection qu’à la date à laquelle cet employeur aurait effectivement eu connaissance du contenu de la plainte. Il n’y a dès lors pas lieu de vérifier si les motifs invoqués à l’appui d’un licenciement après le dépôt d’une plainte sont étrangers aux faits invoqués dans celle-ci.
(Décision commentée)
Est abusive sur pied de l’article 63 de la loi relative aux contrats de travail (en vigueur à la date du licenciement) la décision de licencier une travailleuse occupée dans une E.T.A. sans prendre en considération la limitation de ses capacités professionnelles liée à sa situation de handicap. Sous l’angle des nécessités de l’entreprise, une E.T.A. ne peut se contenter de mettre en avant des exigences de productivité. La cour rappelle le subventionnement des institutions publiques aux fins d’assurer l’occupation de personnes en situation de handicap en dépit des limitations de leur capacité professionnelle. Les nécessités de ce type d’entreprise ne sont dès lors pas prioritairement économiques mais d’abord sociales, la cour relevant que l’E.T.A. n’établit pas le bien-fondé de sa décision à cet égard non plus.
Constitue un abus de droit le fait d’appliquer la procédure d’écartement de sa fonction d’un conseiller en prévention dans le but d’éviter la procédure, plus lourde, visant à son licenciement, laquelle peut déboucher sur une interdiction de licencier. Il y a, de ce fait, perte pour l’intéressé de la chance qu’il avait de conserver son emploi.
Si le cumul d’une indemnité de protection contre le licenciement d’un conseiller en prévention avec celle due pour licenciement manifestement déraisonnable est prohibé, il n’en va pas de même du cumul de celle-ci avec l’indemnité de protection contre l’écartement due sur la base de l’article 10 de la loi du 20 décembre 2002.
Un conseiller en prévention dans l’enseignement libre subventionné n’est ni un membre subsidié, ni un membre tout court du personnel administratif. Il n’est de ce fait pas exclu de l’application de la C.C.T. n° 109. Si celle-ci ne lui est pas applicable en cas de licenciement, elle l’est bien en cas de mesure d’écartement prise à son endroit (art 2, § 3 de la C.C.T. n° 109) .
Le fait de ne pas avoir averti son employeur de son incapacité ou de ne l’en avoir averti que tardivement ne constitue, en tout état de cause, pas un acte équipollent à rupture mais un simple manquement contractuel, susceptible au demeurant de donner lieu à un refus du bénéfice du salaire garanti.
Il apparaît évident que, en vertu du principe d’exécution de bonne foi des conventions, commet une faute l’employeur qui signe un avenant au contrat d’un travailleur réduisant ses prestations de travail à un mi-temps, ce alors qu’il savait qu’il allait licencier l’intéressé le lendemain.
La rémunération brute visée à l’article 65, § 2, alinéas 6 et 7, de la loi du 3 juillet 1978 comprend non seulement la rémunération de base, mais également tous les autres éléments de nature rémunératoire et avantages accordés en vertu du contrat. L’indemnité correspondante doit dès lors inclure non seulement la rémunération qui constitue la contrepartie du travail fourni, c’est-à-dire la rémunération en espèces et les avantages en nature, mais également les avantages octroyés en vertu du contrat qui ne constituent pas cette contrepartie, ainsi le double pécule de vacances.
Il ressort de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 février 2003 que, parce que n’exerçant pas de mandat, un délégué suppléant ne fait pas partie de la délégation syndicale et, sous réserve de dispositions plus favorables prévues par C.C.T. sectorielle ou d’entreprise, ne bénéficie donc de la protection assurée à ses membres que s’il remplace le délégué effectif, pour la durée de ce remplacement. La matière étant d’ordre public et imposant des contraintes à l’employeur, pareilles C.C.T. ne peuvent toutefois faire l’objet d’une interprétation extensive. Ainsi doit-on considérer que si, en adoptant la C.C.T. du 26 mars 2014 régissant les principes relatifs à la délégation syndicale au sein de la commission paritaire des entreprises de travail adapté, les partenaires sociaux avaient voulu étendre la protection aux membres suppléants, ils l’auraient clairement mentionné, ce d’autant que l’article 3 de ladite C.C.T. prévoit que, lorsqu’elles ne peuvent désigner un membre de la délégation syndicale qui n’a pas été candidat aux dernières élections sociales ou si aucun candidat ne manifeste son intérêt pour le mandat, les organisations syndicales s’engagent à ne pas augmenter le nombre de protégés dans l’entreprise, ce qui démontre leur volonté de limiter leur nombre et non de l’étendre, comme, par exemple, aux suppléants.
Un employeur peut, lorsqu’il viole ses obligations en termes de paiement de la rémunération convenue, engager sa responsabilité civile pour inexécution fautive et se voir ainsi opposer par le travailleur, selon le cas, une exception d’inexécution, une action en exécution forcée, un acte équipollent à rupture, une action en résolution judiciaire ou encore une démission pour motif grave, le juge disposant du pouvoir de requalifier, dans le respect des conceptions factuelles de la cause et de l’objet, le mode de dissolution initialement invoqué par l’intéressé.
S’il ne peut être déduit, du simple fait que l’employeur a manqué à son obligation de payer ponctuellement la rémunération, qu’il avait l’intention de rompre le contrat, même malgré une mise en demeure, le paiement systématiquement tardif de celle-ci peut, en revanche, être considéré comme une modification unilatérale d’un élément essentiel du contrat, pour laquelle l’intention de rompre n’est pas requise.
Un changement de statut, d’ouvrier à employé, ne constitue pas un obstacle à l’application de l’article 67 de la loi du 26 décembre 2013, quand bien-même il aurait eu lieu après le 1er janvier 2014. Il convient donc d’additionner, d’une part, le délai de préavis auquel le travailleur aurait eu droit au 31 décembre 2013 selon les règles applicables à cette date et sur la base de l’ancienneté alors acquise, en tenant compte du statut qui était alors celui de l’intéressé, et, d’autre part, le délai de préavis lié à l’ancienneté de service acquise à partir du 1er janvier 2014 selon les règles applicables dans le régime introduit à cette date, en partant du principe qu’une nouvelle ancienneté a, alors, commencé sans que la qualité d’employé ou d’ouvrier soit encore d’aucune utilité puisque les délais de préavis prévus à l’article 37/2 de la loi du 3 juillet 1978 sont les mêmes pour l’une et l’autre catégories.
Commet une faute la société qui ne prend pas suffisamment en compte l’appel à l’aide d’une travailleuse qu’elle licencie dans la foulée d’un incident, sans en rediscuter préalablement avec elle. Elle n’était certes pas formellement tenue d’entendre l’intéressée avant de la licencier, d’autant que des entretiens de mise au point avaient déjà eu lieu dans les semaines précédentes. Dans la mesure où ces entretiens n’ont pas été menés en présence d’un délégué syndical et où l’éventualité d’un licenciement n’y fut pas abordée, il incombait toutefois à l’employeur, compte tenu de la tournure négative des événements, de donner suite à la demande expresse de la travailleuse d’être entendue en présence de son représentant syndical avant de lui notifier son licenciement, ce qui aurait, à défaut de lui permettre de préserver son emploi, certainement servi à atténuer le choc de la rupture.
S’il apparaît un peu cavalier d’informer le travailleur de son licenciement par SMS, ce procédé ne constitue toutefois pas une faute en soi dès lors que, une lettre de licenciement lui ayant aussi été adressée par courrier recommandé et par pli simple, ce texto constituait simplement un moyen sûr de l’aviser qu’il ne devait plus se présenter sur son lieu de travail.
Avant de constater la rupture du contrat d’un travailleur absent à ses torts, un employeur se doit de s’informer auprès de l’intéressé du motif de son absence et/ou le mettre en demeure de la justifier ou, à défaut, de se représenter au travail. Son constat ne sera validé que si le travailleur a laissé sans suite cette ou ces demande(s) de justification et/ou mise(s) en demeure, dans un contexte permettant de présumer qu’il n’entendait plus respecter ses obligations contractuelles et/ou poursuivre l’exécution de son contrat. Telle présomption joue dans le chef de qui n’a réservé aucune suite aux différents courriers électroniques, ou recommandés, qui lui furent adressés en un mois et, ce faisant, a persisté dans ses manquements, fondant ainsi son employeur a considérer que cette persistance était révélatrice de sa volonté de ne plus exécuter son contrat ou, à tout le moins, de ne pas en poursuivre l’exécution selon les modalités qui leur étaient applicables, ce, a fortiori, lorsque, dans ses recommandés, ce dernier avait clairement précisé que telle serait sa conclusion à défaut de suite utile.
Le fait d’avoir quitté son travail sans avoir averti son supérieur hiérarchique, s’il a déjà fait l’objet d’un avertissement, peut d’autant moins justifier un licenciement immédiat que le travailleur avait informé le responsable des ressources humaines de son départ.
Dès lors qu’il était en mesure de se déplacer, commet une faute le travailleur, absent pour cause d’épuisement moral et physique en raison, notamment, de la pression subie au sein de la société, qui, sommé par son employeur de rapporter son ordinateur portable professionnel sur son lieu de travail, mandate, pour ce faire, un tiers inconnu de l’entreprise. En soi, cette faute n’est toutefois pas suffisamment grave pour justifier son licenciement immédiat à partir du moment où (i) il a pris cette décision sans intention de nuire mais uniquement dans le but de préserver sa santé en évitant de nouvelles pressions et (ii) l’ordinateur était protégé par des mots de passe empêchant le tiers mandaté d’y avoir accès, de sorte qu’il n’y a pas eu violation possible de la clause de confidentialité par laquelle il était tenu.
Un employeur peut, en cours de procédure, invoquer d’autres motifs que ceux qu’il avait spontanément communiqués au travailleur. Il supporte, en ce cas, intégralement la charge de la preuve.
En matière de contrats de travail, la preuve est libre. C’est ainsi, et notamment, qu’elle peut être rapportée par la production du C4 que l’employeur a remis au travailleur, à charge pour l’intéressé, s’il conteste être l’auteur de la rupture, d’établir qu’il y va d’un document de complaisance, établi sur demande du travailleur, dont les mentions ne correspondraient pas à la réalité et/ou ne seraient pas sincères, ce qui serait, du reste, inexcusable dans la mesure où il aurait, ce faisant, clairement établi un faux en écriture et prêté son concours à une fraude sociale, ce qui ne correspondrait assurément pas au comportement d’un employeur raisonnable.
Si le fait de désactiver le badge d’accès du travailleur aux locaux de l’entreprise sans l’en informer au préalable est évidemment regrettable, il ne suffit pas à conférer au licenciement de l’intéressé un caractère abusif en ce que ce comportement témoignerait d’un manquement aux égards élémentaires que se doivent les parties au contrat ou serait contraire au principe de l’exécution de bonne foi de celui-ci.
Une indemnité correspondant à dix-sept semaines de rémunération est proportionnée et adéquate dès lors que, le motif invoqué n’étant ni établi, ni même documenté, la décision paraît être marquée par la mauvaise foi de l’employeur, qui s’est employé à fabriquer une motivation acceptable du licenciement intervenu, mais, ce faisant, porte inutilement et gratuitement atteinte à l’image du travailleur licencié.
