Les allocations sociales peuvent relever du domaine de la vie familiale tel que garanti par l’article 8 de la Convention et faire entrer en jeu son article 14. Pour ce, la matière sur laquelle porte le désavantage allégué doit compter parmi les modalités d’exercice du droit au respect de la vie familiale en ce sens que les mesures visent à favoriser la vie familiale et qu’elles ont nécessairement une incidence sur l’organisation de celle-ci. Un éventail d’éléments pertinents doit être pris en compte, éléments qu’il convient d’examiner dans leur ensemble. Il s’agit notamment du but de l’allocation telle que déterminé par la Cour à la lumière de la législation concernée, ses conditions d’octroi, de calcul et d’extinction ainsi que les effets sur l’organisation de la vie familiale et les incidences réelles de l’allocation compte tenu du cas individuel du requérant et de sa vie familiale pendant toute la période de versement.
À défaut, en l’espèce, pour la requérante de démontrer que la réduction de sa rente d’assurance-invalidité (réduction temporaire touchant un quart de celle-ci) l’a touchée de manière significative et concrète dans la jouissance de sa vie familiale, l’article 14 n’est pas applicable sous cet angle.
Entendant dénoncer des faits de harcèlement moral et sexuel survenus sans témoin, une travailleuse avait envoyé un courriel à un nombre limité de personnes (six dont une seulement était extérieure à l’affaire) afin d’alerter celles-ci sur sa situation et de trouver une solution permettant d’y mettre fin. Non seulement aucune suite utile ne fut réservée à sa démarche mais la personne désignée comme l’agresseur (alors vice-président exécutif de l’employeur) déposa plainte au pénal et elle fut condamnée.
La Cour relève le manque de proportionnalité de la sanction eu égard d’abord au nombre réduit des destinataires du courriel litigieux, de la nature des propos tenus et enfin des effets de ceux-ci sur la réputation de l’intéressé. Sur la nature des propos litigieux la Cour précise que la requérante a agi en sa qualité de victime alléguée des faits qu’elle dénonçait et que les propos contenus dans le courriel étaient des déclarations de fait. Elle rappelle que même les documents privés diffusés à un nombre restreint de personnes doivent avoir une base factuelle et que plus l’allégation est sérieuse plus la base factuelle doit être solide. Elle tient compte de la circonstance que les faits dénoncés ont été commis sans témoin et que l’absence de plainte de l’intéressée relativement à de tels agissements ne saurait conduire à caractériser sa mauvaise foi.
En outre, la condamnation pénale prononcée à sa charge comporte par nature un effet dissuasif susceptible de décourager les intéressés de dénoncer des faits aussi graves que ceux caractérisant à leurs yeux un harcèlement moral ou sexuel.
La Cour retient une violation de l’article 10 de la Convention, concluant à l’absence de rapport raisonnable de proportionnalité entre la restriction au droit de la requérante à la liberté d’expression et le but légitime poursuivi.
La législation polonaise a clairement introduit une différence de traitement fondée sur le sexe en ce qui concerne l’âge de la cessation obligatoire d’activité entre personnes exerçant la fonction de juge (les femmes étant contraintes d’arrêter à 60 ans). Il s’agit d’une profession intellectuelle, dans laquelle les différences biologiques entre les hommes et les femmes et les éventuelles considérations liées au rôle de ces dernières dans la société n’ont pas de répercussions sur l’aptitude des uns ou des autres par rapport à l’exercice de la fonction. En outre, en soumettant les femmes à l’obligation de prouver par certificat médical leur aptitude sur le plan intellectuel à siéger, il y a une différence de traitement fondée sur le sexe entre des personnes placées dans des situations analogues (avec renvoi à C.J.U.E. 5 novembre 2019, Aff. C-192/18).
Le cadre juridique national (Pologne) appliqué à des juges femmes leur imposant de prendre leur retraite à l’âge de 60 ans ne les protège d’aucune manière que ce soit contre la cessation arbitraire de leurs fonctions de juge. Les décisions prises à l’égard de chacune des requérantes sont constitutives d’une immixtion arbitraire et irrégulière du représentant de l’autorité exécutive et de l’organe subordonné à celle-ci dans la sphère d’indépendance et d’inamovibilité des juges. La Cour précise que dans une telle situation il devrait y avoir des raisons sérieuses propres à justifier une absence exceptionnelle de contrôle juridictionnel, ce qui n’est pas fourni par le Gouvernement. Il y a dès lors violation du droit d’accès à un tribunal dans le chef de toutes les requérantes (avec renvoi à C.J.U.E. 5 novembre 2019, Aff. C-192/18).
Dans l’affaire Beeler c. Suisse (11 octobre 2022, n° 78.630/12), la Grande Chambre de la Cour a eu l’occasion de clarifier les principes régissant la question de savoir si et dans quelle mesure les allocations sociales ressortissent au domaine de la « vie familiale » au sens de l’article 8 de la Convention et peuvent, dès lors, faire entrer en jeu l’article 14 de la Convention.
Compte tenu du but de la prestation litigieuse en l’espèce, des conditions de son octroi, de la légalité du plafond appliqué et du fait que les effets réels de ce plafonnement sur la vie familiale de l’intéressé sont restés limités, la Cour estime que la prestation en cause ne vise pas à favoriser la vie familiale et qu’elle n’a pas nécessairement une incidence sur l’organisation de celle-ci.
Sans nier la réalité des inconvénients subis par le requérant, la Cour constate également qu’ils sont de nature purement pécuniaire, aspect qui n’est pas en soi couvert par le droit au respect de la vie privée au sens de l’article 8 de la Convention.
Dans l’affaire Beeler c. Suisse (11 octobre 2022, n° 78.630/12), la Grande Chambre de la Cour a eu l’occasion de clarifier les principes régissant la question de savoir si et dans quelle mesure les allocations sociales ressortissent au domaine de la « vie familiale » au sens de l’article 8 de la Convention et peuvent, dès lors, faire entrer en jeu l’article 14 de la Convention.
Compte tenu du but de la prestation litigieuse en l’espèce, des conditions de son octroi, de la légalité du plafond appliqué et du fait que les effets réels de ce plafonnement sur la vie familiale de l’intéressé sont restés limités, la Cour estime que la prestation en cause ne vise pas à favoriser la vie familiale et qu’elle n’a pas nécessairement une incidence sur l’organisation de celle-ci.
Sans nier la réalité des inconvénients subis par le requérant, la Cour constate également qu’ils sont de nature purement pécuniaire, aspect qui n’est pas en soi couvert par le droit au respect de la vie privée au sens de l’article 8 de la Convention.
(Décision commentée)
La divulgation d’informations confidentielles peut contribuer au débat public, s’agissant en l’espèce de données sur les pratiques fiscales des sociétés multinationales portant sur d’importants enjeux économiques et sociaux.
Dans les arrêts Bărbulescu et López Ribalda et autres, la Cour a indiqué que lorsque les juridictions nationales procèdent à la mise en balance des différents intérêts en jeu, elles devraient tenir compte des facteurs suivants : (i) l’information donnée à l’employé de la possibilité que l’employeur prenne des mesures de surveillance ainsi que de la mise en place de telles mesures, (ii) l’ampleur de la surveillance opérée par l’employeur et le degré d’intrusion dans la vie privée de l’employé, (iii) les motifs légitimes justifiant le recours à la surveillance et l’ampleur de celle-ci (iv) la possibilité de mettre en place un système de surveillance reposant sur des moyens et des mesures moins intrusifs, (v) les conséquences de la surveillance pour l’employé qui en a fait l’objet et (vi) ) les garanties adéquates offertes, notamment lorsque les mesures de surveillance de l’employeur avaient un caractère intrusif.
La Cour estime que, en retenant uniquement les données de géolocalisation concernant le kilométrage parcouru, le juge portugais a réduit l’ampleur de l’intrusion dans la vie privée du requérant à ce qui était strictement nécessaire au but légitime poursuivi, à savoir le contrôle des dépenses de l’entreprise. La marge d’appréciation qui revenait à l’État en l’espèce n’a pas été dépassée. Les autorités nationales n’ont pas manqué à l’obligation positive qui leur incombait de protéger le droit du requérant au respect de sa vie privée. Partant, il n’y a pas eu violation de l’article 8 de la Convention.
L’article 14 C.E.D.H. offre une protection contre toute discrimination dans la jouissance des droits et libertés garantis par les autres clauses normatives de la Convention et de ses Protocoles. Pour qu’un problème se pose au regard de cette disposition, il doit y avoir une différence dans le traitement de personnes placées dans des situations analogues ou comparables. Une telle différence est discriminatoire si elle ne repose pas sur une justification objective et raisonnable, c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un but légitime ou s’il n’y a pas un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. La notion de discrimination englobe d’ordinaire les cas dans lesquels un individu ou un groupe se voit, sans justification adéquate, moins bien traité qu’un autre, même si la Convention ne requiert pas le traitement le plus favorable.
En différenciant les conditions d’octroi d’une rente selon qu’il s’agit d’une veuve ou d’un veuf, le législateur (suisse) a opéré une distinction en fonction du sexe qui ne s’impose ni pour des motifs biologiques ni pour des motifs fonctionnels. Seules des considérations très fortes peuvent faire qu’une différence de traitement fondée sur le sexe soit compatible avec la C.E.D.H. La marge d’appréciation dont disposent les Etats pour justifier cette différence est étroite.
L’obligation de souscrire une assurance maladie constitue une ingérence dans l’exercice par une personne du droit au respect de ses biens. Cependant, l’obligation en l’espèce est prévue par la loi et poursuit les buts légitimes qui découlent de l’article 8. Compte tenu du principe de solidarité, du coût de la prime de l’assurance maladie en question, de la possibilité de souscrire une assurance complémentaire (couvrant l’homéopathie) et vu l’existence d’une aide financière pouvant être sollicitée par les personnes à revenus modestes, cette ingérence est proportionnée au but légitime poursuivi. Par conséquent, il n’y a pas violation de l’article 1er du Protocole n° 1 à la C.E.D.H.
La législation française prévoit que le versement d’une pension d’invalidité s’achève automatiquement lorsque le salarié déclaré invalide atteint l’âge légal minimum de départ à la retraite, celle-ci étant alors remplacée par une pension de retraite. Par dérogation à ce principe, lorsque le salarié invalide continue d’exercer une activité professionnelle effective, il peut demander le maintien du versement d’une pension d’invalidité en lieu et place d’une pension de retraite jusqu’au jour où il atteindra l’âge limite légal de départ à la retraite.
La Cour constate que la différence de situation n’est pas liée au handicap, mais qu’elle dépend de l’exercice ou non par l’assuré invalide d’une activité professionnelle effective et rappelle que dans son arrêt du 6 octobre 2016 (dans la présente affaire), la Cour de cassation française a considéré que la différence de situation entre les assurés selon qu’ils exercent ou non une activité professionnelle effective a pour objectif la nécessaire coordination entre l’assurance invalidité et l’assurance vieillesse. Compte tenu de la marge d’appréciation ample dont les Etats contractants jouissent pour déterminer si et dans quelle mesure des différences entre des situations analogues justifient des distinctions de traitement, la Cour conclut que les mesures prises par l’Etat à l’égard de la requérante, fondées sur l’existence ou non d’une activité professionnelle effective, poursuivaient un but légitime et n’étaient pas manifestement dépourvues de base raisonnable et de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. (Recours basé sur une violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 1er du Protocole n° 1)
Suite à une erreur de l’administration (INPS italienne en l’espèce), une enseignante en invalidité se voit réclamer le remboursement d’une allocation compensatrice allouée (à tort) pendant plusieurs années dans le cadre de la garantie salariale liée à la mobilité des enseignants. La Cour estime que la mesure litigieuse a constitué une ingérence dans le droit de la requérante au respect de ses biens. Celle-ci doit remplir trois conditions : avoir été effectuée « dans les conditions prévues par la loi », « pour cause d’utilité publique » et dans le respect d’un juste équilibre entre les droits de la requérante et les intérêts de la communauté. Si les deux premières conditions sont remplies, la troisième ne l’est pas. La décision de procéder au versement de l’allocation compensatrice provient d’un employeur public à l’issue d’un processus administratif. Cela signifie que, du point de vue de la requérante, l’application des dispositions pertinentes en la matière pouvait être raisonnablement perçue comme exacte et fondée sur des actes administratifs. Si une décision administrative peut faire l’objet d’une révocation pour l’avenir (ex nunc), l’expectative qu’elle ne soit pas remise en cause rétroactivement (ex tunc) doit généralement être reconnue comme légitime, à moins qu’il n’existe de sérieuses raisons contraires fondées sur l’intérêt général ou de tiers. Au vu des circonstances particulières de l’espèce, l’ingérence subie par la requérante a été disproportionnée dès lors que, seule, celle-ci a dû supporter la charge de l’erreur commise par l’administration. Partant, il y a eu violation de l’article 1 du Protocole n° 1 à la Convention, la Cour décidant d’une satisfaction équitable (dommage matériel et moral).
Dans la mesure où le droit à une pension d’invalidité était acquis selon le droit national (l’intéressé en bénéficiant depuis 1994), que son inaptitude au travail a persisté (ce qui n’est pas contesté) et que le paiement en a été suspendu (pendant 21 mois en l’espèce) suite à une (mauvaise) appréciation par le service médical du Fonds débiteur, l’absence de réparation constitue un manquement à l’article 1er du Protocole n° 1 à la Convention.
En effet, sur l’appréciation d’une ingérence illégale et disproportionnée, une charge excessive a été imposée à l’intéressé, vu que la mauvaise appréciation de son état par les médecins attachés au Fonds (débiteur) l’ont privé de sa pension alors qu’il était incapable de travailler.
Lorsqu’il s’agit de propriété privée, le principe de bonne gouvernance est de première importance. Les autorités publiques doivent agir avec la plus grande cohérence, particulièrement lorsqu’il s’agit des droits des personnes physiques, tels que les avantages sociaux (sécurité sociale et aide sociale) et autres droits de propriété.
En l’espèce, les autorités nationales, en ce compris les juridictions saisies dans le cadre des procédures d’indemnisation, ont manqué à leur obligation d’agir en temps opportun, de manière appropriée et avec la plus grande cohérence, n’ayant pas réparé l’erreur du Fonds.
L’ingérence dans les droits de propriété du requérant est dès lors disproportionnée (violation de l’article 1er du Protocole n° 1 à la Convention) et ouvre le droit à réparation.
Saisi à l’initiative du Groupe européen des femmes diplômées des Universités de 15 réclamations collectives relatives à la violation (i) des articles 4 § 3 et 20.C de la Charte sociale européenne en ce qui concerne la reconnaissance et l’application du droit à l’égalité de rémunération, (ii) de l’article 20.C pour ce qui est des mesures visant à promouvoir l’égalité des chances entre les femmes et les hommes en matière d’égalité de rémunération et (iii) de l’article 20.D en ce qui concerne la représentation équilibrée des femmes dans les postes décisionnels au sein des entreprises privées, le Comité a décidé en ce qui concerne la Belgique
(i) qu’il n’y a pas violation des articles 4 § 3 et 20.C de la Charte en ce qui concerne la reconnaissance et l’application du droit à l’égalité de rémunération pour un travail égal ou de valeur égale non plus que pour ce qui est de la reconnaissance du droit à l’égalité de rémunération dans la législation et les organes d’égalité ; qu’il y a cependant violation de ces articles vu que la transparence salariale n’est pas assurée ;
(ii) qu’il n’y a pas violation de l’article 20.C de la Charte en ce qui concerne la promotion de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes en matière salariale ni de l’article 20.D pour ce qui est de la représentation équilibrée des femmes dans les postes décisionnels au sein des entreprises privées.
Les principes tirés de l’arrêt BARBALESCU c/ ROUMANIE, qui concerne la surveillance par un employeur du compte email d’un employé, sont transposables à la vidéo-surveillance sur le lieu du travail. Le juge (interne) doit examiner si le travailleur avait été informé de ces mesures de surveillance. Il doit vérifier l’ampleur de celles-ci et le degré d’intrusion, ainsi que la justification de la mesure par des motifs légitimes. Il doit également examiner si existe la possibilité d’adopter des mesures moins intrusives ainsi que les conséquences de la surveillance pour les travailleurs et l’existence de garanties appropriées, notamment l’information fournie ou la possibilité d’introduire une réclamation. La Cour européenne recherchera si l’utilisation des enregistrements vidéo comme preuve a nui à l’équité du procès dans son ensemble (article 6, § 1er).
L’Organisation Internationale du Travail et le Comité Européen des Droits sociaux ont admis que, dans certains secteurs professionnels (forces armées, police), peuvent exister des restrictions du droit de grève. Ni l’un ni l’autre de ces organes ne considère toutefois le transport ou le secteur ferroviaire comme un service essentiel. A supposer même que celui-ci soit un service essentiel, une restriction telle que l’interdiction totale de faire grève exige une solide justification et la perspective de pertes financières découlant d’une action revendicative ne saurait constituer une raison suffisante. Plus particulièrement dans l’espèce examinée, le Gouvernement russe n’a pas étayé son argument consistant à dire que cette action a causé des dommages, à savoir des retards dans le transport ferroviaire des voyageurs ou des marchandises et que l’accès aux quais ne pouvait être régulé.
Dans la mesure où l’intervention du législateur était prévisible et répondait à une impérieuse justification d’intérêt général, même si elle réduit les chances d’une partie (en l’espèce 24 personnes morales, étant des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, des hôpitaux et une association gérant un foyer d’accueil pour personnes handicapées), il n’y a pas de violation de l’article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde, le législateur n’étant ainsi pas intervenu afin de modifier l’issue des procédures auxquelles l’Etat était partie, rompant par là l’égalité des armes.
(Décision commentée)
Un citoyen doit en principe pouvoir présumer de la validité d’une décision administrative prise en sa faveur. Alors que celle-ci peut faire l’objet d’un retrait pour l’avenir (ex nunc), il est légitime d’admettre que la remise en cause de celle-ci avec effet rétroactif (ex tunc) ne peut intervenir, du moins sauf si existent des raisons sérieuses que celle-ci intervient dans l’intérêt général ou dans l’intérêt des tiers.
Vu l’ensemble des éléments de fait retenus (l’intéressée n’ayant pas trompé les autorités sur sa situation et n’ayant pas été informée quant à la période légale maximale pour laquelle elle pouvait prétendre à des indemnités de chômage, la poursuite – par erreur – des paiements étant le seul fait de l’Office de l’Emploi), exiger qu’elle rembourse le montant des allocations de chômage payées à la suite de cette erreur de l’autorité entraîne pour elle une charge individuelle excessive (considérant n° 90), qui constitue une violation de l’article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention.
Pour vérifier si l’ingérence dans le droit à la liberté d’expression de l’avocat que constitue une sanction disciplinaire est disproportionnée - n’étant donc pas nécessaire dans une société démocratique -, il faut avoir égard aux critères suivants : (i) la qualité de l’intéressé et la participation de sa déclaration à la mission de défense de son client, (ii) la contribution à un débat d’intérêt général, (iii) la nature des propos litigieux, (iv) les circonstances particulières de l’espèce et (v) la nature de la sanction infligée (avec renvoi à Cr.E.D.H., 23 avril 2015, Section V, Req n°29.369/10, Morice c/ France).
La vidéo-surveillance conduite par l’employeur, qui s’est poursuivie longtemps, n’était pas conforme aux prescriptions de la législation pertinente et, en particulier, à l’obligation d’informer au préalable, explicitement, précisément et sans équivoque toutes les personnes concernées de l’existence et des spécificités d’un système permettant la collecte d’informations à caractère personnel. Les droits de l’employeur auraient pu être préservés, du moins dans une certaine mesure, par d’autres moyens, notamment en informant au préalable les membres du personnel, fût-ce de manière générale, de l’installation d’un système de vidéo-surveillance et en lui communiquant les informations prescrites par la loi sur la protection des informations à caractère personnel. Nonobstant la marge d’appréciation de l’Etat défendeur, les juridictions internes n’ont pas ménagé de juste équilibre entre le droit des membres du personnel au respect de leur vie privée, garanti par l’article 8 de la Convention, et l’intérêt de leur employeur à la préservation de son droit de propriété.
N.B. Cette affaire a été renvoyée devant la Grande Chambre.
(Décision commentée)
Les communications sont couvertes par les notions de « vie privée » et de « correspondance », ce qui implique l’application de l’article 8 de la C.E.D.H. Dans la mesure où la surveillance des communications a été admise par les juridictions nationales, il faut analyser le grief sous l’angle des obligations positives de l’Etat, les autorités nationales étant en effet tenues de mettre en balance les intérêts concurrents en jeu. Il s’agit d’une part du droit du travailleur au respect de sa vie privée et de l’autre de celui de l’employeur de prendre des mesures pour assurer le bon fonctionnement de l’entreprise. C’est la question du juste équilibre qui est au cœur du débat (la Cour soulignant que, si la cour d’appel a retenu que doivent intervenir les principes de nécessité, de finalité, de transparence, de légitimité, de proportionnalité et de sécurité, elle n’a cependant pas vérifié si le travailleur avait été averti préalablement de la possibilité pour son employeur de mettre en place lesdites procédures, non plus que de la nature de celles-ci).
Une victime d’accident du travail ayant subi des séquelles sérieuses (notamment au visage et de nature à la défigurer) peut être victime d’une violation de l’article 3 de la C.E.D.H. dès lors qu’il n’a pas été investigué utilement et conformément aux exigences de la Convention. L’article 3 requiert en effet que les autorités mènent une enquête officielle fouillée en ce qui concerne les mauvais traitements allégués, même si ceux-ci ont été infligés par des personnes privées. L’obligation procédurale au sens de l’article 3 de la Convention exige que toute enquête soit en principe de nature à permettre l’établissement des faits de l’espèce, ainsi que l’identification et les sanctions à infliger au(x) responsable(s) en cas de violation de dispositions légales. Il ne s’agit pas d’une obligation de résultat mais de moyen. Les autorités doivent prendre les mesures nécessaires dont elles peuvent disposer pour réunir les preuves relatives à l’accident, telles que déclarations de témoins et éléments recueillis sur place. La rapidité de réaction des autorités à la plainte est un facteur important.
En l’espèce, la Cour alloue au titre de dommage moral un montant de 6.500 euros à l’héritier de la victime, décédée entre-temps.
Travailleur détenu ayant dépassé l’âge de la retraite : en l’absence d’un consensus au sein des États membres du Conseil de l’Europe sur la question de l’obligation des personnes détenues de continuer à travailler après qu’elles ont atteint l’âge de la retraite, l’on ne saurait conclure à une interdiction absolue au titre de l’article 4 de la Convention. En conséquence, le travail obligatoire effectué par un détenu pendant sa détention, y inclus celui accompli depuis qu’il a atteint l’âge de la retraite, peut être considéré comme un « travail requis normalement d’une personne soumise à la détention », au sens de l’article 4 § 3 a) de la Convention.
Le droit suisse en matière d’évaluation de l’invalidité contient une méthode dite ‘mixte’. Celle-ci concerne les personnes qui, parallèlement à une activité lucrative à temps partiel, exercent aussi une autre activité, non lucrative (ex : s’occuper du foyer). Le taux d’invalidité est déterminé par comparaison des revenus pour la part d’activité lucrative et par comparaison des champs d’activité pour les activités ménagères.
Cette disposition est susceptible de constituer une discrimination indirecte dès lors qu’elle touche majoritairement des femmes. Si l’objectif de la différence de traitement peut en effet être considéré comme légitime (couvrir le risque de perte, du fait de l’invalidité, de la possibilité d’exercer une activité rémunérée que l’intéressé pouvait réellement effectuer auparavant), une telle méthode ne s’accorde plus avec la poursuite de l’égalité des sexes dans la société contemporaine, où les femmes ont de plus en plus le souhait légitime de pouvoir concilier vie familiale et intérêts professionnels. Le refus de toute rente constitue en l’espèce une violation de l’article 14 de la Convention (combiné avec l’article 8).
(Décision commentée)
La vie privé est un concept large, qui englobe notamment le droit d’établir et de développer des relations avec autrui ainsi que celui à l’identité et au développement personnel. Ceci ne signifie cependant pas que sont protégées toutes les activités menées en vue d’établir et de développer de telles relations. Des communications téléphoniques à partir des locaux professionnels sont prima facie couvertes par les notions de vie privée et de correspondance au sens de l’article 8. Il en va de même des courriels envoyés du lieu du travail ainsi que des informations révélées par le contrôle d’utilisations d’internet faites à usage privé. Il en découle, en l’absence d’information selon laquelle ces utilisations pourraient faire l’objet de contrôles, que le travailleur peut raisonnablement penser que celles-ci sont protégées (appels donnés à partir d’un téléphone de l’entreprise, ainsi que courriels et usage de l’internet).
Dès lors que, en l’espèce, il apparaît que de telles informations ont été données et que le travailleur fait valoir le caractère purement professionnel des échanges, l’employeur pouvait faire de ceux-ci un contrôle raisonnable et proportionné.
Liberté d’expression des avocats dans l’exercice de leur profession dans le cadre de la procédure judiciaire : une condamnation prononcée pour délit de calomnie suite à des écrits de procédure est une ingérence dans l’exercice par celui-ci de son droit à la liberté d’expression telle que protégée par l’article 10, § 1er de la Convention. Une telle restriction emporte violation de l’article 10 si elle ne relève pas de l’une des exceptions ménagées par l’article 10 § 2. Se pose dès lors la question de savoir si une telle ingérence était ‘nécessaire dans une société démocratique’. Il faut en conséquence rechercher si au vu des faits de la cause un juste équilibre a été ménagé entre, d’une part, la nécessité de garantir la protection de l’autorité du pouvoir judiciaire et des droits d’autrui et, d’autre part, la protection de la liberté d’expression du requérant en sa qualité d’avocat.
Dès lors que le juge national a procédé à la balance du droit à la liberté d’expression d’une part et de l’autre des effets négatifs d’accusations proférées par un employé communal à l’encontre d’un mandataire public et qu’il a admis que le licenciement intervenu n’est pas déraisonnable – l’autorité pouvant notamment craindre que son comportement ne se reproduise –, le licenciement n’est pas intervenu en violation de l’article 10 C.E.D.H.
La liberté d’expression vaut aussi pour les avocats, qui ont le droit de se prononcer publiquement sur le fonctionnement de la justice, mais dont la critique ne saurait franchir certaines limites.
Les motifs retenus par le juge national n’étant pas suffisants pour justifier que l’ingérence dans le droit à la liberté d’expression (sanctionnée en l’espèce par le licenciement de l’intéressé) était proportionnée au but légitime poursuivi et était, partant, « nécessaire dans une société démocratique », il y a violation de l’article 10 C.E.D.H.
Dans cet arrêt, la Cour qualifie le recours à la grève (primaire) pour la première fois comme « the most powerful instrument to protect occupational interests ». Voir également l’opinion concordante du juge Pinto DE ALBUQUERQUE.
La notion de ‘vie privée’ est une notion large, non susceptible d’une définition exhaustive, qui recouvre l’intégrité physique et morale de la personne et peut donc englober de multiples aspects de l’identité de l’individu, tels le nom ou des éléments se rapportant au droit à l’image. En ce qui concerne la divulgation de données à caractère personnel, les autorités nationales ont une certaine latitude pour établir un juste équilibre entre les intérêts publics et privés qui se trouvent en concurrence. Cette marge d’appréciation va de pair avec un contrôle européen et son ampleur est fonction de facteurs tels que la nature et l’importance des intérêts en jeu et la gravité de l’ingérence.
Si des enregistrements vidéos faits sur la voie publique par un détective dûment agréé, qui respectent l’ensemble des exigences légales prévues en droit interne pour ce genre d’activités, constituent une ingérence dans le droit à la vie privée, cette ingérence n’est pas disproportionnée à la lumière des exigences de l’article 8 de la Convention, dans la mesure où, en tant qu’ils contredisent les affirmations du requérant quant à son état consécutif à un accident pour lequel il demande réparation en justice, ils peuvent être soumis au juge dans le cadre d’un procès équitable et ne seront utilisés que comme moyen de preuve dans le cours de celui-ci.
Art. 11 convention - limitation invoquée par le syndicat RMT à l’exercice du droit de grève - décision : pas de violation - réf. aux instances de contrôle de l’OIT et de la CSE
Le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion s’applique à des vues atteignant un degré suffisant de force, de sérieux, de cohérence et d’importance. A supposer cette condition satisfaite, le devoir de neutralité et d’impartialité de l’Etat est incompatible avec un quelconque pouvoir d’appréciation de sa part quant à la légitimité des convictions religieuses ou à la manière dont elles sont exprimées. Selon sa jurisprudence constante, la Cour laisse aux Etats parties à la Convention une certaine marge d’appréciation pour ce qui est de dire si et dans quelle mesure une ingérence est nécessaire. Cette marge d’appréciation va de pair avec un contrôle européen portant à la fois sur la loi et sur les décisions qui l’appliquent. La tâche de la Cour consiste à rechercher si les mesures prises au niveau national se justifient dans leur principe et sont proportionnées (extraits).
(Décision commentée)
Absence de motivation du licenciement – violation article 6 CEDH
Eu égard à l’importance fondamentale que revêt la prohibition de la discrimination fondée sur le sexe, l’on ne saurait admettre la possibilité de renoncer au droit à ne pas faire l’objet d’une telle discrimination, car pareille renonciation se heurterait à un intérêt public important (voir, pour une approche comparable concernant la discrimination raciale, D.H. et autres c. République tchèque [GC], n° 57325/00, § 204, CEDH 2007-IV).
L’exclusion des militaires de sexe masculin du droit au congé parental, alors que les militaires de sexe féminin bénéficient de ce droit, ne peut passer pour reposer sur une justification raisonnable ou objective. Cette différence de traitement constitue une discrimination fondée sur le sexe.
Congé parental - ne figure pas à l’article 8 - mais a une incidence sur la vie familiale - militaires masculins ne bénéficiant pas d’un congé parental comme les militaires féminins - conditions des restrictions apportées à la vie familiale et privée des militaires
Le droit à la liberté syndicale ne peut pas être dissocié du droit à la liberté d’expression et d’information. La liberté d’expression tout comme la liberté d’expression syndicale ne sont pas illimitées et leur exercice est soumis aux mêmes limitations et restrictions nécessaires dans une société démocratique. En cas de licenciement de salariés (porteurs de mandats syndicaux), intervenu suite à des caricatures et articles mettant en cause leur hiérarchie, il faut, en application de l’article 10 de la Convention, vérifier si la sanction disciplinaire de licenciement pour faute grave répondait à un ‘besoin social impérieux’, était proportionnée au but légitime poursuivi et si les motifs invoqués par les autorités nationales pour la justifier étaient ‘pertinents et suffisants’. Dans les circonstances particulières de l’espèce (atteinte à l’honorabilité des personnes faite par voie d’expression grossières et insultantes dans le milieu professionnel), la sanction n’est pas manifestement disproportionnée ou excessive (opinion dissidente de 5 membres de la Cour).
Art. 1er du Protocole n° 1 et art. 14 de la Convention : détention - travail en prison - absence de rémunération suffisante pour permettre de cotiser au régime des pensions de retraite - marge des Etats quant à la couverture sociale des détenus - absence de violation en l’espèce
Travail des détenus - notion de « travail requis normalement d’une personne soumise à la détention » - jurisprudence de la Cr.E.D.H. sur la couverture sociale et la rémunération des détenus
Art. 1er du Protocole n° 1 et art. 14 de la Convention : revalorisation d’une pension de retraite (inflation) - personne vivant en Afrique du Sud - lieu de résidence : motif de discrimination prohibé par l’article 14 - absence de situation comparable à celle des pensionnés résidant sur le territoire britannique (ou dans un pays signataire d’un accord de réciprocité)
Bien que les procédures préliminaires ne relèvent normalement pas de la protection de l’article 6, la Cour observe qu’il existe désormais un large consensus au sein des Etats membres du Conseil de l’Europe quant à l’applicabilité de l’article 6 aux mesures provisoires, y compris les injonctions. Telle est aussi la position adoptée dans la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes. Il ne se justifie plus de considérer automatiquement que les procédures d’injonction ne sont pas déterminantes pour des droits ou obligations de caractère civil. La Cour juge qu’elle n’est pas non plus convaincue qu’une déficience d’une telle procédure puisse être nécessairement corrigée dans le cadre de la procédure au fond, étant donné que tout préjudice subi dans l’intervalle pourrait alors être devenu irréversible et que les chances d’obtenir un redressement du dommage seraient vraisemblablement minces, en dehors peut-être d’une indemnisation. La Cour considère donc qu’il y a lieu de modifier la jurisprudence. L’article 6 trouvera à s’appliquer si le droit en jeu tant dans la procédure au principal que dans la procédure d’injonction est « de caractère civil » au sens de l’article 6 et si la mesure provisoire est déterminante pour le droit ou l’obligation de caractère civil en jeu, quelle que soit la durée pendant laquelle elle a été en vigueur (extrait du résumé juridique HUDOC).
Art. 1er du Protocole n° 1 et art. 14 de la Convention : privation d’une prestation (pension d’Etat) pour un motif discriminatoire visé à l’article 14 (nationalité)
(Décision commentée)
La publicité des débats judiciaires est un principe démocratique fondamental - Le justiciable a le droit d’être entendu par le juge, devant au moins une instance - Conversion sexuelle et vie privée - art. 6, 8 et 14 de la C.E.D.H.
(Décision commentée)
Obligation des autorités d’organiser le système judiciaire afin de garantir dans un délai raisonnable l’effectivité d’une décision de justice
C.E.D.H., 12 nov. 2008, Grande Chambre, Req. n° 34.503/97, Demir et Baykara c/ Turquie (art. 11 C.E.D.H. - fonctionnaires – Interprétation de la Convention à la lumière d’autres instruments internationaux – pratique consistant à interpréter les dispositions de la Convention à la lumière des textes et instruments internationaux autres que la Convention (dont la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – principes généraux concernant le contenu du droit syndical – ingérence non nécessaire dans une société non démocratique) - PARTIE 2 (pages 20 à fin)
Cr.E.D.H., 12 nov. 2008, Grande Chambre, Req. n° 34503/97, Demir et Baykara c/ Turquie (art. 11 C.E.D.H. - fonctionnaires – Interprétation de la Convention à la lumière d’autres instruments internationaux – pratique consistant à interpréter les dispositions de la Convention à la lumière des textes et instruments internationaux autres que la Convention (dont la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – principes généraux concernant le contenu du droit syndical – ingérence non nécessaire dans une société non démocratique) - PARTIE 1 (pages 1 à 19)
Art. 1er du Protocole n° 1 et art. 14 de la Convention : indemnité de décès alloué à un veuf
Art. 11 § 1er C.E.D.H. – fonctionnaires – grève perlée – liberté de réunion pacifique – pas de responsabilité civile : ingérence disproportionnée de l’Etat
Art. 1er du Protocole n° 1 et art. 14 de la Convention : marge d’appréciation des Etats pour corriger des « inégalités factuelles » entre des groupes de personnes - variation de cette marge d’appréciation - ample latitude laissée aux Etats pour prendre des mesures d’ordre général en matière économique et sociale - prestation de sécurité sociale - âge de la pension distinct pour les femmes et les hommes
L’article 157 T.F.U.E. ainsi que l’article 2, paragraphe 1, sous b), et l’article 4, premier alinéa, de la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail doivent être interprétés en ce sens qu’une réglementation nationale en vertu de laquelle le paiement d’une majoration de salaire pour heures supplémentaires n’est prévu, pour les travailleurs à temps partiel, que pour les heures de travail effectuées au-delà de la durée normale de travail fixée pour les travailleurs à temps plein, se trouvant dans une situation comparable, constitue une discrimination indirecte fondée sur le sexe s’il est établi que cette réglementation désavantage une proportion significativement plus importante de personnes de sexe féminin par rapport à des personnes de sexe masculin sans qu’il soit également nécessaire que le groupe des travailleurs qui n’est pas désavantagé par ladite réglementation, à savoir les travailleurs à temps plein, soit constitué par un nombre considérablement plus élevé d’hommes que de femmes (…) (Dispositif)
(Décision commentée)
Dès lors qu’une mesure est susceptible d’affecter davantage les travailleurs migrants, elle peut constituer une discrimination indirecte fondée sur la nationalité. Il appartient au juge national de déterminer si celle-ci est objectivement justifiée par un but légitime et est proportionnée à son objectif.
Constitue un but légitime, notamment, le maintien de l’équilibre financier du régime de sécurité sociale nationale. La mesure doit dans ce cas constituer un moyen proportionné permettant d’atteindre ce but.
(Décision commentée)
L’article 5 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lu à la lumière des articles 21 et 26 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que des articles 2 et 27 de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, conclue à New York le 13 décembre 2006 et approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2010/48/CE du Conseil, du 26 novembre 2009, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que l’employeur peut mettre fin au contrat de travail au motif que le travailleur est dans l’incapacité permanente d’exécuter les tâches qui lui incombent en vertu de ce contrat, en raison de la survenance, au cours de la relation de travail, d’un handicap, sans que l’employeur soit tenu, au préalable, de prévoir ou de maintenir des aménagements raisonnables en vue de permettre à ce travailleur de conserver son emploi, ni de démontrer, le cas échéant, que de tels aménagements constitueraient une charge disproportionnée. (dispositif)
(Décision commentée)
L’article 9 du RGPD interdit le traitement de catégories particulières de données à caractère personnel (origines raciales, opinions politiques, convictions, …), celles-ci étant également qualifiées de « données sensibles ». Ces données sont en vertu du considérant 51 du RGPD l’objet d’une protection particulière car liées aux libertés et droits fondamentaux. L’exception visée à l’article 9 paragraphe 2 sous h) autorise ce traitement s’il est nécessaire aux fins notamment d’apprécier la capacité de travail du travailleur sur la base du droit de l’Union, de celui d’un État membre ou encore d’un contrat conclu avec un professionnel de la santé. Tout traitement doit dans ce cas répondre en outre aux conditions et garanties visées au paragraphe 3 du même article 9 (traitement par un professionnel de la santé soumis à une obligation de secret professionnel). L’exception prévue à cette disposition est applicable aux situations dans lesquelles un organisme de contrôle médical traite des données concernant la santé de l’un de ses employés non pas en qualité d’employeur mais de service médical afin d’apprécier la capacité de travail de celui-ci.
L’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lu à la lumière de l’article 26 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que de l’article 19 de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, qui a été approuvée au nom de l’Union européenne par la décision 2010/48/CE du Conseil, du 26 novembre 2009, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que le recrutement d’une personne fournissant une assistance personnelle soit soumis à une condition d’âge, en application d’une législation nationale prévoyant la prise en compte des souhaits individuels des personnes ayant droit, en raison de leur handicap, à des prestations de services d’assistance personnelle, si une telle mesure est nécessaire à la protection des droits et des libertés d’autrui. (dispositif)
L’article 2, paragraphe 2, sous b), de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’une règle interne d’une administration communale interdisant, de façon générale et indifférenciée, aux membres du personnel de cette administration le port visible, sur le lieu de travail, de tout signe révélant, notamment, des convictions philosophiques ou religieuses peut être justifiée par la volonté de ladite administration d’instaurer, compte tenu du contexte qui est le sien, un environnement administratif totalement neutre pour autant que cette règle soit apte, nécessaire et proportionnée au regard de ce contexte et compte tenu des différents droits et intérêts en présence. (Dispositif) (Réponse à Prés. Trib. trav. Liège (réf.), 24 février 2022, R.F. 21/27/C)
Le responsable du traitement de données personnelles est tenu de fournir gratuitement à la demande de la personne concernée une première copie de ses données à caractère personnel à d’autres fins que celles visant à prendre connaissance du traitement de ces données et d’en vérifier la licéité. Ceci inclut le droit d’accéder aux données relatives à la santé.