Si les juridictions du travail ne sont pas compétentes pour déterminer le caractère imposable ou non de l’indemnité due pour licenciement manifestement déraisonnable, ni, a fortiori, les modalités (assiette, taux, etc.) de l’imposition, elles le sont incontestablement pour ce qui est de la nature du dommage couvert par cette indemnité. Le montant de celle-ci n’étant pas fixé forfaitairement, mais déterminé par le juge dans la fourchette fixée par la C.C.T. n° 109, il y a lieu de considérer qu’elle répare un dommage moral individualisé, à charge pour l’administration fiscale d’en tirer les conséquences en termes d’imposition, un recours administratif, puis judiciaire étant ouvert sur ce point au contribuable.
Il appartient aux cours et tribunaux de déterminer la nature d’une clause de stabilité d’emploi convenue par C.C.T. en fonction de son incidence sur les relations de travail entre parties : si cette clause est susceptible d’affecter, positivement ou négativement, leurs droits respectifs, il s’agira d’une clause normative individuelle. Ainsi en va-t-il lorsque, en cas de licenciement pour motif grave, ladite clause impose à l’employeur une obligation spécifique d’information de la délégation syndicale, modalisant de la sorte l’exercice de son droit de rupture ; elle affecte, dans cette mesure, les droits respectifs de l’employeur et du travailleur et a ainsi trait aux relations individuelles entre parties au sens de l’article 26, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968.
Des irrégularités, déjà fautives en elles-mêmes, présentent un caractère particulièrement grave dès lors que, loin de procéder d’erreurs involontaires et/ou d’imprudences accidentelles de la part du travailleur, elles ont un caractère manifestement conscient et délibéré dans son chef et que, loin de ne concerner que quelques faits isolés, elles sont manifestement habituelles et récurrentes.
Le refus de l’employeur de communiquer l’ensemble des preuves en sa possession au conseil de son travailleur, en lui indiquant que celles-ci seraient à la disposition du tribunal si son client décidait de le saisir bien que sachant parfaitement que de telles preuves pourraient être produites n’est nullement légitime et viole l’article 35, dernier alinéa, de la loi du 3 juillet 1978, qui met à charge de l’auteur du licenciement d’en apporter la preuve. Il n’affecte toutefois pas la validité du congé, s’agissant plutôt d’une attitude déloyale de l’employeur postérieure au licenciement – et réparable en cours de procédure – qui n’aurait de conséquences sur le droit à réparation du travailleur que si ce dernier venait, après introduction du litige, à renoncer à sa demande, connaissance une fois prise du dossier de pièces ou, au contraire, avait renoncé à introduire un recours dans l’ignorance où il se trouvait des éléments de preuve à disposition de son employeur.
Un licenciement fondé sur une discrimination prohibée, l’état de santé du travailleur, n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable. Un tel licenciement est manifestement déraisonnable.
(Décision commentée)
En vertu du principe général de bonne administration audi alteram partem, l’autorité publique doit entendre la personne lorsqu’une mesure grave est envisagée pour des motifs liés à elle-même ou à son comportement. Dès lors que l’employeur a agi avec légèreté et précipitation, ne permettant pas au travailleur de se défendre, il y a faute. Pour ce qui est du dommage, il doit s’agir d’un dommage distinct du préjudice matériel et moral causé par le licenciement lui-même. Il doit être certain et non seulement hypothétique, conjectural ou éventuel. Si est invoquée la théorie de la perte d’une chance, la chance doit être réelle. Le demandeur a la charge de la preuve. La perte de chance doit être appréciée en fonction des circonstances particulières propres à la cause, devant être certaine et pas seulement probable ou éventuelle.
Le caractère abusif d’un licenciement n’est pas lié à des éléments ultérieurs au congé, lequel, en tout état de cause, affecte nécessairement la capacité financière du travailleur. Il n’y a, dans cette mesure, pas lieu de tenir compte des difficultés auxquelles il a été confronté après son licenciement en raison de la perception tardive de son indemnité compensatoire de préavis.
Un employeur ne peut invoquer comme nécessité de fonctionnement un événement qu’il a lui-même créé (à savoir procéder au remplacement d’une travailleuse en incapacité de travail pour, précisément, répondre auxdites nécessités) et tirer argument de cette situation pour s’opposer au retour de l’intéressée une fois sa santé recouvrée en préférant conserver sa remplaçante à son service, ce alors même qu’aucun manquement professionnel n’a jamais été reproché à la victime de l’incapacité.
Une psychologue communiquant les données d’un chamane à une patiente commet une faute déontologique par défaut de respecter, dans l’exercice de sa profession, une attitude responsable, de qualité et empreinte de conscience professionnelle. Conformément aux règles de déontologie propres à la profession, il lui appartenait, en effet, de dissuader cette dernière de recourir à des alternatives thérapeutiques qui ne s’inscrivent pas dans le cadre « des théories et des méthodes reconnues par la communauté scientifique en tenant compte des critiques et de l’évolution de celle-ci » (article 32, § 4, de l’arrêté royal du 2 avril 2014) et, quand bien même la patiente aurait fait montre d’une réceptivité certaine à l’égard des sciences occultes, de l’orienter vers un service spécialisé de santé mentale aux fins de soulager sa souffrance psychologique.
Il appartient à l’employeur de prouver que les motifs du licenciement sont étrangers à la plainte et non que les motifs sont étrangers aux motifs relatifs au contenu de la plainte. La protection du travailleur débute au dépôt de celle-ci de sorte qu’il arrive régulièrement qu’un employeur licencie un travailleur sans être au courant qu’il a déposé plainte et par conséquent qu’il est protégé.
Dès lors que les faits reprochés à un travailleur sont pratiquement identiques à ceux qui le sont à son collègue, rien ne justifie une différence d’appréciation de leur gravité. Partant, si l’un d’entre eux ne fait l’objet que d’un simple avertissement, il y a lieu de conclure que la poursuite de la collaboration professionnelle n’était pas davantage impossible dans le chef de l’autre.
Commet assurément un acte équipollent à rupture l’employeur qui, non seulement, ne constate pas par écrit, en temps utile la diminution de l’horaire de travail qu’il entend imposer mais encore n’accepte pas que l’intéressé conteste cette diminution comme il en avait le droit à défaut de cette constatation que requiert l’article 11bis L.C.T. et, ce faisant, tente de la lui imposer de manière unilatérale.
Le fait pour une travailleuse d’avoir entretenu une relation sentimentale avec l’ancien compagnon de son employeur(e) ne présente, comme tel, aucun caractère fautif, ni a fortiori gravement fautif, fût-ce au regard de l’article 16 L.C.T. selon lequel les parties à un contrat de travail se doivent respect et égards mutuels et sont tenues d’assurer et d’observer le respect des convenances et des bonnes mœurs pendant l’exécution de celui-ci. C’est d’autant moins le cas que, si les intéressés avaient déjà noué des liens amicaux préalables, leur relation sentimentale ne fut pas entamée alors que l’employeur(e) était toujours en couple avec son ancien compagnon, qu’il ne ressort d’aucun élément objectif que la travailleuse se serait immiscée dans leur séparation – ou y aurait joué un rôle quelconque au détriment de son employeur(e) –, que cette relation aurait été entretenue en tout ou en partie pendant le temps de travail de la travailleuse, qu’elle aurait détourné celle-ci de ses obligations professionnelles ou aurait eu la moindre incidence concrète sur sa collaboration quotidienne avec son employeur(e). Pour le surplus, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir informé cette dernière de la situation, ni d’avoir menti sur la nature de cette relation lors d’une audition à laquelle elle fut convoquée au pied levé et qu’un huissier fut chargé d’enregistrer, étant alors prise au dépourvu.
Le procédé auquel le législateur a eu recours en décidant de conditionner l’effectivité de la suppression de l’article 63 LCT à la conclusion, au sein du CNT, d’une CCT relative à la motivation du licenciement ne constitue pas une délégation, au Conseil, d’un quelconque pouvoir réglementaire ou exécutif qui relèverait de la compétence constitutionnelle exclusive du Roi. Ce faisant, le législateur lui a simplement « passé la main » afin de lui permettre d’exercer son pouvoir de conclure des CCT en vue de déterminer les relations individuelles et collectives entre employeurs et travailleurs, pouvoir dont il dispose en vertu de la loi du 5 décembre 1968 et qui fait, comme tel, l’objet d’un ancrage constitutionnel dans la mesure où l’article 23, alinéa 3, 1°, de la Constitution coordonnée le 17 février 1994 garantit dorénavant expressément à chacun le droit de négociation collective. Il a donc légitimement opté pour la concertation sociale en une matière relevant de la compétence des partenaires sociaux au sein de l’organe paritaire institué au plus haut niveau et ce, dans le strict respect de la Constitution.
L’employeur qui a reçu une demande de communication des motifs concrets de licenciement est tenu d’y répondre par lettre recommandée. À le faire par courriel, il s’exposerait à l’application de la sanction civile forfaitaire fixée par l’article 7 de la CCT n° 109. Le formalisme ainsi imposé à l’employeur par l’article 5 de ladite CCT correspond exactement à celui qui est imposé au travailleur par son article 4, en manière telle qu’il s’agit d’un système parfaitement équilibré, qui n’implique, de surcroît aucune contrainte excessive, ni, a fortiori, disproportionnée dans le chef de l’employeur.
Est manifestement déraisonnable le licenciement qui, étant intervenu moins de dix jours après le dernier d’entre eux, apparaît comme étant lié, à tout le moins pour partie, aux courriers adressés à l’employeur par le conseil du travailleur pour lui faire part des revendications légitimes de celui-ci.
Le fait pour un travailleur qui avait reçu consigne d’évacuer des déchets dans le container à l’extérieur du magasin de, plutôt, laisser ceux-ci à même la route afin qu’ils soient à disposition de toute personne désireuse de les récupérer n’est pas exempt de tout reproche dès lors que, ce faisant, il n’a pas respecté les instructions de son supérieur hiérarchique. Cette faute n’est cependant pas grave au point de rendre la poursuite des relations contractuelles immédiatement et définitivement impossible.
Le procédé auquel le législateur a eu recours en décidant de conditionner l’effectivité de la suppression de l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 aux conditions qu’il détermine (soit l’entrée en vigueur d’une convention collective de travail conclue au sein du C.N.T., rendue obligatoire par le Roi, relative à la motivation du licenciement) ne constitue pas une délégation de pouvoir normatif, le C.N.T. étant compétent pour conclure en son sein des conventions collectives de travail dont le champ d’application s’étend à diverses branches d’activité et à l’ensemble du pays en vertu de l’article 7 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives.
Pour le surplus, la C.C.T. n° 109 constitue bien, conformément à l’article 5 de la loi du 5 décembre 1968, un accord entre les partenaires sociaux ayant trait aux relations individuelles et collectives entre employeurs et travailleurs et a été élaborée et adoptée par les organes compétents.
La cour rappelle en outre que, disposant d’une délégation de pouvoir par la loi du 5 décembre 1968 pour adopter quelque convention collective que ce soit, les partenaires sociaux n’ont pas, en principe, à justifier d’une base juridique autre et que l’autonomie des partenaires sociaux et le droit de négociation collective sont garantis par l’article 23 de la Constitution et par divers instruments internationaux.