La clause 4, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel, conclu le 6 juin 1997, qui figure à l’annexe de la directive 97/81/CE du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES, doit être interprétée en ce sens qu’une réglementation nationale qui subordonne le paiement d’une rémunération supplémentaire, de manière uniforme pour les travailleurs à temps partiel et pour les travailleurs à temps plein comparables, au dépassement du même nombre d’heures de travail d’une activité donnée, telle que le service de vol d’un pilote, constitue un traitement « moins favorable » des travailleurs à temps partiel, au sens de cette disposition. (Extrait du dispositif)
(Décision commentée)
En vertu des principes du droit de l’Union et selon la jurisprudence constante de la Cour, lorsqu’une discrimination a été constatée, le juge national ainsi que les autorités administratives doivent écarter toute disposition nationale discriminatoire sans attendre l’élimination de celle-ci par le législateur.
La Cour statue sur question préjudicielle à propos de l’indépendance et l’impartialité d’une instance compétente pour autoriser l’ouverture d’une procédure pénale contre des juges des juridictions de droit commun et, en cas de délivrance d’une telle autorisation, pour suspendre les fonctions des juges concernés et réduire leur rémunération pendant la période de suspension, la disposition étant jugée contraire à l’article 19, paragraphe 1er, second alinéa du TUE. Elle donne également l’interprétation de cette disposition, ainsi que du principe de primauté du droit de l’Union et de celui de coopération loyale (article 4, paragraphe 3, TUE).
La directive 2000/78/CE (article 2, § 1, et § 2, sous a) et article 6, § 1,) s’oppose, en l’absence d’un impératif d’intérêt général, à une réglementation nationale prévoyant, pour mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, l’assimilation, avec effet rétroactif, du régime de pension de retraite d’une catégorie de fonctionnaires antérieurement favorisée par la législation nationale portant sur les droits à une pension de retraite à celui de la catégorie de fonctionnaires antérieurement défavorisée par cette même législation.
La Cour examine la conformité de la législation allemande (relative à la prise en compte dans le classement des fonctionnaires de la notion d’ancienneté) aux articles 1er, 2 et 6 de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi qu’au principe d’égalité de traitement, tel que consacré à l’article 20 de la charte des droits fondamentaux, et au principe de sécurité juridique.
L’article 2, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous a), et b), ainsi que l’article 6, paragraphe 1, de la Directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ne s’opposent pas à une réglementation nationale prévoyant que, en vue d’un alignement progressif du régime de pension des fonctionnaires sur le régime de pension général, la première adaptation du montant de la pension de retraite d’une catégorie de fonctionnaires intervient à compter de la deuxième année civile suivant l’ouverture du droit à pension, tandis que, pour une autre catégorie de fonctionnaires, ladite adaptation intervient dès la première année civile suivant l’ouverture dudit droit. (dispositif)
L’article 3, paragraphe 1, sous a) et c), de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale ayant pour effet d’exclure, au titre du libre choix du contractant, de la protection contre les discriminations devant être conférée en vertu de cette directive, le refus, fondé sur l’orientation sexuelle d’une personne, de conclure ou de renouveler avec cette dernière un contrat ayant pour objet la réalisation, par cette personne, de certaines prestations dans le cadre de l’exercice d’une activité indépendante. (Dispositif)
L’article 2, paragraphe 2, l’article 4, paragraphe 1, et l’article 6, paragraphe 1, de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lus à la lumière de l’article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui prévoit la fixation d’une limite d’âge maximal à trente ans pour la participation à un concours visant à recruter des commissaires de police, dans la mesure où les fonctions effectivement exercées par ces commissaires de police n’exigent pas des capacités physiques particulières ou, si de telles capacités physiques sont exigées, il s’avère qu’une telle réglementation, tout en poursuivant un objectif légitime, impose une exigence disproportionnée, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier. (Dispositif)
(Décision commentée)
Le retrait implicite d’un ordre de quitter le territoire (notifié antérieurement) découlant de l’octroi d’une autorisation de séjour suite à l’acceptation de la recevabilité d’un recours sur pied de l’article 9ter de la loi du 15 décembre 1980 n’est pas incompatible avec l’article 6, § 4, de la Directive n° 2008/115/CE.
(Décision commentée)
L’existence d’un désavantage particulier chez les femmes par rapport aux hommes pourrait être établie notamment s’il était prouvé que la réglementation affecte négativement une proportion significativement plus importante de celles-là par rapport à ceux-ci. Il faut prendre en considération l’ensemble des travailleurs soumis à la réglementation nationale dans laquelle la différence de traitement trouve sa source. La meilleure méthode de comparaison consiste à comparer les proportions respectives des travailleurs qui sont et qui ne sont pas affectés par la différence de traitement au sein de la main-d’œuvre féminine relevant du champ d’application de la réglementation et les mêmes proportions chez les hommes. Sur le plan de la méthode, il faut prendre en considération l’ensemble des travailleurs soumis à la réglementation, c’est-à-dire tous ceux qui ont en principe obtenu le droit à plus d’une prestation (en l’occurrence une pension d’invalidité professionnelle). Ensuite, parmi le groupe de travailleurs ainsi circonscrit, il faut examiner d’une part la proportion d’hommes empêchés de cumuler les pensions par rapport aux hommes qui peuvent procéder à un tel cumul et, d’autre part, la même proportion en ce qui concerne les femmes. Enfin, ces proportions doivent être comparées entre elles en vue d’apprécier le caractère significatif de l’écart éventuel.
L’article 3, § 1er, sous a) et d), de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail doit être interprété en ce sens qu’une limite d’âge prévue par les statuts d’une organisation de travailleurs pour être éligible au poste de président de celle-ci relève du champ d’application de cette directive. (Dispositif)
En effet, d’une part, la Directive n° 2000/78 n’exclut pas de son champ d’application les conditions d’accès à un emploi ou à un travail lorsque le titulaire du poste concerné a été élu à celui-ci. A cet égard, la Cour a considéré que la méthode de recrutement à un poste n’a aucune incidence aux fins de l’application de cette directive. (Cons. 38)
D’autre part, il ne résulte pas de la directive 2000/78 que des postes de nature politique seraient exclus de son champ d’application. Au contraire, aux termes de son article 3, § 1er, sous a), celle-ci s’applique tant au secteur privé qu’au secteur public et « quelle que soit la branche d’activité ». En outre, lorsque cette directive autorise les Etats membres à ne pas faire application du régime qu’elle fixe à certaines activités professionnelles, elle précise les activités en cause. Ainsi, l’article 3, § 4, de ladite directive dispose que celle-ci peut ne pas être appliquée aux forces armées pour ce qui concerne les discriminations fondées sur le handicap et l’âge. (Cons. 39)
Le Protocole (no 33) sur l’article 157 T.F.U.E., annexé au Traité F.U.E., et l’article 12 de la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens que la limitation dans le temps des effets du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes prévue par ces dispositions ne s’applique pas à une réglementation nationale prévoyant une adaptation annuelle des pensions de retraite servies au titre d’un régime professionnel de sécurité sociale, applicable postérieurement à la date visée par lesdites dispositions.
L’article 157 T.F.U.E. et l’article 5, sous c), de la Directive n° 2006/54 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale prévoyant une adaptation annuelle dégressive du montant des pensions de retraite des fonctionnaires nationaux en fonction de l’importance de ce montant, avec une absence totale d’adaptation au-delà d’un certain montant de pension, dans l’hypothèse où cette réglementation affecte négativement une proportion significativement plus importante de bénéficiaires masculins que de bénéficiaires féminins, pour autant que ladite réglementation poursuive, de manière cohérente et systématique, les objectifs d’assurer le financement durable des pensions de retraite et de réduire l’écart entre les niveaux de pensions financées par l’Etat, sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs. (Dispositif)
La clause 4, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel (…) s’oppose à une réglementation et à une pratique nationales en vertu desquelles un membre du personnel académique exerçant une charge d’enseignement à temps plein sera automatiquement nommé à titre définitif, sans raison objective autre que le fait d’exercer ladite charge à temps plein, tandis qu’un membre du personnel académique exerçant une charge d’enseignement à temps partiel sera soit nommé à titre définitif, soit désigné à titre temporaire.
L’accord-cadre sur le travail à temps partiel (…) ne prévoit, à la charge de l’employeur qui engage un travailleur à temps partiel, aucune exigence quant au mode de calcul du pourcentage que représente cette charge à temps partiel au regard d’une charge à temps plein comparable.
(Décision commentée)
L’article 4, § 1er, de la Directive n° 79/7/CEE s’oppose à une disposition nationale (législation espagnole) qui exclut les allocations de chômage des prestations de sécurité sociale accordées aux employés de maison par un régime légal de sécurité sociale, dès lors que cette disposition désavantage particulièrement les femmes par rapport aux hommes et qu’elle n’est pas justifiée par des facteurs objectifs et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.
L’article 5 de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens que la notion d’« aménagements raisonnables pour les personnes handicapées », au sens de cet article, implique qu’un travailleur, y compris celui accomplissant un stage consécutif à son recrutement, qui, en raison de son handicap, a été déclaré inapte à exercer les fonctions essentielles du poste qu’il occupe, soit affecté à un autre poste pour lequel il dispose des compétences, des capacités et des disponibilités requises, sous réserve qu’une telle mesure n’impose pas à l’employeur une charge disproportionnée. (Dispositif)
L’article 2, § 2, sous a), et l’article 4, § 1er, de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lus à la lumière des articles 21 et 26 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, qui a été approuvée au nom de la Communauté européenne par la Décision n° 2010/48/CE du Conseil du 26 novembre 2009, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce qu’une personne atteinte de cécité soit privée de toute possibilité d’exercer les fonctions de juré de jugement dans une procédure pénale. (Dispositif)
(Décision commentée)
Pour relever du champ d’application de la Directive n° 79/7, une prestation doit constituer tout ou partie d’un régime légal de protection contre l’un des risques énumérés par celle-ci en son article 3, § 1er, à savoir les risques de maladie, d’invalidité, de vieillesse, d’accident du travail et de maladie professionnelle, ainsi que de chômage ou une forme d’aide sociale ayant le même but, ainsi qu’être directement et effectivement liée à la protection contre l’un de ces risques.
La pension qui vise à garantir les bénéficiaires contre le risque de décès du concubin ne relève d’aucun des risques énumérés à la disposition, La Cour souligne que cette interprétation est corroborée par les travaux préparatoires de la Directive, qui renvoient à la Convention n° 102 de l’Organisation internationale du travail du 28 juin 1952 concernant la sécurité sociale et au Code européen de la sécurité sociale du 16 avril 1964.
La République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 19, § 1er, second alinéa, T.U.E., selon lequel les États membres établissent les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union (manque d’indépendance et d’impartialité de la chambre disciplinaire de la Cour suprême, à laquelle incombe le contrôle des décisions rendues dans les procédures disciplinaires contre les juges ; pouvoir discrétionnaire conféré à son président de désigner le tribunal disciplinaire compétent en première instance dans les affaires relatives aux juges des juridictions de droit commun et, partant, absence de garantie que les affaires disciplinaires soient examinées par un tribunal « établi par la loi » ; absence de garantie que les affaires disciplinaires contre les juges des juridictions de droit commun soient examinées dans un délai raisonnable, absence d’effet suspensif sur le déroulement de la procédure disciplinaire des actes liés à la désignation d’un conseil et à la prise en charge de la défense par celui-ci et possibilité pour le tribunal disciplinaire de mener la procédure même en cas d’absence justifiée du juge mis en cause ou de son conseil, n’assurant pas partant le respect des droits de la défense des juges des juridictions de droit commun mis en cause).
De même, elle a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 267, 2e et 3e alinéas, T.F.U.E. en permettant que le droit des juridictions de saisir la Cour de justice de l’Union européenne de demandes de décision préjudicielle soit limité par la possibilité d’engager une procédure disciplinaire.
L’article 2, § 2, sous a), l’article 4, § 1er, et l’article 5 de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale prévoyant une impossibilité absolue de maintenir dans ses fonctions un agent pénitentiaire dont l’acuité auditive ne répond pas aux seuils de perception sonore minimaux fixés par cette réglementation, sans permettre de vérifier si cet agent est en mesure de remplir lesdites fonctions, le cas échéant après l’adoption d’aménagements raisonnables au sens de cet article 5. (Dispositif)
Une différence de traitement indirectement fondée sur la religion ou les convictions, découlant d’une règle interne d’une entreprise interdisant aux travailleurs de porter tout signe visible de convictions politiques, philosophiques ou religieuses sur le lieu de travail, est susceptible d’être justifiée par la volonté de l’employeur de poursuivre une politique de neutralité politique, philosophique et religieuse à l’égard des clients ou des usagers, pour autant,
Saisie par la Commission européenne d’un recours en manquement, la Cour de justice rend une ordonnance ordonnant la suspension de diverses législations adoptées par l’État polonais relatives à l’indépendance des juges et à l’administration de la justice (une astreinte sera prononcée ultérieurement – ordonnances du 27 octobre 2021 et du 21 avril 2023).
(Décision commentée)
L’article 157 T.F.U.E. doit être interprété en ce sens qu’il est doté d’un effet direct dans des litiges entre particuliers dans lesquels est invoqué le non-respect de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un « travail de même valeur ».
L’article 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui fixe une limite d’âge de 50 ans pour pouvoir participer au concours d’accès à la profession de notaire, dans la mesure où une telle réglementation ne paraît pas poursuivre les objectifs d’assurer la stabilité de l’exercice de cette profession pendant une durée significative avant la retraite, de protéger le bon fonctionnement des prérogatives notariales et de faciliter le renouvellement générationnel ainsi que le rajeunissement de ladite profession et, en tout état de cause, dépasse ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. (dispositif)
(Décision commentée)
La Directive n° 79/7 tend à la mise en œuvre progressive du principe d’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale. L’on entend par « discrimination fondée sur le sexe » les cas de discrimination entre des travailleurs (sexe masculin) et des travailleuses (sexe féminin). Sont visées les situations où des travailleurs sont traités moins favorablement en raison de leur appartenance à l’un ou l’autre sexe par rapport à d’autres travailleurs du sexe opposé. N’est pas visée par la directive l’égalité de traitement au sens large, c’est-à-dire également l’égalité entre des personnes appartenant au même sexe.
Celle-ci ne trouve dès lors pas à s’appliquer à la réglementation nationale qui est soumise à la Cour (loi espagnole), qui prévoit, en faveur des femmes ayant eu au moins deux enfants biologiques ou adoptés, un complément de pension pour maternité en cas de départ à la retraite à l’âge légal ou de départ à la retraite anticipée pour certains motifs prévus par la loi, mais non en cas de retraite anticipée volontaire.
L’article 2 et l’article 6, § 1er, de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle les travailleurs du secteur public qui remplissent au cours d’une période déterminée les conditions pour percevoir une retraite à taux plein sont placés sous un régime de réserve de main-d’œuvre jusqu’à la résiliation de leur contrat de travail, ce qui entraîne une baisse de leur rémunération, une perte de leur avancement éventuel ainsi qu’une réduction, voire la suppression, de l’indemnité de licenciement à laquelle ils auraient pu prétendre au moment de la cessation de leur relation de travail, dès lors que cette réglementation poursuit un objectif légitime de politique de l’emploi et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. (Dispositif)
L’article 2, § 1er, et l’article 4 de la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui, en ce qui concerne le paiement, par l’institution nationale responsable, des salaires et des indemnités impayés aux travailleurs en raison de l’insolvabilité de leur employeur, prévoit un plafond à ce paiement en ce qui concerne les travailleurs à temps plein, lequel, s’agissant des travailleurs à temps partiel, est réduit proportionnellement au temps de travail accompli par ces derniers par rapport au temps de travail accompli par les travailleurs à temps plein. (Dispositif)
La Cour de Justice admet la conformité de la réglementation belge relative aux conditions d’engagement de personnel portuaire aux articles 45, 49 et 56 T.F.U.E.
La pratique d’un employeur consistant à verser un complément de salaire aux travailleurs handicapés ayant remis leur attestation de reconnaissance de handicap après une date choisie par cet employeur, et non aux travailleurs handicapés ayant remis cette attestation avant cette date, est susceptible de constituer une discrimination directe lorsqu’il s’avère que cette pratique est fondée sur un critère indissociablement lié au handicap, en ce qu’elle est de nature à placer définitivement dans l’impossibilité de remplir cette condition temporelle un groupe nettement identifié de travailleurs, composé de l’ensemble des travailleurs handicapés dont l’employeur connaissait nécessairement l’état de handicap lors de l’instauration de cette pratique ; ladite pratique, bien qu’apparemment neutre, est susceptible de constituer une discrimination indirectement fondée sur le handicap lorsqu’il s’avère qu’elle entraîne un désavantage particulier pour des travailleurs handicapés en fonction de la nature de leur handicap, notamment du caractère ostensible de celui-ci ou du fait que ce handicap nécessite des aménagements raisonnables des conditions de travail, sans être objectivement justifiée par un objectif légitime et sans que les moyens pour réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires. (Extrait du dispositif)
(Décision commentée)
La loi espagnole étant susceptible de discriminer indirectement les femmes dans la mesure où elle subordonne l’obtention d’une pension de retraite anticipée à la condition de pouvoir prétendre au minimum légal de pension au titre des cotisations versées sans complément de l’Etat alors qu’un plus grand pourcentage de femmes que d’hommes retraités reçoit un complément de pension permettant d’atteindre la pension minimum légale, la Cour de Justice donne des indications sur la méthode à suivre afin de vérifier l’existence d’une discrimination indirecte. Si l’on dispose de statistiques pertinentes, le juge doit (i) prendre en considération l’ensemble des travailleurs soumis à la réglementation nationale dans laquelle la différence de traitement trouve sa source, (ii) comparer les proportions respectives des travailleurs qui sont et qui ne sont pas affectés par la prétendue différence de traitement au sein de la main d’œuvre féminine relevant du champ d’application de la réglementation et les mêmes proportions au sein de la main d’œuvre masculine, (iii) prendre en compte le nombre de retraités qui perçoivent un complément de pension permettant d’atteindre la pension minimum légale par rapport au nombre total des retraités soumis à ce régime et (iv) prendre en considération les personnes qui se sont vu refuser la pension de retraite anticipée uniquement eu égard à la disposition légale et non pour d’autres motifs (âge ou durée de cotisations).
Réponse à C. trav. Liège (div. Liège), 10 février 2020, R.G. 2020/CL/2 : non-lieu à statuer
Les articles 14 et 28 de la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, lus à la lumière de la Directive n° 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16, § 1er, de la Directive n° 89/391/CEE), doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à la disposition d’une convention collective nationale qui réserve aux travailleuses qui élèvent elles-mêmes leur enfant le droit à un congé après l’expiration du congé légal de maternité, à la condition que ce congé supplémentaire vise la protection des travailleuses au regard tant des conséquences de la grossesse que de leur condition de maternité, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, en prenant en compte, notamment, les conditions d’octroi dudit congé, les modalités et la durée de celui-ci ainsi que le niveau de protection juridique qui y est afférent. (Dispositif)
(Décision commentée)
Un ressortissant de pays tiers doit disposer d’une voie de recours effective pour contester une décision de retour prise à son égard, mais ce recours n’a pas nécessairement un effet suspensif. Aux termes de l’article 47 de la Charte, toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal, dans le respect des conditions qu’il prévoit et avec le principe de non-refoulement, garanti notamment à l’article 19, § 2, de la Charte et à l’article 5 de la Directive.
L’obligation d’assurer dans certains cas à un enfant ressortissant de pays tiers atteint d’une grave maladie le bénéfice d’un recours suspensif vise à lui permettre de se maintenir temporairement sur le territoire de l’Etat, ce qu’il ne pourrait éventuellement pas faire si le parent sous la dépendance duquel il se trouve devait quant à lui quitter le territoire vers un pays tiers. Dans la pratique, l’enfant perdrait la protection dont il doit bénéficier en vertu des articles 5 et 13 de la Directive, lus à la lumière des dispositions précitées de la Charte.
Afin de garantir l’effectivité de cette protection, le parent du même enfant doit, en application de ces dispositions, bénéficier d’un recours suspensif de plein droit contre la décision de retour prise à son égard. Le fait que cet enfant ait atteint la majorité est indifférent.
(Décision commentée)
Si une différence de traitement est constatée et qu’il s’agit de savoir si elle désavantage particulièrement des personnes d’un sexe par rapport à des personnes de l’autre, il faut qu’il soit prouvé à suffisance de droit que la réglementation nationale affecte négativement une proportion significative plus importante de personnes d’un sexe par rapport à des personnes de l’autre sexe. L’appréciation des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination indirecte appartient à la juridiction nationale, qui doit notamment vérifier la fiabilité des données statistiques et, à supposer qu’elle découvre une différence de traitement susceptible de constituer une telle discrimination indirecte fondée sur le sexe, il lui appartient de procéder à l’examen de proportionnalité. S’agissant en l’espèce des mesures nationales prises en 2018 en Autriche (loi de modification des pensions de retraite) aux fins de réduire l’écart entre les pensions, en l’occurrence les pensions d’entreprise, la Cour rappelle sa jurisprudence (arrêts LEONE et BRACHNER), où elle a confirmé que les Etats membres disposent d’une large marge d’appréciation pour ce qui est du choix des mesures susceptibles de réaliser les objectifs de leur politique sociale et de l’emploi.
La notion de « conditions d’accès à l’emploi [...] ou au travail » contenue dans l’article 3, § 1er, sous a), de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprétée en ce sens que relèvent de cette notion des déclarations effectuées par une personne au cours d’une émission audiovisuelle, selon lesquelles jamais elle ne recruterait ni ne ferait travailler de personnes d’une certaine orientation sexuelle dans son entreprise, et ce alors qu’aucune procédure de recrutement n’était en cours ou programmée, à condition que le lien entre ces déclarations et les conditions d’accès à l’emploi ou au travail au sein de cette entreprise ne soit pas hypothétique.
La Directive n° 2000/78 doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle une association d’avocats dont l’objet statutaire consiste à défendre en justice les personnes ayant notamment une certaine orientation sexuelle et à promouvoir la culture et le respect des droits de cette catégorie de personnes a, du fait de cet objet et indépendamment de son but lucratif éventuel, automatiquement qualité pour engager une procédure juridictionnelle visant à faire respecter les obligations découlant de cette directive et, le cas échéant, obtenir réparation, lorsque se produisent des faits susceptibles de constituer une discrimination, au sens de ladite directive, à l’encontre de ladite catégorie de personnes et qu’une personne lésée n’est pas identifiable. (Dispositif)
La Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, notamment en son article 2, § 2, son article 3, § 1er, et son article 6, § 1er, ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui interdit aux administrations publiques d’attribuer des missions d’étude et de conseil à des personnes retraitées, dans la mesure où, d’une part, cette réglementation poursuit un objectif légitime de politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, les moyens mis en œuvre pour réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. Il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est effectivement le cas dans l’affaire au principal. (Dispositif)
Les articles 2 et 6 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens que, pour autant qu’elle répond à la nécessité d’assurer la protection des droits acquis dans un contexte marqué notamment tant par un nombre élevé de fonctionnaires et de juges concernés que par l’absence d’un système de référence valable et n’aboutit pas à perpétuer dans le temps une différence de traitement en fonction de l’âge, ils ne s’opposent pas à une mesure qui accorde à des fonctionnaires et à des juges, afin de leur assurer une rémunération adéquate, un rappel de rémunération à hauteur d’un pourcentage du traitement de base qu’ils ont précédemment perçu en vertu, notamment, d’un échelon de traitement de base qui avait été déterminé, pour chaque grade, lors de leur recrutement, en fonction de leur âge. (Extrait du dispositif)
Les articles 2 et 6 de la Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens que, pour autant qu’elle réponde à la nécessité d’assurer la protection des droits acquis dans un contexte marqué notamment tant par un nombre élevé de fonctionnaires et de juges concernés que par l’absence d’un système de référence valable et n’aboutit pas à perpétuer dans le temps une différence de traitement en fonction de l’âge, ils ne s’opposent pas à une mesure qui accorde à des fonctionnaires et à des juges, afin de leur assurer une rémunération adéquate, un rappel de rémunération à hauteur d’un pourcentage du traitement de base qu’ils ont précédemment perçu en vertu, notamment, d’un échelon de traitement de base qui avait été déterminé, pour chaque grade, lors de leur recrutement, en fonction de leur âge. (Extrait du dispositif)
Le principe d’effectivité doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre fixe le point de départ d’un délai de forclusion de deux mois pour l’introduction d’une demande d’indemnisation du préjudice résultant d’une mesure constitutive d’une discrimination en fonction de l’âge au jour du prononcé d’un arrêt de la Cour ayant constaté le caractère discriminatoire d’une mesure similaire, lorsque les personnes concernées risquent de ne pas être en mesure de connaître, dans ledit délai, l’existence ou l’importance de la discrimination dont elles ont été victimes. Il peut notamment en aller ainsi lorsqu’il existe, dans ledit État membre, une controverse portant sur la possibilité de transposer à la mesure concernée les enseignements découlant de cet arrêt (Extrait du dispositif).
(Décision commentée)
La législation espagnole, qui réserve un complément de pension aux femmes bénéficiaires d’une pension de retraite et ayant eu aux moins deux enfants, complément qui est refusé aux hommes dans la même situation, est discriminatoire.
Dans la mesure en effet où aucun lien n’est exigé avec la prise d’un congé de maternité ou avec les désavantages qu’aurait subis une femme dans sa carrière suite à son accouchement et que l’octroi n’est pas limité aux femmes qui ont accouché, ce complément de pension ne relève pas des dérogations possibles à l’interdiction de discrimination contenue dans la Directive n° 79/7.
L’article 2, § 5, de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 ne s’oppose pas à une réglementation nationale (italienne), qui prévoit la cessation automatique de la relation de travail des pilotes employés par une société exploitant des aéronefs dans le cadre d’activités liées à la protection de la sécurité nationale d’un État membre lorsqu’ils atteignent l’âge de 60 ans, pour autant qu’une telle réglementation soit nécessaire à la sécurité publique, au sens de cette disposition (ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier).
Son article 4, § 1er, ne s’oppose pas à la cessation automatique de la relation de travail des pilotes employés par une société exploitant des aéronefs dans le cadre d’activités liées à la protection de la sécurité nationale d’un État membre lorsqu’ils atteignent l’âge de 60 ans, pour autant qu’une telle réglementation soit proportionnée, au sens de cette disposition (ce qu’il appartient également à la juridiction de renvoi de vérifier).
En instaurant un âge de départ à la retraite différent pour les femmes et les hommes appartenant à la magistrature du siège dans les juridictions de droit commun polonaises et à la Cour suprême, ou à la magistrature du parquet polonais, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 157 T.F.U.E. ainsi que de l’article 5, sous a), et de l’article 9, § 1er, sous f), de la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail.
En habilitant le ministre de la Justice à autoriser ou non la continuation de l’exercice des fonctions des magistrats du siège des juridictions de droit commun polonaises au-delà du nouvel âge du départ à la retraite desdits magistrats, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 19, § 1er, second alinéa, T.U.E.
La clause 4, points 1 et 2, de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel, conclu le 6 juin 1997 ainsi que l’article 14, § 1er, de la Directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006 s’opposent à une réglementation et à une pratique d’entreprise nationales (loi espagnole en l’espèce) dès lors que celles-ci, s’agissant des travailleurs à temps partiel de type vertical cyclique, ne prennent en compte que les périodes effectivement travaillées et excluent ainsi les périodes non travaillées du calcul de l’ancienneté requise pour pouvoir percevoir des primes triennales en tant que compléments de rémunération, alors que les travailleurs à temps plein ne sont pas soumis à une telle réglementation ni à une telle pratique.
(Décision commentée)
Dans les régimes professionnels privés de pension de retraite, la mise en conformité rétroactive des droits à la pension doit intervenir en alignant les droits de la catégorie de personnes défavorisées sur celle des personnes privilégiées (avec rappel de la jurisprudence BARBER). Ceux-ci constituent – à défaut d’exécution correcte de l’article 119 du Traité C.E. en droit national – le seul système de référence valable.
Pour ce qui concerne les périodes d’emploi accomplies après l’adoption des mesures destinées à rétablir l’égalité de traitement, vu l’effet direct de l’article 119 du Traité C.E., l’employeur, après la constatation d’une discrimination, doit appliquer cette disposition de manière immédiate et complète, le maintien de la discrimination – fût-il transitoire – ne pouvant être admis. Il faut également respecter le principe de la sécurité juridique. Les droits de l’Union doivent être mis œuvre de manière suffisamment précise, claire et prévisible pour permettre aux citoyens de connaître avec exactitude leurs droits et leurs obligations et pour pouvoir s’en prévaloir de manière utile devant les juridictions nationales.
La clause 4, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel s’oppose à une réglementation nationale (autrichienne en l’espèce) qui fixe, pour les travailleurs à durée déterminée qu’elle vise, une durée maximale des relations de travail plus longue pour les travailleurs à temps partiel que pour les travailleurs à temps plein comparables, à moins qu’une telle différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et soit proportionnée par rapport auxdites raisons, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. La clause 4, point 2, de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel doit être interprétée en ce sens que le principe du prorata temporis qui y est visé ne s’applique pas à une telle réglementation.
L’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 2006/54/CE s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui fixe, pour les travailleurs à durée déterminée qu’elle vise, une durée maximale des relations de travail plus longue pour les travailleurs à temps partiel que pour les travailleurs à temps plein comparables, s’il est établi que cette réglementation affecte négativement un pourcentage significativement plus élevé de travailleurs féminins que de travailleurs masculins et si ladite réglementation n’est pas objectivement justifiée par un but légitime ou si les moyens pour parvenir à ce but ne sont pas appropriés et nécessaires . L’article 19, paragraphe 1, de cette directive n’exige pas de la partie qui s’estime lésée par une telle discrimination qu’elle produise, afin d’établir une apparence de discrimination, des statistiques ou des faits précis ciblant les travailleurs concernés par la réglementation nationale en cause si cette partie n’a pas accès ou n’a que difficilement accès à ces statistiques ou faits. (Extrait du dispositif).
La Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprétée en ce sens que l’état de santé d’un travailleur reconnu comme étant particulièrement sensible aux risques professionnels, au sens du droit national, qui ne permet pas à ce travailleur d’occuper certains postes de travail au motif que cela entraînerait un risque pour sa propre santé ou pour d’autres personnes, ne relève de la notion de « handicap », au sens de cette directive, que lorsque cet état entraîne une limitation de la capacité, résultant notamment d’atteintes physiques, mentales ou psychiques durables, dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à la pleine et effective participation de la personne concernée à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier si, dans l’affaire au principal, ces conditions sont remplies. (Dispositif)
L’article 24 de la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle, dans une situation où une personne qui s’estime victime d’une discrimination fondée sur le sexe a déposé plainte, un travailleur l’ayant soutenue dans ce contexte est protégé contre les mesures de rétorsion prises par l’employeur uniquement s’il est intervenu en qualité de témoin dans le cadre de l’instruction de cette plainte et que son témoignage répond à des exigences formelles prévues par ladite réglementation.
Dans l’hypothèse où des dispositions nationales ne peuvent être interprétées d’une manière qui soit conforme à la directive 2000/78, la juridiction nationale est tenue d’assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant pour les justiciables de cette directive et de garantir le plein effet de celle-ci, en laissant au besoin inappliquée toute disposition nationale contraire. Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que, dès lors qu’une discrimination, contraire au droit de l’Union, a été constatée et aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, le rétablissement de l’égalité de traitement, dans un cas tel que celui en cause au principal, implique l’octroi aux fonctionnaires défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement des mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les fonctionnaires favorisés par ce régime, en ce qui concerne tant la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans que l’avancement dans l’échelle des rémunérations et, par voie de conséquence, l’octroi d’une compensation financière aux fonctionnaires discriminés à hauteur de la différence entre le montant de la rémunération que le fonctionnaire concerné aurait dû percevoir s’il n’avait pas été traité de manière discriminatoire et le montant de la rémunération qu’il a effectivement perçue. (Extrait du dispositif)
La clause 2, point 6, de l’accord-cadre sur le congé parental, conclu le 14 décembre 1995, s’oppose à ce que, lorsqu’un travailleur engagé à durée indéterminée et à temps plein est licencié au moment où il bénéficie d’un congé parental à temps partiel, l’indemnité de licenciement et l’allocation de congé de reclassement à verser à ce travailleur soient déterminées au moins en partie sur la base de la rémunération réduite qu’il perçoit quand le licenciement intervient.
L’article 157 T.F.U.E. s’oppose à une réglementation qui prévoit que, lorsqu’un travailleur engagé à durée indéterminée et à temps plein est licencié au moment où il bénéficie d’un congé parental à temps partiel, ce travailleur reçoit une indemnité de licenciement et une allocation de congé de reclassement déterminées au moins en partie sur la base de la rémunération réduite qu’il perçoit quand le licenciement intervient, dans la situation où un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes choisissent de bénéficier d’un congé parental à temps partiel et lorsque la différence de traitement qui en résulte ne peut pas s’expliquer par des facteurs objectivement justifiés et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe. (Extrait du dispositif)
L’article 2, § 2, sous b), de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’une mesure (telle que celle en cause au principal) qui, à partir d’une date déterminée, prévoit l’application lors du recrutement de nouveaux enseignants d’une grille de salaire et d’un classement dans les échelons moins favorables que ceux qui étaient appliqués, en vertu des règles antérieures à cette mesure, aux enseignants recrutés avant cette date ne constitue pas une discrimination indirecte fondée sur l’âge, au sens de cette disposition. (Dispositif)
L’article 1er et l’article 2, § 2, de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’une législation nationale en vertu de laquelle, d’une part, le Vendredi saint n’est un jour férié que pour les travailleurs qui sont membres de certaines églises chrétiennes et, d’autre part, seuls ces travailleurs ont droit, s’ils sont amenés à travailler durant ce jour férié, à une indemnité complémentaire à la rémunération perçue pour les prestations accomplies durant cette journée constitue une discrimination directe en raison de la religion.
Les mesures prévues par cette législation nationale ne peuvent être considérées ni comme des mesures nécessaires à la préservation des droits et des libertés d’autrui, au sens de l’article 2, § 5, de ladite directive, ni comme des mesures spécifiques destinées à compenser des désavantages liés à la religion, au sens de l’article 7, § 1er, de la même directive. (Extrait du dispositif)
L’article 2 de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’applique, après l’expiration du délai de transposition de cette directive, à savoir à partir du 3 décembre 2003, aux effets futurs d’une décision disciplinaire définitive (intervenue suite à des comportements liés à l’orientation sexuelle), adoptée avant l’entrée en vigueur de ladite directive, ordonnant la mise à la retraite d’un fonctionnaire, assortie d’une réduction du montant de sa pension.
La Directive n° 2000/78 doit être interprétée en ce sens que, dans une situation telle que celle visée (…), elle impose à la juridiction nationale de réexaminer, pour la période débutant le 3 décembre 2003, non pas la sanction disciplinaire définitive ordonnant la mise à la retraite anticipée du fonctionnaire concerné, mais la réduction du montant de sa pension, pour déterminer le montant qu’il aurait perçu en l’absence de toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. (Dispositif)
Si, en droit irlandais, la Commission des Relations Professionnelles concrétise la Directive n° 2000/78/CE et qu’elle constitue, ainsi, l’organe investi par le législateur national de la compétence pour garantir l’application du principe de non-discrimination en matière d’emploi et de travail, elle doit, dans l’exercice de cette compétence, assurer au citoyen la protection juridique découlant pour lui du droit de l’Union. Elle doit garantir le plein effet de celui-ci, eu égard au principe de primauté, en laissant au besoin inappliquée toute disposition éventuellement contraire à la loi nationale. Si elle ne pouvait décider de laisser cette disposition inappliquée, l’effet utile des règles de l’Union dans le domaine de l’égalité en matière d’emploi et de travail serait amoindri. Il est en effet contradictoire que les particuliers soient fondés à invoquer les dispositions du droit de l’Union dans un domaine particulier devant un organe auquel le droit national a attribué la compétence pour connaître des litiges en ce domaine et que ledit organe n’ait toutefois pas l’obligation d’appliquer ces dispositions en écartant celles du droit national qui n’y sont pas conformes. Il ne saurait être admis que des règles de droit national, fussent-elles d’ordre constitutionnel, portent atteinte à l’unité et à l’efficacité du droit de l’Union (discrimination sur la base de l’âge – recrutement des agents de police).
(Décision commentée)
La C.J.U.E. est interrogée sur la question de savoir si l’article 2, § 2, de la Directive n° 2000/78/CE s’oppose aux règles d’une convention collective qui prévoit que le bénéfice d’une allocation complémentaire temporaire (destinée à compenser – en partie – la perte de revenus suite au licenciement et à favoriser la réintégration sur le marché de l’emploi des bénéficiaires) prend fin avec l’ouverture du droit à une pension de retraite anticipée, ces règles prenant pour critère aux fins de leur application la possibilité d’obtenir une pension de retraite anticipée en raison d’un handicap.
Pour la Cour, celles-ci constituent une discrimination indirecte dans la mesure où, si les travailleurs souffrant d’un handicap grave se trouvent dans une situation comparable à celle des travailleurs valides appartenant à la même tranche d’âge au regard de l’article 2, § 2, b), de la Directive (la disposition concernant des travailleurs proches de l’âge de la retraite qui ont été licenciés), les partenaires sociaux ont certes poursuivi un objectif légitime (compensation pour l’avenir des travailleurs licenciés, aide à leur réinsertion professionnelle tout en tenant compte de la nécessité d’une juste répartition de moyens financiers limités) mais ils ont omis de tenir compte d’éléments pertinents qui concernent particulièrement les travailleurs gravement handicapés. Il y a une atteinte excessive aux intérêts légitimes de ceux-ci et la mesure excède ainsi ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de politique sociale poursuivis.
L’article 4, § 2, second alinéa, de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens :
(Décision commentée)
Le principe de non-discrimination sur la base du sexe est consacré à l’article 157, T.F.U.E., en ce qui concerne la rémunération des travailleurs. Ce principe étant mis en œuvre par l’article 4, § 1er, de la Directive n° 79/7, il doit être respecté par les Etats dans l’exercice de leur compétence en matière d’état civil. Est visée à la disposition la question des conditions d’accès aux régimes légaux assurant une protection contre les risques de vieillesse.
La Directive n° 79/7/CEE du Conseil du 19 décembre 1978, dont l’article 4, § 1er, 1er tiret (lu en combinaison avec les articles 3, § 1er, sous a), 3e tiret, et 7, § 1er, sous a)) s’oppose à une réglementation nationale qui impose à une personne ayant changé de sexe, de satisfaire non seulement à des critères physiques, sociaux et psychologiques, mais également à la condition de ne pas être mariée à une personne du sexe qu’elle a acquis, et ce pour ce qui est du bénéfice d’une pension de retraite de l’Etat à compter de l’âge légal de départ à la retraite des personnes de ce sexe acquis.
Lorsqu’une église ou une autre organisation dont l’éthique est fondée sur la religion ou les convictions fait valoir, au soutien d’un acte ou d’une décision tel le rejet d’une candidature à un emploi en son sein, que, par la nature des activités concernées ou par le contexte dans lequel ces activités sont amenées à être exercées, la religion constitue une exigence professionnelle essentielle, légitime et justifiée eu égard à l’éthique de cette église ou de cette organisation, une telle allégation doit pouvoir, le cas échéant, faire l’objet d’un contrôle juridictionnel effectif requérant de s’assurer que, dans le cas d’espèce, il est satisfait aux critères énoncés à l’article 4, § 2, de la Directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000.
L’article 4, § 2, de la Directive 2000/78 doit être interprété en ce sens que l’exigence professionnelle essentielle, légitime et justifiée qui y est visée renvoie à une exigence nécessaire et objectivement dictée, eu égard à l’éthique de l’église ou de l’organisation concernée, par la nature ou les conditions d’exercice de l’activité professionnelle en cause et ne saurait couvrir des considérations étrangères à cette éthique ou au droit à l’autonomie de cette église ou de cette organisation. Cette exigence doit être conforme au principe de proportionnalité.
Une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant deux particuliers, est tenue, lorsqu’il ne lui est pas possible d’interpréter le droit national applicable de manière conforme à l’article 4, § 2, de la Directive 2000/78, d’assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant pour les justiciables des articles 21 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de garantir le plein effet de ces articles en laissant au besoin inappliquée toute disposition nationale contraire (Dispositif).
L’article 45 TFUE ainsi que les articles 2, 6 et 16 de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui, pour mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, née de l’application d’une réglementation nationale ne prenant en compte, aux fins du classement des travailleurs d’une entreprise dans le barème des salaires, que les périodes d’activité acquises après l’âge de 18 ans, supprime, de manière rétroactive et à l’égard de l’ensemble de ces travailleurs, cette limite d’âge mais autorise uniquement la prise en compte de l’expérience acquise auprès d’entreprises opérant dans le même secteur économique (dispositif).
L’article 14, § 1er, sous c), de la Directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale, telle que celle prévue à l’article 3, § 7, du décret-loi no 64, du 30 avril 2010, converti en loi n° 100, du 29 juin 2010, dans sa version en vigueur à la date des faits en cause au principal, en vertu de laquelle les travailleurs employés en qualité de danseurs, ayant atteint l’âge de départ à la retraite fixé par cette réglementation à 45 ans pour les femmes comme pour les hommes, ont la faculté d’exercer, pendant une période transitoire de deux ans, une option leur permettant de poursuivre leur activité professionnelle jusqu’à l’âge limite de maintien en activité prévu par la réglementation antérieurement en vigueur, fixé à 47 ans pour les femmes et à 52 ans pour les hommes, instaure une discrimination directe fondée sur le sexe interdite par cette directive (dispositif).
L’article 4 de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que l’autorité responsable de l’examen des demandes de protection internationale ou les juridictions saisies, le cas échéant, d’un recours contre une décision de cette autorité, ordonnent une expertise dans le cadre de l’évaluation des faits et des circonstances relatifs à l’orientation sexuelle alléguée d’un demandeur, pour autant que les modalités d’une telle expertise sont conformes aux droits fondamentaux garantis par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, que ladite autorité et ces juridictions ne fondent pas leur décision sur les seules conclusions du rapport d’expertise et qu’elles ne sont pas liées par ces conclusions lors de l’appréciation des déclarations de ce demandeur relatives à son orientation sexuelle.
L’article 4 de la directive 2011/95, lu à la lumière de l’article 7 de la charte des droits fondamentaux, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à la réalisation et à l’utilisation, en vue d’apprécier la réalité de l’orientation sexuelle alléguée d’un demandeur de protection internationale, d’une expertise psychologique, telle que celle en cause au principal, qui a pour objet, sur la base de tests projectifs de la personnalité, de fournir une image de l’orientation sexuelle de ce demandeur (dispositif).
L’article 2, paragraphe 2, sous b), i), de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit qu’un employeur peut licencier un travailleur pour le motif tiré d’absences intermittentes au travail, fussent-elles justifiées, dans la situation où ces absences sont la conséquence de maladies imputables au handicap dont est atteint ce travailleur, sauf si cette réglementation, tout en poursuivant l’objectif légitime de lutter contre l’absentéisme, n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier (dispositif).
(Décision commentée)
L’article 4, § 1er, de la Directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en œuvre progressive du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale, s’oppose à une législation d’un Etat membre qui, dans le cas du travail à temps partiel vertical, exclut les jours non travaillés du calcul des jours pour lesquels les cotisations ont été payées et qui réduit ainsi la période de paiement de la prestation de chômage lorsqu’il est constaté que la majorité des travailleurs à temps partiel vertical sont des femmes qui sont affectées négativement par une telle législation.
L’article 19, paragraphe 1er, de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle une travailleuse allaitante conteste, devant une juridiction nationale ou toute autre instance compétente de l’État membre concerné, l’évaluation des risques présentés par son poste de travail en ce qu’elle n’aurait pas été effectuée conformément à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail.
L’article 19, paragraphe 1, de la directive 2006/54 doit être interprété en ce sens que, dans une situation telle que celle en cause au principal, il appartient à la travailleuse concernée d’établir des faits de nature à suggérer que l’évaluation des risques présentés par son poste de travail n’a pas été effectuée conformément aux exigences de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 92/85 et permettant ainsi de présumer l’existence d’une discrimination directe fondée sur le sexe, au sens de la directive 2006/54, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier. Il appartiendra, dès lors, à la partie défenderesse de prouver que ladite évaluation des risques a été faite conformément aux exigences de cette disposition et qu’il n’y a donc pas eu de violation du principe de non-discrimination.
(Dispositif).
Les dispositions de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, telle que modifiée par la directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 septembre 2002, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, subordonnant l’admission des candidats au concours d’entrée à l’école de police de cet État membre, quel que soit leur sexe, à une exigence de taille physique minimale de 1,70 m, dès lors que cette réglementation désavantage un nombre beaucoup plus élevé de personnes de sexe féminin par rapport à des personnes de sexe masculin et que ladite réglementation n’apparaît pas propre ni nécessaire à la réalisation de l’objectif légitime qu’elle poursuit, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. (Dispositif).
L’article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que l’article 2, § 1er, l’article 2, § 2, sous a), et l’article 6, § 1er, de la Directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une disposition, telle que celle en cause au principal, qui autorise un employeur à conclure un contrat de travail intermittent avec un travailleur âgé de moins de 25 ans, quelle que soit la nature des prestations à effectuer, et à licencier ce travailleur dès que celui-ci atteint l’âge de 25 ans, dès lors que cette disposition poursuit un objectif légitime de politique de l’emploi et du marché du travail et que les moyens prévus pour réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires (dispositif).
(Décision commentée)
La prise en compte de la durée de travail effectivement accomplie par un travailleur au cours de sa carrière constitue un critère objectif et étranger à toute discrimination permettant une réduction proportionnée de ses droits à la pension. La méthode qui aboutit à allouer aux salariés qui ont acquis leur ancienneté lorsqu’ils étaient plus jeunes une retraite d’entreprise inférieure à celle de collègues qui ont acquis celle-ci lorsqu’ils étaient plus âgés bien que l’ancienneté soit la même ne constitue pas une discrimination liée directement au critère de l’âge, la réglementation s’appliquant de la même manière aux travailleurs de tous âges. Elle est donc fondée non sur ce critère mais sur celui de l’ancienneté.
L’annexe I du Règlement n° 1178/2011 doit être interprété en ce sens qu’il n’interdit au titulaire d’une licence de pilote ayant atteint l’âge de 65 ans ni d’intervenir en tant que pilote dans des vols à vide ou des vols de convoyage, effectués dans le cadre de l’activité commerciale d’un transporteur, sans transport de passagers, de fret ou de courrier, ni d’exercer en tant qu’instructeur et/ou examinateur à bord d’un aéronef, sans faire partie de l’équipage de conduite de vol.
L’article 6 T.U.E. et l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit l’interdiction de cumuler la pension nette de retraite dans le secteur public avec les revenus tirés d’activités exercées auprès d’institutions publiques si le niveau de celle-ci dépasse un certain seuil.
L’article 2, § 2, sous b), de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens que cette disposition ne s’applique pas à l’interprétation d’une législation nationale, telle que celle en cause au principal, selon laquelle l’interdiction qu’elle prévoit de cumuler la pension nette de retraite avec les revenus tirés d’activités exercées auprès d’institutions publiques si le niveau de cette pension dépasse le niveau de salaire moyen brut national qui a servi de base pour l’établissement du budget de la sécurité sociale de l’État s’applique aux magistrats de carrière, mais non aux personnes qui ont été investies d’un mandat prévu par la Constitution nationale. (Extrait du dispositif – loi roumaine)
L’article 7, sous f), de la Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données doit être interprété en ce sens qu’il n’impose pas l’obligation de communiquer des données à caractère personnel à un tiers afin de lui permettre d’introduire un recours en indemnisation devant une juridiction civile pour un dommage causé par la personne concernée par la protection de ces données. Toutefois, l’article 7, sous f), de cette directive ne s’oppose pas à une telle communication sur la base du droit national dispositif (arrêt rendu en matière d’accident de la circulation).
L’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail doit être interprété en ce sens que l’interdiction de porter un foulard islamique, qui découle d’une règle interne d’une entreprise privée interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur la religion ou sur les convictions au sens de cette directive.
En revanche, une telle règle interne d’une entreprise privée est susceptible de constituer une discrimination indirecte au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la directive 2000/78 s’il est établi que l’obligation en apparence neutre qu’elle prévoit entraîne, en fait, un désavantage particulier pour les personnes adhérant à une religion ou à des convictions données, à moins qu’elle ne soit objectivement justifiée par un objectif légitime, tel que la poursuite par l’employeur, dans ses relations avec ses clients, d’une politique de neutralité politique, philosophique ainsi que religieuse, et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier (dispositif de l’arrêt).
L’article 4, § 1er, de la Directive 2008/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail doit être interprété en ce sens que la volonté d’un employeur de tenir compte des souhaits d’un client de ne plus voir les services de celui-ci assurés par une travailleuse portant un foulard islamique ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de cette disposition.
L’article 7, § 2, de la Directive 2000/78/CE du Conseil autorise un Etat membre à adopter une réglementation qui confère aux salariés atteints de certains handicaps une protection spéciale ex ante en cas de licenciement, sans pour autant conférer la même protection aux fonctionnaires atteints des mêmes handicaps, à moins qu’une violation du principe d’égalité de traitement ne soit établie, ce qu’il appartient au juge de renvoi de vérifier. Lors de cette vérification, l’analyse de la comparaison des situations doit être centrée sur l’ensemble des règles du droit national pertinentes régissant les positions des travailleurs salariés atteints d’un handicap donné d’une part et celles des fonctionnaires atteints du même handicap, de l’autre, eu égard notamment à l’objet de la protection contre le licenciement.
Dans l’hypothèse où l’article 7, § 2, lu à la lumière de la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes handicapées et en combinaison avec le principe général d’égalité de traitement, s’opposerait à une telle réglementation, l’obligation de respecter le droit de l’Union exigerait que le champ d’application des règles nationales soit étendu afin que ces règles bénéficient également aux fonctionnaires.
Dès lors qu’une convention collective emporte une discrimination indirecte fondée sur l’âge, il y a lieu d’examiner si – bien que formulée de façon neutre – elle désavantage en fait un nombre beaucoup plus élevé de personnes ayant un certain âge ou relevant d’une certaine catégorie d’âge. Si la convention collective prévoit la prise en compte de périodes de scolarité dans les critères de classement (échelons barémiques), ce critère s’applique de la même manière à tous les travailleurs qui font la demande d’une telle prise en compte et n’induit pas de différence de traitement indirectement fondée sur l’âge.
(Décision commentée)
La notion de handicap, non définie par la Convention des Nations-Unies relative aux personnes handicapées, doit faire l’objet d’une interprétation autonome et uniforme. Le fait qu’un travailleur relève d’un régime juridique (national) d’incapacité temporaire n’exclut pas que la limitation de la capacité soit durable. Par ailleurs, le caractère durable de la limitation (entrave à la vie professionnelle de longue durée) doit être examiné au regard de l’état d’incapacité tel que présenté par la personne à la date à laquelle l’acte allégué comme discriminatoire a été posé. C’est à la juridiction nationale d’apprécier, eu égard à la situation factuelle, si la limitation de la capacité de la personne présente ou non le caractère durable requis.
(Décision - doublement - commentée)
La notion de handicap est, au sens de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne, une notion autonome relevant du droit européen. La notion doit être interprétée de façon large et évolutive, et ce sous l’angle fonctionnel. Elle implique une limitation à la participation pleine et active de la personne à la vie professionnelle de longue durée. Il y a dès lors lieu de savoir s’il y a entrave à la participation pleine et effective à la vie professionnelle.
(Décision commentée)
Une pension de survie prévue par un régime professionnel de pension relève du champ d’application de l’article 157 TFUE. Le fait que cette pension soit versée non au travailleur mais à son conjoint survivant ne modifie pas la règle, dans la mesure où la prestation est un avantage qui trouve son origine dans l’affiliation du conjoint décédé.
Une réglementation d’un Etat membre qui n’ouvre pas au partenaire survivant le droit à une pension de survie équivalente à celle de l’époux survivant – alors qu’en droit national, la législation en matière de partenariat de vie placerait les personnes de même sexe dans une situation comparable à celle des époux – est une discrimination directe fondée sur l’orientation sexuelle.
La législation en matière d’état civil (et les prestations qui en découlent) est une matière qui relève de la compétence des Etats membres, compétence dans laquelle ils doivent respecter les principes de non-discrimination. Cependant, les Etats membres sont libres de prévoir ou non le mariage pour des personnes du même sexe ou une forme alternative de reconnaissance légale de leur relation ainsi que, le cas échéant, de prévoir la date à partir de laquelle un tel mariage ou une telle forme alternative produira ses effets.
L’article 2, paragraphe 2, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 1, de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que les candidats aux postes d’agents d’un corps de police qui assurent l’ensemble des fonctions opérationnelles ou exécutives incombant à celui-ci ne doivent pas avoir atteint l’âge de 35 ans. (Dispositif).
L’article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’un régime d’imposition, tel que celui en cause au principal, qui prévoit que le traitement fiscal des frais de formation professionnelle exposés par une personne diffère en fonction de son âge, relève du champ d’application matériel de cette directive dans la mesure où il vise à favoriser l’accès à la formation des jeunes.
L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à un régime d’imposition, tel que celui en cause au principal, qui permet aux personnes n’ayant pas atteint l’âge de 30 ans de déduire intégralement, sous certaines conditions, les frais de formation professionnelle de leurs revenus imposables, alors que ce droit à déduction est limité pour les personnes ayant atteint cet âge, dans la mesure où, d’une part, ce régime est objectivement et raisonnablement justifié par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. Il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans l’affaire au principal. (Dispositif).
Une personne qui présente sa candidature à un emploi en vue non de l’obtenir mais uniquement d’acquérir le statut formel de candidat dans le seul but de réclamer une indemnisation sur le fondement des directives 2000/78 et 2006/54 ne cherche manifestement pas à obtenir l’emploi auquel elle se porte formellement candidate. Elle ne peut dès lors bénéficier de la protection offerte par ces textes, dont l’objectif est d’assurer à toute personne l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail en lui offrant une protection efficace contre les discriminations. Par ailleurs, les justiciables ne sauraient frauduleusement ou abusivement se prévaloir des normes de l’Union européenne (avec renvoi à l’arrêt SICES du 13 mars 2014, Aff. C-155/13).
(Conclusions commentées)
(Décision commentée)
La définition de « régimes professionnels de sécurité sociale » ne figure pas dans la Directive n° 2000/78/CE mais dans la Directive n° 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail. Il s’agit des régimes non régis par la Directive 79/7/CEE du Conseil du 18 décembre 1978 relative à la mise en œuvre progressive du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale et qui ont pour objet de fournir aux travailleurs (indépendants ou salariés) au niveau d’une entreprise, d’un groupe d’entreprises, ou encore d’une branche économique ou d’un secteur (inter)professionnel des prestations destinées à compléter celles prévues par les régimes légaux ou de s’y substituer.
(Conclusions commentées)
Conclusions de l’Avocat Général KOKOTT dans l’affaire n° C-157/15 (question posée par la Cour de cassation belge dans son arrêt du 9 mars 2015)
(Décision commentée)
Le principe général de non-discrimination est une expression particulière du principe fondamental d’égalité de traitement. En conséquence, dans un litige entre particuliers, l’interdiction de discrimination concrétisée par la Directive 2000/78 s’oppose à une réglementation nationale qui prive un employé d’une indemnité de licenciement lorsqu’il peut prétendre à une pension de vieillesse.
Si, dans les litiges entre particuliers, une directive ne peut par elle-même créer d’obligations dans le chef d’un particulier et ne peut être invoquée en tant que telle à son encontre, l’obligation des Etats, découlant d’une directive, d’atteindre le résultat prévu par celle-ci ainsi que de prendre toutes mesures générales propres à en assurer l’exécution s’impose à toutes les autorités de l’Etat, en ce compris aux autorités juridictionnelles.
Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que, aux fins de l’application des articles 4, paragraphe 3, TUE, 325 TFUE, 2, 250, paragraphe 1, et 273 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, l’administration fiscale puisse, afin d’établir l’existence d’une pratique abusive en matière de taxe sur la valeur ajoutée, utiliser des preuves obtenues dans le cadre d’une procédure pénale parallèle non encore clôturée, à l’insu de l’assujetti, au moyen, par exemple, d’interceptions de télécommunications et de saisies de courriers électroniques, à condition que l’obtention de ces preuves dans le cadre de ladite procédure pénale et l’utilisation de celles ci dans le cadre de la procédure administrative ne violent pas les droits garantis par le droit de l’Union.
Il incombe, en vertu des articles 7, 47 et 52, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, à la juridiction nationale qui contrôle la légalité de la décision procédant à un redressement de la taxe sur la valeur ajoutée fondé sur de telles preuves de vérifier, d’une part, si les interceptions de télécommunications et la saisie de courriers électroniques étaient des moyens d’investigation prévus par la loi et étaient nécessaires dans le cadre de la procédure pénale et, d’autre part, si l’utilisation par ladite administration des preuves obtenues par ces moyens était également autorisée par la loi et nécessaire.
Il lui appartient, en outre, de vérifier si, conformément au principe général du respect des droits de la défense, l’assujetti a eu la possibilité, dans le cadre de la procédure administrative, d’avoir accès à ces preuves et d’être entendu sur celles ci. Si elle constate que cet assujetti n’a pas eu cette possibilité ou que ces preuves ont été obtenues dans le cadre de la procédure pénale ou utilisées dans celui de la procédure administrative en violation de l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ladite juridiction nationale doit écarter ces preuves et annuler ladite décision si celle ci se trouve, de ce fait, sans fondement.
Ces preuves doivent, de même, être écartées si cette juridiction n’est pas habilitée à contrôler qu’elles ont été obtenues dans le cadre de la procédure pénale en conformité avec le droit de l’Union ou ne peut à tout le moins s’assurer, sur le fondement d’un contrôle déjà exercé par une juridiction pénale dans le cadre d’une procédure contradictoire, qu’elles ont été obtenues en conformité avec ce droit.
(Décision commentée)
En cas de licenciement discriminatoire en raison du genre, le droit communautaire laisse aux Etats membres la liberté de choisir parmi les différentes solutions propres à réaliser l’objectif poursuivi. Cependant, les mesures prises doivent assurer une protection juridictionnelle effective et efficace et avoir un effet dissuasif réel. Ceci implique de tenir compte des caractéristiques propres de chaque situation. A défaut de réintégration, il faut se tourner vers la réparation pécuniaire du préjudice subi et celle-ci, si elle est la mesure retenue, doit permettre de compenser intégralement les préjudices effectivement encourus du fait du licenciement, et ce selon les règles nationales.
(Décision commentée)
En l’absence de données statistiques précises relatives aux effets d’une règle nationale (en l’occurrence le mode de calcul des allocations de chômage), il ne peut être conclu que celle-ci conduit à l’existence d’une discrimination indirecte dont les femmes seraient victimes au motif qu’elles sont plus nombreuses que les hommes à occuper des postes à temps partiel.
La clause 4, point 2 de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel et l’article 7 de la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail doivent être interprétés en ce sens que, en cas d’augmentation du nombre d’heures de travail effectuées par un travailleur, les Etats membres n’ont pas l’obligation de prévoir que les droits au congé annuel payé déjà acquis – et éventuellement pris – soient calculés rétroactivement en fonction du nouveau rythme de travail. Par contre, un nouveau calcul doit être effectué pour la période au cours de laquelle le temps de travail a augmenté.
Les dispositions de la Directive 95/46, en ce qu’elles régissent le traitement de données à caractère personnel susceptible de porter atteinte aux libertés fondamentales et, en particulier, au droit au respect de la vie privée, doivent nécessairement être interprétées à la lumière des droits fondamentaux garantis par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
La Directive 95/46 vise à garantir non seulement une protection efficace et complète des libertés et des droits fondamentaux des personnes physiques, notamment du droit fondamental au respect de la vie privée à l’égard du traitement des données à caractère personnel, mais également un niveau élevé de protection de ces libertés et droits fondamentaux.
L’importance tant du droit fondamental au respect de la vie privée, garanti par l’article 7 de la Charte, que du droit fondamental à la protection des données à caractère personnel, garanti par l’article 8 de celle-ci, est en outre soulignée dans la jurisprudence de la Cour de Justice (renvoi notamment à Google Spain et Google).
(Décision commentée)
Le non versement d’une indemnité de fin de contrat (versée au titre de complément de salaire à l’issue d’un contrat de travail à durée déterminée lorsque les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée) dans le cas où le contrat est conclu avec un jeune pour une période comprise dans ses vacances scolaires ou universitaires n’est pas incompatible avec le principe de l’interdiction de la discrimination en fonction de l’âge.
(Décision commentée)
Une législation nationale, en vertu de laquelle le traitement de base d’un juge est déterminé, lors de son recrutement, uniquement en fonction de son âge est contraire aux articles 2 et 6, paragraphe 1, de la directive. Le maintien de distinctions dans les conditions de progression barémique peut ne pas l’être s’il peut être justifié conformément à l’article 6, par. 1 de la directive 2000/78.
La notion de « désavantage particulier », au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la directive 2000/43 ne désigne pas le cas d’inégalité grave, flagrant ou particulièrement significatif, mais signifie que ce sont particulièrement les personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée qui, du fait de la disposition, du critère ou de la pratique en cause, se trouvent désavantagées (matière civile : utilisateurs d’électricité d’un même quartier majoritairement d’origine rom).
L’octroi d’un congé parental à un fonctionnaire, qui permet aux nouveaux parents d’interrompre leur activité professionnelle pour se consacrer à leurs responsabilités familiales, a des conséquences sur l’exercice de son activité professionnelle. Les conditions d’attribution relèvent des conditions d’emploi et de travail au sens de l’article 14, par 1, sous c) de la Directive 2006/54. Un fonctionnaire ne peut dès lors se voir accorder un congé parental uniquement si sa femme travaille (et non si elle ne travaille pas).
(Décision commentée)
Effets du temps partiel sur la prestation – mesures ne touchant pas spécifiquement les femmes
(Décision commentée)
Le non paiement d’une indemnité spéciale de licenciement aux travailleurs ayant atteint l’âge normal de la retraite n’est pas incompatible avec le droit de l’Union dès lors qu’elle n’est versée qu’aux personnes qui entendent demeurer actives, mais qui n’ont pas l’âge de la pension et éprouvent généralement plus de difficultés, eu égard à leur âge, à trouver un nouvel emploi, alors que les premiers peuvent prétendre à une pension de retraite.
L’article 16 de la directive 2000/78/CE portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale, qui vise à mettre fin à une discrimination en fonction de l’âge, ne doit pas nécessairement permettre à un agent dont les périodes de travail antérieures à son 18e anniversaire n’ont pas été prises en compte dans le calcul de son avancement, d’obtenir une compensation financière correspondant à la la différence entre la rémunération qu’il aurait obtenue en l’absence d’une telle discrimination et celle qu’il a effectivement perçue. Néanmoins, le rétablissement de l’égalité de traitement implique l’octroi aux agents dont l’expérience a été, ne serait-ce qu’en partie, acquise avant l’âge de 18 ans des mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les agents ayant obtenu, après avoir atteint cet âge, une expérience de même nature et d’une durée comparable, en ce qui concerne la prise en compte des périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans, mais également l’avancement dans l’échelle des rémunérations ; il ne s’oppose cependant pas à ce que le législateur national prévoie, aux fins de la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans, une obligation de coopération en vertu de laquelle l’agent doit fournir à son employeur les preuves afférentes auxdites périodes.
(Décision commentée)
Les articles 2, paragraphes 1 et 2, sous a), et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui exclut la prise en compte des périodes de scolarité accomplies par un fonctionnaire avant l’âge de 18 ans aux fins de l’octroi du droit à pension et du calcul du montant de sa pension de retraite, dans la mesure où, d’une part, elle est objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, elle constitue un moyen approprié et nécessaire pour la réalisation de cet objectif.
(Décision commentée)
Réponse à la question posée par la Cour du travail de Bruxelles le 25 octobre 2013
Obésité – l’état d’obésité d’un travailleur constitue un « handicap », au sens de la Directive 2000/78/CE, lorsque cet état entraîne une limitation, résultant notamment d’atteintes physiques, mentales ou psychiques durables, dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à la pleine et effective participation de la personne concernée à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs – en l’espèce, assistant maternel – unique assistant licencié au motif de la baisse alléguée de la charge de travail
Âge maximum pour le recrutement d’agents de la police locale (30 ans) – condition de recrutement des travailleurs – exigence disproportionnée eu égard à l’objectif légitime poursuivi (caractère opérationnel et bon fonctionnement du corps) – différence de traitement ne pouvant être justifiée – violation des art. 2 par 2, 4 par 2 et 6 par 1 c) de la directive 2000/78/CE
Les articles 2, paragraphes 1 et 2, sous a), et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail s’opposent à une réglementation nationale qui, pour mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, prend en compte des périodes de formation et de service antérieures à l’âge de 18 ans mais qui, simultanément, introduit à l’égard des seuls fonctionnaires victimes de cette discrimination un allongement de trois ans de la durée nécessaire pour pouvoir passer du premier au deuxième échelon de chaque catégorie d’emploi et de chaque catégorie salariale.
Il faut entendre par « rémunération », conformément à l’article 157, paragraphe 2, TFUE, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier. Cette notion comprend tous les avantages, actuels ou futurs. La nature juridique de ces avantages n’importe pas pour l’application de l’article 157 TFUE, dès lors qu’ils sont octroyés en relation avec l’emploi. Si de nombreux types d’avantages consentis par un employeur répondent également à des considérations de politique sociale, le caractère de rémunération d’une prestation ne peut être mis en doute, dès lors que le travailleur est en droit de recevoir de son employeur la prestation en cause, en raison de l’existence de la relation de travail. La prise en compte d’une durée de travail réduite par rapport à celle du travailleur à temps plein peut constituer un critère objectif permettant une réduction proportionnée des droits des travailleurs concernés (octroi d’une allocation pour enfant à charge en l’espèce).
(Décision commentée)
Egalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale
Les conditions de rémunération des fonctionnaires relèvent de la Directive 2000/78.
En cas de discrimination sur le critère de l’âge pratiquée dans la fixation de leur rémunération, le droit de l’Union et en particulier l’article 17 de la Directive, n’impose pas d’octroyer de façon rétroactive aux fonctionnaires discriminés un montant correspondant à la différence entre la rémunération effectivement perçue et celle correspondant à l’échelon le plus élevé de leur grade. Il y a lieu pour le juge national de vérifier tenant compte de la jurisprudence de la Cour si la responsabilité de l’Etat peut être engagée.
La directive européenne 95/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données doit être interprétée en ce sens que :
• d’une part, l’activité d’un moteur de recherche consistant à trouver des informations publiées ou placées sur Internet par des tiers, à les indexer de manière automatique, à les stocker temporairement et, enfin, à les mettre à la disposition des internautes selon un ordre de préférence donné doit être qualifiée de « traitement de donnée à caractère personnel » lorsque ces informations contiennent des données à caractère personnel et, d’autre part, l’exploitant de ce moteur de recherche doit être considéré comme le « responsable » dudit traitement ;
• afin de respecter les droits prévus par ses articles 12, sous b), et 14, alinéa 1er, sous a) de ladite directive, l’exploitant d’un moteur de recherche est obligé de supprimer de la liste de résultats, affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, des liens vers des pages web, publiées par des tiers et contenant des informations relatives à cette personne, également dans l’hypothèse où ce nom ou ces informations ne sont pas effacés préalablement ou simultanément de ces pages web, et ce, le cas échéant, même lorsque leur publication en elle-même sur lesdites pages est licite ;
• dans le cadre de l’appréciation des conditions d’application de ces mêmes articles, il convient notamment d’examiner si la personne concernée a un droit à ce que l’information en question relative à sa personne ne soit plus liée à son nom par une liste de résultats affichée à la suite d’une recherche effectuée au départ de son nom, sans pour autant que la constatation d’un tel droit présuppose que l’inclusion de l’information en question dans cette liste cause un préjudice à cette personne. Cette dernière pouvant, eu égard à ses droits fondamentaux au titre des articles 7 et 8 de la Charte, demander que l’information en question ne soit plus mise à la disposition du grand public du fait de son inclusion dans une telle liste de résultats, ces droits prévalent, en principe, non seulement sur l’intérêt économique de l’exploitant du moteur de recherche, mais également sur l’intérêt de ce public à accéder à ladite Information lors d’une recherche portant sur le nom de cette personne. Cependant, tel ne serait pas le cas s’il apparaissait, pour des raisons particulières, telles que le rôle joué par ladite personne dans la vie publique, que l’ingérence dans ses droits fondamentaux est justifiée par l’intérêt prépondérant dudit public à avoir, du fait cette inclusion, accès à l’information en question.
La directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprétée en ce sens que ne constitue pas une discrimination fondée sur le handicap le fait de refuser d’accorder un congé payé équivalent à un congé de maternité ou à un congé d’adoption à une travailleuse étant dans l’incapacité de porter un enfant et qui a recouru à une convention de mère porteuse.
La validité de cette directive ne peut être appréciée au regard de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, mais ladite directive doit faire l’objet, dans la mesure du possible, d’une interprétation conforme à cette convention.
La directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, notamment ses articles 4 et 14, doit être interprétée en ce sens que ne constitue pas une discrimination fondée sur le sexe le fait de refuser d’accorder un congé payé équivalent à un congé de maternité à une travailleuse, en sa qualité de mère commanditaire ayant eu un enfant grâce à une convention de mère porteuse. La situation d’une telle mère commanditaire en ce qui concerne l’attribution d’un congé d’adoption ne relève pas de cette directive.
En n’instituant pas d’obligation pour tous les employeurs de mettre en place, en fonction des besoins dans des situations concrètes, des aménagements raisonnables pour toutes les personnes handicapées, la République italienne a manqué à son obligation de transposer correctement et pleinement l’article 5 de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail. (Dispositif)
La directive 2000/78/CE portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprétée en ce sens que :
• sont susceptibles d’être qualifiés de « faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination » en ce qui concerne un club de football professionnel, les déclarations émanant d’une personne se présentant et étant perçue, dans les médias comme dans la société, comme étant le principal dirigeant de ce club, sans pour autant avoir nécessairement la capacité juridique de le lier ou de le représenter en matière d’embauche ;
• dans l’hypothèse où des faits seraient qualifiés de « faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination » fondée sur l’orientation sexuelle lors du recrutement des joueurs par un club de football professionnel, la charge de la preuve telle qu’aménagée à son article 10, paragraphe 1, ne conduit pas à exiger une preuve impossible à rapporter sans porter atteinte au droit au respect de la vie privée.
Elle s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle, en cas de constatation d’une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, il n’est possible de prononcer qu’un avertissement lorsqu’une telle constatation intervient après l’expiration d’un délai de prescription de six mois à compter de la date à laquelle les faits se sont produits si, en application de cette même réglementation, une telle discrimination n’est pas sanctionnée dans des conditions de fond et de procédure qui confèrent à la sanction un caractère effectif, proportionné et dissuasif. Il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier si tel est le cas de la réglementation en cause au principal et, le cas échéant, d’interpréter le droit national dans toute la mesure du possible à la lumière du texte et de la finalité de ladite directive pour atteindre le résultat visé par celle-ci.
Notion de handicap - limitation de longue durée - notion d’aménagements raisonnables - réduction du temps de travail
Les États membres peuvent autoriser, par des règles d’habilitation, les partenaires sociaux à adopter des mesures au sens de l’article 2, paragraphe 5 de la directive, dans les domaines visés à cette disposition qui relèvent des accords collectifs et à condition que ces règles d’habilitation soient suffisamment précises afin de garantir que lesdites mesures respectent les exigences énoncées à cet article 2. Une mesure qui fixe à 60 ans l’âge limite à compter duquel les pilotes ne peuvent plus exercer leur activité professionnelle alors que les réglementations nationale et internationale fixent cet âge à 65 ans, n’est pas une mesure nécessaire à la sécurité publique et à la protection de la santé, au sens du même article 2, paragraphe 5
Les articles 2 et 6, paragraphe 1, de la directive s’opposent à une mesure prévue par une convention collective qui prévoit que, à l’intérieur de chaque grade, l’échelon de rémunération de base d’un agent contractuel du secteur public est déterminé, lors du recrutement de cet agent, en fonction de l’âge de celui-ci
La directive ne s’oppose pas à une loi qui prévoit la mise à la retraite d’office des fonctionnaires à vie, en l’occurrence les procureurs, lorsqu’ils atteignent l’âge de 65 ans, tout en leur permettant de continuer à travailler, si l’intérêt du service l’exige, jusqu’à l’âge maximal de 68 ans, pour autant que cette loi a pour objectif d’établir une structure d’âge équilibrée afin de favoriser l’embauche et la promotion des jeunes, d’optimiser la gestion du personnel et par là même de prévenir les litiges éventuels portant sur l’aptitude du salarié à exercer son activité au-delà d’un certain âge et qu’elle permet d’atteindre cet objectif par des moyens appropriés et nécessaires
L’article 3, paragraphe 1, sous c), de la Directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, telle que modifiée par la directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 septembre 2002, doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale qui, afin de promouvoir l’accès à l’emploi de personnes plus jeunes, permet à un employeur de licencier les salariés ayant acquis le droit à la pension de retraite, alors que ce droit est acquis pour les femmes à un âge inférieur de cinq années à l’âge auquel ledit droit est constitué pour les hommes, constitue une discrimination directe fondée sur le sexe interdite par cette directive
L’article 6, paragraphe 1 de la directive ne s’oppose pas à une législation nationale qui prévoit la mise à la retraite d’office des professeurs d’université lorsqu’ils atteignent l’âge de 68 ans et la poursuite de leur activité par ces derniers au-delà de l’âge de 65 ans uniquement au moyen de contrats à durée déterminée d’un an renouvelables au maximum deux fois, pour autant que cette législation poursuit un objectif légitime lié notamment à la politique de l’emploi et du marché du travail, tel que la mise en place d’un enseignement de qualité et la répartition optimale des postes de professeurs entre les générations, et qu’elle permet d’atteindre cet objectif par des moyens appropriés et nécessaires
L’article 6, paragraphe 1, de la directive ne s’oppose pas à une disposition nationale (convention collective) en vertu de laquelle sont considérées comme valables les clauses de cessation automatique des contrats de travail en raison du fait que le salarié a atteint l’âge de départ à la retraite, dans la mesure où, d’une part, ladite disposition est objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et du marché du travail et, d’autre part, les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires
La clause 4 de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel annexé à la directive 97/81/CE du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES, doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale qui, pour les travailleurs à temps partiel vertical cyclique, exclut les périodes non travaillées du calcul de l’ancienneté requise pour acquérir un droit à une pension de retraite, à moins qu’une telle différence de traitement ne soit justifiée par des raisons objectives (personnel navigant de l’aviation civile).
Est contraire au principe de non-discrimination en fonction de l’âge la réglementation nationale qui prévoit que les périodes de travail accomplies par le salarié avant qu’il ait atteint l’âge de 25 ans ne sont pas prises en compte pour le calcul du délai de préavis de licenciement – pouvoir du juge national
Limite d’âge maximale fixée pour l’exercice de la profession de dentiste conventionné (en l’occurrence 68 ans) – contrariété avec l’article 2, paragraphe 5, de la directive, lorsque cette mesure a pour seul objectif de protéger la santé des patients contre la baisse de performance de ces dentistes au-delà de cet âge, dès lors que cette même limite d’âge n’est pas applicable aux dentistes non conventionnés – absence de contrariété avec l’article 6, paragraphe 1, si la mesure a pour objectif de répartir les possibilités d’emploi entre les générations au sein de la profession de dentiste conventionné, si, compte tenu de la situation du marché de l’emploi concerné, cette mesure est appropriée et nécessaire pour atteindre cet objectif
Si la réglementation est contraire à la directive, pouvoir du juge national de laisser celle-ci inappliquée même si elle est antérieure à cette directive et que le droit national ne prévoit pas de l’écarter
L’article 4, paragraphe 1, de la directive ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui fixe à 30 ans l’âge maximal pour le recrutement dans le cadre d’emploi du service technique intermédiaire des pompiers
Les articles 1, 2 et 6 de la directive s’opposent à une réglementation nationale qui, aux fins de ne pas défavoriser l’enseignement général par rapport à l’enseignement professionnel et de promouvoir l’insertion des jeunes apprentis sur le marché de l’emploi, exclut la prise en compte des périodes d’emploi accomplies avant l’âge de 18 ans aux fins de la détermination de l’échelon auquel sont placés les agents contractuels de la fonction publique d’un État membre
L’article 6, § 1er, de la Directive 2000/78 n’ouvre la possibilité de déroger au principe de l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge que pour les seules mesures justifiées par des objectifs légitimes de politique sociale tels que ceux liés à la politique de l’emploi, du marché du travail ou de la formation professionnelle. Il appartient au juge national de vérifier si la réglementation en cause au principal répond à un tel objectif légitime et si l’autorité législative ou réglementaire nationale pouvait légitimement estimer, compte tenu de la marge d’appréciation dont disposent les Etats membres en matière de politique sociale, que les moyens choisis étaient appropriés et nécessaires à la réalisation de cet objectif.
Ce même article donne la possibilité aux Etats membres de prévoir, dans le cadre du droit national, certaines formes de différence de traitement fondée sur l’âge lorsqu’elles sont « objectivement et raisonnablement » justifiées par un objectif légitime, tel que la politique de l’emploi, du marché du travail ou de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. Il impose aux Etats membres la charge d’établir le caractère légitime de l’objectif invoqué à titre de justification à concurrence d’un seuil probatoire élevé. Il n’y a pas lieu d’attacher une signification particulière à la circonstance que le terme « raisonnablement », employé à l’article 6, § 1er, de ladite directive, ne figure pas à l’article 2, § 2, sous b), de celle-ci.
Handicap d’un enfant - but de la directive : lutter contre toute forme de discrimination fondées sur le handicap - obligation d’interpréter de manière extensive le principe de l’égalité de traitement
Le fait pour un employeur de déclarer publiquement qu’il ne recrutera pas de salariés ayant une certaine origine ethnique ou raciale constitue une discrimination directe à l’embauche au sens de la directive 2000/43/CE relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique, de telles déclarations étant de nature à dissuader sérieusement certains candidats de déposer leur candidature et, partant, à faire obstacle à leur accès au marché du travail. Pareilles déclarations suffisent à présumer l’existence d’une politique d’embauche directement discriminatoire. Il incombe alors à cet employeur de prouver qu’il n’y a pas eu de violation du principe de l’égalité de traitement. Il peut le faire en démontrant que la pratique réelle d’embauche de l’entreprise ne correspond pas à ces déclarations. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier que les faits reprochés sont établis et d’apprécier si les éléments apportés au soutien des affirmations dudit employeur selon lesquelles il n’a pas violé le principe de l’égalité de traitement sont suffisants.
La directive ne s’oppose pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle sont considérées comme valables les clauses de mise à la retraite d’office figurant dans des conventions collectives et qui exigent, comme seules conditions, que le travailleur ait atteint la limite d’âge (fixée à 65 ans par la réglementation nationale) pour l’admission à la retraite et remplisse les autres critères en matière de sécurité sociale pour avoir droit à une pension de retraite de type contributif, dès lors que ladite mesure est objectivement et raisonnablement justifiée, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et au marché du travail, et que les moyens mis en œuvre pour réaliser cet objectif d’intérêt général n’apparaissent pas inappropriés et non nécessaires à cet effet
Licenciement pour cause de maladie - pas une discrimination fondée sur le handicap au sens de la Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 - notion de handicap - aménagements raisonnables
L’article 119 du traité CE ainsi que la Directive n° 75/117/CEE du Conseil, du 10 février 1975, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation qui prévoit que, lorsqu’un pourcentage beaucoup plus élevé de travailleurs féminins par rapport à celui de travailleurs masculins exerce son emploi à temps partagé, les travailleurs à temps partagé qui accèdent à un emploi à temps plein se voient attribuer un échelon de l’échelle des rémunérations applicable au personnel travaillant à temps plein inférieur à celui de l’échelle des rémunérations applicable au personnel employé à temps partagé dont ces travailleurs bénéficiaient auparavant, en raison de l’application par l’employeur du critère du service calculé par référence à la durée du temps de travail effectivement accompli dans un emploi, à moins que cette législation ne soit justifiée par des critères objectifs et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe. Lié à C. trav. Bruxelles, 13 mai 2011, R.G. 2010/AB/257 et 2010/AB/264 ci-dessous.