Par conséquent, l’article 38, 1°, de la loi du 26 décembre 2013 ne viole pas la Constitution et la C.C.T. n° 109 n’est ni inconstitutionnelle ni illégale.
La circonstance que le travailleur aurait choisi ou accepté que la procédure se déroule en néerlandais devant un tribunal néerlandophone ne permet pas de déroger à l’article 38 de la loi du 15 juin 1935. Il s’ensuit, indépendamment du fait que le décret flamand concernant l’emploi des langues était par ailleurs applicable, que si, compte tenu de la situation du domicile de l’intéressé, la notification de ce jugement doit être faite en région de langue française, une traduction française de celui-ci doit être jointe à cette notification, ce sous peine de nullité absolue et avec pour conséquence (i) que le délai d’appel prévu par l’article 11 de la loi du 19 mars 1991 n’a jamais commencé à courir et (ii) que, malgré l’admission du motif grave par le tribunal, le licenciement subséquent est irrégulier. C’est donc à bon droit que, dans ces circonstances, l’intéressé poursuit la condamnation de son employeur à lui payer l’indemnité prévue par l’article 17 de cette même loi.
Le seul fait que les documents signés par le travailleur aient été préalablement préparés par l’employeur n’est, ni en soi ni en combinaison avec d’autres éléments, constitutif de violence morale ou de dol. Il ne s’agit pas d’une circonstance de nature à faire impression sur une personne raisonnable ou qui peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.
En règle soumettre le salarié au choix entre une démission et une rupture d’un commun accord d’une part et un licenciement pour motif grave d’autre part ne revient pas à exercer une menace injuste mais constitue l’exercice légitime du droit de l’employeur. Les juridictions de fond ne font exception à ce principe que lorsque les faits allégués à l’appui de la menace de licenciement pour motif grave sont anodins, manifestement sans fondement ou factices. Dans ce cas, la violence est établie. Une menace n’est pas injuste lorsque l’employeur peut raisonnablement considérer que les faits sur lesquels repose la menace constituent véritablement un motif grave de licenciement, indépendamment de la justesse de cette appréciation. C’est pour cette raison que, sous réserve du caractère anodin, non fondé ou factice des faits, le juge du vice de consentement n’est pas saisi du contrôle du motif grave invoqué à titre de menace par l’employeur. Il n’exerce en effet sur le motif grave concerné qu’un contrôle ‘marginal’ dans le cadre de l’appréciation du caractère éventuellement injuste ou illicite de la violence alléguée.
Constitue un indice très fort de ce que le licenciement n’est pas entièrement étranger à l’état de la travailleuse le fait qu’il intervienne de façon extrêmement soudaine, voire même précipitée, immédiatement après l’annonce de sa grossesse par l’intéressée et en l’absence de tout acte préparatoire ou annonciateur de la rupture qui aurait été posé par l’employeur avant la communication de cette information.
Le doute devant bénéficier au travailleur licencié, une MRS ne peut se borner à qualifier de motif grave le fait pour une infirmière de nuit de ne pas avoir consigné l’appel et la plainte d’un résident dans son dossier individuel de soins. Encore faut-il qu’elle produise les instructions données à son personnel quant à la tenue de ce dossier et au degré de complétude qu’il doit présenter.
Même à défaut d’instructions quant à sa tenue et au degré de complétude qu’il doit présenter, il peut être raisonnablement attendu d’une infirmière de nuit qu’elle consigne, dans le dossier individuel de soins d’un patient, une plainte relative à sa santé et les vérifications qu’elle a effectuées à ce sujet et être admis que son licenciement pour ne l’avoir pas complété de la sorte n’est pas manifestement déraisonnable.
Le fait, pour un Senior Private Banker ayant développé en parallèle une activité entrepreneuriale propre, de donner, à un magazine spécialisé en matières économique et financière, une interview à propos de sa double activité, est un procédé tout à fait contraire non seulement à la culture d’entreprise d’une banque privée dans laquelle la discrétion et la réserve sont de rigueur, mais encore au souhait de celle-ci de maîtriser sa communication, comme en attestent les instructions explicites données au sujet de relations éventuelles avec la presse. Il y va d’un obstacle immédiat et définitif à la poursuite des relations de travail.
L’absence de tout élément de preuve de nature à le justifier confère au licenciement un caractère à ce point déraisonnable qu’elle justifie l’octroi de l’indemnité maximale de licenciement.
Dès lors que le motif potentiellement grave a trait aux dégâts causés au véhicule d’un client de l’entreprise lors d’un usage non autorisé de celui-ci en dehors des heures de service, il est parfaitement légitime de la part de l’auteur du congé de prendre la précaution d’attendre la communication d’un devis de réparation détaillé avant de rompre le contrat sans préavis ni indemnité pour le motif en cause, cette démarche ne pouvant, si un tel devis est de nature à objectiver les premiers constats, être assimilée à une manœuvre dilatoire, destinée à postposer la prise de cours du délai de 3 jours prévu par l’article 35, alinéa 3.
Subit un dommage moral (évalué à un montant net de 15.000 euros) en relation directe avec la faute commise par son employeur, le travailleur licencié pour un motif apparent se révélant totalement étranger à la véritable raison qui a déterminé la décision de ce dernier de rompre les relations de travail, laquelle constitue un motif illégitime dès lors que ce licenciement a été opéré à des fins de pures représailles à la suite de son témoignage dans le cadre d’une plainte pour harcèlement déposée par une collègue à l’encontre de son supérieur direct, après que celui-ci eut pris connaissance du rapport dressé par la conseillère en prévention aspects psychosociaux.
En avançant, sans les établir, des motifs d’inaptitude et de mauvaise conduite dans le chef du travailleur et en mettant en cause la perte progressive de sa motivation et de son engagement professionnel sans prouver le moindre avertissement, un employeur porte subitement et illégitimement atteinte au parcours professionnel de l’intéressé. Une indemnité de 12 semaines s’impose eu égard au caractère généralement vexatoire de la décision.
Le simple constat d’anomalies de pointage opéré après une période de vérification ne justifie pas un licenciement immédiat, mais aurait pu et dû faire l’objet d’une mise au point par la communication d’instructions claires et d’un sérieux avertissement. Fût-elle particulièrement légitime au regard de la fonction du travailleur, la rupture de confiance ne peut, en effet, être considérée comme étant immédiatement et définitivement acquise avant que soient prises, et imposées, toutes les mesures utiles préalables.
Un employeur peut légitimement estimer impossible de poursuivre une relation contractuelle avec une travailleuse, en contact avec ses clients et fournisseurs, qui propose des services de prostitution, qui plus est durant une période d’incapacité de travail, et dont des photos de nature pornographique sont disponibles en libre accès sur internet.
En cas de dispense conventionnelle de prestations en cours de préavis, le contrat et les autres obligations qui en découlent subsistent comme tels jusqu’à l’échéance de celui-ci. Dans cette mesure, le fait que, dans leur accord, les parties soient demeurées muettes quant à la rémunération afférente à cette période non prestée ne peut avoir pour effet de priver le travailleur de la rémunération contractuellement convenue.
S’il est normal et légitime de faire valoir son point de vue, l’existence d’un différend professionnel ne peut justifier que son expression conduise à des comportements dénigrants, insultants, violents ou à des attitudes visant à user de pressions pour parvenir à s’imposer.
Fait preuve d’un comportement laissant à désirer et justifiant que n’importe quel employeur normal et raisonnable décide de le licencier, le travailleur qui, recevant une visite privée pendant les heures de travail, non seulement rend inopérante, en la braquant vers le plafond, une caméra de surveillance destinée à prévenir les vols dans le magasin et à permettre à l’employeur de savoir quand il doit venir en renfort, mais encore, lorsque ce dernier lui en fait la remarque, retire ou arrache le câble d’alimentation de ladite caméra.
Le simple fait pour l’employeur de laisser le choix entre une démission ou un licenciement pour faute grave à un travailleur ayant commis des faits qui ne sont ni anodins ni factices ne constitue pas un acte de violence illicite, susceptible de vicier le consentement de ce dernier. Il n’y a là aucune contrainte illégitime, mais simple menace par l’employeur d’un exercice légitime de ses droits, non susceptible d’influencer un travailleur expérimenté, âgé de plus de quarante ans et rompu tant aux techniques de gestion d’équipe qu’aux processus de négociation, ce qui le rendait tout à fait à même d’évaluer les avantages et inconvénients de la proposition formulée par son employeur.
La clause de stabilité d’emploi contenue à l’article 2, § 2, de la C.C.T. conclue le 2 juillet 2007 au sein de la commission paritaire n° 310 et consolidée par la C.C.T. du 29 septembre 2017 consacre, d’une part, un droit au bénéfice du travailleur (ce droit s’identifiant dans la prétention au respect des exigences procédurales auxquelles est subordonné le licenciement) et, d’autre part, limite dans une mesure équivalente l’exercice du droit de licenciement de l’employeur. Il s’agit, par conséquent, d’une disposition normative individuelle qui s’intègre dans le contrat.
Il ressort de ses termes que l’objectif de la procédure est de convoquer le travailleur à un entretien au cours duquel l’employeur l’informe, sans devoir les justifier, des motifs pour lesquels il envisage son licenciement et au cours duquel des actions peuvent être entreprises en vue d’éviter la rupture contractuelle. En adressant cette convocation au travailleur pendant une période de suspension de son contrat et en fixant la date de l’entretien dans le cours de cette même période, son employeur ne lui permet ni d’entendre les griefs qui lui sont imputés, ni, éventuellement, de négocier des mesures en vue d’éviter son licenciement et ne respecte donc pas le prescrit de cette clause, ce d’autant qu’elle fait partie intégrante du contrat et que les mesures qui en découlent sont, elles aussi, suspendues.
En prenant une décision de mise à pied après avoir entendu le travailleur, l’employeur démontre, par définition, que la faute commise ne rend pas immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle mais ne justifie, à son estime, qu’une mesure d’éloignement temporaire. Cette décision est incompatible avec celle de rompre le contrat pour motif grave prise dans les trois jours suivant cet entretien.
Il y a lieu de retenir la sanction maximale dès lors que les motifs, non étayés, ne peuvent justifier le licenciement et portent, en outre, atteinte à la probité du travailleur accusé, à tort, d’avoir délibérément menti et monté de toutes pièces un déplacement inutile à des fins privées, et donc d’avoir fait primer ses intérêts personnels sur ceux de l’entreprise.
Même si la convention de mise à disposition d’une voiture de société ne précise pas que l’usage de la carte d’essence dont également question dans celle-ci est réservé à l’alimentation en carburant de ce seul véhicule, cet usage exclusif de tout autre va néanmoins de soi, la carte d’essence constituant, évidemment, un accessoire du véhicule qui constitue l’objet principal de la convention. Il en résulte que fait un usage fautif et abusif de ladite carte le travailleur qui l’utilise, à raison de plus de 80%, pour alimenter en carburant un ou plusieurs autre(s) véhicule(s) que celui mis à sa disposition. Le fait que le véhicule mis à sa disposition puisse aussi être utilisé à des fins privées et par son conjoint ne change rien à ce constat, non plus, du reste, que celui que, en dépit de cet usage, il soit resté dans les limites du budget convenu verbalement et/ou que sa consommation de carburant soit restée constante durant toute son occupation et similaire à celle de ses collègues.
Si la contestation du mandat ne doit pas nécessairement être immédiate, encore faut-il qu’elle intervienne dans un délai raisonnable, lequel peut, par exemple, correspondre au délai nécessaire au travailleur pour vérifier si l’auteur du congé était habilité à le donner en prenant, le cas échéant, conseil auprès d’un syndicat ou d’un avocat. Excède largement les limites du raisonnable la contestation qui n’intervient qu’aux termes de la requête introductive d’instance déposée près de neuf mois après le licenciement et, de surcroît, près de quatre mois après consultation d’un avocat dont la mise en demeure, par ailleurs particulièrement circonstanciée en fait comme en droit, ne formulait aucune contestation, ni même aucune réserve, à ce propos.
Réforme Trib. trav. Liège (div. Namur), 13 octobre 2020, R.G. 16/2.079/A (ci-dessous) en ce qu’il a estimé que l’employeur avait apporté la preuve des faits d’exhibitionnisme imputés à faute grave et déclaré non fondée la demande du travailleur en paiement d’une indemnité de rupture.
Si l’on peut admettre qu’un travailleur émette un avis sur la stratégie commerciale que son employeur lui impose, il ne lui appartient pas de la remettre en cause si ce dernier décide de la maintenir et, encore moins, s’il persiste à la désapprouver malgré les explications données, de ne pas s’y conformer, ce qui constitue, dans son chef, un acte d’insubordination rompant immédiatement et définitivement la confiance de celui-ci.
Les principes généraux de droit, tels ceux de bonne administration, ne peuvent contrevenir à une règle de droit, de surcroît doublement impérative, comme celle de l’article 35, alinéas 3 et 4, de la loi du 3 juillet 1978, qui impose le respect d’un double délai de 3 jours en cas de notification d’un congé pour motif grave. Dès lors qu’il s’impose de faire prévaloir cette règle par rapport aux principes de droit administratif d’un rang hiérarchiquement inférieur, l’audition d’un contractuel engagé par une autorité publique sur qui pèsent des soupçons de manquements constitutifs de motif grave ne saurait avoir pour effet de dénaturer ladite règle : elle ne postpose ainsi le point de départ du délai de 3 jours que lorsqu’elle s’avère nécessaire à l’acquisition d’une certitude suffisante dans le chef de l’employeur et, lorsqu’il est acquis qu’il avait une connaissance certaine et suffisante des faits avant l’audition du travailleur, ne peut, en tout état de cause, être utilisée pour recréer fictivement un nouveau délai.
Faire référence à des « attestations écrites remises par les travailleurs » non autrement identifiés non seulement empêche la juridiction saisie de vérifier si le délai de 3 jours a été respecté, mais encore ne permet ni au travailleur de déterminer avec précision les griefs qui lui sont reprochés dans celles-ci, ni au juge d’être certain qu’il s’agit bien des faits dénoncés.
Se rend coupable d’abus de droit le travailleur qui, suspectant l’imminence de son licenciement, se fait désigner par son organisation syndicale pour exercer le mandat de délégué syndical qu’elle avait déclaré vacant. Ce faisant, il use d’un droit reconnu en vue d’assurer la représentation des travailleurs en le détournant de sa finalité économique et sociale à son seul profit, dans le but de faire échec à son licenciement ou pour piéger son employeur aux fins de rendre celui-ci plus onéreux en spéculant clairement sur l’irrespect par ce dernier de la procédure applicable en cas de licenciement d’un délégué du personnel. Il s’impose, dès lors, de considérer que sa désignation doit être tenue pour nulle et non avenue.
Conformémentà l’article 461 du Code pénal, le vol requiert que la chose soit soustraite, que cette appropriation soit frauduleuse et que la chose détournée n’appartienne pas à celui qui l’a soustraite. C’est à l’employeur qui se prévaut d’un fait qualifié de vol au titre de motif grave qu’il incombe d’en établir les éléments constitutifs, à savoir non seulement l’élément matériel consistant en la soustraction d’une chose appartenant à autrui contre le gré du propriétaire, mais également l’intention frauduleuse, laquelle doit exister au moment de l’infraction, même si la preuve de cette intention peut résulter de faits postérieurs à la soustraction. Le juge qui, au vu de l’absence d‘intention frauduleuse, exclut qu’un vol ait été commis par le travailleur justifie légalement sa décision de ne pas admettre le motif grave de licenciement.
Il ne peut être question, en cas d’invalidation d’un licenciement pour motif grave, de déduire de l’indemnité de rupture à laquelle l’employeur est finalement condamné une quelconque somme au titre d’un reclassement professionnel auquel le travailleur n’avait pas droit en raison de sa prétendue faute et dont il n’a pas bénéficié.
Le fait pour un délégué syndical d’avoir, à certaines occasions, exprimé envers deux collègues (mais non à son employeur) son souhait d’obtenir son licenciement pour force majeure médicale, ne peut être interprété comme procédant de sa volonté de provoquer son licenciement avec une double indemnité.
(Cassé par Cass., 15 mai 2023, n° S.22.0038.F)
S’il peut se justifier que, pour acquérir une connaissance suffisante des faits, l’employeur procède à une enquête, il est, en revanche, parfaitement illégitime, celui-ci n’ayant pas à s’immiscer dans la relation entre un patient et son médecin, que cette enquête l’amène à interroger le praticien traitant le travailleur pour obtenir confirmation de l’authenticité des certificats médicaux remis par ce dernier, ce d’autant que, pour le surplus, cette démarche ne vise, en soi, pas à acquérir la connaissance d’un fait, mais bien à se procurer une preuve et que s’il doutait de la réalité de l’incapacité de travail, il lui était loisible de faire procéder à un contrôle médical, ce qu’il n’a pas fait.
Le fait, pour une infirmière prestant au sein d’une équipe et présentant une ancienneté qui devrait lui permettre d’être une personne de confiance pour ses jeunes collègues, de profiter de l’ascendant que lui confère cette ancienneté pour asseoir, sur les intéressés, un pouvoir hiérarchique autoritaire infondé de nature à engendrer une charge psycho-sociale dans leur chef n’est pas conforme à ce qui peut être attendu d’une personne normalement prudente et diligente placée dans les mêmes circonstances. Confronté à cette erreur de conduite à forte composante relationnelle interpersonnelle, la réaction de l’employeur ne peut toutefois être de procéder à son licenciement immédiat, sans avoir respecté la procédure de prévention qu’impose cette problématique spécifique, dont les interventions destinées à remédier au problème.
N’apparaît pas distinct de celui que couvre déjà l’indemnité compensatoire de préavis le dommage limité au choc causé par la perte de son emploi et aux difficultés éprouvées depuis lors pour se réorienter et se former, compte tenu de son âge et de sa qualification spécifique.
Rend le licenciement manifestement déraisonnable la circonstance qu’il ait été décidé subitement, en faisant un trait pur et simple sur un accord conclu à peine quatre mois plus tôt et non encore complétement exécuté.
Dès lors que, dans le cadre du contrat avenu avec une société de consultance, une délégation de pouvoirs a valablement été donnée au directeur général de celle-ci, comportant notamment une responsabilité directe dans le recrutement et la gestion du personnel de l’entreprise, en ce compris les licenciements pouvant intervenir à raison de manquements commis par ses salariés, est parfaitement valable la lettre de licenciement émanant de ladite société, sans qu’il soit nécessaire d’y mentionner que le signataire agit en tant que gérant de celle-ci.
Il n’est pas concevable que, dans une petite entreprise où tout le monde se connaît, un employeur de bonne foi, ignorant pour quel motif le travailleur n’a pas repris le travail à la date annoncée, ne prenne pas spontanément contact avec lui pour lui demander une explication et laisse s’écouler un délai de trois semaines sans la moindre initiative avant de lui envoyer une mise en demeure le sommant de s’expliquer sur son absence que, autrement, il considérera comme constituant un abandon de travail.
Ne commet aucun manquement en termes d’actes infirmiers ou de surveillance du résident, l’infirmière qui, à la suite du comportement agressif et déplacé de ce dernier à son encontre, décide de se mettre en retrait et de laisser un aide-soignant s’occuper de l’intéressé, en restant toutefois dans sa chambre à des fins de surveillance.
Il est de règle élémentaire, en matière de remboursement de frais professionnels, que la note présentée à cette fin à l’employeur émane de celui qui a effectivement fait l’avance de ceux-ci. Est donc contraire à cette règle, le procédé consistant, pour un travailleur qui a exposé des frais professionnels ou prétendus tels, à se les faire rembourser par un subordonné qui en a, lui-même, préalablement obtenu le paiement par l’employeur sur présentation d’un état de dépenses. Pareil comportement, malsain en soi en ce qu’il favorise toutes les fraudes possibles en la matière et rend fort malaisé le contrôle du bien-fondé des dépenses, constitue un motif grave rendant impossible la poursuite de toute collaboration entre parties, et ce indépendamment de son importance concrète.
On ne peut déduire du fait qu’une travailleuse, consciente de ce que l’entretien qu’elle venait d’avoir avec la nouvelle gérance de l’entreprise qui l’occupait s’était mal passé et pouvait déboucher sur son licenciement, a contacté l’ancienne gérante de celle-ci pour lui faire part de ce ressenti que l’intéressée a eu un comportement fautif dans le cours de cet entretien.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 10 novembre 2020, R.G. 19/204/A, ci-dessous en ce qu’il a condamné l’employeur à payer une indemnité compensatoire de préavis à un travailleur ayant tenté d’étrangler son épouse, ce qui rendait la poursuite de la relation de travail plus difficile mais n’avait néanmoins pas pour effet de rompre la confiance devant présider à celle-ci dès lors que, le travailleur n’étant, eu égard à sa fonction, pas amené à représenter l’employeur ou à être en contact constant avec sa clientèle, il ne pouvait certainement pas lui être fait grief d’avoir, par son comportement, terni l’image de celui-ci.
Le cadre dirigeant qui exerce une activité secondaire concurrente sans autorisation préalable adopte un comportement hautement déloyal à l’égard de son employeur et, en agissant en contradiction avec les règles explicitement fixées par ce dernier relativement à la déclaration de conflits d’intérêts, commet une faute grave justifiant son licenciement immédiat.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 10 novembre 2020, R.G. 19/204/A, ci-dessous en ce qu’il a condamné l’employeur à payer une indemnité compensatoire de préavis à un travailleur ayant tenté d’étrangler son épouse, ce qui rendait la poursuite de la relation de travail plus difficile mais n’avait néanmoins pas pour effet de rompre la confiance devant présider à celle-ci dès lors que, le travailleur n’étant, eu égard à sa fonction, pas amené à représenter l’employeur ou à être en contact constant avec sa clientèle, il ne pouvait certainement pas lui être fait grief d’avoir, par son comportement, terni l’image de celui-ci.
Il est sage pour une autorité administrative de ne pas se fier à la presse pour conclure à la matérialité de l’infraction commise par un de ses travailleurs. En l’absence de certitude quant à l’imputabilité de celle-ci dans le chef de l’intéressé et, son procès n’ayant pas encore eu lieu, à sa qualification, il est de même légitime pour celle-ci, nonobstant les règles relatives à l’audition préalable dans le secteur public, de souhaiter entendre ce dernier avant de prendre sa décision.