L’article 119 du traité CEE doit être interprété dans ce sens qu’il s’oppose à ce qu’une convention collective conclue dans les services publics nationaux prévoie la prise en compte intégrale de l’ancienneté des travailleurs accomplissant au moins les trois quarts de l’horaire de travail normal pour l’accession à un indice de rémunération supérieur, mais seulement la moitié de cette ancienneté pour les travailleurs dont l’horaire a une durée comprise entre la moitié et les trois quarts de celle de l’horaire normal, lorsqu’il s’avère qu’en fait ce dernier groupe de travailleurs comprend un pourcentage considérablement plus faible d’hommes que de femmes, à moins que l’employeur n’établisse que ladite disposition est justifiée par des facteurs dont l’objectivité dépend notamment de la relation entre la nature de la fonction exercée et l’expérience que l’exercice de cette fonction apporte après un certain nombre d’heures de travail effectuées.
En présence d’une discrimination indirecte dans une disposition d’une convention collective, le juge national est tenu d’écarter cette disposition sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de celle-ci par la négociation collective ou par tout autre procédé, et d’appliquer aux membres du groupe défavorisé par cette discrimination le même régime que celui dont bénéficient les autres travailleurs, régime qui, à défaut de l’exécution correcte de l’article 119 du traité CEE en droit national, reste le seul système de référence valable. (Dispositif) Lié à C. trav. Bruxelles, 13 mai 2011, R.G. 2010/AB/257 et 2010/AB/264 ci-dessous.
Les articles 1er et 2 de la loi du 8 juin 1972 organisant le travail portuaire ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté de commerce et d’industrie, en ce que la loi ne limite pas l’obligation imposée aux personnes, organismes ou entreprises qui déploient des activités dans une zone portuaire de faire appel à des ouvriers portuaires reconnus pour ce qui est du chargement et déchargement de navires, mais impose également cette obligation pour des opérations qui peuvent être effectuées en dehors des zones portuaires. Cet arrêt fait suite à celui de la C.J.U.E. du 11 février 2021 (Aff. n° C-407/19 et C-471/19 - EU:C:2021:107), celle-ci ayant été saisie par la Cour constitutionnelle sur la conformité de la réglementation belge relative aux conditions d’engagement de personnel portuaire aux articles 45, 49 et 56 T.F.U.E.
La possibilité d’infliger des sanctions disciplinaires en cas de manquement aux prescriptions de la loi du 23 juillet 1926 relative à la SNCB et au personnel des Chemins de fer belges est pertinente et n’entraîne pas d’ingérence disproportionnée dans les droits des travailleurs concernés au regard des objectifs poursuivis. Il est toutefois disproportionné, au regard de ces objectifs, de considérer comme un manquement disciplinaire le fait pour un agent de ne pas communiquer son intention de ne pas participer à la grève, et, partant, de travailler. Le moyen est dès lors fondé en ce qu’il vise la possibilité d’infliger une sanction disciplinaire lorsque l’agent concerné ne communique pas son intention de ne pas participer au jour de grève. Il y a lieu d’annuler les mots « ou non » dans l’article 153/1, § 3, alinéa 5, de la loi du 23 juillet 1926, tel qu’il a été inséré par l’article 4 de la loi du 29 novembre 2017 relative à la continuité du service de transport ferroviaire de personnes en cas de grève (deux recours en annulation totale ou partielle (articles 2 et 4) de la loi du 29 novembre 2017, rejetés pour le surplus).
La différence de traitement entre les employeurs qui se rendent coupables envers un travailleur d’une discrimination prohibée par comparaison avec n’importe quel autre justiciable qui se rend coupable de la même discrimination repose sur un critère objectif : l’indemnisation forfaitaire diffère selon que la discrimination est ou non opérée dans le cadre des relations de travail ou des régimes complémentaires de sécurité sociale. Le choix du législateur en faveur d’un régime d’indemnisation forfaitaire spécifique repose sur un critère de distinction pertinent.
En ce qui concerne la proportionnalité des effets de la différence de traitement (les employeurs discriminants devant payer un montant généralement plus élevé), celle-ci trouve sa justification dans le constat que l’indemnité forfaitaire couvre tant le dommage moral que le dommage matériel alors que, dans les autres hypothèses, seul le dommage moral est couvert (avec renvoi à C. const., 12 février 2009, n° 17/2009). En outre, la Directive n° 2000/78/CE impose en son article 17 au législateur de prévoir des sanctions qui ont à l’égard des employeurs un effet dissuasif réel et qui sont adéquates au dommage subi en raison de l’impact grave pour la victime discriminée dans le domaine des relations de travail.
L’effectivité et l’efficacité de la lutte contre la fraude - et donc de la protection des intérêts financiers de l’Etat et des droits d’autrui dans un système social - peuvent justifier la limitation des droits de contrôle des intéressés sur le traitement de leurs données personnelles, pour autant que cette limitation du droit d’accès en ce qui concerne les missions de police administrative porte uniquement sur les données relatives à des bénéficiaires de prestations sociales et que la durée de l’exclusion du droit d’accès direct n’excède pas les besoins de l’enquête. La non-application des articles 9, 10 et 12 de la loi relative à la protection de la vie privée et le droit d’accès indirect, prévu par l’article 13 de la loi relative à la protection de la vie privée, sont limités aux données qui sont traitées par les (douze) instances visées et par les inspecteurs sociaux, dans le cadre de leurs missions de police administrative. En ce qui concerne les données qui sont traitées par ces institutions publiques et par ces inspecteurs sociaux, pour d’autres missions et à d’autres fins, ces derniers sont tenus au respect des articles 9, 10 et 12 de la loi relative à la protection de la vie privée. Toutefois, lorsque les besoins d’une enquête ne le justifient plus, il n’est pas raisonnablement justifié de refuser à l’intéressé l’accès direct à ses données personnelles et le contrôle de ces dernières (B.38.2.).
L’article 136, § 2, de la loi AMI, combiné avec les articles 1382, 1383 et 1384 du Code civil, viole les articles 10 et 11 de la Constitution dans la mesure où il ne subroge pas les organismes assureurs à l’assuré en ce qui concerne l’indemnisation du dommage résultant de la perte d’une chance ou dans la mesure où il ne leur confère pas le droit de réclamer le remboursement des prestations octroyées à l’assuré à concurrence de l’indemnisation de droit commun accordée à ce dernier pour la perte d’une chance.
Les dispositions en cause ne sauraient être interprétées de manière conforme à la Constitution sans qu’il soit porté atteinte à la définition autonome du dommage que constitue la perte d’une chance. Il appartient au législateur de prendre en considération cette composante du préjudice indemnisable, en permettant la subrogation des organismes assureurs en ce qui concerne l’indemnisation d’une chance perdue ou en prévoyant un droit au remboursement des indemnités qu’ils ont octroyées, à concurrence de l’indemnisation de droit commun accordée, à l’assuré du fait de la chance définitivement perdue. Dans l’attente de l’intervention du législateur, il appartient au juge d’autoriser, selon les circonstances, la subrogation précitée ou le droit au remboursement précité.
L’adresse privée d’une personne est une donnée dont la divulgation peut constituer une ingérence dans le respect de sa vie privée. Les droits que garantissent les articles 22 de la Constitution et 8 de la C.E.D.H. ne sont pas absolus. Les atteintes à la vie privée qui découlent d’une procédure judiciaire doivent se limiter autant que faire se peut à celles rendues strictement nécessaires par les spécificités de la procédure d’une part et par les données du litige de l’autre. Il n’apparaît pas nécessaire d’imposer à une partie de divulguer à l’autre partie l’adresse d’un tiers lorsque cette adresse ne constitue pas en tant que telle un élément de preuve mais ne revêt une importance qu’en tant qu’elle permet de convoquer ce tiers à témoigner (articles 871 et 877 C.J.)
La Cour constitutionnelle a annulé des dispositions de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement.
Il s’agit de (1) l’article 70, § 4, qui exclut pour une durée indéterminée des délais de préavis généraux les travailleurs qui répondent aux trois critères cumulatifs énumérés dans cette disposition (étant que le délai de préavis était au 31 décembre 2013 déterminé par le Roi et était à cette date inférieur au délai général, que le travailleur n’a pas de lieu fixe de travail et qu’il accomplit habituellement dans des lieux de travail temporaires ou mobiles une ou plusieurs des activités désignées) ainsi que (2) la référence aux travailleurs visés à l’article 70 dans l’article 97, qui exclut du champ d’application de l’indemnité en compensation du licenciement les travailleurs auxquels s’applique l’article 70 de la loi (préavis réduits).
Les effets des dispositions annulées sont cependant maintenus jusqu’au 31 décembre 2017.
Ni l’article 13 de la Constitution, ni l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ne garantissent un droit à un double degré de juridiction (CEDH, grande chambre, 26 octobre 2000, Kudla c. Pologne, § 122 ; 18 décembre 2007, Marini c. Albanie, § 120 ; 17 juillet 2012, Muscat c. Maltes, § 42) - sauf en matière pénale, il n’existe en outre aucun principe général de droit qui impose l’existence d’un double degré de juridiction
Loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée - détectives privés agréés - exceptions concernant certaines catégories de professions ou d’organismes - organismes professionnels de droit public chargés de rechercher des manquements à la déontologie d’une profession réglementée - renvoi à C.J.U.E., C-473/12 ci-dessus
Dans cet arrêt la Cour fait observer que le temps dont peut disposer le législateur pour remédier à une situation jugée inconstitutionnelle n’est pas illimité. L’objectif d’une harmonisation progressive des statuts des ouvriers et des employés jugée préférable par le législateur à une brusque suppression de la distinction de ces catégories professionnelles, spécialement dans une matière où les normes peuvent évoluer grâce à la négociation collective, ne justifie plus, dix-huit ans après que la Cour eut, par arrêt n° 56/93, constaté que le critère de distinction en cause ne pouvait plus être considéré comme pertinent, que certaines différences de traitement puissent encore être longtemps maintenues, perpétuant ainsi une situation d’inconstitutionnalité manifeste.
Elle dit donc pour droit que :
• les articles 52, § 1er, alinéas 2 à 4, et 59 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail violent les articles 10 et 11 de la Constitution ;
• les effets de ces dispositions législatives sont maintenus jusqu’à ce que le législateur adopte de nouvelles dispositions, et au plus tard jusqu’au 8 juillet 2013.
L’affiliation ou l’appartenance à une organisation syndicale et l’activité menée dans le cadre d’une telle organisation doivent être considérées comme des manifestations de l’opinion syndicale de la personne concernée. La victime d’une discrimination fondée sur son affiliation, son appartenance ou son activité syndicale est dès lors également victime d’une discrimination fondée sur ses convictions en matière syndicale, de sorte que les trois motifs de discrimination cités sont compris dans celui de la conviction syndicale
Il ne saurait être question d’un renversement de la charge de la preuve qu’après que la victime prouve les faits qui laissent présumer l’existence d’une discrimination. Par conséquent, elle doit démontrer que le défendeur a commis des actes ou a donné des instructions qui pourraient, de prime abord, être discriminatoires. La charge de la preuve incombe dès lors en premier lieu à la victime (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2720/009, p. 72). Les faits avancés doivent être suffisamment graves et pertinents. Il ne suffit pas qu’une personne prouve qu’elle a fait l’objet d’un traitement qui lui est défavorable. Cette personne doit également prouver les faits qui semblent indiquer que ce traitement défavorable a été dicté par des motifs illicites.
Pour ce faire, elle peut par exemple démontrer que sa situation est comparable à celle d’une personne de référence (article 28, § 2, 2°), c’est-à-dire une personne qui n’est pas caractérisée par un des motifs mentionnés dans la loi attaquée et qui est traitée différemment par le défendeur. Les faits précités ne peuvent toutefois avoir un caractère général, mais doivent pouvoir être imputés spécifiquement à l’auteur de la distinction. Etant donné que, selon l’article 28, § 2, 1°, (…), « les éléments qui révèlent une certaine récurrence de traitement défavorable à l’égard de personnes partageant un critère protégé » font naître une présomption de discrimination directe, cette récurrence doit exister dans le chef de ces personnes.
Il doit en être de même pour les faits qui peuvent faire présumer l’existence d’une discrimination indirecte fondée sur un des motifs mentionnés dans la loi attaquée. Il ne suffit pas de démontrer sur la base de statistiques qu’un motif apparemment neutre lèse des personnes caractérisées par un des motifs mentionnés dans la loi attaquée. Il faut démontrer en outre que le défendeur en était conscient. Les données statistiques doivent par ailleurs satisfaire à certaines exigences de qualité pour que le juge puisse en tenir compte, ainsi qu’il ressort notamment de la jurisprudence de la Cour de justice et de la Cour européenne des droits de l’homme. (B.52) (Rejet du recours en annulation)
Saisie sur question préjudicielle de la compatibilité de l’article 63 LCT avec le principe d’égalité et de non-discrimination, la Cour constitutionnelle examine si, en accordant aux ouvriers, en matière de licenciement abusif, des avantages qu’il n’accorde pas aux employés, le législateur n’a pas violé ce principe au détriment de ces derniers. Elle conclut que les mesures critiquées sont raisonnablement justifiées par rapport à l’objectif de réduire progressivement les différences entre employés et ouvriers, en ce qui concerne les garanties accordées aux uns et aux autres en matière de licenciement.
Dans cet arrêt, la Cour dit pour droit que :
• les articles 59 et 82 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ne violent pas les articles 6 et 6bis de la Constitution en tant qu’ils fixent des délais de préavis différents pour le congé donné respectivement à un ouvrier et à un employé qui ont la même ancienneté en tant que travailleur ;
• les paragraphes 2 et 3 de l’article 82 de la même loi ne violent pas les articles 6 et 6bis de la Constitution en tant qu’ils fixent des délais de préavis différents pour le congé donné par l’employeur aux employés, selon que la rémunération de ceux-ci dépasse ou non 650 000 francs.
A son estime, le législateur a pris une mesure conforme à son objectif de rapprochement des statuts des ouvriers et des employés en préférant une harmonisation progressive de ceux-ci à une brusque suppression de la distinction de ces catégories professionnelles, spécialement dans une matière où les normes peuvent évoluer grâce à la négociation collective. Cette considération démontre également que le maintien de la distinction n’est pas manifestement disproportionné à un objectif qui ne peut être atteint que par étapes successives. Il s’ensuit que le processus d’effacement, entamé depuis des décennies, ne peut être que progressif. Le fait qu’il serait injustifié d’instituer aujourd’hui une telle distinction ne suffit pas pour justifier sa brusque abolition.
Mêmes développements sur la preuve que C. const., 11 mars 2009, n° 39/2009 ci-dessus
Conclusions de M. l’Avocat Général H. MORMONT avant Cass., 12 juin 2023, n° S.17.0054.F
Tel qu’applicable aux faits jugés, soit avant l’entrée en vigueur du nouvel article 1er/3 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers, un ordre de quitter le territoire était implicitement retiré du fait de l’octroi d’une attestation d’immatriculation, l’étranger ne pouvant être à la fois sous le coup de cet ordre et autorisé au séjour.
Il suit de l’article 6, § 4, de la Charte sociale européenne révisée, de son article G et de l’article N de son Annexe, que les travailleurs ont le droit de grève et que ce droit peut faire l’objet de restrictions. La décision de faire la grève est susceptible de constituer une faute. Celle-ci est de nature à engager la responsabilité de l’employeur si les autres conditions de l’article 1384, alinéa 3, de l’ancien Code civil, auquel renvoie l’article 3 de la loi du 18 février 2003 relative à la responsabilité des et pour les membres du personnel au service des personnes publiques, sont réunies.
(Secteur public)
Il résulte des dispositions du Code du travail français, transposant la Directive n° 2006/54/CE du 5 juillet 2006, que les différences de traitement en raison du sexe doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle véritable et déterminante et être proportionnées au but recherché. Par analogie avec la notion d’« exigence professionnelle essentielle et déterminante » au sens de la Directive n° 2000/78/CE, la notion d’« exigence professionnelle véritable et déterminante » au sens de la Directive n° 2006/54/CE renvoie à une exigence objectivement dictée par la nature ou les conditions d’exercice de l’activité professionnelle en cause (avec référence à l’arrêt BOUGNAOUI). La Cour de cassation renvoie à la version en langue anglaise des deux directives précitées, où les dispositions en cause sont rédigées de façon identique (« such a characteristic constitutes a genuine and determining occupational requirement »).
Elle censure dès lors un arrêt qui a débouté un salarié engagé en tant que steward de ses demandes fondées notamment sur la discrimination, au motif que l’employeur lui avait interdit de se présenter à l’embarquement avec des cheveux longs coiffés en tresses africaines nouées en chignon. Pour exercer ses fonctions, l’intéressé avait dû porter une perruque masquant sa coiffure, au motif que celle-ci n’était pas conforme au référentiel relatif au personnel navigant commercial masculin, au motif que l’interdiction faite à l’intéressé de porter une coiffure – pourtant autorisée pour le personnel féminin – caractérisait une discrimination directement fondée sur l’apparence physique, en lien avec le sexe. Pour la Cour de cassation, l’arrêt se prononce par des motifs inopérants pour justifier que les restrictions imposées au personnel masculin relatives à la coiffure étaient nécessaires pour permettre l’identification du personnel de la compagnie aérienne et préserver son image. Par ailleurs, est également censurée la motivation qui se fonde sur la perception sociale de l’apparence physique des genres masculin et féminin, laquelle ne peut constituer une exigence professionnelle véritable et déterminante justifiant une différence de traitement relative à la coiffure entre les hommes et les femmes au sens de la Directive n° 2006/54/CE (article 14, § 2).
Les articles 6.4 et N de la Charte sociale européenne révisée signée à Strasbourg le 3 mai 1996 disposent que les Etats parties reconnaissent le droit de grève et peuvent le réglementer. Dénuées du caractère suffisamment clair et précis qui permettrait de leur reconnaître un effet direct, ces dispositions n’attribuent pas aux prévenus (militants et représentants syndicaux à qui est reproché un délit d’entrave méchante à la circulation routière à l’occasion d’un barrage sur l’autoroute), un droit subjectif qu’ils pourraient faire valoir à l’encontre des sanctions pénales requises à leur charge.
Conclusions de M. l’Avocat général GENICOT (avec renvoi à Cass., 11 mai 2020, n° S.19.0012.N rendu en matière de rémunération de base en accidents du travail).
La règle qui imposerait de calculer les indemnités de préavis et de protection contre le licenciement sur la rémunération correspondant aux prestations réduites n’est compatible avec l’article 157 du Traité, lorsqu’un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes choisissent de bénéficier d’une réduction des prestations de travail pour prendre soin de leur enfant jusqu’à l’âge de huit ans, qu’à la condition que la différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins ainsi engendrée soit susceptible d’être justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe (avec renvoi à C.J.U.E., 8 mai 2019, Aff. C-486/18, RE c/ PRAXAIR MRC SAS).
Il ressort des articles 23 et 25, § 2, de la loi genre que l’indemnité forfaitaire de l’article 23, § 2, 2°, est applicable uniquement lorsque la procédure est dirigée contre l’employeur. Dans tous les autres cas, c’est l’indemnité de l’article 23, § 2, 1°, qui s’applique.
Il ressort manifestement de l’interprétation des articles 5, 13 et 14, § 1er, b), de la Directive n° 2008/115/CE (Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier) faite par la Cour de Justice de l’Union européenne dans l’arrêt ABDIDA, que, afin de garantir que le grief de violation de l’article 5 soit examiné avant l’exécution de la décision de retour, la législation nationale doit conférer un caractère suspensif au recours du ressortissant de pays tiers atteint d’une grave maladie dès que l’exécution de la décision lui ordonnant de quitter le territoire est susceptible de l’exposer au risque sérieux de détérioration grave et irréversible de son état de santé et que ce caractère suspensif ne dépend pas de la démonstration que l’exécution de la décision exposerait effectivement l’étranger à ce risque.
Il s’ensuit que l’article 57, § 2, alinéas 1er, 1° et 2°, et 2, de la loi du 8 juillet 1976, interprété conformément aux articles 5, 13 et 14, § 1er, b), de la Directive n° 2008/115/CE, ne s’applique pas au ressortissant d’un pays tiers à l’Union européenne atteint d’une grave maladie qui exerce un recours contre une décision lui ordonnant de quitter le territoire, lorsque l’exécution de cette décision est susceptible de l’exposer à un risque sérieux de détérioration grave et irréversible de son état de santé.
Il ressort des articles 10 et 11 de la C.E.D.H. que le droit de grève ou le droit de manifestation ne sont pas des droits absolus. L’exercice de ces droits est susceptible de limitations, à la condition que celles-ci répondent de manière effective à des objectifs d’intérêt général et ne soient pas susceptibles de constituer une ingérence disproportionnée et inadmissible qui affecterait dans leur substance les droits protégés. Il appartient au juge d’exercer son pouvoir d’appréciation souverain sur la base des faits qu’il établit.
Vu les termes de l’article 124 de la loi du 13 juin 2005 relative aux communications téléphoniques (énumérant les actes interdits aux tiers à une communication téléphonique, s’il n’y est pas autorisé par toutes les personnes directement ou indirectement concernées), l’on ne peut, dans l’examen de courriels échangés entre un travailleur (licencié pour motif grave) et un tiers, considérer que, dans la mesure où ils ont été adressés et reçus à partir de matériel appartenant à l’employeur, mis à disposition du travailleur et destiné à un usage professionnel, leur contenu est purement professionnel et qu’ils ne contiennent pas d’informations de nature privée. L’arrêt qui considère qu’il est sans intérêt de savoir si le travailleur a ou non donné son accord pour que la société employeur accède à ses courriels dès lors que, s’agissant de courriels sans rapport avec sa vie privée, la prise de connaissance de ceux-ci ne peut enfreindre l’article 124 de la loi du 13 juin 2005, viole cette disposition légale.
L’article 12, § 2, 3°, de la loi du 10 mai 2007 dispose que, en matière de régimes complémentaires de sécurité sociale (et par dérogation à l’article 8 et sans préjudice des autres dispositions du Titre II relatif à la justification des distinctions), une distinction directe fondée sur l’âge ne constitue pas une discrimination pourvu que cela ne se traduise pas par une discrimination fondée sur le sexe en cas de fixation d’âges différents d’admission ou d’admissibilité aux prestations de pension ou d’invalidité, pour des travailleurs, pour des groupes ou catégories de travailleurs ou pour des indépendants.
Il ressort de ce texte ainsi que des travaux parlementaires que le législateur a entendu faire usage de la faculté contenue au point 6.2. de la Directive n° 2000/78/CE (selon lequel les États membres peuvent prévoir que ne constitue pas une discrimination fondée sur l’âge la fixation, pour les régimes professionnels de sécurité sociale, d’âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité, y compris la fixation, pour ces régimes, d’âges différents pour des travailleurs ou des groupes ou catégories de travailleurs et l’utilisation, dans le cadre de ces régimes, de critères d’âge dans les calculs actuariels, à condition que cela ne se traduise pas par des discriminations fondées sur le sexe).
En vertu de l’article 29, § 1, de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, le Centre pour l’Egalité des Chances (UNIA) peut ester en justice dans les litiges auxquels l’application de la loi donnerait lieu, à l’exception des litiges basés sur une discrimination fondée sur la langue.
Lorsque la victime de la discrimination est une personne physique ou une personne morale identifiée, l’article 31 dispose que l’action du Centre et des groupements d’intérêts ne sera recevable que s’ils prouvent qu’ils ont reçu l’accord de la victime. Il ressort des travaux préparatoires de la loi que cette condition de recevabilité n’est pas requise lorsque la discrimination concerne un nombre indéterminé de personnes.
Il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit à indemnisation du travailleur, qui est licencié en raison du non-respect d’un ordre ou d’une interdiction de l’employeur qui implique une discrimination qui n’est pas autorisée par les dispositions de la directive, ne peut être subordonné à la condition que la faute de l’employeur soit prouvée et qu’il n’existe aucune cause d’exonération prévue par le droit national applicable. (arrêt rendu après C.J.U.E., 14 mars 2017, Aff. C-157/15, ACHBITA et CENTRUM VOOR GELIJKHEID VAN KANSEN EN VOOR RACISMEBESTRIJDING c/ G4S SECURE SOLUTIONS N.V.).
Lorsque la victime d’une discrimination établie dans le cadre des relations de travail ou des régimes complémentaires de sécurité sociale réclame un montant forfaitaire au titre de réparation du préjudice matériel et moral subi et que l’employeur démontre que le traitement litigieux défavorable ou désavantageux aurait également été adopté en l’absence de discrimination, elle a droit à une indemnisation de trois mois de rémunération brute. La sanction de l’article 15 (nullité) ne s’applique pas s’agissant de déterminer le préjudice matériel dans une telle hypothèse.
(Décision commentée)
La perte d’une protection contre le licenciement constitue une condition de licenciement au sens de l’article 2 § 4 de la loi du 25 février 2003. Elle doit satisfaire à l’exigence d’égalité de traitement prévue par la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail. Dès lors qu’une clause d’une convention d’entreprise prévoit que plus l’ancienneté du travailleur est importante, plus tôt il entre dans la période où une protection spécifique contre le licenciement ne lui est plus applicable, c’est nécessairement le critère de l’âge qui modifie les conditions de licenciement.
(Décision commentée)
La Cour de cassation pose à la C.J.U.E. la question de savoir si l’article 2.2., a), de la Directive n° 2000/78/CE doit être interprété en ce sens que l’interdiction faite à une employée musulmane de porter le foulard au travail constitue ou non une discrimination directe lorsqu’existe chez l’employeur une interdiction générale adressée à l’ensemble du personnel de port de signes extérieurs de convictions politiques, philosophiques ou religieuses.
La tierce opposition peut être jugée irrecevable s’il ressort des éléments du dossier qu’il y a défaut d’intérêt dans le chef de celui qui la forme. Ainsi, d’un mandataire d’une organisation syndicale qui introduit celle-ci alors que les mesures ordonnées l’ont été pour la durée du conflit, que celui-ci s’est terminé suite à la conclusion d’un accord social quelques jours plus tard et que le demandeur sur tierce opposition ne peut faire valoir que des conséquences préjudiciables ou des astreintes étaient susceptibles d’intervenir, le concernant, au moment où il a introduit sa procédure (décision rendue sur l’article 1122, al. 1er C.J.).
Il y a absolue nécessité au sens de l’article 584, al. 3 C.J. s’il se présente des circonstances exceptionnelles exigeant que le droit à la contradiction ne soit pas mis en œuvre dans la toute première phase de la procédure. Il n’y a pas absolue nécessité dès lors que le juge a constaté que les mesures demandées auraient pu être imposées à l’issue de débats contradictoires, que certains des participants étaient connus et que, en l’espèce, un ’effet de surprise’ n’était pas nécessaire vu la nature des mesures demandées.
(Décision commentée)
Assurance de groupe - égalité hommes-femmes
Action introduite dans le délai de prescription légal - règle de prescription respectée - pas d’application dans cette mesure des principes du dépassement du délai raisonnable
Licéité de l’occupation d’entreprise intervenue en réaction à la fermeture décidée par l’employeur d’une unité de production, eu égard au fait que ledit employeur - qui a décidé de l’arrêt des activités et cette fermeture sans information ni consultation préalable des institutions représentatives du personnel - a interdit aux salariés l’accès à leur lieu de travail en leur notifiant sans autre explication leur mise en disponibilité.Par ailleurs, si les salariés ont occupé les locaux, aucun fait de dégradation du matériel, de violence, séquestration ou autre comportement dangereux à l’égard des membres du personnel se trouvant sur le site n’est établi.
Le président siégeant en référé est tenu, avant d’imposer une mesure provisoire au sens de l’article 584, al. 1er C.J. d’examiner si la demande présente encore un caractère urgent au moment de sa décision. Le juge d’appel est tenu d’examiner la légalité des mesures de référé dont appel. Il ne peut considérer qu’il n’est plus tenu d’examiner la légalité des mesures de référé assorties d’une contrainte ordonnées par le premier juge dès lors que ces mesures ont été entre-temps exécutées et que la demande n’a plus d’objet.
Le juge des référés peut examiner le droit des parties. Pourvu qu’il n’applique pas déraisonnablement les règles de droit ou refuse déraisonnablement d’appliquer celles-ci dans son raisonnement, le juge des référés constate souverainement, dans une première appréciation, s’il existe une atteinte illicite apparente justifiant la prononciation d’une mesure. L’appréciation provisoire du juge d’appel selon laquelle les travailleurs bénéficient d’un droit de grève dans les limites de critères acceptés dans la vie sociale n’est pas déraisonnable, le juge ayant en l’espèce considéré que la menace d’un dommage n’était pas suffisamment établie.
Aucune disposition légale n’interdit de participer à une grève non reconnue.
(Décision commentée)
L’on ne peut déterminer dans la jurisprudence de la C.J.U.E. rendue en matière de handicap si l’obligation de prévoir des aménagements raisonnables emporte celle d’affecter une personne qui, en raison de son handicap, n’est plus capable de remplir les fonctions essentielles du poste concerné à un autre poste dans l’entreprise pour lequel elle dispose des compétences, des capacités et des disponibilités requises lorsqu’une telle obligation ne constitue pas pour l’employeur une charge disproportionnée. La Cour de Justice est dès lors interrogée sur cette question.
Loi du 19 août 1948 – réquisition de travailleurs décidée par une autorité publique : s’agissant du risque de préjudice causé par l’atteinte au droit de grève, dès lors que la réquisition des requérants est insuffisamment motivée, la justification de l’atteinte portée au droit de grève n’apparaît pas. Les requérants sont donc en droit de la considérer comme une restriction illégale au droit de grève. C’est donc à juste titre qu’ils se déclarent exposés, de par cette restriction irrégulière à l’exercice de ce droit, à un risque de préjudice grave difficilement réparable.
Art. 6 Charte sociale européenne et art. 8D du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels – fonctionnaires – conditions de l’exercice abusif du droit
Constituent des faits permettant de présumer l’existence d’une discrimination une incapacité de travail depuis quelques jours au moment de la prise de décision, la notification du licenciement par message quelques minutes après que l’intéressée avait informé sa responsable de la prolongation de l’incapacité, le motif futile donné à la mesure (prétendue arrivée tardive de cinq minutes) et le refus de l’employeur de payer le salaire garanti alors que l’incapacité était dûment justifiée et qu’un certificat médical avait été remis.
La désorganisation doit être prouvée, l’employeur devant établir pièces à l’appui que l’absence d’une travailleuse, en l’espèce pendant six jours, engendrait une désorganisation telle au sein de la société qu’il fallait y mettre immédiatement un terme. La cour ajoute que le contexte de pandémie est à lui seul insuffisant pour démontrer l’importance de la désorganisation vantée.
Ni la loi du 19 mars 1991 ni la loi anti-discrimination n’excluent le cumul des indemnités qu’elles prévoient. En règle, dès lors que le cumul n’est pas expressément exclu, il est autorisé, sauf à considérer la finalité des indemnités et le dommage couvert. La cour renvoie notamment à l’article 16 de la loi du 19 mars 1991 et aux arrêts de la Cour de cassation du 3 décembre 2012 (S.11.0014.F) et 20 février 2012 (S.10.0048.F).
Dès lors que sont présentés différents faits de nature à présumer l’existence d’une discrimination sur la base de la conviction syndicale (licenciement – intervenu avec paiement de l’indemnité spéciale - ne respectant pas les procédures légales, avertissements adressés pour des faits relatifs à l’exercice de sa mission, …), la présomption de discrimination peut être retenue. Il appartient dès lors à la société d’établir que ce licenciement n’a pas pour cause cette conviction syndicale mais qu’il est exclusivement basé sur d’autres motifs. En l’espèce, aucun motif autre n’est établi. Le licenciement est discriminatoire et l’indemnité légale est due.
Constituent des faits laissant présumer une discrimination directe sur la base de l’état de santé actuel la circonstance selon laquelle le licenciement est intervenu pendant une période d’incapacité de travail et au moment où un nouveau certificat médical a été remis, les mentions du C4 ainsi que les explications données par l’employeur.
En l’espèce, la cour conclut que le licenciement trouve son origine exclusive dans l’état de santé de la travailleuse dès lors que l’employeur tenait cette situation d’incapacité pour responsable du retard dans l’exécution des ordres transmis et craignait la prolongation de ce « dysfonctionnement » dans le futur compte tenu de l’indisponibilité de l’intéressée pour une longue période.
Dès lors que les faits présumant la discrimination sont établis (ensemble d’événements et de décisions intervenues sur le plan professionnel suite à un grave accident de la vie privée de l’employé), il y a lieu pour l’employeur d’apporter la preuve des motifs qu’il invoque à l’appui du licenciement. Le renversement de la présomption légale suppose la preuve que le licenciement est étranger à l’état de santé (l’intéressé n’étant, en l’espèce, pas retombé en incapacité de travail après sa reprise du travail faisant suite à ses absences pour les traitements chirurgicaux nécessités par l’accident).
Les éléments invoqués en l’espèce par l’employeur (absence de participation active à l’élaboration de la stratégie commerciale ainsi que divergences de vue avec l’administratrice déléguée) sont rejetés, au vu des éléments du dossier. De même la cour rejette que le cas de l’intéressé (qui assumait une fonction de direction) soit comparé avec celui d’autres membres du personnel.
(Décision commentée)
Dès lors que plusieurs ex-employés de l’entreprise, exerçant une fonction identique ou similaire à celle de la travailleuse, ont souffert soit de burn-out, soit de troubles de stress ou de gestion du stress et ont été licenciés pendant leur incapacité de travail, le constat s’impose que règne manifestement en son sein une récurrence de traitement défavorable de ses travailleurs en raison de leur état de santé ; dès lors, en outre, qu’il ne pouvait être ignoré que la cause de l’incapacité de travail de l’intéressée était liée à un stress au travail vu qu’elle avait fait une crise d’hyperventilation sur son lieu de travail et avait dû être emmenée à l’hôpital (événement qui a d’ailleurs été reconnu comme accident du travail), une présomption de discrimination est acquise au bénéfice de celle-ci. Il appartient donc à l’employeur d’établir que, malgré cette apparence, son licenciement n’est pas discriminatoire, à défaut de quoi il peut en être déduit que la seule explication du licenciement est l’état de santé de la travailleuse, et plus précisément, sa fragilité en cas de stress ainsi que sa difficulté à faire face à une charge de travail importante, démontrée par son hospitalisation en urgence suite à une crise de stress intervenue lors d’un entretien avec sa supérieure.
(Décision commentée)
L’information donnée au travailleur par l’Inspection des lois sociales concernant l’existence d’une Dimona de sortie ne peut, à elle seule, être considérée comme la manifestation claire et sans ambiguïté de la volonté de rompre le contrat, laquelle doit être extériorisée par une notification adressée individuellement au travailleur, portée à sa connaissance de manière non équivoque. On n’aperçoit pas non plus en quoi une Dimona-out incorrectement enregistrée par le secrétariat social, sans que cela soit précédé d’un licenciement, pourrait constituer une présomption de discrimination, ce d’autant que le licenciement finalement intervenu n’est pas lié à l’état de santé du travailleur, mais à son comportement durant son incapacité de travail (i.e., absence de justification malgré mises en demeure).
Pour représenter un moment charnière dans une carrière professionnelle, le fait d’atteindre l’âge légal de la retraite n’en constitue pas moins une opportunité pour favoriser la mise au travail de jeunes, ce qui représente un motif légitime et approprié de fin de contrat dans le chef d’un travailleur atteignant tel âge.
(Décision commentée)
Un test de situation effectué pour établir la présomption de discrimination doit respecter une méthodologie rigoureuse. D’une part, la mise en œuvre d’un tel test impose d’assurer une pleine comparabilité des profils, étant que le profil des candidats doit être équivalent pour ce qui est des éléments pertinents pour la sélection à opérer et différer uniquement du point de vue du critère de discrimination étudié. D’autre part, la différence de traitement doit en principe être répétée pour que le test soit probant. Il ne peut en effet être exclu que le traitement moins favorable reçu par le candidat à l’embauche d’origine étrangère soit le fruit du hasard. Un test unique révélant un traitement inégalitaire pourrait toutefois contribuer à établir une présomption de discrimination s’il est combiné à d’autres éléments rendant le comportement du défendeur suspect.
(Décision commentée)
Le non-recrutement d’une candidate à un emploi proposé par la Ville de Bruxelles n’est pas une mesure discriminatoire eu égard à la volonté exprimée par celle-ci de ne pas se conformer aux règles mises en œuvre par la Ville aux fins d’assurer le respect du principe de neutralité des pouvoirs publics, s’agissant d’un principe constitutionnel.
(Décision commentée)
L’article 14 de la loi du 28 avril 2003 relative aux pensions complémentaires et au régime fiscal de celles-ci et de certains avantages complémentaires en matière de sécurité sociale interdit toute forme de discrimination. Il s’agit d’une disposition « ouverte », étant qu’elle s’applique dès lors que le litige ne porte pas sur une question de discrimination liée à un critère protégé par les lois anti-discrimination mais sur un critère non spécifiquement protégé, à savoir celui de la catégorie de personnel.
Un critère d’appréciation de la catégorie de personnel peut être celui des élections sociales, et ce même si le règlement de pension ne s’y réfère pas, la cour renvoyant en l’espèce à l’article 4, 4°, de la loi du 4 décembre 2017, qui définit le personnel de direction).
Échoue à apporter la preuve des motifs organisationnels qu’il avance l’employeur qui, alors qu’il dispose d’indications de prolongation de cette incapacité pour une plus longue période qu’initialement prévue – ce qui lui permettait de rechercher une solution pour pallier les effets de l’absence de l’intéressée –, licencie une travailleuse un mois à peine après le début de son incapacité, sans déposer de preuve des démarches effectuées en vue de pourvoir à son remplacement ou expliquer les raisons pour lesquelles la solution trouvée pour certains jours d’absence n’a pu être réutilisée pour les autres jours.
Son licenciement étant intervenu alors que l’employée était toujours dans la période de protection fixée à l’article 40 de la loi sur le travail, la cour du travail retient à la fois le non-respect de l’article 40 et une double discrimination (genre et état de santé). Elle autorise le cumul des trois indemnités, considérant qu’aucune interdiction n’existe dans les textes et que le dommage réparé est distinct.
(Décision commentée)
Son licenciement étant intervenu alors que l’employée était toujours dans la période de protection fixée à l’article 40 de la loi sur le travail, la cour du travail retient à la fois le non-respect de l’article 40 et une double discrimination (genre et état de santé). Elle autorise le cumul des trois indemnités, considérant qu’aucune interdiction n’existe dans les textes et que le dommage réparé est distinct.
N’est pas discriminatoire le licenciement consécutif à une rupture de confiance liée à l’attitude du travailleur qui n’a pas respecté les consignes de sa hiérarchie et a refusé de transmettre les documents que celle-ci lui réclamait. Cette motivation est étrangère à son état de santé.
Dans l’absolu, l’impératif d’une organisation efficace du travail peut constituer un objectif légitime au sens des articles 7 ou 9 de la loi. Encore faut-il cependant en ce cas que le licenciement se présente comme un moyen approprié et nécessaire pour réaliser cet objectif. En l’espèce, la Cour constate que, ayant été atteint avant la date choisie pour licencier, cet objectif n’a pu réellement motiver la décision querellée, qui est dès lors constitutive d’une discrimination directe fondée sur ce critère protégé qu’est l’état de santé. Et d’estimer que la même conclusion s’imposerait si cet impératif organisationnel avait encore subsisté à ce moment, l’employeur n’expliquant ni en quoi il consistait réellement, ni en quoi le licenciement était un moyen approprié et nécessaire pour l’atteindre.