Au sein d’une société anonyme, c’est, en principe, le conseil d’administration qui seul a le pouvoir de licencier un cadre tel qu’un directeur, mais il peut donner un mandat spécial, p. ex. à son président ou son directeur général, pour ce faire.
La circonstance qu’une décision soit arrêtée par le conseil d’administration d’une société anonyme alors qu’il n’est pas régulièrement composé n’a pas pour effet que cette décision, fût-elle de nature à être irrégulière, n’engagerait pas la société que représente ce collège. Celle que le congé fut donné par une personne non titulaire d’un mandat rend, quant à elle, le licenciement irrégulier.
Le travailleur qui entend se prévaloir de l‘irrégularité de la notification du congé lui donné par un mandataire au nom et pour compte de son employeur doit en contester immédiatement la validité et, pour s’assurer de l’existence du pouvoir délégué à l’intéressé, est en droit d’exiger la remise de la procuration qui lui a été donnée. Il n’est toutefois pas tenu de le faire.
S’il ne le fait pas et ne vient plus travailler, la conséquence en est que, lorsque ni le mandataire ni le mandant n’ont élevé de contestation à ce sujet, il ne peut plus contester l’existence du mandat, sauf dans un bref délai.
La circonstance que le fait allégué ait eu pour cadre une discussion privée entre deux ex-conjoints n’exclut pas que ce fait puisse justifier un licenciement pour motif grave au sens de l’article 35 L.C.T. Ainsi en va-t-il lorsqu’une travailleuse gifle le gérant de la société, son ex-mari, alors qu’ils s’étaient retirés tous deux dans le bureau de ce dernier pour y discuter d’un sujet privé, ce même si la victime était rompue aux arts martiaux et n’était pas de ceux qui se laissent intimider par une agression physique.
S’il est admis que les parties à un contrat de travail puissent convenir de tenir compte d’une ancienneté fictive pour le calcul du délai de préavis, encore faut-il que cette ancienneté conventionnelle, qui se distingue de l’ancienneté réelle remontant au jour de l’entrée en service chez le même employeur, résulte de manière certaine de la volonté commune des parties. En soi, la simple mention de celle-ci sur des fiches de paie, voire sur des comptes individuels, ne suffit pas à l’établir si elle n’est pas corroborée par d’autres éléments précis et concordants.
Le caractère définitif et irrévocable du congé s’oppose à ce qu’un employeur décide d’annuler a posteriori le licenciement pour motif grave notifié par son conseil, muni d’un mandat exprès, sauf pour le travailleur à avoir consenti à celui-ci.
(Décision commentée)
S’agissant en l’espèce d’un licenciement intervenu le 3 mars 2016, l’Etat belge, qui n’a pas auditionné le travailleur contractuel avant de le licencier, ne s’est pas comporté comme tout employeur public raisonnable et prudent placé dans les mêmes circonstances. Vu les débats en doctrine et les décisions de jurisprudence, l’erreur invincible ou toute autre cause de justification ne peut être retenue. Il y a une faute et celle-ci a causé un dommage en lien causal. Il s’agit de la perte d’une chance de conserver l’emploi. La cour applique le mode d’évaluation habituel, étant l’évaluation ex aequo et bono. Elle alloue de ce chef une indemnité de 2.500 euros, s’alignant sur diverses décisions en ce sens.
Justifie l’octroi de l’indemnité maximale le licenciement constituant, en réalité, le point d’orgue d’un processus initié par l’employeur, visant à déposséder un travailleur de l’essentiel de sa fonction pour lui faire grief ensuite de ne pas adhérer à une modification à la finalité réelle particulièrement obscure, et alors qu’aucun motif admissible de licenciement n’est démontré.
Il ne peut être exigé, sans ajouter à la C.C.T. n° 109 des conditions qu’elle ne contient pas, qu’un travailleur, au courant de ce que son employeur n’a pas retiré le pli recommandé contenant sa demande d’être informé des motifs concrets de son licenciement, l’en avertisse par un autre biais.
Aucune disposition légale n’exige que le préavis ne puisse être donné que lorsque l’exécution du contrat a commencé. La sanction qui s’appliquera en cas de licenciement irrégulier sera conforme à celle prévue par le droit du travail et non à celle prévue par le droit commun.
Le risque de la rupture et ses conséquences ne se présentent pas différemment avant ou après la prise de cours effective du contrat. En cas de rupture par le travailleur, cela n’exclut pas de considérer le droit commun pour apprécier les circonstances de la rupture et réparer un dommage distinct de celui couvert par le préavis ou son indemnité compensatoire.
Il ne peut être considéré que, dans le cadre de la notification des motifs du licenciement par voie recommandée, l’article 35 L.C.T. ferait peser sur l’employeur une obligation de résultat quant à la remise effective du courrier au travailleur. Est ainsi sans incidence sur la régularité de la notification desdits motifs le fait que la remise effective du recommandé ait été tenue en échec par une erreur des services postaux – ce dont l’employeur ne peut être tenu pour responsable – et que ce courrier n’ait, finalement, été transmis à son destinataire, par l’entremise de son organisation syndicale, qu’avec un dépassement certain du délai prescrit – ce qui n’a, de facto, pas entraîné de préjudice à son égard.
(Décision commentée)
Dès lors que le travailleur dépose la preuve que l’offre qui a été suivie de son engagement concernait une fonction précise ainsi que le descriptif qui lui en a été remis, la circonstance que le contrat conclu se contente de reprendre son engagement en qualité d’employé ne saurait suffire à contredire que la fonction pour laquelle il fut engagé constituait un élément essentiel du contrat de travail.
(Décision commentée)
En raison des opérations demandées pour y arriver, le fait pour un travailleur de mettre sur son profil Facebook un lien vers un reportage intrinsèquement critique à l’égard de son employeur ne peut, manifestement, résulter que d’un acte volontaire rendant ce partage fautif et non d’une simple erreur de manipulation. Il est indifférent que ce partage, en soi susceptible de nuire à l’image de celui-ci, n’ait pas été accompagné de commentaires négatifs. Il est, en revanche, interpellant que l’intéressé n’ait pas cru bon d’attirer l’attention sur le fait que l’incident dénoncé dans ce reportage était intervenu il y a un certain temps déjà et que, depuis, l’entreprise n’avait plus connu ce genre de problème. L’omission est, ici, aussi reprochable qu’un commentaire critique en ce qu’elle pouvait laisser supposer que la situation ancienne restait d’actualité : faire planer le doute et l’incertitude peut se révéler bien plus destructeur que la plus acerbe des critiques.
Il est indifférent qu’un travailleur ait, précédemment, donné pleine satisfaction dans son travail lorsque la gravité des faits fautifs qui lui sont, aujourd’hui, reprochés est telle qu’elle ne peut être minimisée au seul vu de ses états de service passés.
S’il paraît évident que de simples négligences ne peuvent justifier un licenciement pour motif grave, il en va bien évidemment autrement si le travailleur refuse de faire preuve de responsabilité professionnelle en faisant amende honorable et reproduit quelque temps plus tard le même comportement que celui qui fut dénoncé aux termes d’un avertissement sévère, de telle sorte que les manquements dont il s’est rendu coupable traduisent en réalité une désinvolture délibérée dans son chef constitutive d’un motif grave. Ainsi, pour un employé d’une société spécialisée dans la vente de produits alimentaires dans la grande distribution, si des manquements sont constatés par rapport au respect de règles d’hygiène et une désinvolture ainsi qu’un refus caractérisé d’effectuer le travail confié.
En faisant effectuer du travail en noir au fils d’une bénéficiaire du centre, le travailleur au service d’un C.P.A.S. commet une infraction au Code de déontologie applicable aux travailleurs sociaux, lequel prévoit que ceux-ci sont tenus à une attitude générale propre à inspirer la confiance des utilisateurs ainsi qu’au respect des lois et règlements s’appliquant à tout citoyen. Même née dans la sphère privée et même s’il n’y eut pas de dommage direct dans le chef du C.P.A.S., il y va d’une faute intrinsèquement grave et de nature à rendre définitivement impossible toute collaboration professionnelle, le recours au travail non déclaré étant constitutif d’une infraction pénale, portant atteinte à la sécurité sociale au détriment de la collectivité et permettant de retirer des avantages pécuniaires d’une main d’œuvre à bon marché et sous statut précaire (réforme Trib. trav. Liège, div. Liège, 23 novembre 2020, R.G. 19/3.458/A).
Est abusif le licenciement d’un chauffeur décidé davantage par les conséquences de l’accident qu’il a provoqué que par son attitude, dont il n’est pas démontré qu’elle n’était pas conforme aux instructions reçues ou aurait fait l’objet d’une négligence fautive.
(Décision commentée)
Dès que le congé moyennant un préavis nul est notifié, il y a en principe rupture immédiate du contrat de travail, les parties ayant cependant la possibilité de renoncer à se prévaloir du congé immédiat, le contrat subsistant alors jusqu’à ce qu’il y soit mis fin autrement. La renonciation à invoquer le congé immédiat n’implique cependant pas qu’il soit renoncé à la nullité absolue du préavis ou au droit d’invoquer celle-ci. En l’espèce, la cour considère qu’ayant soulevé la nullité du préavis par lettre recommandée 12 jours après le licenciement, l’ouvrier a réagi dans un délai rapide et raisonnable et que le fait qu’il ait continué à travailler jusqu’à cette date ne permet pas de considérer qu’il ait couvert la nullité.
(Décision commentée)
Une association de C.P.A.S., constituée conformément à l’article 118 de la loi organique des C.P.A.S., est une autorité publique à qui le principe audi alteram partem s’applique. Il s’agit en effet d’une A.S.B.L. de droit public, dont les membres sont des C.P.A.S. identifiés ainsi que, en l’occurrence, une université. L’Association ainsi constituée est soumise à une influence déterminante des C.P.A.S., pouvoirs publics. En l’espèce, en tant que hôpital créé dans le cadre de l’article 118, celle-ci poursuit une mission d’intérêt général et dispose d’un pouvoir de décision contraignant à l’égard des tiers. La cour conclut dès lors à l’obligation d’audition préalable au licenciement d’une travailleuse contractuelle, ce licenciement étant une mesure grave liée, en partie en l’espèce, à son comportement.
Lorsqu’il n’est pas établi que l’intéressé a agi intentionnellement et de manière déloyale, le fait d’avoir proposé à un client une solution à fournir par une société concurrente constitue, d’évidence, une erreur professionnelle qui, tout en étant d’une certaine gravité, n’est pas de nature à rendre impossible la poursuite de la relation professionnelle entre parties.
La divergence d’appréciation entre l’employeur et la juridiction saisie sur la question de savoir si les faits reprochés sont de nature à justifier un licenciement immédiat ne permet pas de conclure au comportement abusif de son auteur. S’il est, par ailleurs, certain qu’un licenciement pour motif grave peut représenter un choc douloureux pour qui en est victime, ce ressenti ne permet pas plus d’y voir une forme de brutalité, rendant cette mesure manifestement déraisonnable.