Dès lors qu’elle répare forfaitairement le préjudice causé par le fait que le licenciement est constitutif d’une discrimination, l’indemnité due en raison du caractère discriminatoire du licenciement constitue bel et bien une indemnité due par l’employeur « à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la CCT n° 109. Elle ne peut, en outre, être assimilée à aucune des quatre indemnités pour lesquelles le cumul serait permis en application de ce même article. Il s’ensuit que l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable doit s’effacer devant celle que le travailleur obtient sur la base de la loi du 10 mai 2007.
Constituent des faits permettant de présumer l’existence d’une discrimination le licenciement intervenu pendant une période d’incapacité de travail, l’existence de plusieurs périodes d’incapacité précédentes, l’utilisation par l’employeur du « facteur Bradford », les explications données avant le licenciement quant à la nécessité de réorganisation (maison de repos) suite aux nombreuses absences,….
L’employeur (C.P.A.S.) peut dès lors démontrer soit l’absence de distinction directe soit que cette distinction est objectivement justifiée par un but légitime et que les moyens de réaliser ce but sont appropriés et nécessaires. La distinction directe étant reconnue, la cour retient comme justification objective (but légitime) la désorganisation de la maison de repos et la volonté du C.P.A.S. d’y mettre fin vu sa mission de service public. Elle constate que le but du C.P.A.S. (mettre fin à la désorganisation) ne pouvait pas être atteint par une mesure moins radicale d’autant que la maison de repos était fortement touchée par la pandémie de COVID-19.
La volonté délibérée de ne pas mettre en place les aménagements raisonnables constitue de la discrimination. L’indemnité forfaitaire de 6 mois est dès lors due, s’il n’est pas démontré que le traitement défavorable aurait été adopté en l’absence de discrimination.
La cour ayant en l’espèce relevé la volonté délibérée de l’autorité publique employeur de ne pas mettre en place les aménagements raisonnables, et ce alors que diverses obligations lui avaient été rappelées, elle condamne à une astreinte vu la tentation pour celle-ci de ne pas exécuter la décision de justice.
Licencier quelqu’un pour obstacle au contrôle médical n’est pas lié à son incapacité de travail comme telle, mais à sa prétendue volonté de se soustraire à ses obligations légales.
L’exigence de griefs défendables au sens de la jurisprudence ABDIDA ne requiert pas que l’étranger présente des « éléments médicaux percutants » et la circonstance que les griefs invoqués n’ont finalement pas été retenus ne signifie pas qu’ils n’étaient pas défendables. Compte tenu de la pathologie et au vu des moyens invoqués en l’espèce dans son recours en annulation, l’intéressé faisait valoir devant le CCE des griefs défendables de nature à établir, moyennant un examen approfondi de ces griefs par le juge administratif, que l’exécution de la décision de retour était susceptible de l’exposer à un risque sérieux de détérioration grave et irréversible de son état de santé. Il y a dès lors lieu de reconnaître un effet suspensif au recours introduit pour la période comprise entre la demande d’aide sociale et la date de l’arrêt du CCE.
(Décision commentée)
Si la réduction du temps de travail peut être un aménagement raisonnable et en admettant que l’employé, eu égard à son état de santé, puisse être considéré comme personne handicapée, l’octroi d’un revenu garanti ne peut être admis à ce titre, cette mesure n’ayant pas pour effet de permettre d’accéder à un emploi ou de progresser dans la carrière professionnelle. Exiger d’un employeur qu’il doive prendre en charge lui-même le risque du manque de revenu prévu dans une assurance de groupe au motif que le travailleur, de par son état de santé, ne pourrait y prétendre apparaît tout à fait disproportionné. La discrimination n’est pas établie.
(Décision commentée)
Depuis une loi du 5 mai 2014, qui a modifié la loi du 23 avril 2003 (articles 14/1 à 14/4) relative aux pensions complémentaires et au régime fiscal de celles-ci et de certains avantages complémentaires en matière de sécurité sociale, le droit d’agir en justice en vue de faire cesser une discrimination dans les engagements de pension complémentaire sur la base du critère ouvrier/employé est exclu alors que les travailleurs qui ont accédé à la pension avant la date d’entrée en vigueur (19 mai 2014) avaient la possibilité de dénoncer ces différences de traitement. La cour a retenu la question posée par le travailleur, à destination de la Cour constitutionnelle, ainsi que celle relative à l’impossibilité pour le travailleur qui bénéficie d’un engagement de pension comportant une discrimination fondée sur la distinction ouvrier/employé de contester la discrimination alors que cette contestation serait possible à propos du même engagement de pension complémentaire en cas de discrimination sur la base d’un autre critère.
Un agent (d’un C.P.A.S. en l’occurrence) souffrant depuis de longues années d’une maladie grave doit être considéré comme atteint d’un handicap au sens de la législation anti- discrimination. Le retrait (après plusieurs années) de son indemnité de disponibilité, au motif qu’il a été autorisé à travailler à temps partiel et que celle-ci ne peut être allouée qu’en cas de mise en disponibilité totale est discriminatoire. La cour renvoie à l’arrêt de la Cour de justice du 26 janvier 2021 (Aff. n° C-16/19, EU:C:2021:64), qui a relevé que le principe de l’égalité de traitement consacré par la directive 2000/78 a vocation à protéger un travailleur présentant un handicap au sens de cette directive contre toute discrimination fondée sur celui-ci non seulement par rapport aux travailleurs ne présentant pas de handicap mais également par rapport aux autres travailleurs présentant un handicap.
Aussi la cour du travail conclut-t-elle que la situation de l’intéressé est comparable à celle d’un agent atteint d’un handicap qui ne fournit aucune prestation de travail. La distinction entre incapacité totale ou partielle n’est pas pertinente dans l’examen du critère de la « situation comparable » (article 4, 6°, de la loi anti-discrimination). Etant privé de son indemnité de disponibilité alors que les autres collègues ne le sont pas, il est victime d’une discrimination directe au regard de la situation des collègues en incapacité totale. La cour conclut à son droit à être indemnisé du dommage matériel découlant de celle-ci, étant le traitement de disponibilité non perçu.
(Décision commentée)
Dès lors que l’intention de rompre le contrat de travail a été exprimée avant le début de l’incapacité de travail, la seule coïncidence dans le temps entre celle-ci et le licenciement ne suffit pas à permettre de présumer que la décision de rompre était fondée, en tout ou en partie, sur l’état de santé du travailleur.
Remarque : dans le même sens, voy. aussi C. trav. Bruxelles, 13 juillet 2023, R.G. 2020/AB/337.
+ lien vers l’arrêt suivant qui se trouvera sous Droits fondamentaux > Egalité et non-discrimination > Relations de travail > Mécanisme probatoire
(Décision commentée)
La règle de preuve inscrite à l’article 28, § 1er, de la loi doit, pour être elle-même conforme au principe d’égalité, être interprétée en ce sens qu’il ne saurait être question d’un renversement de la charge de la preuve qu’après que la victime aura prouvé des faits, suffisamment graves et pertinents, qui laissent présumer l’existence d’une discrimination. Par conséquent, elle ne peut se borner à prouver qu’elle a fait l’objet d’un traitement qui lui est défavorable, mais doit démontrer la commission d’actes ou l’existence d’instructions qui pourraient, de prime abord, être discriminatoires, et ce en avançant des faits semblant indiquer que ce traitement défavorable a été dicté par des motifs illicites.
Le fondement théorique de la suspension des intérêts est que les intérêts judiciaires de retard alloués en exécution de l’article 1153 du Code judiciaire ont pour objet de réparer le dommage qui découle du retard dans l’exécution de dettes de sommes. Le créancier a l’obligation de prendre avec loyauté les mesures raisonnables qui permettent de modérer ou de limiter son préjudice. À défaut il commet une faute, qui le prive du droit à la réparation du préjudice que l’exécution de cette obligation de restreindre le dommage aurait évité ou empêché.
Le demandeur en justice a l’obligation de prendre avec loyauté les mesures raisonnables qui permettraient de mettre l’affaire en état d’être jugée. En l’espèce, s’agissant de vérifier si l’O.N.S.S. a traité le dossier avec une rapidité raisonnable durant la phase d’enquête, la cour note qu’il y a un délai de presque trois ans pour réaliser deux auditions et le rapport qui en découle, ce qui est parfaitement déraisonnable, un délai de maximum de six mois ayant du suffire. La procédure ayant été déraisonnablement étendue pendant une période déterminée, la suspension des intérêts est accordée pendant cette période.
Le Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique dispose d’une immunité de juridiction en vertu d’un Accord de siège signé le 26 avril 1993 et approuvé par la loi du 15 janvier 1998. L’Accord de siège ne limite pas cette immunité de juridiction à certains secteurs. Elle peut dès lors être invoquée, quand bien même l’action concerne une action engagée par un ancien travailleur (interprète).
L’âge atteint par le travailleur au moment de son licenciement ne suffit, à lui seul, pas à faire présumer qu’il constitue le motif de la décision prise.
La présomption de discrimination n’est pas levée lorsque le licenciement est également justifié par d’autres motifs, étrangers à l’un des critères protégés. Cette situation se résout, en application de l’article 18 de la loi, par une limitation de l’indemnité forfaitaire prévue au bénéfice de la victime de la discrimination, laquelle n’équivaut, alors, plus à six mois de rémunération brute, mais, dans la mesure où l’employeur a démontré que le traitement litigieux défavorable ou désavantageux aurait également été adopté en l’absence de discrimination, est limitée à un montant correspondant à trois mois de celle-ci.
Postuler que l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable peut être cumulée avec l’indemnité pour discrimination va à l’encontre du texte, clair, de l’article 9 de la CCT n° 109.
Une société est en droit de se prémunir de tout conflit d’intérêt d’un membre de son personnel et de divulgation de données. Cette volonté n’est pas nécessairement liée à la supposition d’un comportement illicite dans le chef du travailleur du fait de son lien de parenté, mais constitue une mesure de protection du fait de la proximité existant avec quelqu’un qui occupe une fonction centrale au sein d’une entreprise concurrente à qui certaines informations pourraient être dévoilées au cours d’une conversation privée. La cour constate également que la société n’aurait pas évoqué ce lien de parenté si la sœur de ce travailleur n’avait pas travaillé pour la concurrence. (Réforme Trib. trav. Liège (div. Liège), 22 octobre 2021, R.G. 20/1.810/A).
Dès lors que l’employée sollicite l’obtention d’une seule indemnité égale à 6 mois de rémunération tant sur la base de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail que sur celle de l’article 23 de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre les discriminations entre les femmes et les hommes et qu’il est constaté que la société a licencié celle-ci dans le délai de protection de la femme enceinte prévu par l’article 40 de la loi du 16 mars 1971, la cour estime qu’il convient d’apprécier par priorité la demande d’indemnité sous l’angle de cette loi, celle-ci protégeant spécifiquement la femme enceinte contre le risque de licenciement.
La société a ainsi la charge d’établir qu’elle a licencié pour des motifs totalement étrangers à la grossesse.
Il n’existe pas de règles de preuve relatives au refus des aménagements raisonnables, ce qui permet de conclure que le simple refus suffit à considérer la discrimination établie, pour autant que les mesures n’apparaissent pas disproportionnées.
Un employeur qui soutient que les prestations du travailleur ne répondaient pas à ses attentes et qu’il avait l’intention de le licencier pour ce motif, mais qui procède à son licenciement dès réception de son certificat médical – ce qui démontre une décision prise dans la précipitation et partiellement en lien avec l’état de santé de l’intéressé – s’expose à la sanction de l’article 18 de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination s’il ne parvient pas à établir le but légitime qu’il prétend être le sien et que les moyens de réaliser celui-ci étaient appropriés et nécessaires.
En matière de discrimination sur la base de l’âge, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice, il n’y a pas lieu d’exiger que la réglementation contestée soit assortie d’une justification préétablie. La Cour a en effet jugé à plusieurs reprises et de façon constante qu’à défaut de précision de la réglementation en cause quant à l’objectif poursuivi, le juge peut tenir compte d’éléments tirés du contexte général de la mesure concernée pour apprécier sa légitimité et le caractère approprié et nécessaire des moyens mis en œuvre.
Le souci d’optimiser la gestion du corps médical d’un hôpital et d’assurer une certaine prévisibilité dans le renouvellement des cadres par la fixation d’une limite d’âge correspond parfaitement à l’objectif qui a conduit le législateur à imposer aux hôpitaux l’obligation d’adopter une réglementation générale réglant le statut juridique des médecins hospitaliers et déterminant les circonstances de cessation de la relation de travail.
Lorsqu’une personne qui s’estime victime d’une discrimination invoque devant la juridiction compétente des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur l’un des critères protégés, dont l’état de santé actuel ou futur, il incombe au défendeur, en l’occurrence l’employeur, de prouver qu’il n’y a pas eu de discrimination. Lorsque les conditions légales pour l’inversion de la charge de la preuve ne semblent pas réunies, cela implique que le travailleur doit prouver la discrimination alléguée par application des règles du droit commun relatives à la charge de la preuve. Avancer simplement que l’employeur a commis une infraction ne suffit pas. La cour constate en l’espèce que la chronologie des faits permet de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur l’un des critères protégés, étant l’état de santé actuel ou futur.
La circonstance qu’en vertu de l’article 38, §§ 1er et 2, L.C.T., un congé puisse être donné par l’employeur pendant la suspension du contrat de travail visée à l’article 31, § 1er (l’impossibilité pour le travailleur de fournir son travail par suite de maladie ou d’accident suspend l’exécution du contrat) ne l’autorise pas pour autant à licencier le travailleur en raison de son état de santé actuel ou futur en contravention avec les articles 4, 4°, et 14 de la loi du 10 mai 2007.
Le simple fait que la société, qui avait procédé au licenciement du travailleur plus d’un mois avant la déclaration de son incapacité de travail, ait, le lendemain du jour où elle a été avisée de celle-ci, décidé, sans raison apparente, de mettre fin au contrat avec effet immédiat et moyennant paiement d’une indemnité couvrant le préavis restant à courir, laisse supposer prima facie l’existence d’une discrimination directe sur la base de l’état de santé actuel ou futur de l’intéressé, ce dont il lui revient d’apporter la preuve contraire en démontrant que cette distinction reposait sur un but légitime et que la mesure adoptée pour y arriver était appropriée et nécessaire, ce qu’elle échoue à faire.
(Décision commentée)
En imposant que le paiement intervienne sur la base d’une décision judiciaire ou d’un acte notarié, ou sur la base d’un acte sous seing privé déposé au greffe du tribunal en cas de procédure de divorce ou de séparation de corps et de biens par consentement mutuel, l’article 225, § 1er, 5°, de l’arrêté royal du 3 juillet 1996 poursuit un objectif légitime, soit s’assurer d’un contrôle « judiciaire » de l’obligation au paiement d’une pension alimentaire invoquée. S’il est certain qu’une telle officialisation de l’obligation alimentaire ne constitue pas une garantie absolue contre d’éventuelles fraudes (une telle assurance absolue étant de toute façon illusoire), elle contribue assurément à atteindre l’objectif de réduction du risque de mise en œuvre de systèmes fallacieux. En ce sens, la mesure est pertinente par rapport à l’objectif poursuivi. Le critère d’objectivité est également rempli puisque les deux catégories d’assurés sociaux sont distinguées sur la base d’un critère objectif : le paiement de la contribution alimentaire intervient ou non sur la base d’une décision judiciaire ou d’un acte notarié, ou sur la base d’un acte sous seing privé déposé au greffe. La mesure répond enfin à l’exigence de proportionnalité puisqu’elle permet aux parties d’opter pour une mesure alternative à l’introduction d’une procédure judiciaire (acte notarié ou acte sous seing privé). Elle ne revêt donc pas de caractère discriminatoire, de sorte qu’elle n’a pas à être écartée sur pied de l’article 159 de la Constitution.
C’est également à tort qu’il serait soutenu qu’il existerait une différence de traitement entre le bénéficiaire qui paie une pension alimentaire (art. 225, § 1er, 5°) et celui qui cohabite avec enfant à charge (id., § 1er, 3°). Dans les deux cas, aucune condition d’âge n’est prévue. Au contraire, l’article 225, § 1er, 3°, renvoie effectivement à l’article 123 du même texte (qui définit les conditions à remplir pour pouvoir bénéficier de l’assurance soins de santé en tant que personne à charge d’un titulaire du droit et qui prévoit notamment que l’enfant doit être âgé de moins de 25 ans) mais en précisant expressément que ce renvoi intervient « exception faite de la condition d’âge prévue par cette dernière disposition ».
Même si des difficultés sont consécutives à l’absence pour longue durée d’un responsable pour cause d’incapacité de travail, ceci n’implique pas nécessairement que le licenciement ne soit pas discriminatoire, l’employeur restant en l’espèce en défaut d’établir que lesdites difficultés devaient entraîner le licenciement.
Subordonner le droit à l’indemnité forfaitaire visée à l’article 23, § 2, 2°, de la loi genre (avant insertion, dans cet article, d’un § 3 réglant la question des possibles cumuls) à la preuve que cette indemnité couvrirait un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité de protection déjà accordée en application de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971 revient à imposer à la victime une condition que la loi ne prévoit pas.
De plus, une telle solution prive ces dispositions d’une part de leur effet utile en négligeant la finalité dissuasive qui les sous-tend. Surabondamment et quand bien même il faudrait considérer que la travailleuse doit apporter la preuve de dommages distincts, quod non, on ne peut perdre de vue que les dommages couverts par les indemnités en cause diffèrent au moins partiellement sous l’angle moral, ce qui en soi devrait suffire pour autoriser le cumul. La violation de l’article 40 précité et celle de la loi du 10 mai 2007 ont certes toutes deux entraîné le licenciement de l’intéressée, mais le préjudice moral subi suite au licenciement en raison de son état de grossesse, d’une part, et celui subi à la suite de la discrimination fondée sur le sexe, d’autre part, ne coïncident pas, s’agissant d’atteintes différentes à l’intégrité personnelle de la travailleuse. Le cumul des indemnités en cause est dès lors permis.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 26 avril 2022, R.G. 21/1.432/A (ci-dessous) dans la mesure où il estime que le licenciement du travailleur ne constituait pas une discrimination en lien avec son état de santé en considération du motif réel de ce licenciement (p.m. : la désinvolture dont il a fait preuve à l’égard des règles sanitaires en vigueur pour lutter contre la pandémie de COVID-19), mais le réforme en ce qu’il a débouté l’intéressé de sa demande d’indemnité pour licenciement abusif (et l’a condamné aux dépens).
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 13 novembre 2020, R.G. 19/361/A (commenté ci-dessus).
(Décision commentée)
Pour déterminer si les aménagements raisonnables donnent lieu à une charge disproportionnée, il convient de tenir compte, notamment, des coûts financiers qu’ils impliquent, de la taille et des ressources financières de l’organisation ou de l’entreprise ainsi que de la possibilité d’obtenir des fonds publics ou toute autre aide. En tout état de cause, la possibilité d’affecter une personne handicapée à un autre poste de travail n’existe qu’en présence d’au moins un poste vacant que le travailleur concerné est susceptible d’occuper. La réaffectation d’un travailleur handicapé ne doit cependant pas aboutir à priver un autre travailleur de son emploi ou forcer ce dernier à échanger son poste de travail. La réaffectation apparaît dès lors facilitée dans une entreprise de grande taille pour laquelle le nombre de postes disponibles est en principe plus étendu. Jouera également la plus ou moins grande polyvalence du travailleur.
Le travailleur qui se prétend victime d’une discrimination sur la base du handicap doit démontrer le caractère « durable », au moment de la décision de licencier, de la limitation physique qui l’affectait. En l’espèce, la recommandation du conseiller en prévention-médecin du travail d’une mutation à un poste où l’intéressé ne travaillerait pas en position à genoux ou accroupie ne valait que pour une courte période. La circonstance que son affection au genou ait par la suite perduré ne peut conduire à une qualification rétroactive de cette limitation en handicap.
L’adaptation ou la modification de la fonction ou encore l’offre d’un autre poste de travail dans une fonction différente du travailleur peuvent constituer un aménagement raisonnable.
L’adoption du critère protégé de l’ « état de santé actuel ou futur » par loi du 10.5.2007 se concilie parfaitement avec les dispositions de la loi du 3.7.1978. Les textes ne se contredisent pas, ils se complètent. Ainsi, la circonstance qu’en vertu de l’article 38, §§ 1 et 2, de la loi du 3.7.1978, un congé puisse être donné par l’employeur pendant la suspension de l’exécution du contrat visée à l’article 31, § 1er, ne l’autorise pas pour autant à licencier le travailleur en raison de son état de santé actuel ou futur en contravention avec les articles 4, 4°, et 14 de la loi du 10.5.2007. S’il procède au licenciement pendant cette période de suspension du contrat (ce qu’il est en droit de faire), mais que sa décision est motivée par l’état de santé actuel ou futur du travailleur qui a justifié cette suspension, l’employeur contreviendra assurément à la loi du 10.5.2007 et sera aussi tenu, en plus de l’indemnité de préavis, au paiement de l’indemnité visée à l’article 18 de ladite loi qui lui serait réclamée.
L’interdiction de discrimination englobe également l’hypothèse de la « discrimination supposée », c’est-à-dire la discrimination basée sur un critère protégé que l’auteur attribue à tort à la victime. La protection contre les discriminations profite ainsi autant à la personne caractérisée par le critère protégé qu’à celle qui ne l’est pas, mais dont l’auteur du traitement défavorable croit qu’elle l’est.
(Décision commentée)
L’objet de la revendication ayant manifestement un aspect pécuniaire lié à la réparation d’un dommage résultant d’une faute commise par l’employeur, le droit de revendiquer une indemnité pour discrimination au travail ne constitue pas un droit exclusivement attaché à la personne. Il peut donc être exercé par ses héritiers, ce même si la loi dispose expressément que le choix de la réparation appartient à la « victime », cette précision visant, si l’on se réfère aux travaux préparatoires de la loi, à exclure du bénéfice de l’indemnisation les groupements d’intérêts ou acteurs institutionnels disposant d’un droit d’action en la matière.
Le fait de reprocher, même à tort, à un travailleur de déposer un certificat de complaisance ne signifie pas qu’il lui est fait grief de présenter un problème de santé. C’est, au contraire, l’absence de problème de santé qui est pointée. Il ne saurait donc être considéré que son licenciement est intervenu en raison de son état de santé actuel ou futur.
(Décision commentée)
Un traitement défavorable fondé sur l’âge peut être justifié par des exigences professionnelles essentielles et déterminantes lorsque (i) une caractéristique déterminée, liée au critère protégé – en l’occurrence l’âge –, est essentielle et déterminante en raison de la nature des activités professionnelles spécifiques concernées ou du contexte dans lequel celles-ci sont exécutées et (ii) l’exigence repose sur un objectif légitime et est proportionnée par rapport à celui-ci.
Pour procéder au test de comparabilité, il faut prendre des catégories de personnes qui partagent le critère protégé (appartenance syndicale) et celles qui ne sont pas protégées (les autres travailleurs). Il faut comparer ces personnes avec d’autres personnes dans des situations similaires. Lorsqu’un délégué exerce ses mandats, il ne peut être comparé à un travailleur qui ne travaille plus car en incapacité, en congé de maternité, etc. L’exercice du mandat doit être assimilé à du travail effectif. Dès lors que des éléments sont produits présumant une discrimination fondée sur le critère protégé (délégué syndical qui exerce son mandat à temps plein), il faut vérifier si la mesure (absence de promotion) est raisonnable et proportionnée.
Peut prétendre à l’indemnité forfaitaire due à titre de réparation du préjudice subi à la suite de son licenciement la personne démontrant l’existence de faits permettant de présumer l’existence d’une discrimination basée sur son état de santé, soit, en l’espèce, que le non-renouvellement de son CDD est au moins partiellement fondé sur ses absences pour cause de maladie, sa difficulté à assumer un temps plein pour raisons de santé et sur le fait qu’elle était en incapacité de travail au moment de ce non-renouvellement.
Même si le fait que plusieurs travailleuses aient vécu leur grossesse de manière parfaitement respectueuse au sein de la société ne permet pas d’exclure la possibilité de discrimination à l’égard de l’une d’entre elles en raison de son état, elle démontre à tout le moins que la culture de l’entreprise n’est pas structurellement problématique à cet égard et que, malgré une chronologie interpellante (licenciement intervenu dans les premiers mois de la grossesse), on peut porter crédit au motif avancé par la société, étant le rendement insuffisant de l’intéressée dans une conjoncture économique difficile après plusieurs mois de lock down.
La requête unilatérale introduite par un employeur sollicitant des mesures enjoignant à un ex-employé de remettre à des experts à désigner tous ses ordinateurs et supports informatiques, de leur donner accès, en fournissant les logins et mots de passe nécessaires, à tous les services cloud dont il est propriétaire ou qui sont exclusivement utilisés par lui, ainsi que de permettre à ces experts d’emporter tous ces ordinateurs et supports informatiques dans leur bureau ou d’en analyser le contenu à son domicile, porte atteinte d’une manière inadmissible aux droits fondamentaux de l’intéressé. Pareille mesure s’apparente à une perquisition privée et porte également atteinte au principe de l’inviolabilité du domicile ainsi qu’au droit fondamental au respect de la vie privée.
Dès lors que ce licenciement est intervenu dans le cadre d’une C.C.T. d’entreprise prévoyant un processus de reclassement dont l’unique motif d’enclenchement est la disparition de la fonction exercée et que, à son terme, c’est le fait de ne pas avoir retrouvé de fonction permanente qui justifie le licenciement, la circonstance qu’un travailleur soit âgé de 61 ans au moment de celui-ci ne permet pas de présumer l’existence d’une discrimination directe fondée sur son âge. Il en va de même de la proposition faite aux travailleurs ayant atteint un certain âge de bénéficier d’un crédit-temps en vue d’un départ anticipé, laquelle, outre qu’elle ne présentait aucun caractère contraignant, constituait, au contraire, un traitement plus favorable réservé aux travailleurs plus âgés, et non l’inverse.
Lorsqu’il est nécessaire de procéder à une réduction des effectifs dans le cadre d’une restructuration de l’entreprise justifiée par des raisons économiques, il est légitime d’opérer une sélection en se fondant sur le critère d’efficacité des différents travailleurs. Il n’y a donc aucun comportement générateur de discrimination dans le chef de l’employeur qui, sur la base de ce critère d’efficacité, choisit de licencier celui ou celle dont le rendement, indépendamment de toute faute, est incontestablement affecté par des absences répétées pour cause de maladie ou d’incapacité, fussent-elles dûment justifiées par certificats médicaux.
On ne peut souscrire au postulat voulant qu’en vertu des articles 31, §1er, 38, §§ 1er et 2, et 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978, l’employeur peut licencier un travailleur moyennant indemnité pendant une période de suspension de son contrat en raison de son impossibilité de fournir son travail par suite de maladie ou d’accident. A le faire ─ ce qui est assurément son droit ─, il contreviendrait, si sa décision était motivée par l’état de santé actuel ou futur de l’intéressé, à la loi du 10 mai 2007 et serait tenu au paiement de l’indemnité visée à l’article 18 de ladite loi qui lui serait réclamée, en plus de l’indemnité de préavis.
Lié à C. trav. Liège (div. Neufchâteau), 15 février 2023, R.G. 2021/AU/46 (décision commentée - ci-dessus)
Le fait qu’une modification de fonction ne soit pas constitutive d’acte équipollent à rupture est sans incidence sur la question de la discrimination, cette modification, même non définitive, tombant sous l’application de l’article 5, § 2, 2°, de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination. La différence de traitement est avérée dès lors que l’employeur ne démontre ni l’existence de justifications autorisées par le Titre II de ladite loi ni que le retrait d’une partie des compétences du travailleur à son retour de maladie était objectivement justifié par un but légitime et que non seulement les moyens mis en œuvre pour réaliser ce but étaient appropriés et nécessaires mais encore que celui-ci ne pouvait être atteint autrement que par leur biais.
Le préjudice moral subi par la travailleuse licenciée en raison de son état de grossesse d’une part et celui subi à la suite d’une discrimination fondée sur son sexe d’autre part ne coïncident pas, s’agissant d’atteintes différentes à son intégrité personnelle. Elle est ainsi en droit de revendiquer le cumul des indemnités de protection prévues aux articles 40 de loi du 16 mars 1971 et 23 de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes.
Tant l’article 14, § 1er, de la Directive « refonte » du 5 juillet 2006 que l’article 19 de la loi genre s’opposent au licenciement pour cause de grossesse d’une travailleuse ayant omis d’informer son employeur de son état alors même qu’elle en avait connaissance au moment de la conclusion de son contrat.
Parmi les dispositifs de protection de la loi du 10 mai 2007, son article 25, § 3, prévoit la possibilité de prescrire l’affichage de la décision ou d’un résumé de celle-ci, pendant un délai déterminé, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur des établissements du contrevenant ou des locaux lui appartenant et d’ordonner la publication ou la diffusion de ladite décision ou de son résumé par la voie de journaux ou de toute autre manière, le tout aux frais de celui-ci. Il y va, toutefois, de mesures qui ne peuvent être prescrites que si elles sont de nature à contribuer, par leur effet dissuasif, à la cessation de l’acte incriminé ou de ses effets et à constituer une forme d’information pour le citoyen, lui donnant l’occasion de mieux connaître ses droits et d’en exiger le respect. Au nombre des autres moyens de diffusion envisageables eu égard à la généralisation du télétravail à la suite de la crise du COVID-19, figure son envoi par courriel à l’ensemble des travailleurs de l‘entreprise.
L’indemnité de protection pour licenciement discriminatoire et l’indemnité de protection fondée sur la C.C.T. n° 103 trouvent leur source dans des causes distinctes et réparent des préjudices distincts. La première ne tend, en effet, pas à indemniser le dommage causé par le licenciement mais constitue une sanction civile visant à assurer l’effectivité de l’interdiction de toute forme de discrimination dans les matières qui relèvent du champ d’application de la loi ; de son côté, la seconde vise à sanctionner la faute commise par l’employeur lorsqu’il reste en défaut de démontrer qu’il a licencié le travailleur pour un motif étranger au crédit-temps sollicité ainsi qu’à indemniser l’intéressé du dommage moral qu’il a subi suite à son licenciement. Il s’ensuit que ces deux indemnités sont parfaitement cumulables.
NB : La même cour s’était, par arrêt du 23 septembre 2022 (R.G. 2021/AM/102 - décision commentée), déjà prononcée dans le même sens quant au possible cumul avec l’indemnité due pour licenciement manifestement déraisonnable.
Le fait que toute absence, aussi légitime soit-elle, comme celle due à un état d’incapacité de travail, soit susceptible de perturber l’organisation du travail au sein d’une entreprise ne justifie l’adoption de mesures a priori discriminatoires qu’à la double condition de rechercher un but légitime, et ce par des moyens appropriés et nécessaires. Tel n’est pas le cas lorsqu’un employeur, parvenu à pallier l’absence d’un travailleur durant son incapacité par des glissements de personnel et la prise en charge corrélative d’une partie de leurs tâches par d’autres travailleurs, mais craignant, eu égard à la longueur passée de son éloignement du travail, la résurgence future de nouveaux épisodes d’incapacité, préfère jouer la carte de la sécurité en licenciant l’intéressé au moment où il se déclare apte à reprendre le travail à temps plein. Ce faisant, il use de moyens disproportionnés pour, prétendument, rencontrer un problème qui ne s’est jamais posé.
Dans la jurisprudence de la Cr.E.D.H., la notion de « biens » peut recouvrir tant des biens actuels que des valeurs patrimoniales, y compris des créances en vertu desquelles le requérant peut prétendre avoir au moins une espérance légitime d’obtenir la jouissance effective d’un droit de propriété. Dans l’espèce qui lui est soumise, la cour du travail considère que l’on ne peut exclure qu’une créance sur une rémunération future fixée par un contrat de travail constitue, aussi longtemps que ce contrat est en cours, une créance en vertu de laquelle le travailleur peut prétendre avoir au moins une espérance légitime d’obtenir la jouissance effective de son salaire. Dans la mesure où il pourrait (la cour précisant « sans certitude ») s’agir d’un bien au sens de cette disposition, elle interroge la Cour constitutionnelle à propos du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 (visant à renforcer la gouvernance et l’éthique au sein des organismes wallons), s’agissant de savoir s’il heurte les garanties consacrées par l’article 1er du Premier Protocole et par l’article 16 de la Constitution en ce qu’il prévoit la privation à hauteur de 40% d’un bien (rémunération) sans juste et préalable indemnité.
Selon l’article 7 de la loi du 10 mai 2007, toute distinction directe fondée sur l’un des critères protégés constitue une discrimination directe, à moins que cette distinction directe ne soit objectivement justifiée par un but légitime et que les moyens de réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires. Le caractère approprié des moyens doit permettre de constater qu’ils sont aptes à atteindre le but légitime invoqué. Leur caractère nécessaire renvoie plutôt à la vérification d’un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi. En d’autres termes, l’examen du caractère approprié et nécessaire des moyens utilisés consistera à vérifier si ces moyens permettent d’atteindre l’objectif légitime poursuivi, sans que cela n’excède ce qui est nécessaire pour y parvenir et donc sans porter une atteinte excessive aux intérêts légitimes de la personne qui subit la différence de traitement.
L’adoption du critère protégé de l’« état de santé actuel ou futur » par loi du 10 mai 2007 se concilie parfaitement avec les dispositions de la loi du 3 juillet 1978. Les textes ne se contredisent pas, ils se complètent. Ainsi, la circonstance qu’en vertu de l’article 38, §§ 1er et 2, de la loi relative aux contrats de travail, un congé puisse être donné par l’employeur pendant la suspension de l’exécution du contrat visée par son article 31, § 1er, ne l’autorise pas pour autant à licencier le travailleur en raison de son état de santé actuel ou futur en contravention avec les articles 4, 4°, et 14 de la loi du 10 mai 2007. On ne peut donc pas souscrire au postulat voulant qu’en vertu des articles 31, §1er, 38, §§ 1er et 2, et 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978, l’employeur peut, moyennant indemnité, licencier pendant une période de suspension du contrat en raison de l’impossibilité pour le travailleur de fournir son travail par suite de maladie ou d’accident. S’il procède au licenciement pendant cette période de suspension du contrat (ce qu’il est en droit de faire), mais que sa décision est motivée par l’état de santé actuel ou futur du travailleur qui a justifié la suspension du contrat, l’employeur contreviendra assurément à la loi du 10 mai 2007 et sera aussi tenu, en plus de l’indemnité de préavis, au paiement de l’indemnité visée à l’article 18 de ladite loi qui lui serait réclamée.
La notion « d’âge d’admissibilité aux prestations » au sens de l’article 12 de la loi du 10 mai 2007 renvoie à l’âge conditionnant le fait d’être admis à des prestations. Elle n’apparaît pas clairement viser l’âge auquel on pourrait, à l’inverse, être exclu du droit à celles-ci après en avoir bénéficié. La clause d’une assurance collective invalidité en vertu de laquelle, parmi les travailleurs qui restent en service au-delà de leur 60e anniversaire, seuls peuvent bénéficier du maintien de la couverture assurée ceux d’entre eux qui ne sont pas en invalidité au moment de leur 60e anniversaire, pourrait ainsi être discriminatoire sur la base du critère de l’âge et l’est sans conteste de par la distinction que, en outre, elle opère sur la base de l’état de santé actuel. C’est, en effet, parce que le travailleur est en invalidité au jour où il atteint l’âge de soixante ans qu’il ne peut plus bénéficier du maintien de la couverture invalidité, ce sans que cette distinction soit objectivement justifiée par un but légitime et que les moyens mis en œuvre pour réaliser ce but soient appropriés et nécessaires.
On ne peut, à cet égard, suivre l’argument selon lequel les travailleurs en invalidité à 60 ans et ceux qui ne le sont pas au même âge constituent des catégories distinctes, qui doivent être traitées de manière distincte dès lors que le risque couvert (invalidité) est déjà réalisé pour les premiers, ce qui n’est pas le cas pour les autres. Sur le plan de la technique assurantielle, on peut admettre qu’il ne soit pas possible d’assurer un risque réalisé et, partant, comprendre qu’il ne soit pas envisageable de prolonger une assurance venant à terme à l’âge de 60 ans ; on n’aperçoit, en revanche, pas ce qui pourrait empêcher de contourner cet obstacle en adoptant un règlement d’assurance ne fixant plus cette échéance à l’âge de 60 ans, mais à une date postérieure, ce afin de permettre aux travailleurs encore en service de continuer à bénéficier de leur assurance au-delà de cet âge. Telle modification aurait permis de résoudre la question, sans impliquer d’assurer un risque déjà réalisé.
Le refus de l’employeur d’inviter une candidate à prendre part à une formation préalable à la désignation dans une fonction en raison de son handicap (agénésie), alors que le médecin du travail a donné un avis favorable, est une discrimination directe fondée sur le handicap. Dans le cadre de l’action en cessation, le juge peut ordonner à l’employeur de fournir une formation adaptée mais non de désigner la candidate dans la fonction. Ceci est contraire aux principes de l’autonomie de la volonté et de la séparation des pouvoirs (confirmation de l’ordonnance du Président du tribunal du 17 septembre 2020, R.F. 20/16/C sauf sur la désignation dans la fonction).
L’indemnité de protection pour licenciement discriminatoire et l’indemnité de protection pour licenciement manifestement déraisonnable trouvent leur source dans des causes distinctes et réparent des préjudices distincts. En effet, l’indemnité forfaitaire prévue à l’article 18 de la loi du 10 mai 2007 ne tend pas à indemniser le dommage causé par le licenciement mais constitue une sanction civile visant (i) à assurer l’effectivité de l’interdiction de toute forme de discrimination dans les matières qui relèvent du champ d’application de la loi. De son côté, l’indemnité forfaitaire de 3 à 17 semaines de rémunération prévue par la C.C.T. n° 109 sanctionne la faute commise par l’employeur lorsqu’il reste en défaut de démontrer qu’il a licencié le travailleur pour des raisons liées à son attitude ou son aptitude ou aux nécessités économiques de l’entreprise et (ii) à indemniser le travailleur du dommage moral qu’il a subi suite au licenciement manifestement déraisonnable. Dès lors que l’indemnité forfaitaire prévue à l’article 18 de la loi du 10 mai 2007 a une cause juridique distincte de l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable, le travailleur est en droit de solliciter théoriquement le bénéfice de leur cumul.
(Décision commentée)
Un licenciement intervenant dans les jours suivant une reprise de travail suite à une longue maladie peut être considéré comme lié à l’état de santé actuel du travailleur. Une distinction fondée sur l’état de santé passé est visée par la loi du 10 mai 2007 dès lors qu’elle peut être rattachée à des appréhensions de l’employeur quant à l’état de santé actuel ou futur. Ainsi, un licenciement motivé par des absences médicales passées du travailleur est intrinsèquement lié à des inquiétudes quant à son état de santé actuel ou futur et, partant, aux critères expressément protégés. La cour rappelle également qu’une incapacité de travail faisant suite à un accident du travail relève de celui-ci et que, lorsqu’un licenciement est fondé sur les absences, il est de facto en relation avec l’état de santé actuel.
(Décision commentée)
Dès lors que le travailleur bénéficiait de la protection de la loi du 19 mars 1991, celle-ci étant d’ordre public et n’autorisant son licenciement que pour des motifs encadrés (motif grave préalablement admis par la juridiction du travail ou motif d’ordre économique ou technique préalablement reconnu par l’organe paritaire compétent), le licenciement intervenu sans respecter les procédures imposées constitue la présomption de discrimination exigée par la loi du 10 mai 2007. La charge de la preuve de l’absence de discrimination revient à la société, qui doit établir celle-ci ou prouver que la distinction directe qui a été opérée est objectivement justifiée par un but légitime et que les moyens de réaliser ce but étaient appropriés et nécessaires.
(Un recours en cassation a été introduit contre cet arrêt)
(Décision commentée)
Si la loi n’a pas défini ce qu’il convient d’entendre par « état de santé actuel ou futur », ces termes sont clairs. Il faut comprendre par là tous les éléments relatifs à l’état de santé du travailleur au moment de la mesure litigieuse et dans le futur par rapport à ce moment. Ces termes visent les tests génétiques prévisionnels ainsi que d’autres tests médicaux prédictifs. La cour souligne encore qu’il y a une conciliation entre la loi du 10 mai 2007 en ce qu’elle vise l’état de santé actuel ou futur et les dispositions de la loi du 3 juillet 1978 : si l’employeur peut licencier pendant une période de suspension de l’exécution du contrat, ceci ne l’autorise pour autant pas à le faire en raison de l’état de santé actuel ou futur du travailleur en contravention aux articles 4, 4°, et 14 de la loi du 10 mai 2007.
(Décision commentée)
Si la demande d’aménagements raisonnables n’est pas soumise à des formes particulières, encore faut-il que l’employeur ait été en mesure d’être informé de l’existence du handicap. L’absence de mise en place d’aménagements raisonnables ne peut dans cette hypothèse être assimilée à un refus de ceux-ci. Il n’est nullement démontré en l’espèce que la société connaissait la nature des problèmes de santé concrets dont souffrait l’employé et qu’elle disposait d’informations suffisantes pour pouvoir considérer que ceux-ci répondaient à la notion de handicap. Le demandeur doit déposer des éléments de nature à présumer que l’employeur a connaissance qu’il souffrait d’un handicap, ce qu’il ne fait pas.
(Décision commentée)
La notion d’exigence professionnelle essentielle et déterminante doit être basée sur un objectif légitime et doit être proportionnée à l’objectif poursuivi. Ce qui doit constituer une exigence essentielle et déterminante, ce n’est pas le motif sur lequel est fondée la différence de traitement, mais plus exactement une caractéristique liée à celui-ci. Parmi les indices permettant de considérer qu’une limitation est « durable », figure notamment le fait que, à la date du fait prétendument discriminatoire, l’incapacité de la personne concernée ne présente pas une perspective bien délimitée quant à son achèvement à court terme ou le fait que cette incapacité est susceptible de se prolonger significativement avant le rétablissement de ladite personne.
Dès lors que des absences fréquentes et de courte durée sont, plus que d’autres, de nature à créer des problèmes organisationnels, un employeur est, sans verser dans une quelconque forme de discrimination, fondé à appliquer une politique différenciée de contrôle des incapacités de travail basée sur ces critères, ce à l’effet d’objectiver le phénomène et, si un lien de cause à effet avec les conditions de travail apparaît, de prendre des mesures destinées à y remédier.
(Décision commentée)
Les indemnités de protection contre le licenciement de la femme enceinte ou intervenu pour discrimination sur la base du genre ont une nature différente, vu les finalités légales visées : l’une se fonde sur les objectifs poursuivis par la Directive n° 92/85/CEE relative à la protection des travailleuses enceintes et des mères de jeunes enfants, la seconde sur la Directive n° 2006/54/CEE relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail.
L’employée soutenant avoir subi deux dommages distincts, la cour pose la question de savoir quel est le dommage supplémentaire que celle-ci entend voir réparé par rapport à celui qui est couvert par l’indemnité accordée sur pied de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971. Elle considère que le dommage exposé (stress d’une part et sentiment d’injustice de l’autre) est couvert par l’indemnité accordée sur pied de l’article 40 ci-avant, dont l’objet est de protéger les femmes enceintes contre les conséquences dommageables pour leur santé physique et psychique d’un licenciement.
La notion de « relation de travail » au sens de la loi Anti-discrimination est définie de manière large et inclut toute collaboration professionnelle sous quelque forme que ce soit. Raisonner autrement impliquerait qu’une convention conclue avec une personne morale suffise à écarter l’application de la loi Anti-discrimination à la relation professionnelle, alors que cette loi est d’ordre public.
Ses dispositions étant d’ordre public, la loi Genre est d’application immédiate aux conventions en cours. L’interdiction de discrimination contenue dans la loi et qui prohibe une distinction opérée sur la base du sexe en ce qui concerne les conditions de durée et de maintien du droit à des prestations dans les régimes complémentaires à la sécurité sociale est d’application immédiate à un contrat qui prévoit la cessation du droit à un complément d’indemnité d’incapacité de travail à l’âge de soixante ans pour les femmes, celui-ci étant maintenu jusqu’à soixante-cinq ans pour les hommes. Il s’agit d’une discrimination directe au sens de l’article 17 de la loi Genre. L’article 20 de la même loi prévoit qu’une telle disposition est nulle.
(Décision commentée)
Contrairement à d’autres établissements ou organisations autorisés à agir en justice pour une action collective, UNIA ne doit pas démontrer qu’il est porté préjudice aux fins statutaires qu’il s’est données. Son intérêt à agir est présumé dès l’instant où il agit dans un litige auquel l’application de la loi du 10 mai 2007 donne lieu.
L’occurrence d’une distinction indirecte se vérifie à l’aune d’un test comparatif, lequel doit permettre d’isoler le critère protégé comme étant le seul qui puisse en définitive expliquer la différence de traitement découlant de l’emploi d’un critère à première vue neutre. En d’autres mots, le procédé est propre à manifester le lien de causalité éventuel qui unit le traitement défavorable au critère protégé, encore que la distinction soit suscitée par un critère apparemment neutre. Ce test requiert que la comparaison se fasse entre des catégories de personnes se trouvant dans des situations comparables, en-dehors du critère protégé. C’est en ce sens que le désavantage invoqué doit être « particulier ».
L’employée se plaignant en l’espèce d’angoisses extrêmes dans certaines circonstances, et celles-ci étant effectivement établies par certificat médical, il peut s’agir pour la cour d’un handicap ou d’une maladie pouvant donner lieu à discrimination, dans la mesure où ces angoisses sont liées à certaines conditions de travail (locaux où sont présentes certaines substances nocives). Le handicap et l’état de santé présentent une série de caractéristiques communes et peuvent être décrits comme ayant trait à une maladie diagnostiquée sur le plan médical lorsque celle-ci induit une limitation qui, entre autres, est la conséquence d’affections physiques, mentales ou psychiques qui, en interaction avec d’autres facteurs, peuvent empêcher l’intéressé de prendre complétement, effectivement et sur pied d’égalité avec les autres travailleurs, part à la vie professionnelle.
Arrêt lié à Cass., 23 mars 2022, n° P.21.1500.F - ci-dessus
(Décision commentée)
Rien ne justifie que des prestations identiques effectuées au sein du même corps et dans des conditions identiques soient indemnisées différemment, ainsi pour des prestations nocturnes et de week-end. La distinction entre pompiers professionnels selon qu’ils ont cinq ans ou non d’ancienneté n’est pas justifiée : la pénibilité et l’atteinte à la vie familiale et sociale sont les mêmes pour le pompier, quelle que soit son ancienneté de fonction.
La cour ajoute que, autrement composée, elle s’est déjà prononcée en ce sens pour l’octroi de la même allocation entre pompiers volontaires et pompiers professionnels. La mesure n’est a fortiori pas pertinente lorsqu’elle crée une différence de traitement entre deux catégories de pompiers parmi les pompiers professionnels.
L’abstention de mettre en place les aménagements raisonnables devant permettre à un travailleur handicapé de se maintenir à son poste n’est, par elle-même, constitutive de discrimination que pour autant qu’elle puisse être qualifiée de refus, ce qui suppose qu’une demande ait été formulée en ce sens, à laquelle il n’a pas été donné suite, sans qu’il soit démontré que cette mise en place aurait engendré une charge disproportionnée dans le contexte particulier d’une restructuration annoncée, cette perspective étant, in se, insuffisante pour légitimer la position de la société en ce qu’elle ne constitue pas ipso facto un motif valable élusif d’un potentiel reclassement.
(Décision commentée)
En cas de refus d’embauche d’une femme enceinte au motif que « (son) rôle de maman doit primer sur (sa) carrière et (que la société recherche) une personne libre de tout engagement familial et flexible dans les horaires de travail », il y a une présomption d’existence d’une discrimination fondée sur le sexe.
La société doit dès lors établir qu’elle n’a pas discriminé l’intéressée en raison de sa maternité. A cet égard, l’absence d’élément intentionnel est indifférente. Il peut y avoir une discrimination même si l’employeur n’a pas consciemment l’intention de la pratiquer. De même, la politique d’embauche n’est pas suffisante pour contredire la présomption légale et le recours à des prestataires de services indépendantes n’est pas un point susceptible de confirmer l’absence de discrimination, le fait de conclure des contrats de prestation de services avec des femmes étant ainsi indifférent pour juger si la pratique d’embauche d’une travailleuse salariée repose sur des facteurs étrangers à toute discrimination fondée sur la maternité. Ne renverse pas non plus celle-ci l’embauche, sept mois plus tard, d’une femme ayant un enfant en bas âge.
(Décision commentée)
Lorsqu’une personne qui s’estime victime de discrimination invoque devant la juridiction compétente des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur le sexe ou le changement de sexe, il incombe au défendeur de prouver qu’il n’y a pas eu de discrimination Le terme « invoque » ne peut signifier « allègue », la personne devant prouver des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination. Une présomption doit en effet avoir pour point de départ un fait connu, c’est-à-dire un fait établi et non un fait allégué.
Parmi les faits susceptibles de présumer l’existence d’une discrimination directe fondée sur le sexe, sont visés les éléments qui révèlent une certaine récurrence de traitement défavorable à l’égard de personnes du même sexe (sont visés entre autres des signalements isolés faits auprès de l’Institut ou de l’un des groupements d’intérêt) ou ceux qui révèlent que la situation de la victime du traitement plus défavorable est comparable avec la situation de la personne de référence. Pour ce qui est de la discrimination indirecte, le renvoi est fait à (i) l’exigence de statistiques générales concernant la situation du groupe dont la victime de la discrimination fait partie ou de faits de connaissance générale, (ii) l’utilisation d’un critère de distinction intrinsèquement suspect ou encore (iii) l’existence de matériel statistique élémentaire révélant un traitement défavorable.
(Décision commentée)
Constitue un objectif légitime le souci d’éviter qu’une indemnité de licenciement ne bénéficie pas à des personnes qui ne cherchent pas un nouvel emploi mais vont percevoir un revenu de substitution sous forme d’une pension de vieillesse. Dans sa jurisprudence, la Cour de justice a admis le caractère non discriminatoire d’une législation excluant du droit à une indemnité spéciale de licenciement les travailleurs éligibles à une pension de retraite à la date de leur licenciement.
Un renvoi est également fait à un arrêt de la Cour de cassation française (Cass. fr. (ch. soc.), 15 avril 2015, n° 13-18849) pour une différence de traitement dû à l’âge des travailleurs, concernant ceux susceptibles immédiatement après leur licenciement ou dans un délai inférieur à deux ans de bénéficier de droits à la retraite au taux plein.
La volonté d’un employeur de mettre en place une politique de neutralité à l’égard de sa clientèle constitue un objectif légitime au sens de la législation anti-discrimination et de l’article 9 C.E.D.H. L’interdiction faite aux travailleuses en contact avec le public de porter le voile sur le lieu de travail constitue une mesure nécessaire pour mettre en œuvre dans l’entreprise une politique de neutralité vis-à-vis de la clientèle (pharmacie). En l’espèce, aucune autre solution n’aurait pu être privilégiée qui aurait été moins contraignante tout en étant appropriée pour atteindre cet objectif. Même réalisé aux couleurs de l’entreprise, un voile islamique reste une manifestation non discrète des convictions religieuses d’une femme et empêche donc totalement l’employeur de mettre en œuvre une politique de neutralité vis-à-vis de la clientèle. Par conséquent, l’interdiction faite à la pharmacienne de porter le voile sur le lieu de travail constitue une mesure nécessaire pour mettre en œuvre dans l’entreprise une politique de neutralité vis-à-vis de la clientèle.
(Décision commentée)
Constituent des faits laissant présumer prima facie une discrimination directe sur la base de l’état de santé actuel (i) la circonstance que le licenciement est intervenu pendant une période d’incapacité de travail et au moment où un nouveau certificat médical a été remis, (ii) les mentions du C4 ainsi que (iii) les explications données par l’employeur dans ses conclusions. Dès lors il appartient à celui-ci d’établir qu’il n’y a pas eu discrimination.
La société faisant état de nécessités économiques, la cour conclut d’un examen circonstancié des arguments avancés qu’elle ne démontre pas que la distinction directe constatée était objectivement justifiée par un but légitime et encore moins que le licenciement aurait constitué un moyen approprié et nécessaire de réaliser pareil objectif.
(Décision commentée)
Aménagements raisonnables en faveur du travailleur handicapé
(Décision commentée)
Il faut entendre par « aménagements raisonnables » les mesures appropriées, prises en fonction des besoins dans une situation concrète, pour permettre à une personne handicapée d’accéder, de participer et de progresser dans les domaines pour lesquels la loi est d’application, sauf si ces mesures imposent à l’égard de la personne qui doit les adopter une charge disproportionnée. Cette charge n’a pas ce caractère lorsqu’elle est compensée de façon suffisante par des mesures existantes dans le cadre de la politique publique menée concernant les personnes handicapées (article 4, 12°, de la loi).
Est discriminatoire pour être lié à son état de santé le licenciement d’un travailleur décidé pour le double motif, d’une part, qu’il ne répond plus au niveau requis pour l’exercice de ses fonctions ─ ce qui ne résulte pas clairement de sa dernière évaluation ─ et, d’autre part, que son absence de longue durée sans perspective de retour à court terme commande son remplacement ─ postulat qui ne peut être inféré des certificats médicaux rentrés par l’intéressé.
N’est pas discriminatoire pour être lié à son état de santé le licenciement d’un consultant décidé en raison de la désorganisation du travail que son incapacité provoque et du fait que la durée de celle-ci lui a fait perdre le contact avec l’évolution de la matière qu’il est chargé d’appréhender.
(Décision commentée)
Des restrictions au droit d’accès à un tribunal peuvent intervenir. Parmi celles-ci figurent les limitations généralement admises par la communauté des nations comme relevant de la doctrine de l’immunité de juridiction, qu’il s’agisse de l’immunité d’un Etat étranger ou de celle d’une organisation internationale. La règle de l’immunité de juridiction des organisations internationales poursuit un but légitime et, pour déterminer si l’atteinte aux garanties de l’article 6, § 1er, est admissible, il faut examiner si la personne contre laquelle l’immunité de juridiction est invoquée dispose d’autres voies raisonnables pour protéger efficacement les droits que lui garantit la Convention.
L’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable ne peut être cumulée avec l’indemnité pour discrimination (fondée, en l’espèce, sur l’état de santé), cette dernière étant considérée comme une indemnité due par l’employeur « à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la C.C.T.
On peut comprendre l’exaspération de la direction d’une entreprise au regard des comportements déviants de certains travailleurs et le souci corrélatif qui a été le sien de restaurer un climat de sérénité en son sein en affichant, à l’adresse des intéressés, un communiqué constituant une mise au point ferme en réponse aux accusations de discrimination lancées à son égard par une organisation syndicale et ayant justifié le préavis de grève déposé par celle-ci.
Dès lors qu’elle vise des travailleurs, et non l’exercice par eux d’un quelconque mandat syndical, l’utilisation maladroite de termes tels « menteur » ou « comportement immature » n’est, dans ce contexte, pas un fait constitutif de discrimination liée à la conviction syndicale des affiliés/délégués de ladite organisation.
La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination a instauré un régime dérogatoire au droit commun en ce qu’elle permet à certains groupements d’intérêt d’agir en justice dans les hypothèses qu’elle précise en diligentant une action en cessation dans le respect de certaines conditions, dont la démonstration par ceux-ci de l’accord préalable de la (des) victime(s) de la discrimination dénoncée.
Dès lors qu’un des motifs évoqués à l’appui de l’action en cessation vise également un nombre indéterminé de victimes potentielles, il ne saurait, toutefois, être fait grief au groupement diligentant celle-ci de n’avoir pas préalablement recueilli l’accord des victimes de faits de discrimination identifiés.
(Décision commentée)
Le droit de nourrir n’importe quelle conviction est absolu et inconditionnel. En revanche, la manifestation par une personne de ses convictions religieuses pouvant avoir des conséquences pour autrui, elle est susceptible d’être restreinte aux conditions prévues par l’article 9.2 de la C.E.D.H., qui dispose que la liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.
En l’espèce, la mesure critiquée interdit à tous les travailleurs et toutes les travailleuses le port de tout signe extérieur visible d’appartenance à une opinion (religieuse, politique, philosophique ou culturelle) quelle qu’elle soit. La religion musulmane n’est pas distinguée des autres. Cette mesure n’est donc pas directement fondée sur la religion et n’est pas susceptible de constituer une discrimination directe. Cependant, elle constitue une distinction indirectement fondée sur la religion, puisqu’elle entraîne un désavantage particulier pour les femmes de religion musulmane portant le voile. Il faut dès lors examiner la justification de cette distinction indirecte.
(Décision commentée)
Il peut être admis d’ordonner la cessation d’un acte ou d’une pratique qui a pris fin dans la mesure où subsiste un risque de récidive, le juge de la cessation pouvant également ordonner la cessation d’une politique discriminatoire.
Dès lors que, pour un membre du personnel statutaire en congé syndical, le retrait anticipé d’un intérim à une fonction supérieure a été décidé exclusivement en raison de celui-ci, l’on peut présumer l’existence d’une discrimination. La preuve de l’absence de discrimination est à rapporter par l’employeur, ce qu’il ne fait en l’espèce pas. La cour constate qu’il a adopté envers l’intéressée, en raison de son congé syndical, une mesure préjudiciable individuelle, qui s’écarte de la mesure générale figurant au statut. La mesure prise n’est pas dans un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi, vu l’importante diminution de la rémunération, le risque de dissuasion d’autres candidats et l’entorse faite aux règles générales. Elle n’est en outre pas justifiée au regard du décret applicable. La cour fait dès lors droit à la demande de cessation (même si la situation est révolue) et fait interdiction à l’employeur de réitérer une telle mesure.
La maternité (et le désir de maternité), en ce compris le fait de subir une fausse couche et de subir une incapacité de travail résultant de celle-ci, constitue une réalité qui ne concerne que les femmes. Le licenciement intervenant en raison de la maternité d’une travailleuse, de son désir de maternité, de son état de grossesse, de la fausse couche qu’elle a subie ou de l’incapacité de travail résultant de celle-ci constitue donc une discrimination directe sur la base du sexe. Il revient à la demanderesse de démontrer l’existence de faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur celui-ci. Si cette preuve est rapportée, il appartient à l’employeur de prouver qu’il n’y a pas eu de discrimination.
Si l’employeur démontre dans une certaine mesure que d’autres motifs que l’état de santé réel et futur sont à la base du licenciement, ceci ne suffit pas à écarter le caractère discriminatoire du licenciement. Il doit en effet établir que ce licenciement est tout à fait étranger à l’état de santé, ce qui n’est pas démontré en l’espèce. En conséquence, l’indemnité légale est due.
Statuant au provisoire et en extrême urgence, la Cour du travail de Liège a interrogé la C.J.U.E. (demandant l’application de l’article 108 du règlement de procédure de la Cour ou, à défaut celle de l’article 105) sur les points suivants :
Il convient de ne pas apprécier d’une manière trop stricte les présomptions de l’existence d’une discrimination liée à un critère protégé, sous peine de ne pas atteindre l’objectif du législateur, qui est de protéger la partie la plus faible à travers le système de partage de la charge de la preuve.
En l’espèce, la Cour passe en revue le parcours professionnel de l’intéressé dans l’entreprise, ainsi que les décisions intervenues à son égard. Elle en conclut qu’existent des éléments qui, pris ensemble, constituent un faisceau de faits graves et pertinents permettant de présumer une discrimination en raison du seul critère qui distinguait l’intéressé des autres travailleurs, à savoir son état de santé (actuel ou futur), la société ne démontrant pas à suffisance l’absence de discrimination.
(Décision commentée)
Dans l’hypothèse où la discrimination directe est fondée sur le fait qu’une femme est enceinte, il n’y a pas lieu de déterminer un élément de comparaison (avec renvoi à la jurisprudence constante de la Cour de Justice, dont l’arrêt de principe DEKKER). Pour déterminer si l’exigence d’un lien de causalité entre le traitement moins favorable et la caractéristique protégée est satisfaite, il faut se poser la question de savoir si la personne aurait été traitée de manière différente si elle avait été de sexe différent (ou de race différente) ou si elle avait eu un autre âge, ou encore si elle n’avait pas présenté une particularité correspondant à l’une des autres caractéristiques protégées (8e feuillet, point 7). Si la réponse est positive, le traitement moins favorable est imputable à la caractéristique visée.
Le lien causal peut être partiel, une discrimination pouvant être identifiée si le traitement défavorable est en lien causal avec simultanément un critère protégé et d’autres motifs.
Le fait pour la gérante d’un magasin d’imposer à ses vendeuses un dress code aguichant relève d’une option sexiste d’autant plus évidente que son compagnon profite de cette ambiance orientée sur les apparences pour formuler aux intéressées de soi-disant compliments diversement appréciés par elles. Cette technique de vente, choisie et revendiquée par elle et sujet coquin pour son compagnon, va à l’encontre du respect dû aux personnes qu’elle emploie dans leurs diversités sensibles, lequel ne peut être sacrifié à une nécessaire rentabilité.
Décision citée dans l’article publié dans cette rubrique : « Etrangers : impossibilité médicale absolue de retour et bénéfice de la jurisprudence ABDIDA – la Cour constitutionnelle et la Cour de Justice de l’Union européenne interrogées par la Cour du travail de Liège »
Le fait que son supérieur hiérarchique n’ait pas autorisé un travailleur atteint de surdité quasi-totale dont l’appareil auditif venait de tomber en panne à quitter le bureau sans prendre congé pour se rendre chez l’audicien n’est pas de nature à générer, dans son chef, un désavantage particulier en lien avec le handicap qu’il présente. Si le handicap d’un travailleur ne peut, évidemment, pas lui porter préjudice, cela ne le dispense pas de se plier aux règles qui n’interfèrent pas avec celui-ci. Ainsi, une panne d’appareil auditif, si elle est propre au handicap de l’intéressé, constitue une manifestation à ce point peu fréquente de celui-ci qu’elle ne justifie pas de dérogation à la procédure ordinaire applicable aux absences médicales, qui permet de rencontrer son problème de façon tout à fait idoine.
Est victime d’un comportement constitutif de discrimination liée à sa conviction syndicale le travailleur dont l’employeur refuse d’accepter la candidature sur la liste des employés pour la constitution d’une délégation syndicale, le privant ainsi du droit potentiel de mener des négociations collectives avec l’entreprise, revêtu du mandat de délégué syndical membre d’une organisation représentative des travailleurs visée par la C.C.T. n° 5 du 24 mai 1971.
Décision citée dans l’article publié dans cette rubrique : « Etrangers : impossibilité médicale absolue de retour et bénéfice de la jurisprudence ABDIDA – la Cour constitutionnelle et la Cour de Justice de l’Union européenne interrogées par la Cour du travail de Liège »
Un refus d’embauche résulte d’un acte de discrimination directe par violation d’un critère protégé, celui de la naissance, lorsque la raison s’en trouve être l’appartenance du candidat à une famille avec laquelle l’auteur du refus a précédemment été en litige et sa déclaration selon laquelle il ne serait, à ce titre, jamais engagé au sein de son entreprise.
Une incapacité fort modérée et qui, à l’évidence, ne présente pas non plus de caractère durable, n’est pas de nature à constituer un obstacle à une participation pleine et effective à la vie professionnelle sur une base égalitaire avec d’autres travailleurs.
Considérer que le licenciement d’une travailleuse serait discriminatoire en ce que les demandes de crédit-temps sont majoritairement sollicitées par des femmes, quod non, signifierait que tous les licenciements irréguliers de femmes qui se révéleraient en lien avec une demande de crédit-temps seraient, ipso facto, discriminatoires, thèse qui n’a aucun sens puisqu’elle aboutirait à créer une autre discrimination, au détriment, cette fois, des hommes puisque ces derniers peuvent, au même titre que les femmes, également solliciter le bénéfice du crédit-temps pour motif, à savoir prendre soin d’un enfant de moins de 8 ans.
Il ne suffit pas de prétendre, en se fondant à cet effet sur l’enseignement déduit de l’arrêt HOFFMAN (Aff. n° 184/83, Rec. 3047), que la Directive n° 2006/54/CEE, transposée par la loi « genre » du 10 mai 2007, vise à protéger « une femme enceinte en raison de sa condition biologique pendant la grossesse et la maternité de même qu’à prévoir des mesures de protection de la maternité comme moyen de parvenir à une réelle égalité entre les sexes » pour pouvoir prétendre cumuler l’indemnité forfaitaire prévue par l’article 23 de ladite loi avec l’indemnité protectionnelle visée par l’article 40 de la loi du 16 mars 1971. Encore faut-il pouvoir identifier l’existence d’un facteur aggravant le dommage couvert par la loi du 16 mars 1971 et non réparé spécifiquement par l’indemnité prévue par son article 40, dont l‘objet est de protéger les femmes enceintes contre les conséquences dommageables pour leur santé physique et psychique d’un licenciement opéré dans des circonstances que cette législation prohibe.
Le droit de grève garanti par l’article 6.4 de la Charte sociale européenne a été exercé de manière paisible, sans acte de violence ou de menace à l’égard des non-grévistes ou de la direction. Aucun dommage n’a été causé par les grévistes à l’entreprise. Dans la mesure où les actions ont consisté en piquets (chaînes humaines) et en actions paisibles, celles-ci ne peuvent constituer une forme d’intimidation. L’ordonnance rendue sur requête unilatérale doit dès lors être réformée, au motif de l’absence d’absolue nécessité au sens de l’article 584, 4e alinéa, C.J.
Le simple fait de remplacer momentanément un délégué syndical ne peut suffire à faire présumer que la conviction syndicale aurait pu être la cause du licenciement du travailleur au motif que l’employeur se serait douté que l’intéressé pourrait devenir délégué effectif lors du départ du délégué provisoirement remplacé et aurait préféré se séparer de lui au plus vite pour éviter cette titularisation potentielle.
Il est licite et légitime que les représentants du personnel donnent, en cette qualité, des informations à leurs collègues (conformément au cadre légal) et entretiennent une communication avec ceux-ci à ce sujet sans que l’employeur y ait accès. Cette liberté fait partie de la liberté d’expression et de la liberté syndicale. L’exclusion des membres de la direction ainsi que de l’épouse d’un directeur du groupe des personnes invitées à participer à un blog interne à l’entreprise n’est dès lors pas critiquable (confirmation de Trib. trav. fr. Bruxelles, 27 mars 2018, R.G. 18/584/A).
(Décision commentée)
L’affiliation ou l’appartenance à une organisation syndicale et l’activité menée dans le cadre d’une telle organisation devant être considérées comme des manifestations de l’opinion syndicale de la personne concernée, la victime d’une discrimination sur la base de son affiliation, de son appartenance ou de son activité syndicale est dès lors également victime d’une discrimination sur la base de ses convictions en matière syndicale. Les trois motifs de discrimination cités sont compris dans celui de la conviction syndicale.
L’article 6-1 de la Convention de sauvegarde est applicable à la personne qui fait l’objet d’une sanction disciplinaire, dans le secteur privé ou dans le secteur public. Le tribunal doit veiller au respect de cette disposition. Il exerce ici un contrôle de pleine juridiction, en examinant si la sanction a été prise sans abus de droit. Il a de même été jugé que le principe général du droit relatif au respect des droits de la défense, les articles 6-1 de la Convention de sauvegarde et 14.3.g du Pacte international relatif aux droits civils et politiques consacrent notamment le droit pour (le prévenu ou) la personne poursuivie de ne pas devoir collaborer à la preuve des faits mis à sa charge et de ne pas devoir participer à sa condamnation. Ces règles sont, en principe, applicables en matière disciplinaire même si l’interprétation concrète de ces droits peut dépendre de la nature spécifique des procédures disciplinaires (Cass., 1er octobre 2009, n° D.07.0024.N).
En droit, la liberté d’expression garantie par l’article 10, C.E.D.H., n’est pas sans limite. Si les travailleurs ne sont pas tenus à des devoirs de réserve ou de loyauté absolus envers leur employeur, ils doivent toutefois faire preuve d’égards lorsqu’ils portent une appréciation ou un jugement sur celui-ci. En d’autres termes, ils bénéficient certainement d’un droit à la critique, mais pas d’un droit à l’insulte ou à la caricature méchante.
La liberté d’expression ne l’emporte pas sur l’obligation de déférence et de respect vis-à-vis de l’employeur. Elle doit s’exprimer de manière raisonnable et pondérée et non de manière injurieuse ou violente. De même, la critique devient fautive si elle est excessive dans sa formulation, c’est-à-dire si elle est offensante ou calomnieuse à l’égard de l’entreprise ou d’un membre de son personnel ou si la publicité qui lui est donnée sape l’autorité de l’employeur.
À souligner à cet égard que les informations publiées sur une page Facebook à laquelle tout internaute a accès, voire même celles dont l’accès est ouvert aux « amis des amis » du titulaire du profil, perdent leur caractère privé. Quant à celles accessibles aux seuls « amis » du travailleur, elles seront considérées comme publiques lorsque leur nombre est important ou lorsque certains d’entre eux font partie du personnel de l’entreprise.
(Décision commentée)
La C.E.D.H. ne contient pas de sanction en cas de dépassement du délai raisonnable visé à l’article 6. Celle-ci n’est pas nécessairement la déchéance du droit. Renvoyant à divers arrêts de la Cour de cassation (dont Cass., 20 juin 2000, n° P.00.0654.N), en matière pénale (avant que des sanctions propres ne soient introduites par le législateur), il était admis, dans une telle hypothèse, et pour autant que les preuves n’aient pas été perdues entre-temps et que l’exercice des droits de défense n’était pas devenu impossible, qu’il appartient au juge de déterminer le mode le plus adéquat de réparation.
Par ailleurs, il ne faut pas confondre les règles concernant le procès équitable au sens de l’article 6 de la Convention et le principe du délai raisonnable, qui est un principe de bonne administration. L’article 6 ne s’applique pas dans la procédure administrative (où vaut le principe de bonne administration) ni à l’entrée de la phase judiciaire (soumise aux règles de prescription), mais dans le procès lui-même. Enfin, le respect du principe de bonne administration ne permet pas de céder devant celui de légalité et ainsi, pour ce motif, de parer à l’absence de la prescription d’une créance. Elle renvoie ici à l’arrêt de la Cour de cassation du 18 mars 2013 (Cass., 18 mars 2013, n° S.12.0082.F).
En vertu de l’article 4, §§ 2 et 3, de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, une distinction directe fondée sur le changement de sexe est assimilée à une distinction directe fondée sur celui-ci et une distinction directe fondée sur l’identité de genre ou l’expression de genre est assimilée à une distinction directe fondée sur le sexe. La restriction pour une employée transgenre de ses droits en matière d’assurance hospitalisation accordée dans le cadre de la politique rémunératoire de l’employeur constitue une discrimination directe sur la base du changement de sexe et de l’identité de genre. Vu le caractère large et général de la formulation de l’exclusion, les critères de la proportionnalité ne sont en l’espèce pas rencontrés. Une telle discrimination est prohibée.
La liberté d’expression garantie par l’article 10 de la C.E.D.H. valant pour toute personne, elle ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise et aux travailleurs engagés sous contrat de travail. Ne peut dès lors constituer un élément justifiant son licenciement pour motif grave, le fait qu’un travailleur, invité à participer à un débat, ait, dans son cours et sans manifester aucune opposition aux valeurs de l’institution dans laquelle il travaille, exprimé un avis personnel (sans doute contraire à celui de son employeur) à propos du système législatif en vigueur dans le milieu professionnel qu’il pratique.
(Décision commentée)
Dans la jurisprudence de la Cour de Justice, une distinction est faite entre les termes « handicap » et « maladie », précisant que, si ceux-ci ne peuvent être confondus, une maladie peut constituer un handicap, dans la mesure où la Directive n° 2000/78 ne vise pas uniquement les handicaps de naissance ou d’origine accidentelle en excluant ceux causés par une maladie. Si une maladie curable ou incurable entraîne une limitation, résultant notamment d’atteintes physiques, mentales ou psychiques, dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à la pleine et effective participation de la personne concernée à la vie professionnelle sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs et si cette limitation est de longue durée, une telle maladie peut relever de la notion de « handicap » au sens de cette disposition.
En l’espèce, suite à un diagnostic de cancer, la travailleuse a été absente, étant en incapacité totale pendant 21 mois. L’intéressée étant alors suivie sur le plan médical, la cour conclut qu’il y a une atteinte physique, mais également psychique, de longue durée. Celle-ci l’empêchait de reprendre le travail à temps plein. Cette situation constituait dès lors une affection de longue durée répondant à la notion de handicap.
(Décision commentée)
Dès la mesure où une enseignante souffre de dysphonie, elle présente une atteinte physique et sa pleine participation à la vie professionnelle s’en trouve sérieusement affectée. Il s’agit d’une limitation de longue durée. Elle est dès lors porteuse d’un handicap au sens de la loi. Une demande de reclassement dans des fonctions subventionnées doit être considérée comme demande d’aménagements raisonnables.
Dès lors cependant que l’intéressée réclame un aménagement supplémentaire, à savoir un poste définitif, ceci n’est pas raisonnable (le poste devant en outre répondre à la condition de ne pas solliciter excessivement la voix).
La charge de la preuve de la discrimination est partagée entre les parties : lorsqu’une personne qui s’estime victime de discrimination invoque devant la juridiction compétente des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur l’un des critères protégés, en l’occurrence l’état de santé et le handicap, il incombe au défendeur de prouver qu’il n’y a pas eu de discrimination. Appliqué à la forme particulière de discrimination que constitue le refus d’aménagement raisonnable, ce mécanisme implique que le travailleur établisse son handicap, l’existence d’une demande d’aménagement et, prima facie, l’efficacité de l’aménagement raisonnable proposé. Il appartient alors à l’employeur de contester ces éléments ou d’établir que l’aménagement représente une charge disproportionnée.
Dès lors que ce qui est reproché au travailleur est le comportement qu’il a adopté vis-à-vis d’un stagiaire se trouvant sous son autorité, la décision prise par son employeur de donner suite à la plainte déposée par ce dernier en procédant au licenciement de l’intéressé ne relève nullement d’une forme quelconque de discrimination fondée sur son orientation sexuelle, du reste bien connue et autrement admise, ce même si la description des faits renvoie inévitablement à cette orientation.
(Décision commentée)
Dès lors que le travailleur présente une atteinte physique (séquelles aux coudes), qui a affecté sérieusement sa pleine participation à la vie professionnelle – celui-ci ne pouvant plus exercer bon nombre de fonctions – et que, à la date de la rupture, cette limitation était de longue durée (et avait d’ailleurs été jugée permanente dans le cadre de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail), il faut conclure à l’existence d’un handicap.
En outre, il avait demandé à son employeur de l’inscrire à un (second) module d’une formation qui lui aurait permis d’exercer d’autres activités compatibles avec son handicap. Il s’agit d’une demande d’aménagements. Ceux-ci ont un caractère raisonnable, l’intéressé ayant prouvé son aptitude pour cette fonction. La formation n’entraînait pas, par ailleurs, de charges disproportionnées pour l’employeur. La rupture constatée pour cause de force majeure est un traitement défavorable fondé sur le handicap, correspondant ainsi à une distinction directe au sens de la loi du 10 mai 2007 et est discriminatoire.
L’action en cessation d’une discrimination n’est pas dépourvue d’objet et/ou d’intérêt au motif que la collaboration professionnelle a déjà été rompue. Si la rupture doit être considérée comme « irréversible », cette caractéristique n’a aucune incidence sur l’intérêt à agir et/ou sur l’objet de l’action. Il suffit que l’acte litigieux soit posé et il est donc vain de relever que l’acte est « définitif » en ce sens qu’il a épuisé ses effets et/ou que le manquement est « consommé » : ce fait n’implique ni la disparition de l’acte ni celle du manquement.
L’article 37, § 5, alinéa 5, de l’A.R. du 25 novembre 1991 doit être appliqué à la lumière de la Directive européenne n° 79/7 visant à assurer l’égalité de traitement dans les régimes de sécurité sociale, y compris le régime du chômage. Dans le cadre de l’évaluation des efforts de recherche d’emploi, il y a donc lieu d’avoir égard à la situation personnelle de la demanderesse prise globalement, en ce compris sa situation de jeune mère de famille devant faire face aux conséquences d’un accouchement difficile. Ne pas en tenir compte serait, en effet, source de discrimination par rapport aux demandeurs d’emploi de l’autre sexe qui, par hypothèse, ne doivent pas faire face aux mêmes conséquences.
Cette prise en compte impose d’avoir égard à un double degré de protection : il s’agit « d’assurer, d’une part, la protection de la condition biologique de la femme au cours de sa grossesse et à la suite de celle-ci, jusqu’à un moment où ses fonctions physiologiques et psychiques sont normalisées à la suite de l’accouchement, et, d’autre part, la protection des rapports particuliers entre la femme et son enfant au cours de la période qui fait suite à la grossesse et à l’accouchement, en évitant que ces rapports soient troublés par le cumul des charges résultant de l’exercice simultané d’une activité professionnelle » (not., C.J.U.E., 12 juillet 1984, Hofmann, C-184/83, § 25).
En application des arrêts CHACON NAVAS et DAOUIDI (supra), il appartient au juge de se prononcer sur l’existence d’un handicap en examinant deux composantes : l’existence d’une limitation, résultant notamment d’atteintes physiques, mentales ou psychiques, dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à la pleine et effective participation à la vie professionnelle sur pied d’égalité avec les autres travailleurs et le caractère durable de cette limitation.
Il est évident que, pour un ouvrier occupé sur chantier, une fracture de la malléole externe entraînant une incapacité temporaire (accident du travail) constitue une limitation résultant d’une atteinte physique faisant obstacle à sa participation pleine et effective à la vie professionnelle. Une telle limitation ne présente toutefois pas le caractère de durabilité requis pour qu’elle puisse être constitutive de handicap.
Ni la directive 2000/78 ni la loi du 10 mai 2007 ne précisent ce qu’il y a lieu d’entendre par « handicap ». La Cour de justice en a néanmoins donné une interprétation, considérant que la notion de « handicap » doit être entendue comme une limitation des capacités, résultant d’atteintes physiques, mentales ou psychiques qui entravent de manière durable la participation d’un travailleur à la vie professionnelle. Il n’apparaît donc pas que les dispositions précitées aient été prévues pour rencontrer les problèmes afférents à une incapacité temporaire de courte durée.
(Décision commentée)
Il résulte de l’application combinée des articles 34, alinéa 1er, 5°, b) et c), ainsi que 35bis, § 1er, alinéa 1er, et § 2, alinéa 1er, de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 (relatifs à la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables) et de l’arrêté royal du 21 décembre 2001 (fixant les procédures, délais et conditions concernant l’intervention de l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités dans le coût des spécialités pharmaceutiques) qu’une décision portant sur la modification de la liste des spécialités remboursables est prise après une évaluation de leur valeur thérapeutique. Il s’agit de la somme de l’évaluation de toutes les propriétés pertinentes pour le traitement de la spécialité et pour laquelle sont pris en considération notamment l’efficacité, l’utilité ainsi que les effets indésirables (article 1er, 20°, de l’arrêté royal du 21 décembre 2001).
L’efficacité est admise si l’activité pharmacologique lors de la mise en œuvre dans le cadre d’un examen clinique engendre un effet thérapeutique ; le critère de l’utilité est rencontré si la spécialité est efficace et si l’examen atteste que son utilisation dans la pratique quotidienne permet d’atteindre le but escompté du traitement. Les effets indésirables sont également listés. Le remboursement de la spécialité est dès lors soumis à ces conditions.