Le fait d’avoir à formuler certaines réserves à propos des prestations du travailleur peut être considéré comme motif suffisant, pour peu, naturellement, qu’elles soient étrangères à la prise du congé parental. Ainsi en va-t-il lorsqu’il appert de rapports d’évaluation que l’appréciation, globalement positive de celles-ci, est néanmoins tempérée par la mention de points d’amélioration tenant au manque de résistance au stress de l’intéressé ainsi qu’à ses problèmes de communication avec les membres de son équipe.
Dans la mesure où le congé est un acte juridique unilatéral impliquant, dans le chef de son auteur, une décision irrévocable et définitive, ce dernier ne peut, après avoir licencié le travailleur moyennant un préavis – et déjà commué celui-ci en une dispense de prestations assortie de l’engagement de verser une indemnité compensatoire de préavis –, rompre ce contrat une seconde fois en l’assortissant d’une nouvelle modalité, à savoir un motif grave.
Doit être tenue pour nulle et non avenue la désignation en qualité de délégué syndical qu’un travailleur, remplissant par ailleurs les conditions prescrites par la C.C.T. applicable, obtient en détournant l’usage d’un droit reconnu en vue d’assurer la représentation des travailleurs, à l’effet de faire échec à son propre licenciement ou de le rendre plus onéreux en spéculant clairement sur l’irrespect par son employeur de la procédure applicable en cas de licenciement d’un délégué syndical.
Agit avec une légèreté telle qu’il y a dépassement manifeste des limites de l’exercice normal du droit de rupture l’employeur qui licencie un travailleur, sans avertissement écrit ni audition préalable, au motif de la prise, le midi, d’une pause plus importante que la norme, sans tenir compte du fait que le supérieur hiérarchique de l’intéressé avait, lui-même, adressé un mail au personnel sous ses ordres pour autoriser des dépassements jusqu’à une certaine limite, ni vérifier si celle-ci n’avait pas été dépassée.
La loi du 15 juin 2020, en vigueur le 22 juin 2020, vise à suspendre les délais de préavis des congés notifiés avant ou durant la période de suspension temporaire de l’exécution des contrats pour cause de force majeure en raison de la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19. En cas de congé donné par l’employeur, les délais de préavis :
Autrement dit, à partir du 22 juin 2020, les délais de préavis notifiés par l’employeur avant ou pendant une période de chômage temporaire pour cause de force majeure Covid-19 cessent de courir pendant cette période de suspension du contrat. Les jours de chômage temporaire pour cause de force majeure Covid-19 précédant le 22 juin 2020 ne suspendent, eux, pas le délai de préavis.
Des explications mêmes brèves peuvent être suffisamment concrètes pour se rendre compte de la réalité du motif avancé pour justifier le licenciement.
La prolongation d’une incapacité de travail ne constitue, en soi, pas un motif valable de licenciement. Une décision de licenciement fondée sur ce motif n’aurait manifestement pas été prise par un employeur normalement prudent sans faire examiner la victime par la médecine du travail ou sans connaître la suite réservée au terme du certificat médical, à moins d’établir la désorganisation de l’entreprise due à l’absence du travailleur concerné.
La question de la charge de la preuve peut être synthétisée selon (i) que le travailleur a adressé à son employeur une demande afin de connaître les motifs qui ont conduit à son licenciement et que soit l’employeur a répondu adéquatement à la demande, soit qu’il a déjà communiqué d’initiative les motifs au travailleur (partage de la charge de la preuve, chacun devant prouver les faits qu’il allègue), (ii) que le travailleur a adressé à son employeur une demande régulière afin de connaître les motifs qui ont conduit à son licenciement et que l’employeur n’y a pas répondu ou n’a pas répondu de manière adéquate (renversement de la charge de la preuve au détriment de l’employeur et risque de la preuve pour lui en application de l’article 8.4, alinéa 4, du Code civil), ou (iii) que le travailleur n’a formulé aucune demande régulière et que l’employeur a ou non communiqué les motifs d’initiative (retour au droit commun de la preuve énoncé à l’article 8.4, alinéas 1er et 2, C. civ.).
L’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 est sujet à une interprétation large, dès lors que, même lorsque l’action porte sur des engagements souscrits par l’employeur pendant l’exécution du contrat et qui n’ont pas directement leur cause juridique dans les dispositions de celui-ci, il pourrait malgré tout être considéré que l’action trouve sa source dans le contrat de travail au sens de cette disposition. Pour que l’article 15 s’applique, il suffit que, sans le contrat de travail, l’action n’aurait pas pu naître.
Les faits qui fondent le sentiment de rupture de confiance sont des données objectives qui peuvent guider le juge dans son appréciation souveraine de la situation. Il examine la faute à la lumière de toutes les circonstances qui l’accompagnent et qui sont de nature à lui conférer le caractère de motif grave. Il peut avoir égard à des éléments qui concernent tant le travailleur que l’employeur et à des circonstances diverses (ancienneté, type de fonction, temps, lieu, degré de responsabilité, passé professionnel, état physique et mental, nature de l’entreprise et importance du préjudice subi). Ces éléments sont susceptibles d’exercer une influence tantôt sur le degré de gravité de la faute, tantôt sur l’évaluation globale et objective de l’impact de celle-ci sur la possibilité de poursuite de la relation professionnelle. Le juge ne peut cependant lier l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles au critère de la disproportion entre cette faute et la perte de l’emploi, celui-ci lui étant étranger.
En convoquant un travailleur à un entretien avant de procéder à son licenciement pour motif grave, l’intercommunale qui l’occupe reconnaît l’existence d’une obligation d’audition préalable dans son chef et, corrélativement, le droit, dans celui de l’intéressé, de faire valoir ses moyens de défense à l’encontre des accusations lancées à son égard, ce qui implique qu’elle respecte les garanties liées à l’exercice effectif de celui-ci. Dès lors que les droits de défense de l’intéressé auraient été violés lors de cette audition, l’aveu extra-judiciaire obtenu dans son cours ne peut, en aucune façon, être retenu comme élément de preuve à sa charge, ni permettre d’établir la matérialité de la faute grave qui lui est reprochée.
(Décision commentée)
Une faute grave ne constitue pas nécessairement un motif grave. Il faut qu’elle ait une répercussion telle sur les relations contractuelles que celles-ci ne peuvent plus être poursuivies. Il est ainsi fait une distinction entre les fautes graves, certaines d’entre elles allant entraîner la rupture du contrat, alors que d’autres permettent au lien contractuel de subsister.
Certains faits reprochés en l’espèce dénotent une attitude « peu docile » de l’intéressé vis-à-vis des ordres reçus et un manque de collégialité vis-à-vis d’un autre travailleur. En outre, vu leur caractère multiple et eu égard à deux mises en garde, ces faits sont considérés comme gravement fautifs. La cour considère cependant que ces fautes, examinées isolément ou dans leur ensemble, n’atteignent pas le degré de gravité suffisant pour être constitutives d’un motif grave. Il s’agit d’un comportement inapproprié vis-à-vis des interlocuteurs du travailleur. Si la société a pu légitimement les désapprouver, ceux-ci s’expliquent partiellement par une incapacité dans le chef de l’intéressé à gérer sa nervosité dans un contexte professionnel exigeant le strict respect de délais.
Se rend coupable d’une rétention caractérisée d’informations nécessaires à son employeur, qu’il est seul à détenir, le travailleur qui choisit d’ignorer les demandes légitimes et répétées de sa hiérarchie de fournir les informations demandées. Il y va, dans son chef, d’un acte d’insurbodination commis en connaissance de cause.
Le principe suivant lequel la faute doit être imputable personnellement au travailleur connaît un double tempérament étant, d’une part, que, par application des dispositions relatives au mandat, la faute d’un tiers mandataire peut être imputée à son mandant si ce tiers a agi dans les limites de son mandat – auquel cas la faute commise par le mandataire dans ce cadre est imputée au mandant et peut entraîner son licenciement pour motif grave – et, d’autre part, qu’il est possible que le fait fautif ne soit pas posé directement par le travailleur, mais qu’il le soit à son instigation. Peut, ainsi, être convaincue de motif grave compte tenu de son implication directe et personnelle dans la démarche entreprise par son mari, la gérante adjointe d’un magasin qui, en violation du règlement de travail et de la loi du 8 décembre 1992, a communiqué à celui-ci les coordonnées personnelles d’un client, auteur d’une plainte à son égard, et l’a incité à prendre contact avec lui, ce qui a débouché, au cours d’un entretien téléphonique auquel l’intéressée a assisté, sur la tenue de propos menaçants et intimidants à l’adresse de ce client.
L’article 3, § 2, de la loi du 19 mars 1991 implique une interdiction, dans le chef de l’employeur, de discriminer le travailleur protégé, négativement ou positivement, en considération de sa qualité de délégué ou candidat délégué du personnel. Il en sera ainsi, notamment, lorsque, à l’occasion d’une fermeture d’entreprise, l’employeur démontre que tous les travailleurs protégés disposaient de la même information et des mêmes chances d’accès au reclassement que leurs collègues licenciés, sans que celles-ci leur soient réservées par priorité, ce qui constituerait un traitement plus favorable lié à leur mandat.
La rupture de la confiance sur laquelle repose le contrat peut rendre impossible la poursuite des relations de travail. Celle-ci est, certes, ressentie subjectivement, mais les faits qui fondent ce sentiment sont des données objectives pouvant guider le juge dans son appréciation souveraine de la situation, appréciation au cours de laquelle il examinera la faute à la lumière de toutes les circonstances qui l’accompagnent et qui sont de nature à lui conférer le caractère d’un motif grave.
Dans cette approche, il pourra avoir égard à des éléments qui concernent tant le travailleur que l’employeur et des circonstances variées (ancienneté, type de fonctions, importance du préjudice subi, etc.) apparaissant, in fine, comme étant autant d’éléments susceptibles d’exercer une influence, tantôt sur le degré de gravité de la faute, tantôt sur l’évaluation globale et objective de son impact sur la possibilité de poursuivre la collaboration professionnelle.
Le comportement agressif adopté à l’égard d’un collègue dans un contexte d’antécédents de même nature constitue une faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible la poursuite de toute collaboration professionnelle.
Le fait que le licenciement a eu lieu alors que le travailleur était en congé de maladie et avait déposé une plainte informelle pour un prétendu harcèlement ne permet pas de conclure au caractère manifestement déraisonnable de celui-ci dès lors que la preuve est rapportée de motifs liés à sa conduite et qu’il n’existe, en outre, aucun commencement de preuve que ce licenciement était motivé par une volonté de vengeance ou constituerait un acte de représailles.
Confirmation de Trib. trav. Liège (div. Huy), 12 octobre 2020, R.G. 19/191/A - ci-dessous.
L’article 189 du Code pénal social ne punit que d’une peine de niveau 1 (soit une amende administrative et non une amende pénale) la violation de la C.C.T. n° 10. Il ne s’agit donc pas d’un délit qui se prescrirait par 5 ans. Il s’agit toutefois bel et bien d’une infraction ayant causé dommage au travailleur qui en postule l’indemnisation. La prescription quinquennale est dès lors applicable en vertu de l’article 2262bis du Code civil, qui a vocation à régir toutes les actions en responsabilité extracontractuelle.