Dès lors qu’une travailleuse présente une limitation de longue durée, due à une atteinte psychique et qui lorsqu’elle atteint un seuil déterminé l’empêche de prendre part à la vie professionnelle de manière complète, effective et sur pied d’égalité avec les autres travailleurs, il peut être conclu qu’elle souffre d’un handicap. (En l’espèce il est constaté sur le plan médical qu’elle présente une problématique d’ordre psychiatrique entraînant une perte fonctionnelle à caractère permanent sur le plan cognitif et émotionnel et l’intéressée a été reconnue par sa mutualité incapable de travailler pour une période de plus de deux ans).
La distinction que le législateur opère entre revenus mobiliers et revenus immobiliers dans la prise en compte des revenus des demandeurs d’une GRAPA est objectivement et raisonnablement fondée.
Comme le revenu d’intégration sociale, la garantie de revenus aux personnes âgées relève des régimes résiduaires de sécurité sociale, dans lesquels il est tenu compte des ressources dont les demandeurs disposent pour pourvoir à leurs besoins. Vouloir abroger, dans le présent régime, une distinction également faite dans celui du revenu d’intégration, reviendrait, dans les faits, à créer une différence de traitement injustifiée entre bénéficiaires de l’un et l’autre régimes.
Il revient en outre en propre au législateur ─ et non au juge ─ de décider de la juste balance à opérer, compte tenu du but poursuivi par les textes, entre biens mobiliers, plus faciles à vérifier, et biens immobiliers.
Il y a discrimination fondée sur l’état de santé actuel ou futur du travailleur lorsqu’il appert que la décision de mettre fin à son contrat résulte d’une défiance a priori à l’égard dudit état, défiance sans laquelle la société se serait montrée plus ouverte à la demande de l’intéressé d’une activité à temps partiel, inscrite dans le contexte d’une incapacité de longue durée.
(Décision commentée)
Des problèmes de santé temporaires n’entrent pas dans le champ de la Directive 2000/78. L’arrêt CHACON-NAVAS (C.J.U.E., 11 juillet 2006, CHACON-NAVAS, C-13/05) a posé le principe que la personne licenciée pour le seul motif de maladie n’entre pas dans le cadre de celle-ci, ceci n’étant pas une discrimination sur la base du handicap. L’arrêt DAOUIDI (C.J.U.E., 1er décembre 2016, DAOUIDI, C-395/15) a confirmé que la maladie dont la fin est prévisible ne constitue pas un handicap.
(Décision commentée)
Dans la mesure où l’article 107, § 3, C, alinéa 2, de l’A.R. du 22 décembre 1967 prévoit, si l’activité professionnelle ne s’étend pas sur une année civile complète, une « proratisation » des revenus à prendre en compte qui n’est pas de règle dans le régime salarié et crée ainsi, entre personnes se trouvant dans des situations comparables, une différence de traitement sans justification objective et raisonnable, le juge amené à connaître de litiges antérieurs au 1er janvier 2013 (date de son abrogation par l’A.R. du 6 juin 2013) doit, conformément à l’article 159 de la Constitution, écarter l’application de cette disposition.
(Décision commentée)
L’action en cessation d’une discrimination est devenue sans objet si la discrimination a cessé, l’acte étant définitivement accompli et aucun risque de récidive n’existant. La compétence du juge dans le cadre de cette saisine étant restrictive, il ne peut connaître d’autres demandes, telles qu’une demande d’injonction de reprendre la poursuite de relations professionnelles, dès lors qu’il a été mis fin à celles-ci depuis. Toute autre action doit être introduite conformément au dispositif légal, ainsi une demande d’indemnisation.
Les cotisations de sécurité sociale payées par le travailleur indépendant qui poursuit une activité professionnelle après l’âge de la retraite n’ouvrent pas le droit à des indemnités en cas d’incapacité de travail. Il existe dès lors une différence de traitement entre celui qui n’a pas atteint l’âge de la pension et qui peut bénéficier de telles indemnités et celui qui a atteint cet âge et ne le peut pas. Cette différence de traitement ne constitue cependant pas une discrimination en raison de l’âge, l’article 7 de la loi du 10 mai 2007 prévoyant que ne constitue pas une discrimination directe la distinction directe qui est objectivement justifiée par un but légitime, les moyens de réaliser ce but étant appropriés et nécessaires.
Le droit à la liberté d’expression que lui garantit l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme justifie que, malgré le devoir de loyauté qui s’impose à lui, le dirigeant d’un service voulu indépendant par le législateur européen - inquiet de la manière dont son autorité de tutelle envisage cette indépendance (dans les faits et au travers de ses projets d’arrêtés royaux) et qui, constatant qu’en dépit de mises en demeure de la Commission européenne, elle ne transpose pas correctement des directives européennes - fasse légitimement part de ses réserves à des tiers directement intéressés par cette problématique, qu’il s’agisse de membres du Gouvernement ou de la Chambre. Ce fait ne peut donc fonder un licenciement pour motif grave.
Même si le conseil d’administration attendait un appui de sa part, il ne peut être reproché à un directeur de ne pas avoir soutenu, au cours d’une réunion provoquée par les membres de son équipe, une position qu’il désapprouvait. Si le travailleur a l’obligation d’agir conformément aux ordres et instructions qui lui sont donnés (LCT, art. 17, 2°), cette subordination ne s’assimile pas à une soumission aveugle et ne le prive ni de tout droit critique ni des libertés garanties par les articles 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et 19 de la Constitution.
(Décision commentée)
Le dispositif de l’article 28, § 1er de la loi anti discrimination est comparable sur le plan de la charge de la preuve à celui de l’article 32undecies de la loi sur le bien-être de sorte que ce qui est valable pour celui-ci l’est également pour celui-là.
Le respect des droits de la défense englobe le principe du contradictoire. L’exigence du débat contradictoire est une composante du droit au procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le respect du caractère contradictoire de la procédure exige que chaque partie ait non seulement la faculté de faire connaître les éléments qui sont nécessaires à sa défense et au succès de ses prétentions, mais aussi celle de prendre connaissance et de discuter toute pièce ou observation présentée au juge en vue d’influencer sa décision.
Le non-fondement de la demande n’est une sanction adéquate du dépassement du délai raisonnable qu’en cas de violation des droits de la défense, lorsque le défendeur peut légitimement faire valoir que le temps a provoqué une déperdition effective de moyens de preuve et que, sans cette déperdition, il aurait eu de grandes chances de pouvoir faire triompher son point de vue. En-dehors de cette hypothèse assez exceptionnelle, le dépassement du délai raisonnable peut justifier une suspension du cours des intérêts.
(Décision commentée)
Par locaux habités au sens de la loi du 6 novembre 1972 concernant l’Inspection du travail, il ne faut pas distinguer, en ce qui concerne la notion de domicile, le local habité et le jardin lui-même. Il faut entendre par là l’habitation, mais également les dépendances (jardin, cour, remises, garages, allées) de cette habitation, où la personne est amenée à vivre sa vie privée. Depuis l’entrée en vigueur du Code pénal social, il y a obligation, pour la visite d’un espace habité, d’obtenir l’autorisation du juge d’instruction.
(Décision commentée)
Le travailleur qui entend faire valoir le caractère discriminatoire de son licenciement doit avancer des faits suffisamment forts et pertinents. Il doit apporter des éléments permettant de faire présumer l’existence d’une discrimination, à savoir qu’il a été traité différemment que d’autres personnes dans une situation similaire. Ce n’est qu’une fois ceux-ci établis que l’employeur doit prouver qu’il n’a pas eu un comportement discriminatoire. Un licenciement non discriminatoire peut cependant être abusif au sens de la théorie générale de l’abus de droit, la preuve à rapporter dans cette hypothèse suivant des règles distinctes.
Dès lors qu’une procédure en paiement de cotisations au statut social a duré plus de 24 ans, le délai raisonnable est manifestement dépassé et le cours des intérêts doit être suspendu pour la période d’inertie de la caisse, cette attitude étant fautive dans le chef d’une institution de sécurité sociale dont l’une des missions légales consiste à récolter les cotisations.
(Décision commentée)
Article 8 de la C.E.D.H. et droit à l’aide sociale - Dès lors qu’un étranger ne peut être expulsé sous peine de violer une disposition internationale directement applicable (garantie du maintien de l’unité familiale), il ne peut plus être considéré comme étant en séjour illégal au sens de l’article 57, § 2 de la loi du 8 juillet 1976.
Les articles 3 et 8 de la C.E.D.H. sont des engagements souscrits par l’Etat belge au niveau international, qui ont un effet direct. L’article 57, § 2, ne saurait trouver à s’appliquer à l’étranger en séjour illégal s’il y a atteinte à ces deux dispositions de la Convention.
Lorsqu’une partie manifeste son intention de rompre, celle-ci mettant en cause la protection organisée par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, le juge des référés peut intervenir et fixer des mesures urgentes et provisoires aussi longtemps que le contrat est en cours.
(Décision commentée)
Vu le principe de l’interdiction de discrimination des travailleurs à temps partiel contenu dans la loi du 5 mars 2002 – qui est la transposition de la Directive 97/81CE du Conseil du 15 décembre 1997 -, l’ancienneté pécuniaire de cette catégorie de travailleurs ne peut être calculée différemment de celle des travailleurs à temps plein. Ainsi, elle ne peut être proratisée en fonction du régime de travail effectif. Le règlement d’un employeur public qui le prévoirait ne peut être appliqué, s’agissant d’une différence de traitement prohibée.
Pour pouvoir être imputé à la société faisant l’objet de l’action, il importe que le comportement discriminatoire émane d’une personne légalement habilitée à engager celle-ci de par les fonctions qu’elle exerce en son sein ou qui, même sans disposer de ce pouvoir, se comporte publiquement comme tel. La société ne peut, en revanche, être mise en cause en cas de déclaration discriminante émanant d’une personne ne disposant d’aucun pouvoir décisionnel en son sein ou dont le public ne pouvait supposer qu’il s’exprimait qualitate qua.
(Décision commentée)
Non-respect du délai raisonnable d’une procédure administrative (instruction d’un dossier chômage) – sanction : obligation d’établir un dommage en lien causal avec la faute établie par la violation du principe du délai raisonnable
En refusant à un membre suppléant au CPPT l’application d’une CCT de stabilité d’emploi au motif que l’octroi des indemnités de protection que lui vaut son statut syndical est toujours plus favorable que l’octroi, aux travailleurs non protégés, des indemnités et avantages dus en application de cette CCT, l’employeur a recours à un critère de distinction intrinsèquement suspect au sens de l’article 28 de la loi du 10 mai 2007.
Si en cas de licenciement multiple les modalités ne doivent pas être identiques, elles ne peuvent cependant être exclues du champ d’application de la loi dès lors qu’elles laissent apparaître, dans des situations sinon identiques en tout cas comparables, des différences de traitement fondées, notamment, sur l’âge, le sexe, la couleur de peau, le handicap ou l’appartenance à un mouvement religieux, idéologique ou syndical.
À aucun moment, la Cour européenne des droits de l’homme n’a considéré que l’article 6 de la Convention, éventuellement combiné avec l’exigence d’effectivité découlant de son article 13, doit être interprété comme faisant obligation de donner à un recours administratif ou judiciaire dirigé contre une décision d’une institution de sécurité sociale un caractère suspensif, notamment lorsque cette décision a pour effet de refuser l’octroi d’une dispense ou d’interrompre le bénéfice d’une prestations
(Décision commentée)
Sanction de discrimination à l’embauche et propos racistes proférés par un collègue
(Décision commentée)
Indemnité de maternité : non-cumul avec l’indemnité pour discrimination prohibée
(Décision commentée)
A la différence de la législation en matière de harcèlement moral au travail, la loi du 10 mai 2007 ne prévoit pas d’intervention d’un conseiller en prévention. La plainte peut être introduite directement auprès de l’employeur, mais elle doit être motivée, datée, signée et notifiée par lettre recommandée à la poste.
Amende administrative - délai de 4 ans entre la constatation des faits et la décision - pas de dépassement du délai raisonnable
(Décision commentée)
Répartition de la charge de la preuve
(Décision commentée)
Recevabilité de la demande – acte ayant cessé et possibilité de récidive étant exclue
(Décision commentée)
Changement de sexe – licenciement discriminatoire – licenciement abusif
(Décision commentée)
Décision refusant le droit de séjour et/ou la protection subsidiaire - obligation de l’Etat de prendre en charge les besoins élémentaires de l’intéressé pendant l’instruction du recours - question à la CJUE - art. 47 Charte des droits fondamentaux de l’U.E.
Obligation pour le demandeur d’avancer des faits suffisamment forts et pertinents susceptibles de faire présumer l’existence d’une discrimination
(Décision commentée)
Limite d’âge pour la collaboration d’un hôpital avec un médecin - action en cessation
Conditions - obligation de demander au juge d’ordonner la cessation - principe dispositif
(Décision commentée)
Violation de domicile – preuve illégale
Refus d’engagement ou de réengagement justifié par l’état de grossesse : discrimination directe
(Décision commentée)
Handicap – notion – obligation de reclassement
Examen factuel des aménagements raisonnables eu égard aux obligations contenues dans l’A.R. du 28 mai 2003 et en fonction des recommandations du conseiller en prévention-médecin du travail
(Décision commentée)
Conditions de licenciement – prestation du préavis
(Décision commentée)
Cotisations de sécurité sociale – dépassement du délai – incidence sur les intérêts
(Décision commentée)
Absence de cumul avec l’indemnité de protection - harcèlement moral
Sanction : abus de droit - Commission européenne - destinataires des directives : Etats (oui) ; Institutions européennes (non) - conséquences sur l’effet vertical
(Décision commentée)
Cotisations au statut social des travailleurs indépendants – dépassement du délai - conséquences
Inaction procédurale – Application de la théorie de l’abus de droit – Réparation du dommage causé : suspension du cours des intérêts de retard durant la période (17 ans) pendant laquelle l’inertie de la procédure est imputable à la caisse d’assurances sociales
Procès en matière civile - obligation pour les parties d’apporter toutes informations utiles à la solution du litige - défense téméraire et vexatoire - responsabilité
Décision fondée à la fois sur des éléments liés à l’âge et d’autres critères, non discriminatoires : recherche du motif prépondérant - renvoi à C.J.U.E., 16 octobre 2007, n° C-411/05
Un syndicat peut-il légitimement licencier un membre de son personnel sur pied de ses convictions politiques ?
Conditions de licenciement - refus d’adhésion à un plan social - absence de preuve d’une discrimination fondée sur le genre
(Décision commentée)
Amendes administratives – notion de dépassement du délai raisonnable pour être jugé
(Décision commentée)
Obligation des services publics d’honorer les prévisions justifiées qu’ils font naître dans le chef des citoyens – conséquences de la violation du principe de bonne administration
(Décision commentée)
Discrimination sur la base du sexe
Décision de suspension du contrat de travail pour cause de force majeure (inaptitude à la fonction) - discrimination pour motifs de conviction syndicale et de santé - motifs non établis
Il ressort des arrêts HILL et STAPLETON ainsi que NIMZ que l’ancienneté à prendre en compte en cas de prestations à temps partiel doit se calculer en fonction des années prestées et non en fonction de la durée du travail pendant celles-ci.
(Décision commentée)
Article 6 de la C.E.D.H. – Sanction
Octroi d’une assurance de groupe - personnel universitaire - contrat à durée déterminée
Notion de délai raisonnable - conséquences en cas de dépassement
Cotisations au statut social - article 6, § 1er, C.E.D.H. - affaire en cours de puis 29 ans
Affaire en cours depuis plus de 10 ans - dépassement du délai raisonnable (affaire ne présentant pas une complexité exceptionnelle) - article 6 CEDH - conséquences - caractère non adéquat de la sanction de non fondement de la demande
(Décision commentée)
Affaire en cours depuis plus de 25 ans - dépassement du délai raisonnable - article 6 CEDH - conséquences - distinction entre le principal et les intérêts
Le fait que, dans le chef des ouvriers, les pécules de vacances soient calculés sur la base de la rémunération de l’année en cours et non, comme dans celui des employés, sur celle du mois durant lequel les vacances sont prises ou, en cas de rémunération variable, sur celle de l’année qui précède, peut paraître plus favorable en ce qu’il permet qu’il soit tenu compte d’adaptations salariales intermédiaires. Il est néanmoins justifié compte notamment tenu du système de rétribution propre au employés, lesquels peuvent non seulement être payés à la commission, mais aussi être intéressés aux résultats de l’entreprise ou ouvrir droit à diverses autres primes. Cette situation justifie des choix qui ne manquent ni de pertinence, ni d’objectivité.
Niveau comparativement très faible de réengagement des anciens travailleurs protégés
Incapacité définitive d’effectuer certains mouvements (nettoyeuse) - handicap au sens de la directive (oui) - appréciation de la force majeure par l’examen des aménagements raisonnables
Amendes administratives - inculpation : moment où l’intéressé est invité par l’autorité administrative à présenter ses moyens de défense
Amendes administratives – prise de cours du délai au moment où l’intéressé est inculpé pour avoir commis un fait punissable
Appréciation du caractère raisonnable de la durée de la procédure suivant les circonstances de la cause – jurisprudence de la CEDH quant aux critères
Une demande de revalidation introduite plus de 25 ans après le jugement à revalider porte gravement atteinte aux droits de la défense, fait échec à un procès équitable et n’est pas conforme au principe de loyauté que se doivent les parties
(Décision commentée)
Modalités licites du droit de grève - conditions
Suspension du cours des intérêts si le demandeur ne diligente pas la procédure - point de départ de la violation du délai raisonnable : acte introductif d’instance
Amendes administratives - lenteurs dues à l’administration - conséquences
Pouvoirs du juge en référé - irrecevabilité de la demande de faire cesser le licenciement (consommé)
Suspension du cours des intérêts judiciaires
(Décision commentée)
Maladies rares, pathologies lourdes et nomenclature
Imposer le respect des conditions relatives à l’occupation de la main-d’œuvre étrangère pour l’octroi des allocations de chômage revient à établir une différence de traitement entre les Belges ou étrangers dispensés de permis de travail et les autres étrangers, ce qui constitue une discrimination fondée sur la nationalité
(Décision commentée)
Inaction procédurale - conditions de l’abus de droit - conséquences sur les intérêts
Article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme - juges sociaux représentant une organisation syndicale
Les apprentissages visés par la limitation de l’article 4 de l’arrêté royal du 28 novembre 1969 pour les formations, dispensées en EFT, ayant pour objet de favoriser l’accès à l’emploi ou à une formation qualifiante des personnes éprouvant des difficultés à participer au monde du travail pour des raisons sociales et culturelles. Il en résulte que, si discrimination il y a, elle vise deux catégories distinctes de personnes et se justifie en fonction des buts distincts poursuivis. N’est pas davantage discriminatoire l’exonération instaurée, en fonction de leur âge, du chef de la formation de certains jeunes défavorisés ne pouvant prétendre à une allocation de chômage ou de remplacement et n’entrant pas en considération pour pouvoir suivre une formation professionnelle : le législateur était, en effet, en droit d’instaurer un régime particulier de sécurité sociale pour ce groupe particulier de personnes, à savoir les jeunes défavorisés étant, en principe, en âge de bénéficier des allocations familiales.
Discrimination d’une déléguée syndicale - constat erroné d’une force majeure mettant fin au contrat – injonction de mettre un terme immédiat à la situation créée (la situation n’étant pas analysée juridiquement comme un licenciement)
A priori le simple fait d’être en incapacité travail ne vaut pas présomption que le licenciement est en lien avec l’état de santé actuel ou futur, ceci revenant à perdre de vue que l’aptitude d’un employé à effectuer ses prestations professionnelles est au cœur de la relation de travail. En l’espèce, le tribunal relève cependant que c’est uniquement parce que le travailleur était en incapacité de travail que l’employeur a mandaté un bureau de détectives privés et un huissier de justice afin de le suivre et que la mission leur confiée consistait précisément à vérifier la réalité de ladite incapacité. Le seul manquement invoqué pour rompre le contrat de travail (motif grave) est dès lors intrinsèquement lié à l’incapacité de travail.
Le simple fait de pouvoir se prévaloir du critère protégé ne peut, à lui seul, suffire à renverser la charge de la preuve et encore moins à emporter une conviction définitive. Le travailleur ne peut ainsi se borner à soutenir qu’il a été licencié le jour de son retour d’incapacité de travail pour qu’il y ait présomption automatique de discrimination et a fortiori pour que le juge puisse conclure à l’existence d’une discrimination. Encore doit-il, pour emporter cette conviction, mettre en avant d’autres éléments comme, p.ex., le licenciement systématique des travailleurs en incapacité de travail au sein de l’entreprise, le motif figurant sur le formulaire C4 ou encore une rupture qui serait intervenue le jour de la remise d’un certificat de prolongation.
Il y a lieu de conclure à l’absence de discrimination lorsque ce qui était problématique et a mené au licenciement de la travailleuse ne sont pas ses absences justifiées pour cause de maladie, mais ses absences non rémunérées qui n’étaient ni justifiées par un motif lié à l’état de santé, ni même annoncées en temps réel à la responsable d’agence, ce qui avait pour conséquence de désorganiser le service et de rendre impossible le remplacement de cette dernière par d’autres travailleurs.
Il résulte de l’article 6 de la loi cadre du 10 mai 2007 que ses dispositions ne s’appliquent pas au harcèlement dans la relation de travail, qu’il soit discriminatoire ou non, les victimes de celui-ci ne pouvant recourir qu’aux dispositions de la loi du 4 août 1996 sauf en ce qui concerne la protection contre les mesures préjudiciables prises par l’employeur à l’égard des travailleurs qui ont fait un signalement ou déposé une plainte ou une action en justice en se basant sur sa propre violation.
(Décision commentée)
La notion d’état de santé au sens de l’article 3 de la du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination vise l’état de santé au moment du licenciement.
Dès lors que la présomption légale est activée, l’employeur doit établir que le licenciement n’est pas fondé sur celui-ci mais sur d’autres motifs : ainsi, en cas de réorganisation du service et de désorganisation entraînée par une longue incapacité de travail, il doit prouver le lien entre les motifs invoqués et la nécessité du licenciement. Entrent notamment dans le contrôle judiciaire de la vérification du (des) motif(s) avancé(s) par l’employeur l’examen des plannings de travail, des décisions prises en vue du recours à sous-traitance ou (pour l’employeur public) à la privatisation d’un service ainsi encore que les motifs d’engagement d’un travailleur venant exercer les fonctions du travailleur licencié.
Il convient de ne pas apprécier de manière trop restrictive les présomptions de l’existence d’une discrimination liée à un critère protégé, sous peine de ne pas atteindre l’objectif du législateur, qui est de protéger la partie la plus faible à travers le système de partage de la charge de la preuve. Dans de nombreux cas c’est un ensemble de faits combinés, soit un faisceau d’indices, qui confère au comportement du défendeur un caractère suspect et permet ainsi d’établir une présomption de discrimination.
(Décision commentée)
Pour pouvoir être considéré comme handicap, il ne faut pas nécessairement un pourcentage élevé d’I.P.P. En l’espèce, est maintenue la contrainte d’éviter le port répété de charges lourdes, ce qui fait clairement obstacle à la pleine et effective participation de l’intéressé à sa vie de sapeur-pompier, qui est sa fonction opérationnelle de base. Cette entrave à sa participation pleine et effective à la vie professionnelle est durable.
(Décision commentée)
Les difficultés pour l’employeur relatives à l’organisation du travail opérationnel constituent certes une charge, mais celle-ci n’est pas disproportionnée et est « relativement normale ». Elle fait partie « d’un bon management des ressources humaines, soucieux du bien-être du personnel, de nature à permettre à l’institution d’assurer ses missions de service public au bénéfice des citoyens et de rester attractive tant pour le personnel en place que pour les futurs candidats à de tels emplois ».
Un licenciement ne peut être considéré comme étant basé sur l’état de santé du travailleur du seul fait qu’il soit intervenu peu après la remise d’un certificat de prolongation du mi-temps médical de l’intéressé dès lors, d’une part, que de précédentes prolongations de cet état sont restées sans incidence sur la poursuite des relations de travail et, d’autre part, que, entre la prolongation de ce mi-temps médical et le licenciement, s’est tenue une réunion d’équipe, suivie d’une altercation entre le travailleur et son nouveau responsable avec qui il entretenait une relation conflictuelle, de nature à tendre l’ambiance générale de travail et à justifier la rupture du contrat.
Le fait que le licenciement intervienne alors que le travailleur, ayant repris le travail après plusieurs semaines d’absence pour raisons médicales, venait de déposer un certificat pour couvrir une nouvelle période d’incapacité n’implique pas, en soi, l’existence d’une discrimination sur la base de l’état de santé. Tel n’est pas le cas lorsque les motifs invoqués, et dûment établis, pour justifier le licenciement sont liés au comportement et à l’attitude du travailleur (en l’espèce : dégradation des relations depuis son retour au travail se traduisant par un désintérêt constant pour sa fonction, son désinvestissement ainsi que la mise à l’écart volontaire et le dénigrement de certains membres du personnel).
Dès lors que l’employée prouve qu’à l’issue d’un long processus de recrutement, elle aurait été promue si la direction générale n’avait pas dû approuver sa promotion et d’un autre côté que la société ne démontre pas le motif objectif pour lequel elle a été in extremis évincée, l’on peut retenir que seul le critère de l’état de santé explique la différence de traitement dont elle a été l’objet.
(Décision commentée)
L’existence d’une convention collective (en l’espèce transport public de personnes - CCT du 30 juin 2008 prévoyant que le travail dans un régime de prestations à mi-temps peut être autorisé pour une durée maximale de trois mois en vue d’une reprise de prestations à temps plein – avec possibilité de prolongation exceptionnelle) ne peut exonérer l’employeur de son obligation d’assurer au titre d’aménagements raisonnables un mi-temps médical, vu l’obligation pour lui de respecter la hiérarchie des normes figurant à l’article 51 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. Cette convention collective ne peut primer la loi.
Par ailleurs, l’aménagement raisonnable implique une analyse des besoins concrets de la personne handicapée. Il s’agit de statuer sur la situation actuelle du travailleur et non d’anticiper les éventuels cas futurs d’un recours abusif (ou non) au temps partiel. La reprise progressive du travail, qui est un aménagement raisonnable au sens de la loi anti – discrimination, n’est ni insurmontable ni disproportionnée. Sans négliger la possibilité d’existence de difficultés d’organisation et de planification du travail, le Président du tribunal retient en l’espèce qu’il faut avoir égard au fait que l’intéressé ne travaille plus depuis plus de deux ans, et ce malgré sa volonté de reprendre ses fonctions de façon compatible avec son handicap. Le refus d’aménagements raisonnables – et par conséquent la discrimination – étant établis, il fait droit à la demande.
Dans la mesure où le licenciement intervient pendant une période d’incapacité de travail et où le formulaire C4 fait clairement référence aux absences motivées du travailleur, la preuve est apportée à suffisance de droit d’éléments permettant de présumer l’existence d’une discrimination basée sur l’état de santé. Il appartient alors à l’employeur de démontrer que le traitement différencié était objectivement justifié par un but légitime (contrôle de légitimité) et que les moyens de réaliser ce but étaient appropriés et nécessaires (contrôle de proportionnalité).
(Décision commentée)
Lorsqu’un employeur licencie un travailleur non en raison de sa maladie mais de l’impact de l’absentéisme qui en découle sur l’organisation du travail, il est question d’une distinction indirecte fondée sur l’état de santé, laquelle est susceptible de constituer un but légitime pour peu que l’intéressé prouve qu’il y a effectivement eu désorganisation du service et que le licenciement était de nature à constituer une mesure appropriée et nécessaire pour la bonne organisation du travail.
Tel n’est pas le cas lorsque, sachant à ce moment que, ne disposant que de deux camions, il n’aurait pas de place pour trois chauffeurs, il a, en engageant un remplaçant sous CDI moins d’une semaine après l’accident survenu à l’un de ses chauffeurs, en réalité fait le choix de ne pas permettre à celui-ci de reprendre son poste à la fin de son incapacité. En le licenciant le jour de sa reprise annoncée de travail, la société a, partant, usé de moyens disproportionnés pour rencontrer un problème qui, en définitive, ne se posait plus à ce moment du fait de cet engagement antérieur. Elle a, en outre, traité la victime de l’accident moins favorablement que le nouveau chauffeur engagé sous CDI puisque son absence lui a coûté sa place au sein de la société.
Reste néanmoins que ce licenciement aurait été décidé, même en l’absence de discrimination. La désorganisation suite à l’incapacité du travailleur concerné était en effet réelle compte tenu du fait que la société, qui possédait deux camions, ne disposait plus que d’un seul chauffeur en son sein. Il fait, en outre, peu de doutes que, même si l’employeur avait été diligent en engageant, dans un premier temps, un travailleur dans le cadre d’un contrat temporaire, une absence de deux ans aurait fini par le contraindre à engager quelqu’un de manière pérenne après un certain temps ne serait-ce que pour respecter les règles en matière de contrats de remplacement ou à durée déterminée successifs.
Dans cette mesure, le tribunal fixe à trois mois de rémunération l’indemnité forfaitaire due pour discrimination en raison de l’état de santé.
L’origine d’un travailleur ne signifie pas automatiquement que, en cas de licenciement, il est victime de discrimination. Comme tous les travailleurs présentant un critère protégé, ceux d’origine étrangère peuvent être classés en trois catégories, étant (i) les travailleurs qui sont qualifiés pour le poste qu’ils occupent, (ii) ceux qui ne sont, objectivement, pas qualifiés pour ledit poste et (iii) ceux que l’on considère comme n’étant pas qualifiés en raison du fait qu’ils présentent le critère protégé.
Les origines, quelles qu’elles soient, étant tout autant compatibles avec la compétence qu’avec l’incompétence, seules les personnes relevant de la troisième catégorie peuvent, en définitive, se prévaloir de la loi anti-discrimination, étant entendu que formuler des critiques à l’encontre d’un travailleur n’est pas synonyme de racisme au seul motif que celui qui en fait l’objet est d’origine étrangère.
(Décision commentée)
L’indemnité de protection d’un travailleur protégé au sens de la loi du 19 mars 1991 est cumulable avec une indemnité pour discrimination au sens de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination.
Dès lors qu’un travailleur, occupé dans le call center d’un service public, est déclaré définitivement inapte à sa fonction – étant atteint d’une sclérose en plaques -, mais qu’il peut effectuer un travail administratif à raison d’un mi-temps, le refus de l’employeur public de mettre en place l’aménagement raisonnable est discriminatoire. Il est dès lors condamné à mettre fin à la discrimination et à mettre celui-ci en place. L’indemnité de six mois est allouée au travailleur.
Les règlements de pension prévoyant le versement d’un capital décès selon l’état civil du travailleur en fonction d’un ordre de dévolution qu’il a choisi et prévoyant des distinctions en fonction de la catégorie de bénéficiaire, le tribunal examine d’abord si ces règles ont un but légitime. Il conclut par l’affirmative, celui-ci étant d’assurer une sécurité financière pour les personnes qui se trouvent dans une situation de dépendance économique vis-à-vis de la personne affiliée. Sur la question des moyens mis en œuvre, il retient que ceux-ci sont appropriés et nécessaires, les règlements ayant pour objet de rencontrer au mieux les besoins des personnes de l’entourage de l’affilié – décédé lui survivant en tenant compte de la réalité de la situation et des personnes concernées. L’entourage du défunt diffère en effet selon qu’il soit marié/cohabitant/en ménage, isolé mais avec enfants à charge ou isolé simple.
La société qui a introduit une requête unilatérale en vue d’obtenir l’évacuation de piquets de grève était à-même d’introduire la procédure vis-à-vis de personnes déterminées. Ce n’est que si, après l’introduction d’une telle procédure, il s’avérait que les membres du piquet se remplaçaient régulièrement dans le but de faire obstacle aux mesures ordonnées qu’il était alors avéré que le recours à la procédure contradictoire n’était pas réaliste, pouvant être invoquée à ce moment « l’absolue nécessité » de recourir à la requête unilatérale. Dans une telle hypothèse, la meilleure manière de procéder est de combiner la procédure contradictoire et la procédure unilatérale, afin de respecter au mieux le principe fondamental du contradictoire (avec renvoi à la doctrine et à la position du Comité européen des droits sociaux). Le président ajoute qu’en l’espèce, il n’apparaît d’aucun élément du dossier que les membres du piquet changeaient en vue de se soustraire aux mesures judiciaires.
En présence de piquets de grève, il s’agit de vérifier le caractère nécessairement pacifique de l’action collective. Suite à la décision du 13 septembre 2011 du Comité européen des droits sociaux, il est admis que les ordonnances de référé doivent répondre aux exigences de stabilité et de prévisibilité nécessaires pour assurer une sécurité juridique suffisante pour les deux parties. La Présidente du tribunal souligne encore que la Belgique a ratifié le protocole qui confère au Comité européen des droits sociaux un monopole quant à l’interprétation juridique de la Charte et que seuls les actes de violence, d’intimidation ou qui ne respectent pas la liberté de ne pas faire grève ne sont pas protégés. Les restrictions posées au droit de grève doivent dès lors satisfaire aux exigences de l’article G, dont celle du degré de prévisibilité et de stabilité nécessaires pour assurer la sécurité juridique. Or, une procédure unilatérale est difficilement compatible avec ces principes. Il faut dès lors faire preuve d’une particulière circonspection s’il est demandé de condamner à des astreintes dans le cadre d’une telle procédure unilatérale, l’indétermination du débiteur empêchant notamment de fixer adéquatement le montant de celles-ci.
Il est permis de présumer un comportement discriminatoire dans le chef de l’employeur qui, sans établir que cette mesure était appropriée et nécessaire pour éviter que l’organisation du travail au sein de la société soit perturbée, licencie un travailleur après l’avoir convoqué afin d’évaluer lui-même sa capacité à reprendre le travail, ce au simple motif qu’il a des doutes sur la réalité des raisons justifiant ses absences et explique ceux-ci par le changement de médecin attestant l’incapacité de l’intéressé, remettant ainsi en cause la validité des certificats médicaux délivrés à celui-ci.
Dès lors que la situation médicale du travailleur répond à la notion de handicap au sens de la loi du 10 mai 2007, se pose la question des aménagements raisonnables dont la victime pourrait solliciter la mise en place pour lui permettre de conserver une activité adaptée à ses capacités résiduaires ainsi que de la possibilité laissée à la personne qui devrait les implémenter de ne pas les adopter si elles lui imposent une charge disproportionnée. Tel est le cas lorsque les aménagements souhaités (poste de travail sans manutentions lourdes) impliquent concrètement de ne plus travailler seule en salles d’accouchement, post partum ou néonat pour pouvoir bénéficier de l’aide d’un collègue lorsqu’il y a lieu de procéder à de telles manutentions ou d’être affectée exclusivement à des consultations prénatales, ce qui va à l’encontre du souhait légitime de la maternité de conserver le nursing intégré qui y a cours, avec la polyvalence de tout le personnel qu’elle implique.
Rapporte la preuve de plusieurs indices permettant de présumer l’existence d’une discrimination basée sur son état de santé actuel ou futur la travailleuse, en incapacité de travail prolongée lors de la notification du congé avec préavis, dont l’état a fait l’objet de contrôles systématiques de la part de son employeur (mécontent de la situation), à qui elle venait de faire part de la prolongation de son incapacité dans les jours ayant précédant la décision de rompre, celle-ci n’étant par ailleurs pas spontanément motivée.
Le cumul entre l’indemnité compensatoire de préavis et l’indemnité due en cas de discrimination est permis. En effet, la première répare tout dommage, tant matériel que moral, résultant de la rupture du contrat de travail alors que la seconde tend à la réparation du préjudice subi en raison de la discrimination dont est victime le travailleur en raison du caractère discriminatoire du motif à la base de son licenciement.
Pour le travailleur qui s’estime victime de discrimination, un faisceau d’indices suffit pour se conformer à l’objectif du législateur (européen ou national) qui est de protéger la partie la plus faible à travers un système de partage de la charge de la preuve. Il n’y a pas lieu, à ce stade, d’imposer au demandeur la preuve de la discrimination elle-même. Il faut toutefois que les faits qu’il allègue soient établis et qu’ils soient suffisamment graves, pertinents et spécifiquement imputables à l’auteur de la discrimination (avec renvoi à C. const., 12 février 2009, n° 17/2009, B.93.3 et 11 mars 2009, n° 39/2009, B.52). Tel n’est pas le cas lorsque l’intéressé, prétendant souffrir de burnout, et qui semble en avoir informé sa supérieure hiérarchique par simple sms, ne dépose aucun document médical en attestant la réalité ni ne démontre que son état aurait été causé par une surcharge de travail.
L’article 9, § 3, de la C.C.T. n° 109 précisant que l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas cumulable avec toute autre indemnité due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail (à l’exception de quatre indemnités spécifiquement visées), le tribunal conclut que l’indemnité pour discrimination fondée sur l’état de santé constitue une telle indemnité due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail et qu’elle n’est pas cumulable avec l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable.
La personne qui s’estime victime d’une discrimination doit invoquer des comportements ou des faits concrets et clairement définis de personnes identifiables, desquels il est possible d’inférer qu’il y a bel et bien discrimination. Diverses affirmations décousues et une déclaration « sur l’honneur » de la personne qui s’estime victime de discrimination ne suffisent pas.
A supposer qu’il faille considérer que le texte de la C.C.T. n° 109 n’exclut pas le cumul entre l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable et celle due pour licenciement discriminatoire, reste que ces indemnités ont un fondement et un objet identiques. Elles trouvent leur cause dans la légitimité/l’illégitimité des motifs présidant au licenciement et ont chacune pour vocation de sanctionner la faute de l’employeur qui n’est pas prudent et diligent en l’obligeant à indemniser le travailleur. L’octroi de l’une prévient ainsi l’octroi de l’autre.
La cour de Justice a progressivement dégagé que l’interdiction de discrimination ne doit pas avoir trait à la grossesse elle-même mais à d’autres situations physiques propres au sexe féminin, ainsi un traitement de fertilité ou une fausse couche, ou encore une interruption de grossesse. Toutes ces situations sont protégées par la loi « genre », le tribunal précisant que seules les femmes peuvent subir un avortement, avec ses conséquences préjudiciables dans le cadre de la relation de travail. Que la loi « genre » ne mentionne pas spécifiquement l’avortement comme critère protégé n’énerve en rien cette règle. Un licenciement en lien avec un avortement est protégé par la loi.
(Décision commentée)
L’indemnité pour licenciement discriminatoire ne peut se cumuler avec l’indemnité C.C.T. n° 109, celle-ci ne pouvant l’être avec une autre indemnité due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail, à l’exception d’une indemnité de préavis, d’une indemnité de non-concurrence, d’une indemnité d’éviction ou d’une indemnité complémentaire payée en plus des allocations sociales (article 9, § 3, de la C.C.T).
En outre, les deux indemnités ont un fondement et un objet identiques, le fondement étant le motif du licenciement – motif illégitime – et l’objet la sanction de la faute de l’employeur qui n’est pas prudent et diligent. Quant au dommage, il est le même, étant celui causé par ce comportement.
Toute action qui a pour objet l’exécution d’un avantage lié au contrat de travail et dont la cause se fonde sur un fait lié à l’exécution de ce contrat est, en principe, soumise à la prescription contractuelle d’un an. Tel est le cas de l’action en paiement des dommages et intérêts dus en raison d’une discrimination commise durant l’exécution du contrat de travail. Cette prescription peut toutefois être portée à cinq ans dans l’hypothèse où la discrimination reprochée est constitutive d’infraction pénale. Ainsi en va-t-il des comportements visés au Titre IV de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination.
La circonstance que le travailleur n’ait pas initié la procédure « trajet de réintégration » ne donne, naturellement, pas à son employeur l’autorisation de le licencier, qui plus est sur la base d’un critère protégé, sans envisager la question de savoir si l’aménagement de son poste de travail était (im)possible ou (difficilement) réalisable.