Il est légitime pour un employé d’une société de courtage en assurances d’aviser les clients dont il gérait les portefeuilles de son prochain départ de l’entreprise, situation qui a pu, à juste titre, inciter certains d’entre eux, membres de sa famille, amis et connaissances, à quitter celle-ci, avec son aide éventuelle dans l’accomplissement des démarches utiles à cette fin, dès lors qu’ils ont pu estimer que leurs intérêts ne seraient plus défendus avec la même énergie que si l’intéressé veillait à en assurer la protection. Une telle intervention n’est pas constitutive de détournement de clientèle et ne saurait davantage être qualifiée d’illégale au prétexte qu’elle aurait trouvé place à un moment où il était bénéficiaire de prestations de sécurité sociale.
Un employeur normal et raisonnable n’aurait jamais licencié un de ses travailleurs pour de prétendus motifs découlant d’informations dont il n’a vérifié la réalité qu’après avoir procédé au licenciement, se rendant compte, seulement à ce moment, que ces informations étaient inexactes et incomplètes.
Un employeur peut, sans excéder les normes du raisonnable, décider de mettre un terme à l’occupation d’un travailleur ayant commis une faute professionnelle qui, sans constituer un motif grave, est toutefois intrinsèquement sérieuse et susceptible de conséquences qui le sont tout autant.
En ne consultant pas la messagerie du courrier indésirable pendant une période en l’espèce de 4 semaines, une secrétaire d’un cabinet d’avocats manque aux obligations professionnelles qui sont les siennes et n’agit pas comme une secrétaire normalement prudente et diligente placée dans les mêmes circonstances. Il s’agit d’une faute « professionnelle » commise toutefois sans intention délibérée, malveillante ou de nuire et qui ne témoigne pas non plus d’une forme de malhonnêteté à l’égard de l’employeur. Ces éléments sont de nature à minorer l’impact de cette faute sur le maintien de la confiance indispensable dans les relations professionnelles. A l’inverse, doivent être pris en considération le fait qu’elle s’était vu adresser un avertissement écrit quelques semaines auparavant en raison de manquements professionnels, tout comme la circonstance que la faute en cause était de nature à avoir des conséquences sérieuses en termes de responsabilité pour son employeur.
Le juge peut légalement déduire de la constatation que la partie ayant donné congé a fait durer inutilement l’examen du caractère sérieux des faits pris en considération comme motif grave, que ceux-ci ne sont pas de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible toute collaboration entre parties et ne constituent, dès lors, pas un motif grave justifiant le congé (avec renvoi à Cass. 8 avril 1991, Pas., I, 1991, p. 718).
Un employeur normal et raisonnable n’aurait jamais pris une décision de licenciement fondée sur la non-remise d’un certificat médical d’incapacité de travail pour une période de quelques jours.
Représentent de simples erreurs d’appréciation, certes importantes, mais qui n’atteignent pas le caractère de gravité requis pour justifier un licenciement immédiat, des manquements consistant, d’une part, à avoir, alors qu’il ne disposait d’aucune instruction pour ce faire, entamé, pour répondre à la demande d’une inspectrice sociale, une réunion sans attendre l’arrivée d’un supérieur dont la présence était normalement prévue et sans s’inquiéter, ne fût-ce que par un simple appel téléphonique, de savoir si (et quand) ce dernier allait arriver et, d’autre part, à avoir accueilli à cette réunion un délégué syndical, sans avoir, au préalable, demandé à son employeur si la présence de celui-ci était admise.
Le licenciement d’un travailleur peut, dans certaines conditions (grand nombre de travailleurs occupés, position hiérarchique de l’intéressé ne relevant pas de la direction ou d’un niveau apparenté, etc.), être délégué à un mandataire de l’association par son comité de gestion et, ainsi, relever de la gestion journalière de celle-ci.
Un employeur ne peut plus accorder aucune confiance à un chef boucher qui, au mépris des dispositions réglementaires, commet, de manière répétée et malgré des avertissements circonstanciés, des manquements importants relatifs à la tenue du rayon boucherie et au respect des règles d’hygiène alimentaire, mettant ainsi en danger la santé des clients.
Constitue un manquement au devoir de loyauté qui entraîne une perte de confiance rendant toute collaboration professionnelle définitivement et immédiatement impossible le fait pour un responsable de succursale, ayant connaissance de faits de vol commis par son adjoint, de n’envisager qu’une mesure de rétrogradation à son égard et, ensuite, de s’abstenir d’évoquer ces faits graves lors d’une réunion ayant précisément pour objet de préparer le bilan de compétences de cet adjoint.
En convoquant un agent contractuel à un entretien, un commune reconnaît l’existence d’une obligation d’audition préalable à une éventuelle mesure de licenciement et, corrélativement, le droit pour l’intéressé de faire valoir ses moyens de défense à l’encontre des accusations lancées envers lui. Il n’y a, dès lors, pas lieu de lui retirer ensuite ce droit au prétexte qu’il se serait rendu coupable d’insubordination en refusant d’assister à l’entrevue à laquelle il avait été convoqué, alors même que ce prétendu refus, assorti d’une demande de report de date par son conseil, traduisait simplement sa volonté de préparer la défense de ses intérêts, rendue impossible par l’absence de communication de son dossier administratif et, partant, de faire usage de son droit, ce qui impliquait le respect des garanties liées à son exercice effectif.
Reste en défaut de faire preuve de respect et d’égards à l’adresse d’un de ses agents contractuels mais, au contraire, adopte une attitude humiliante et vexatoire envers lui la commune qui, tout en offrant à l’intéressé la possibilité de se faire assister par un conseil à l’occasion d’une entrevue destinée à débattre des problèmes de collaboration professionnelle préalablement à un éventuel licenciement, empêche, dans les faits, volontairement qu’il puisse présenter ses moyens de défense en lui imposant une confrontation sans lui permettre de disposer de son dossier administratif et de l’assistance de son conseil.
(Décision commentée)
L’indemnité de protection du conseiller en prévention est due lorsque le motif grave n’est pas admis et que le juge a reconnu que celui-ci porte atteinte à l’indépendance de celui-ci ou que les motifs d’incompétence invoqués ne sont pas établis. Dès lors, lorsque le licenciement pour motif grave n’est pas fondé, le paiement de l’indemnité de protection n’est pas automatique. En l’espèce, la cour considère qu’il n’y a pas lieu d’allouer cette indemnité, les motifs de rupture (incidents entre parties) étant étrangers à l’indépendance du conseiller et n’étant pas relatifs à sa compétence à exercer ses missions légales.
En participant activement à l’humiliation d’un stagiaire placé sous son autorité, le travailleur se rend coupable d’une violation de la norme comportementale posée par les articles 16 et 17, 1°, L.C.T., laquelle doit être qualifiée de faute grave constitutive de motif grave.
Si c’est une autorité collégiale qui dispose du pouvoir de licencier un travailleur pour motif grave, le délai ne commence à courir que lorsque celle-ci est valablement constituée. La circonstance que les faits auraient été connus, individuellement, par certains membres de la hiérarchie, voire certains administrateurs, ne constitue évidemment pas la connaissance requise.
On ne peut reprocher à un travailleur de ne pas avoir respecté une procédure dont il n’a, même si elle est qualifiée de « normale », jamais eu connaissance et qui lui fut détaillée, pour la première fois, dans le courrier de notification des fautes constitutives de motif grave. Cette manière de procéder est clairement inacceptable, de telle sorte qu’aucune faute en relation avec un prétendu refus de se conformer à cette procédure ne peut lui être imputée.
Présente indéniablement un caractère abusif en raison des circonstances qui l’ont précédé le licenciement pour motif grave consistant à reprocher à un travailleur de mettre en péril l’introduction d’une demande de subvention pour l’échéance prévue, ce après avoir modifié à son insu ses codes d’accès à l’interface informatique de l’entreprise et, ce faisant, porté atteinte au crédit et à la compétence de l’intéressé en alimentant faussement les reproches invoqués puisque, de par cette modification, il avait, de facto, rendu cette introduction impossible.
Dès lors qu’un différend sérieux a surgi entre parties sur les modalités de leur collaboration professionnelle – ce qui a conduit le travailleur à prétendre, tout en ne déduisant aucune conséquence juridique du constat posé par ses soins, que son employeur avait rompu unilatéralement le contrat les liant –, tout employeur normalement prudent et raisonnable aurait immanquablement conclu à l’impossibilité de poursuivre toute collaboration avec l’intéressé, la confiance indispensable au maintien des relations de travail étant sérieusement entamée suite au positionnement difficilement compréhensible qu’il a adopté.
Manque gravement à ses obligations le conducteur de bus qui laisse un voyageur monter dans son véhicule sans vérifier son titre de transport et omet de mettre les données de son ordinateur à jour au moment du passage d’un zone à une autre, permettant ainsi à celui-ci de frauder le client-donneur d’ordre de son employeur et impactant, de ce fait, les relations existant entre eux.
Commet une faute en lien de causalité avec un dommage à tout le moins moral l’employeur qui délivre un C4 comportant des mentions contradictoires (en renseignant tout à la fois que le travailleur a été licencié pour motif grave et qu’une indemnité de congé lui a été payée), ce qui a empêché l’intéressé d’obtenir des allocations de chômage provisoires à la date de sa demande et l’a obligé à formuler une demande d’aide au C.P.A.S.
Ce n’est pas parce que les griefs retenus dans la lettre de congé pourraient s’analyser comme des manquements continus que l’employeur pourrait artificiellement reporter la date à laquelle il estime que ceux-ci, à les supposer exister, rendent immédiatement et définitivement impossible toute poursuite de la collaboration professionnelle, même en l’absence d’un élément nouveau alimentant la continuité de ceux dont il aurait eu connaissance dans les trois jours précédant le congé.
Dans un contexte de surcharge de travail, ne constitue pas un motif grave le fait pour un travailleur de ne pas obtempérer immédiatement à une demande de son employeur qui l’eût obligé à interrompre l’exécution des tâches, tout autant prioritaires, auxquelles il était occupé.
Un comportement contraire aux règles internes à l’entreprise, pour fautif qu’il soit, ne revêt pas le caractère de gravité requis pour fonder un motif grave dans le chef d’un travailleur justifiant d’une ancienneté conséquente et sans autre incident de parcours établi qu’un avertissement écrit pour des faits d’une autre nature, ce d’autant plus que le règlement de travail prévoit expressément une échelle de sanctions en cas de non-respect des règles d’organisation.
Un employeur normalement prudent et diligent ne licencierait pas un membre de son personnel, sans aucun reproche propre à sa personne, au seul motif de son lien de parenté avec un autre travailleur à qui la gestion de la société a été retirée en raison de griefs invoqués par elle à son encontre.
En présence d’une clause d’essai, il convient de calculer la première partie du délai de préavis visé à l’article 68 de la loi du 26 décembre 2013 sur la base de l’ancienneté acquise en date du 31 décembre 2013, sans tenir compte, pour ce faire, de ce qu’une période d’essai était, à celle-ci, encore en cours. Le travailleur a, de ce fait, droit à une délai de préavis de 3 mois.
Par « ancienneté scientifique » au sens du décret du 19 juillet 1991 relatif à la carrière des chercheurs scientifiques, on entend le total de l’expérience acquise depuis l’obtention du diplôme avec, pour objet, la détermination de la rémunération à laquelle les intéressés peuvent prétendre sur cette base. Elle vise donc, et uniquement, une ancienneté barémique et est, partant, sans incidence, sur la détermination du délai de préavis.
Constitue un manquement à l’obligation de respect et d’égards mutuels qui s’impose dans la relation de travail (LCT, art. 16) le fait de s’en prendre, en présence de tiers, à un supérieur hiérarchique avec cris, injures et gestes perçus comme menaçants par les personnes présentes.
La faute doit être appréciée non de manière abstraite, mais concrètement en prenant en considération l’ensemble des éléments de fait relatifs à l’acte lui-même et au contexte dans lequel il a été posé. Ces éléments concernent tant le travailleur que l’employeur. Le juge doit ainsi tenir compte, notamment, de l’ancienneté, des fonctions, des responsabilités, du passé professionnel, des éventuels antécédents, de l’état de santé physique et mental du travailleur tel que connu de l’employeur. Il doit aussi apprécier la faute subjectivement dans le chef de l’employeur, sa gravité pouvant dépendre des règles internes et éthiques de l’entreprise ou encore de ce que l’on appelle communément la « culture de l’entreprise ».
Même si son intention n’était pas frauduleuse et si les informations reprises sur le document litigieux étaient identiques à celles figurant sur celui qu’il avait fait valider par sa hiérarchie, se rend coupable de faux et d’usage de faux le travailleur qui découpe les signatures apparaissant sur un formulaire erronément utilisé pour les coller sur le document adéquat dont il effectue une copie-couleur, qu’il envoie ensuite à la personne devant traiter l’opération.
Le seul fait que le règlement de travail mentionne que constitue un motif grave le fait de travailler pendant une période d’incapacité de travail est insuffisant pour établir celui-ci. Le motif grave peut cependant exister en cas de comportement frauduleux.
Il importe peu que l’activité en question ait été exercée pendant les horaires de travail, puisque le contrat de travail est par hypothèse suspendu. Peu importe également que l’activité soit exercée à titre privé ou à titre professionnel ou qu’elle ait été préalablement autorisée ou non par l’employeur, la cour relevant encore que l’incapacité de travail est due en l’espèce non à une atteinte d’ordre physique qui aurait empêché le travailleur d’accomplir des tâches similaires à celles exercées dans ses fonctions contractuelles mais essentiellement à une atteinte d’ordre psychique liée aux conditions de travail.
Rien ne permet de supposer, lorsque la lettre de notification du congé pour motif grave a été envoyée au travailleur à une adresse inexacte, que l’intéressé a pris connaissance de son contenu avant que ce courrier lui soit communiqué dans le cadre de la procédure judiciaire qu’il a intentée pour contester son licenciement. Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que l’employeur n’a pas valablement communiqué d’initiative les motifs concrets de celui-ci. Il lui appartient alors de fournir la preuve des motifs invoqués qu’il n’a pas communiqués à l’intéressé dans le respect de l’article 5 de la C.C.T. n° 109.
Le fait de s’endormir sur son lieu de travail au vu de tous constitue indiscutablement un manquement fautif du travailleur à l’obligation qui lui est faite « d’exécuter son travail avec soin, probité et conscience, au temps, au lieu et dans les conditions convenus » (L.C.T., art. 17), présentant un caractère de gravité d’autant plus certain lorsque, en sa qualité d’agent de gardiennage, il est investi d’un poste de confiance, requérant une attention toute particulière de sa part.
C’est à tort et en vain que le travailleur entend se prévaloir, pour couvrir son comportement, d’une prétendue pratique lorsque celle-ci va directement à l’encontre des instructions claires données par l’employeur aux agents de gardiennage en charge d’un site spécifique – lesquelles ne prévoient aucun assouplissement quelconque quant au lieu de travail pour ce qui concerne les shifts de nuit, la seule tolérance admise concernant l’usage d’un petit appareil multimédia par le garde de nuit – et qu’il ne ressort d’aucun élément objectif du dossier que cette pratique manifestement contraire aux instructions en vigueur était connue et a fortiori tolérée par la société.
Outre que le fait de ne pas être présent à son poste de travail pendant plusieurs heures constitue indiscutablement un manquement fautif du travailleur à ses obligations tant contractuelles que légales, il s’agit, comme tel, d’un manquement déjà particulièrement grave dans son chef en ce qu’il était, en sa qualité d’agent de gardiennage, investi d’un poste de confiance requérant une attention toute particulière et qu’il était de surcroît en charge d’un site particulièrement sensible.
Un travailleur a le droit d’exprimer, sans pour autant que l’on puisse conclure à la menace, qu’il entend exercer un recours en justice pour se défendre de la diffamation dont il se prétend victime et qu’il estime de nature à nuire à son avenir professionnel.
(Décision commentée)
L’article 35 LCT n’exige pas que la lettre de congé contienne expressément la mention « motif grave ». Son absence n’est donc pas de nature à invalider le licenciement intervenu sur cette base. Il en va de même lorsque, à la suite d’une simple erreur matérielle, on y évoque un « avertissement », ce fait ne modifiant pas la portée de la lettre de congé.
La précision requise n’est pas atteinte lorsque la lettre qui contient les motifs fait état d’une « conviction acquise », mais ne permet pas de déterminer avec certitude à quel moment celle-ci le fut, et, pour le reste, se réfère, à titre de faute très grave, à des menaces et intimidations à l’encontre de la société et de sa gérante, sans préciser le moins du monde en quoi consistaient lesdites menaces.
Aucun employeur normal et raisonnable ne peut accepter que la société et sa gérante fassent l’objet de menaces téléphoniques de la part d’un travailleur, en particulier dans une petite structure où il n’est pas possible de déplacer l’intéressé dans une autre division lointaine parce que les frictions avec la hiérarchie locale deviennent insupportables.
Lorsque l’employeur a communiqué les motifs du congé, la charge de la preuve sera partagée de façon égale. L’avantage dont bénéficierait l’employeur consisterait dans le fait qu’il bénéficie quelque-part d’une présomption (simple) de l’absence du caractère manifestement déraisonnable du licenciement lorsqu’il a été en mesure de démontrer la réalité des motifs invoqués à l’appui de sa décision et leur lien de causalité avec le licenciement.
Une notification écrite des motifs du licenciement sur le formulaire C4 peut être considérée comme une notification spontanée et valable des motifs au sens de l’article 6 de la C.C.T. n° 109, pour autant qu’elle permette au travailleur d’être informé des motifs qui ont conduit à son licenciement.
Une lecture à la lettre de l’article 8 de la C.C.T. n° 109 impliquerait d’écarter l’existence d’un licenciement manifestement déraisonnable si l’une des propositions énoncées fait défaut, ce qui serait en contradiction avec les enseignements évolutifs de la Cour de cassation relatifs à l’ancien article 63 de la loi du 3 juillet 1978.
Il convient de considérer que l’utilisation de la conjonction de coordination « et » dans l’article 8 est malheureuse et de privilégier une autre lecture, sous la forme positive, de cette disposition : le licenciement sera régulier s’il se base sur un motif en lien avec l’aptitude, la conduite du travailleur ou les nécessités de fonctionnement de l’entreprise et si la décision de licencier aurait été prise par un employeur normal et prudent.
(Décision commentée)
En cas de licenciement pour carences professionnelles, la procédure préalable au licenciement (C.P. 325) vise quatre étapes étant (i) la notification des manquements professionnels au travailleur, (ii) sa convocation écrite à un entretien dans un délai déterminé (avec remise du dossier de licenciement), (iii) la notification de la décision définitive et (iv) l’information de la délégation syndicale avec notification au travailleur.
Le choix fait par l’intéressé de ne pas être assisté par un délégué syndical ne dispense pas l’employeur du respect de l’ensemble de ces étapes. Ces obligations ne sont pas purement formelles. Il appartient à l’employeur d’agir de façon à permettre que l’effet utile de la procédure soit atteint. A défaut, l’indemnité spéciale est due.
Même dans le secteur du bâtiment, il n’est pas particulièrement adéquat d’appeler les membres de son équipe en les sifflant. À partir du moment où la direction estime que ce n’est pas vraiment « la fin du monde », ce fait n’est cependant pas suffisamment grave pour justifier un licenciement immédiat.
Ne correspond pas à l’attitude que l’on peut attendre d’un employeur normalement prudent et diligent qui met fin à un contrat de travail, même pour faute grave, le fait de décider de ce licenciement sur la seule base du rapport que le conseiller en prévention a dû réaliser dans l’urgence et en faisant l’objet de manipulations orchestrées à l’effet de lui présenter des témoins dont les déclarations convergeaient artificiellement. Il y va de méthodes d’autant plus inacceptables et inutilement vexatoires que les faits reprochés étaient particulièrement odieux et, partant, attentatoires à la réputation du travailleur.
Dès lors qu’il ne peut être exigé que l’organisation de l’entreprise soit telle que la personne investie du pouvoir de licencier soit informée en temps utile du fait considéré comme grave, le fait qu’elle ait eu la possibilité de connaître le fait reproché plus de trois jours avant le licenciement est non pertinent.
(Décision commentée)
La convention collective relative à la stabilité d’emploi dans le secteur des assurances contient une disposition particulière en cas de licenciement pour motif grave, étant que l’employeur est tenu d’informer la délégation syndicale dès la notification légale à l’intéressé. Cette formalité est distincte de la présence du délégué syndical lors de l’audition du travailleur, qui ne peut réparer l’omission de l’information à la délégation syndicale. Il s’agit d’une procédure prévue par la convention collective au même titre que les autres obligations de l’employeur dans d’autres hypothèses de licenciement. Le travailleur n’a pas à exercer un droit à cet égard. En conséquence vu l’omission de la formalité, la société est tenue au payement de l’indemnité de sécurité d’emploi.
Dès lors qu’aucun fait fautif dont l’employeur eut connaissance dans le délai légal n’est établi, il n’y a pas lieu d’avoir égard aux faits connus depuis plus de trois jours ouvrables, ceux-ci n’étant pas susceptibles d’avoir une incidence sur la gravité de comportements dont le caractère fautif n’est pas établi.
Toute modification (importante ou non) d’un élément convenu (essentiel ou accessoire), temporaire ou définitive est fautive au regard des dispositions du Code civil (article 1134) et des dispositions spécifiques du contrat de travail (articles 17, 20 et 25 de la loi sur les contrats de travail). Toute modification apportée unilatéralement à un élément convenu constitue donc un manquement mais ne justifie pas nécessairement une rupture du contrat. Le Président du tribunal, saisi en référés, peut en conséquence ordonner la suspension de la décision prise unilatéralement par l’employeur dans l’attente d’un accord ou de l’issue de la procédure menée au fond, et cela dans un contexte d’urgence dès lors que la modification est mise en œuvre.
On ne peut attendre d’ouvriers de production qu’ils utilisent toujours un langage correct ou fassent preuve d’une politesse de tous les instants et que, dans le cadre de conversations sur Messenger qui n’ont pas vocation à être rendues publiques, ils s’abstiennent de tenir, fût-ce sur un ton qui se veut celui de la plaisanterie, des propos à tout le moins indélicats ou inappropriés, voire triviaux.