(Décision commentée)
Dans une maison de repos et de soins, qui doit faire face à ses obligations journalières vis-à-vis de résidents qu’elle ne peut laisser sans soins, il paraît légitime, après s’être accommodé tant bien que mal de la situation par le biais de mesures palliatives (adaptation des tableaux de planning pour reporter la charge de travail sur ses collègues, appel à des intérimaires, conclusion de CDD), de vouloir mettre fin à la désorganisation générée par les fréquentes incapacités de la travailleuse licenciée, une distinction directe pouvant, notamment, être justifiée par un but légitime et pour peu que les moyens de réaliser ce but soient appropriés et nécessaires.
(Décision commentée)
L’employeur (public) ayant présenté le licenciement comme lié à l’état de santé – et ce eu égard au courrier et au document C4, qui reprend comme motif précis du chômage la désorganisation du service due à « de nombreux accidents de travail et absences du travailleur » –, le tribunal constate que, lors de son licenciement, l’intéressé n’était plus en incapacité, et ce depuis un mois et demi. La circonstance que l’employeur craint de nouvelles absences confirme qu’est en cause le critère de l’état de santé actuel ou futur. Les faits permettant de présumer la discrimination fondée sur l’état de santé sont dès lors établis et l’employeur a la charge de la preuve de l’absence de discrimination.
La preuve de la discrimination peut résulter des appréhensions émises par l’employeur quant à la capacité du travailleur de reprendre le travail. De la même manière, elle peut découler de la chronologie des étapes ayant mené au licenciement. Elle ne peut cependant résulter du seul fait que le licenciement intervient en période d’incapacité de travail. En d’autres termes, dès lors que la discrimination constitue un traitement défavorable en raison d’un critère protégé, le seul fait de justifier d’un tel critère et d’un traitement défavorable est insuffisant à démontrer le lien – fût-il ténu – entre ces deux éléments.
Dès lors que l’employée a été licenciée alors qu’elle était en incapacité de travail et que le motif avancé par l’employeur est son absence due à son état de santé et à ses incapacités, celui-ci doit établir que le licenciement n’est pas discriminatoire. La décision de licencier opère en effet une distinction directe du fait que la travailleuse a perdu son emploi alors qu’elle était en maladie. Elle a ainsi subi un traitement défavorable par rapport à tout autre travailleur ne présentant pas un problème de santé ayant nécessité des incapacités de travail. La preuve à rapporter par l’employeur est que le traitement différencié était objectivement justifié par un but légitime (contrôle de légitimité) et que les moyens de réaliser ce but étaient appropriés et nécessaires (contrôle de proportionnalité).
Si la lutte contre l’absentéisme peut, dans nombre d’hypothèses, apparaître légitime en ce qu’elle ne constitue, tout au plus, qu’un indice d’une discrimination indirecte qui sera vérifié par le processus du test de comparabilité, la défiance à l’égard de l’état de santé actuel ou futur est, par contre, une discrimination directe.
L’employeur justifiant le licenciement notamment en raison de l’absentéisme de l’employée, qui met régulièrement à mal l’équilibre de la filiale, il y a pour le tribunal des éléments qui permettent de présumer l’existence de la discrimination. Il appartient dès lors à la société de renverser la présomption, c’est-à-dire de prouver que le licenciement n’est pas intervenu en raison de l’état de santé ou qu’il était objectivement justifié par un but légitime, les moyens de réaliser celui-ci étant appropriés et nécessaires. Si, en effet, est discriminatoire le licenciement uniquement justifié par l’incapacité de travail, il n’en va pas de même s’il s’agit de répondre à un but légitime, étant de résoudre les problèmes de désorganisation sans qu’aucune autre mesure ne soit plus appropriée.
Tout en rappelant qu’une incapacité de travail participe des impondérables qui en soi augmentent la charge de travail et déstabilisent le travail et les habitudes du personnel, le tribunal constate qu’il n’est pas établi concrètement comment les absences en cause ont désorganisé le magasin. Aussi, suivre la position de la société impliquerait-il d’avaliser le licenciement d’un travailleur en incapacité.
Un travailleur dispose, comme toute personne, du droit à la liberté d’expression, lequel ne prend pas fin par son engagement dans les liens d’un contrat de travail, ce qui lui donne un droit de critique, qu’il est tenu d’exercer de manière raisonnable et lui autorise certaines prises de position.
En vertu de l’article 41, alinéa 1er, de la loi du 16 mars 1971, une analyse des risques doit être effectuée pour toute activité susceptible de présenter un risque spécifique d’exposition (dont la liste est fixée par le Roi) afin d’apprécier tout risque pour la sécurité ou la santé ainsi que toute répercussion sur la grossesse ou l’allaitement de la travailleuse ou la santé de l’enfant et afin de déterminer les mesures générales à prendre. Le non-respect des mesures de protection de la maternité est, dans la jurisprudence de la Cour de Justice, constitutif d’une violation du principe de non-discrimination fondé sur le sexe. Le fait de ne pas avoir procédé à une quelconque analyse des risques en violation de l’article 41 constitue un traitement moins favorable d’une femme lié à la grossesse et constitue de fait une discrimination directe fondée sur le sexe.
N’est pas discriminatoire le licenciement d’un travailleur intervenu, à l’occasion de son incapacité pour Covid-19, en raison de sa désinvolture à l’égard des règles sanitaires, laquelle a entraîné sa contamination et la fermeture de l’entreprise.
(Décision commentée)
Un refus d’embauche intervenu au motif que l’intéressé était le frère d’un membre du personnel (enseignante) déjà en poste est de nature à présumer une discrimination fondée sur la naissance, discrimination dont l’employeur doit démontrer l’inexistence. Il s’agit de prouver non seulement que la mesure n’est pas discriminatoire, mais également qu’elle n’est pas disproportionnée par rapport à l’objectif visant à prévenir les conflits et les risques psychosociaux. (Affaire tranchée dans le cadre du Décret de la Communauté française du 12 décembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination).
(Décision commentée)
Dès lors que la présomption d’un comportement discriminatoire est avérée, la preuve contraire peut être rapportée si l’employeur prouve que la désorganisation de l’entreprise était telle que le licenciement était la mesure appropriée. Même si le but poursuivi était légitime, le licenciement peut être discriminatoire si l’employeur n’a pas recherché une mesure moins dommageable (contrat de remplacement, appel à un service externe, etc.), alors même que la travailleuse reprenait le travail, usant de moyens disproportionnés dans la recherche d’une solution.
En l’espèce, la chronologie des faits permet de présumer une discrimination fondée sur l’état de santé actuel ou futur. L’employeur doit dès lors prouver, vu que la charge de la preuve est inversée, que cette distinction directe n’est pas constitutive d’une discrimination. Si un absentéisme important, même justifié, est de nature à perturber dans une certaine mesure les tâches des personnes présentes et engendre une adaptation organisationnelle, le recours à des remplaçants dans ce cadre est inévitable et ne peut être de nature à justifier un comportement discriminatoire.
(Décision commentée)
La Cour de Justice est interrogée sur l’article 2, § 2, sous a) et sous b), de la Directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail. La question posée est de savoir si ces dispositions autorisent une administration publique à organiser un environnement administratif totalement neutre et, partant, à interdire le port de signes convictionnels à l’ensemble des membres du personnel, qu’ils soient ou non en contact direct avec le public, même si cette interdiction neutre semble toucher une majorité de femmes et est donc susceptible de constituer une discrimination déguisée en fonction du genre.
La Cour constitutionnelle se voit quant à elle poser trois questions, la première étant relative aux articles 4 et 5 de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination et aux articles 4 et 5 du Décret wallon du 6 novembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination, les deux dernières aux articles L1122-32 et L1123-23 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, ainsi qu’à la loi du 8 avril 1965 instituant les règlements de travail. (Réponses :
Dès lors que, dans le secteur public, les différentes autorités administratives n’ont nullement l’obligation de maintenir en fonction les agents qui atteignent l’âge de 65 ans et que le principe est celui de la retraite, le maintien en activité, lorsqu’il est autorisé, est un régime dérogatoire et doit rencontrer l’intérêt de l’organisme. Dans l’appréciation de l’opportunité de ce maintien en service, le fonctionnaire-dirigeant (s’agissant en l’espèce d’un membre du personnel de la police, soit le Chef de Corps) dispose d’un très large pouvoir d’appréciation. S’il existe un droit subjectif pour tout agent de demander son maintien en activité au-delà de 65 ans, sans être discriminé sur la base d’un critère protégé visé par la loi du 10 mai 2007, il n’existe pas de droit subjectif absolu dans le chef de celui-ci à être maintenu en fonction après cet âge. La mesure (refus du maintien en service) ne peut dès lors, de ce chef, être discriminatoire.
Le non-respect de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971 constitue une faute qui heurte l’objet social de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes (I.E.F.H.). L’inobservance de la protection protégeant la femme enceinte est un comportement révélant une forme de discrimination basée sur l’état de santé de la demanderesse (et plus particulièrement sur son état de grossesse), qui cause un préjudice moral à l’Institut. Le tribunal admet 500 euros à ce titre.
L’indemnité forfaitaire de protection de six mois de rémunération prévue à l’article 40 de la loi du 16 mars 1971 ne peut être cumulée avec l’indemnité pour discrimination fondée sur le sexe prévue à l’article 23 de la loi Genre du 10 mai 2007.
La seule circonstance que, chronologiquement, le licenciement suive une période d’incapacité de travail ne suffit pas à établir que le traitement défavorable dont a été victime le travailleur (c-à-d. son licenciement) a été dicté par des motifs illicites (soit son incapacité et son état de santé).
Intervenu volontairement à la cause, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes (I.E.F.H.) demande l’indemnisation du dommage subi par lui en raison de la faute commise par l’employeur. Le tribunal a retenu en l’espèce une discrimination, en application de la loi Genre du 10 mai 2007. L’I.E.F.H. soutenant que ce comportement fautif, révélateur d’une hostilité envers la grossesse et, partant, discriminatoire, heurte son objet social de « veiller au respect de l’égalité des femmes et des hommes » et de « combattre toute forme de discrimination et d’inégalité basée sur le sexe », le tribunal retient qu’il est fondé à réclamer des dommages et intérêts en lien causal avec la faute commise. Se fondant sur un arrêt de la Cour constitutionnelle n° 7/2016 du 21 janvier 2016 en matière d’environnement, le tribunal confirme que le dommage subi par les personnes morales créées et agissant en vue de défendre un intérêt collectif ne peut être tenu comme étant limité à un dédommagement symbolique. Parmi les critères retenus par la Cour constitutionnelle pour évaluer un préjudice moral figurent les objectifs statutaires, l’importance des activités et les efforts fournis par la personne morale. En l’espèce, le tribunal alloue 1.300 euros, étant le montant demandé par l’Institut.
Le fait que le licenciement soit intervenu pendant une période d’incapacité de travail peut permettre d’analyser celui-ci sous le prisme des lois du 10 mai 2007. Cette seule circonstance factuelle, isolée de toutes les autres, est cependant insuffisante pour considérer que, au moment où la décision de congé est arrêtée par l’employeur, elle est susceptible de justifier une discrimination basée sur l’état de santé.
La coïncidence entre le début de l’incapacité de travail ─ qui n’est prévue que pour une durée de 15 jours ─ et le licenciement ─ qui intervient après seulement 2 jours effectifs d’absence ─ permet de présumer que la rupture a été dictée par l’état de santé actuel du travailleur, ce d’autant que, au vu des arguments avancés par la société, cette rupture aurait pu attendre le retour du travailleur.
La notion d’état de santé actuel recouvre également, dans une certaine mesure, les éléments du passé dont certains effets perdurent dans le temps. Ainsi, lorsque la longue absence pour maladie du travailleur, qui ne s’est achevée que quelques jours plus tôt, a toujours des conséquences sur sa situation présente, peut-on considérer que, même si au jour de son licenciement, l’intéressé n’était plus en incapacité de travail, son licenciement est en lien avec son état de santé actuel.
Tout congé notifié durant une période d’incapacité de travail, aussi brève soit elle, n’entraîne pas, ipso facto, une présomption de discrimination fondée sur l’état de santé. Encore faut-il apporter la preuve de comportements discriminatoires, ou d’éléments permettant d’établir que l’on a été traité moins favorablement que ses collègues ou de faire présumer qu’il y a bien eu licenciement en raison de l’état de santé.
L’unique critère de l’expérience n’est pas une raison objective suffisante pour justifier une discrimination entre deux types de travailleurs, à temps plein et à temps partiel, et autoriser la réduction de traitement qui serait réservée aux derniers d’entre eux si leurs prestations antérieures étaient proratisées. Il s’ensuit que l’ancienneté valorisable des intéressés doit être calculée sur la base d’un temps de travail complet.
La notion de « naissance » n’est pas définie dans la loi du 10 mai 2007. Il est cependant exclu qu’il s’agisse de la seule référence à une relation parents-enfants. Les travaux parlementaires de la loi du 25 février 2003 précisent que ce critère vise la culture d’origine. Il est admis en jurisprudence qu’elle peut viser l’appartenance familiale. Aussi faut-il non se limiter aux liens ascendants, mais inclure les liens de fratrie. Ainsi, est discriminatoire le refus d’embauche au motif que la sœur de l’intéressé travaille chez un concurrent direct.
Constituent une présomption de discrimination liée au sexe des propos tenus par l’employeur dont il ressort que c’est le fait pour l’employée d’être une femme devant s’occuper après son accouchement d’un enfant en bas âge qui justifie qu’un mi-temps lui soit proposé plutôt qu’un temps plein.
(Décision commentée)
La jurisprudence de la Cour de Justice indique la manière d’identifier des mesures qui bien qu’apparemment neutres produisent en pratique un effet défavorable pour des personnes caractérisées par un critère protégé. Pour qu’il y ait discrimination indirecte, la mesure litigieuse doit aboutir en pratique à désavantager un nombre beaucoup plus important de personnes caractérisées par un motif protégé que d’autres. Pour ce, il faut recourir à une analyse statistique pour vérifier si l’impact est disproportionné sur un groupe protégé. Par ailleurs, certaines mesures sont par nature et intrinsèquement susceptibles de défavoriser les personnes présentant un tel critère.
Dès lors qu’est identifié un critère apparemment neutre mais de nature à créer une discrimination indirecte, il faut se demander s’il touche en pratique un pourcentage considérablement plus élevé de travailleurs qui exercent des mandats syndicaux que d’autres travailleurs. Cette preuve est à fournir par le demandeur, qui doit établir des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination.
(Décision commentée)
Quand bien même faudrait-il considérer que c’est le principe clairement formulé de neutralité exclusive imposé ä l’ensemble du personnel de la société qui a conduit celle-ci à refuser l’engagement de l’intéressée, … et que, dans le prolongement de la jurisprudence Achbita, une telle règle interne n’est pas génératrice d’une discrimination directe, la mise en œuvre concrète de la règle est, elle, porteuse d’une discrimination directe fondée sur le critère protégé de la conviction religieuse.
Le marquage convictionnel d’un voile n’est pas manifeste et, sauf à laisser libre cours aux préjugés, l’application concrète de la règle interne qui interdit de manière générale, à l’ensemble des membres du personnel, le port de tout signe convictionnel, quel qu’il soit (religieux, politique, philosophique, ...), nécessite le plus souvent que celui ou celle qui arbore un signe soit contraint de révéler à l’employeur ou à son représentant sa motivation d’ordre convictionnel. Les échanges intervenus entre M.T. et les deux agences de recrutement confirment en l’espèce ce passage obligé par cette ingérence qui, d’une certaine manière, a poussé l’employée à devoir justifier son choix et, en quelque sorte, à se « mettre à nu » en dévoilant son for interne. Or, partant du principe que l’aspect négatif de la liberté de manifester ses convictions religieuses signifie également que l’individu ne peut pas être obligé de révéler son appartenance ou ses convictions religieuses, l’employée qui entend exercer sa liberté de religion par le port d’un foulard qui n’est pas en soi un symbole univoque de cette religion, vu qu’une autre femme pourrait choisir de le porter pour des motifs esthétiques, culturels ou même pour un motif de santé et qu’il ne se distingue pas forcément d’un simple bandana, est traitée de façon moins favorable, notamment qu’un autre candidat qui n’adhère à aucune religion, n’entretient aucune conviction philosophique et ne se réclame d’aucune obédience politique et qui, de ce fait, ne nourrit aucun besoin de porter un quelconque signe politique, philosophique ou religieux ou qu’un autre candidat adhérant à une autre religion, voire à la même, mais dont le besoin de l’afficher publiquement par le port d’un signe (connoté) est moindre, voire inexistant.
Les indemnités prévues par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination et la C.C.T. n° 109 ne sont pas cumulables. Celles-ci peuvent cependant être réclamées utilement, l’une en ordre principal - a priori la plus élevée - et l’autre à titre subsidiaire.
(Décision commentée)
L’état de santé et son altération sont considérés comme un état, l’altération étant transitoire. Ils sont évolutifs, même s’ils peuvent s’inscrire dans la durée, une maladie dont la fin est prévisible ne constituant pas un handicap au sens de la jurisprudence de la Cour de Justice.
Il y a eu en l’espèce un absentéisme important et la question est de savoir si celui-ci, même justifié et légitime, peut entraîner la rupture. La question est dès lors de savoir si l’employeur, qui pouvait craindre que le schéma existant (longues périodes d’incapacité + autres périodes plus courtes) allait se répéter, pouvait procéder à un licenciement. Le tribunal conclut par la négative, la défiance à l’égard de l’état de santé actuel ou futur étant une discrimination directe.
(Décision commentée)
Dans le cadre de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, la Cour constitutionnelle a jugé dans son arrêt du 12 février 2009 (n° 17/2009) qu’il ne suffit pas qu’une personne prouve qu’elle a fait l’objet d’un traitement défavorable. Cette personne doit également prouver les faits qui semblent indiquer que ce traitement défavorable a été dicté par des motifs illicites.
En l’espèce, le caractère discriminatoire du licenciement est retenu, celui-ci intervenant à la suite d’une incapacité de travail ayant requis une adaptation du temps de travail lors de la reprise, reprise qui avortera, le licenciement étant notifié verbalement la veille.
(Décision commentée)
La Cour constitutionnelle est interrogée sur
(Décision commentée)
Dès lors qu’une fonctionnaire a satisfait à une épreuve de sélection pour une fonction et que selon le médecin du travail rien ne l’empêche médicalement d’exercer celle-ci, sa candidature ne peut être écartée au motif que l’existence d’un handicap (agénésie) ne lui permettrait pas de suivre une formation comportant en l’espèce de nombreuses techniques utilisant l’usage des deux mains sans limitation (menottage, fouille corporelle, techniques spray, etc.). N’étant pas démontré que la réussite de la formation relative à l’armement léger constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, cet écartement est directement lié à son handicap et est discriminatoire. En conséquence, la cessation des faits discriminatoires est ordonnée dans le délai fixé dans le dispositif de l’ordonnance et selon les modalités y précisées.
L’employeur saisi d’une demande de libérer un travailleur pour le suivi de formations ouvertes aux délégués syndicaux doit être considéré comme étant averti, de manière implicite mais certaine, de ce que l’intéressé exercera un mandat syndical. S’il le licencie avant que le syndicat ait eu le temps de confirmer formellement son mandat de délégué effectif, il se rend coupable de discrimination directe fondée sur la conviction syndicale.
La liberté de manifester sa religion, garantie à l’article 9 de la C.E.D.H., peut faire l’objet de restrictions pour autant qu’elles soient justifiées, ces limitations devant respecter trois conditions, étant la légalité, la légitimité et la proportionnalité de la mesure.
La neutralité des services publics peut constituer un objectif légitime, étant que les agents des services publics se doivent de traiter les usagers de manière égale et impartiale ; il peut être exigé qu’ils s’abstiennent d’arborer des signes convictionnels aux fins de ne pas susciter chez ceux-ci le sentiment qu’ils ne seraient pas traités de manière impartiale. Pour les autres agents (ainsi ceux exerçant des fonctions techniques ou d’exécution), une restriction ne peut être adoptée qu’au terme d’une évaluation in concreto (celle-ci devant tenir compte de la nature de la fonction exercée et d’un examen de proportionnalité entre le droit fondamental et la protection des droits et libertés d’autrui ou la protection de la santé).
Dans la mesure où les pièces déposées ne sont pas susceptibles d’établir que les actions de grève projetées étaient à ce point problématiques qu’il y avait absolue nécessité de prendre des mesures qui ne pouvaient être adoptées que via une demande introduite par une requête unilatérale et que par ailleurs la société n’établit pas qu’une action en référés (éventuellement introduite avec abréviation des délais) n’aurait pas permis d’atteindre l’objectif souhaité, la demande originaire est rejetée, la tierce opposition étant ainsi recevable et fondée.
(Décision commentée)
Une compagnie aérienne exigeant un âge maximum au stade du recrutement (la date d’inscription aux examens devant intervenir avant la 25e année des candidats), une action en cessation basée sur l’article 20 de la loi est introduite devant le Président du tribunal, étant demandée la cessation de la pratique discriminatoire (discrimination directe).
La société se fondant essentiellement sur ce qu’elle qualifie de « situational awareness », la question est de savoir si ce critère (qui est admis comme constituant une exigence professionnelle essentielle et déterminante) est lié au jeune âge et si cette exigence repose sur un objectif légitime et est proportionnée par rapport à celui-ci. Le tribunal examine dans le cadre de l’article 8 de la loi les éléments avancés par la société, étant la maximalisation des chances de réussite de la formation, l’exigence d’une expérience suffisante au regard de la diminution des capacités cognitives et, enfin, l’évolution vers des fonctions plus complexes. Il conclut que la condition d’âge n’est pas proportionnée à l’objectif poursuivi.
La société se fondant également sur l’article 6.1. c) de la Directive n° 2000/78/CE, qui prévoit expressément la fixation d’un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d’une période d’emploi raisonnable avant la retraite, le tribunal considère que, dans le cadre de l’examen de l’article 12 de la loi, la société n’établit pas davantage la justification du choix de l’âge de 25 ans.
Une modification de fonction intervenue pendant l’absence d’une travailleuse pour congé parental consécutif à un congé de maternité - modification qui lui est imposée à son retour – peut, dès lors que les deux fonctions ne sont pas des fonctions équivalentes, être retenue comme présomption d’un traitement défavorable au sens de la loi « genre » de 2007. Dès lors que l’employeur n’établit pas la preuve contraire, à savoir que la décision a été prise pour des motifs étrangers à la discrimination sur la base du genre, il y a une discrimination prohibée, réparée par l’octroi de l’indemnité légale de six mois.
L’article 23, §§ 1er et 2, 2°, de la loi « genre » détermine comme fondement de celle-ci le droit de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle et laisse le choix à la victime entre l’indemnisation de son dommage réel (qu’elle doit établir) et une indemnité forfaitaire pour préjudice matériel et moral (de six mois mais pouvant être limitée à trois mois si l’employeur établit que le traitement défavorable serait également intervenu en l’absence de discrimination).
Dès lors que le travailleur pointe des indices permettant de présumer un lien direct entre le licenciement avec le handicap et que le juge admet que ceux-ci sont suffisants, l’institution employeur (ETA en l’espèce) doit établir l’absence de ce lien ou que le licenciement est justifié par une obligation légale ou encore par des exigences professionnelles essentielles et déterminantes. Celle-ci faisant valoir qu’elle était tenue de licencier pour des raisons légales (risques potentiels liés à des crises d’épilepsie, malgré les aménagements maximums qu’elle aurait concédés), le tribunal retient qu’aucune mise en péril évidente n’est avérée, ni au niveau de la sécurité de l’intéressé ni eu égard à des risques à prévenir. Par ailleurs aucun élément sérieux quant à des exigences professionnelles essentielles et déterminantes qui permettrait de rendre le licenciement admissible n’est établi. Il y a dès lors distinction directe opérée (mesure de licenciement), qui constitue une discrimination directe pour laquelle l’institution échoue à faire valoir valablement un quelconque élément de justification autorisé par la loi.
En outre, le licenciement est intervenu avec effet immédiat après la dernière crise du travailleur. Il y a eu précipitation. Le licenciement doit être assimilé à un refus d’aménagements raisonnables.
(Décision commentée)
Il faut donner à la notion de conviction syndicale une acception large, étant que ce critère ne couvre pas seulement une activité exercée dans le cadre d’une organisation syndicale. Le parallèle peut être fait avec les débats autour de la conviction politique, une interprétation restrictive aboutissant à une différence injustifiée entre les deux situations.
En l’espèce, certains travailleurs, qualifiés comme les « plus grands fauteurs de troubles » lors d’un mouvement de grève spontanée, ayant été licenciés, le tribunal retient au vu des éléments relevés dans les circonstances du mouvement et du licenciement que les faits peuvent faire présumer de l’existence d’une discrimination syndicale. Il appartient dès lors à la société d’apporter la preuve contraire, ce qu’elle ne fait pas. Le tribunal conclut que les reproches faits relatifs à leur implication dans ce mouvement sont à la base du licenciement et fait droit à la demande d’indemnité pour discrimination.
C’est en vain qu’un travailleur protégé du fait du mandat qu’il exerce au sein du C.P.P.T. soutient que son licenciement est discriminatoire pour être lié au mandat exercé, lorsque celui-ci intervient dans le cadre de la fermeture de l’entreprise qui l’occupe découlant de celle de l’entreprise dont elle sous-traitait une partie des activités.
Qu’il ait qualité de représentant du personnel ou non, tout travailleur a le droit de porter à la connaissance de l’administration compétente des informations concernant une demande de chômage temporaire formulée par son employeur et d’accompagner cette communication de documents permettant d’apprécier la véracité des informations communiquées. Il ne dépasse pas, ce faisant, les bornes du droit de critique dont il jouit dans le cadre de sa liberté d’expression en tant que travailleur salarié. Il ne peut davantage être convaincu d’être animé par une intention de nuire à son employeur, alors que sa démarche procède d’une légitime volonté de défendre son droit - et celui de tous les autres travailleurs non-grévistes - à sa/leur rémunération, l’employeur tentant, par tous les moyens, de ne pas payer celle-ci, alors qu’il aurait dû connaître la position, constante, de l’ONEm en cas de grève nationale.
(Décision commentée)
Dès lors que le règlement d’une institution hospitalière contient pour les médecins indépendants qu’elle emploie un principe (fin des activités à 65 ans) et une exception (prolongation d’un an, renouvelable cinq fois, entraînant ainsi une fin d’activités à 70 ans maximum), une telle clause (qui n’aurait pu exister dans un contrat de travail, s’agissant d’une clause résolutoire liée à l’âge), place ceux-ci dans une situation moins favorable que s’ils avaient été liés à l’hôpital dans le cadre d’un contrat de travail. La fin du contrat de collaboration intervenant automatiquement à 65 ou 70 ans peut être considérée comme une distinction liée à l’âge
Il faut vérifier si la distinction est justifiée. En l’espèce, les justifications qui sont présentées permettent de retenir une certaine logique (une certaine mixité des âges étant ressentie comme nécessaire dans une équipe médicale, motif donné dès le départ et figurant d’ailleurs dès l’élaboration du projet de budget, où il avait été souligné que le rajeunissement du staff semblait une réelle nécessité).
(Décision commentée)
La liberté de culte et celle de manifester ses opinions, dont les opinions et convictions religieuses, sont protégées dans la Constitution belge (articles 19 et 20), dans la Convention européenne des droits de l’homme (articles 9 et 14), ainsi que dans la Directive européenne n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 et dans la loi belge de transposition du 10 mai 2007.
En présence d’une règle interne à une entreprise concernant l’interdiction de port de signes convictionnels, il faut vérifier si elle n’instaure pas de différence de traitement directement fondée sur la religion ou sur les convictions au sens de la Directive n° 2000/78/CE. En vertu de la jurisprudence de la Cour de Justice, cette vérification porte sur l’existence d’un objectif légitime (politique de neutralité), sur le caractère approprié de la règle contestée (port de signes visibles interdits dans le cadre d’une politique qui doit être effectivement poursuivie de manière cohérente et systématique) et le caractère nécessaire de l’interdiction (celle-ci devant se limiter au « strict nécessaire »).
La politique de neutralité doit être cohérente et systématique et il ne peut s’agir d’admettre une mesure directement discriminatoire dirigée contre une religion déterminée ou une pratique religieuse précise.
(Décision commentée)
Le traitement du cancer du sein chez un homme doit être pris en charge même si la nomenclature ne visait pas (dans le cas d’espèce) le remboursement des dépenses liées à celui-ci. Si l’arrêté royal du 21 décembre 2001 fixant les procédures, délais et conditions en matière d’intervention de l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités dans les coûts des spécialités pharmaceutiques liait (à l’époque des faits) spécifiquement le remboursement de ces spécialités au fait d’être une femme (pré ou péri-ménopausée et justifiable d’un traitement hormonal), cette distinction ne se justifie pas et constitue une discrimination prohibée par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, qui couvre notamment la protection sociale, incluant ainsi la sécurité sociale et les soins de santé.
(Décision commentée)
Est une discrimination fondée sur le sexe féminin la mesure prise au regard, à l’occasion ou dans le cadre de la grossesse, qu’il s’agisse de la grossesse en elle-même, d’un traitement en rapport avec la fertilité (fécondation in vitro, etc.), d’une fausse couche, de l’accouchement, ou encore de l’allaitement : ces mesures ont un lien direct avec le sexe, mais non avec l’état de santé, avec lequel elles n’entretiennent en l’espèce qu’un lien indirect. La discrimination est une discrimination directe et non susceptible de justification.
Aucune disposition légale ou réglementaire (que ce soit dans le statut administratif, le statut réglementaire ou l’arrêté royal du 28 septembre 1984) ne permet de dire que le délégué permanent, qui a été dûment agréé et qui effectue des prestations dans cette qualité, en défendant les intérêts de sa profession, ne pourrait pas être considéré comme effectuant des « prestations effectives » au sens de l’article 25 du statut pécuniaire. Ainsi, ne pas lui octroyer la prime d’opérationnalité, au motif qu’il n’effectuerait pas des « prestations effectives » au sens de l’article 25 du statut pécuniaire, aurait pour effet de conduire à une discrimination indirecte basée sur la conviction syndicale, prohibée par la loi du 10 mai 2007.
Le fait qu’il soit la conséquence de multiples incapacités de travail, du reste systématiquement justifiées par certificats médicaux, ne rend pas discriminatoire, en dépit du lien indirect existant, implicitement ou explicitement, entre la maladie/le handicap et la rupture, le licenciement décidé pour cause d’un taux d’absentéisme jugé important au regard des besoins spécifiques de l’entreprise ou du service.
A supposer que l’on puisse considérer que le texte de l’article 9, § 3, de la C.C.T. n° 109 n’exclut pas le cumul entre l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable et l’indemnité pour licenciement discriminatoire due sur la base de la loi du 10 mai 2007, il n’en demeure pas moins que, en toute hypothèse, l’arrêt de la Cour de cassation du 20 février 2012 ne permettrait pas d’avaliser cette thèse dans la mesure où l’une et l’autre de ces deux indemnités ont une cause (l’(il)légitimité du/des motif(s) ayant présidé au licenciement) et un objet (sanctionner la faute de l’employeur qui a licencié un travailleur pour un motif illégitime) identiques. Le travailleur dispose donc d’une option entre les deux indemnités, et non d’une possibilité de cumuler les deux.
(Décision commentée)
Dès lors qu’il s’agit de réduire les perturbations de l’entreprise liées à une absence pour raisons de santé, le but de l’employeur est légitime. Si la travailleuse rapporte la preuve de son appartenance à un groupe déterminé, s’agissant des travailleurs ayant subi de longues parenthèses et/ou de nombreuses périodes d’incapacité de travail et/ou encore affichant (ou ayant affiché) une santé fragile, elle établit des faits laissant supposer une présomption de comportement discriminatoire. Pour qu’il n’y ait pas discrimination, l’employeur est tenu d’établir que les mesures prises rencontrent deux conditions, étant qu’il a recherché un but légitime et recouru à des moyens appropriés et nécessaires. Le contrôle du juge n’est pas un contrôle marginal dans la mesure où la vérification de moyens « appropriés et nécessaires » pour réaliser le but poursuivi implique un contrôle d’opportunité et de proportionnalité.
Enfin, le licenciement lié aux appréhensions quant à l’état de santé futur du travailleur peut revêtir un caractère discriminatoire.
Une discrimination ne peut être présumée en cas de licenciement d’un travailleur handicapé justifié non par le refus d’envisager des aménagements raisonnables, mais par l’impossibilité de reclassement de l’intéressé, qui n’a jamais paru être satisfait par les mesures proposées ou mises en oeuvre.
Dès lors qu’existe dans une entreprise une règle interne imposant à l’ensemble du personnel de respecter une consigne vestimentaire, le refus d’une employée (portant le foulard) de s’y soumettre échappe à la qualification de discrimination directe, et ce en raison de son caractère général. Il n’y a pas davantage de discrimination indirecte, le fait d’interdire à tous les travailleurs, de manière cohérente et systématique, de porter des signes convictionnels visibles étant un moyen approprié de réaliser le but légitime affiché, qui est la politique de neutralité de l’entreprise (avec renvoi à la jurisprudence de la C.J.U.E. dans ses arrêts ACHBITA et BOUGNAOUI).
(Décision commentée)
Dès lors qu’existe dans une entreprise une règle interne imposant à l’ensemble du personnel de respecter une consigne vestimentaire, le refus d’une employée (portant le foulard) de s’y soumettre échappe à la qualification de discrimination directe, et ce en raison de son caractère général. Il n’y a pas davantage de discrimination indirecte, le fait d’interdire à tous les travailleurs, de manière cohérente et systématique, de porter des signes convictionnels visibles étant un moyen approprié de réaliser le but légitime affiché, qui est la politique de neutralité de l’entreprise (avec renvoi à la jurisprudence de la C.J.U.E. dans ses arrêts ACHBITA et BOUGNAOUI).
En se portant candidat à un mandat au sein de la délégation et en exerçant celui-ci, le travailleur affirme indéniablement ses convictions syndicales, ce qui ne suffit pas à démontrer que le PIP (Personal Improvment Plan) dont il fait l’objet revêt un caractère discriminatoire en lien avec l’expression de celles-ci lorsque la chronologie des événements établit à suffisance que ce plan a été mis en place après évaluation de ses prestations, concluant à une attente d’amélioration de ses performances, à laquelle il a du reste souscrit.
La perte d’un enfant touchant aussi bien les hommes que les femmes, un licenciement décidé en raison d’une diminution des performances d’une travailleuse due à pareil drame ne constitue pas une discrimination sur la base du genre.
(Décision commentée)
Le fait que la société ait licencié l’employée au moment où elle était en incapacité de travail ne suffit pas à faire naître une présomption de discrimination fondée sur le fait que le licenciement est intervenu en raison de l’état de santé. En l’espèce, cet état d’incapacité n’était pas récurrent et l’employeur n’était pas au fait de problèmes de santé plus sérieux de l’intéressée. Par ailleurs, une incapacité de travail n’est pas un handicap au sens du droit européen (avec référence aux arrêts CHACÓN NAVAS et DAOUIDI).
(Décision commentée)
Il convient de rechercher le juste équilibre entre, d’une part, la liberté du travailleur de s’exprimer, garantie en règle par l’article 10 de la C.E.D.H. et par l’article 19 de la Constitution, et, d’autre part, ses obligations à l’égard de l’employeur. La liberté d’expression n’est pas un droit absolu et, dans le cadre d’une relation de travail, il faut respecter cet équilibre, le travailleur ayant un devoir de loyauté vis-à-vis de son employeur.
Si un travailleur occupe des responsabilités particulières dans l’entreprise, il est admis que le droit de critique peut être plus étendu, la subordination ne s’assimilant pas à une soumission aveugle. Il est cependant exigé que la critique émise entre dans les responsabilités du travailleur et qu’elle ne soit pas exprimée de manière disproportionnée.
(Décision commentée)
La personne qui s’estime l’objet d’une discrimination doit invoquer des faits permettant de présumer l’existence de celle-ci. Ces faits incluent entre autres des éléments révélant une certaine récurrence de traitement défavorable à l’égard d’une personne partageant un critère protégé ou faisant apparaître que la situation de la victime du traitement défavorable est comparable à celle de la personne de référence. Il peut s’agir de comportements, de faits concrets et clairement définis, de personnes identifiables, mais non d’affirmations décousues ou d’une déclaration « sur l’honneur » que ferait le plaignant.
Dès lors qu’est invoquée une discrimination directe, le travailleur doit établir son appartenance à un groupe déterminé, ainsi que la comparabilité de sa situation avec celle d’un travailleur qui n’appartient pas à ce groupe. Il doit en outre prouver la différence de traitement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve.
(Décision commentée)
En ce qui concerne la question de l’étendue et de la portée des aménagements raisonnables, il faut savoir s’ils s’imposent, s’ils portent sur un autre travail que celui convenu et si l’employeur s’oppose à les envisager.
En l’espèce, il est constaté, via l’examen des formulaires d’évaluation de santé ainsi que des rapports de divers médecins consultés (et encore une attestation circonstanciée de kinésithérapie), que l’on est en présence d’un handicap et que celui-ci s’est aggravé depuis un dernier accident de la route.
Les deux aménagements proposés, étant une dispense partielle de prestations et le recours au télétravail, sont considérés comme des mesures appropriées prises en fonction des besoins de l’intéressée dans une situation concrète pour lui permettre d’accéder, de participer et de progresser dans les domaines pour lesquels le Décret (Décret wallon du 6 novembre 2008) est d’application. Par ailleurs, ils ne constituent pas une charge disproportionnée, la dispense de deux demi-journées pouvant être compensée de façon suffisante par une intervention de l’AVIQ. Quant au télétravail, l’ordonnance relève que rares sont aujourd’hui les services publics où celui-ci n’est pas appliqué, voire même favorisé.
S’il est vrai que seules les entreprises belges ou occupant du personnel sur le territoire belge sont susceptibles de faire application d’une C.C.T. rendue obligatoire par un arrêté royal belge – ou, autrement dit, qu’une entreprise de droit français, occupant des travailleurs sur le sol français, n’est pas soumise à la C.C.T. n° 24, propre à l’ordre juridique belge –, subordonne dans le chef d’un travailleur devenu chômeur, le bénéfice d’un avantage de sécurité sociale (tel un complément d’ancienneté) au fait d’avoir été licencié dans le cadre d’une procédure de licenciement régie par une C.C.T. belge, revient à exclure, de manière automatique et sans nuance, toute personne non soumise au droit belge, ce quand bien même elle aurait fait t’objet d’un licenciement dans des conditions et circonstances parfaitement identiques, et instaure une discrimination basée sur le lieu d’exécution du contrat.
Cette discrimination est condamnable au regard, général, du droit européen, qui vise notamment à faciliter la libre circulation des travailleurs et à celui, particulier, de la Directive n° 98/59/CE du Conseil, dont le droit belge visant à encadrer les licenciements collectifs constitue la transposition ; elle est plus encore choquante lorsqu’elle concerne une personne, de nationalité et résidence belges, qui, pour éviter le chômage à la suite d’un licenciement en Belgique, a accepté un emploi transfrontalier.
(Décision commentée)
La notion de handicap n’est pas définie par la loi mais figure dans plusieurs arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne : le handicap suppose une atteinte à l’intégrité physique, psychique ou mentale du travailleur, qui restreint durablement ses capacités professionnelles. L’origine de ce handicap est sans importance et il n’est pas exigé qu’il ait atteint un certain seuil.
Avant de licencier un travailleur atteint d’un handicap, l’employeur doit mettre en place des aménagements raisonnables. Ceux-ci sont définis par la loi du 10 mai 2007, étant des mesures appropriées qui tiennent compte des besoins de la personne handicapée pour lui permettre d’accéder, de participer et de progresser dans les domaines d’application de la loi sauf s’ils constituent une charge disproportionnée (la loi soulignant que la charge n’est pas disproportionnée lorsqu’elle est compensée de manière suffisante par des mesures prises dans le cadre de la politique publique concernant les personnes souffrant d’un handicap).
S’agissant d’une double discrimination (en l’occurrence refus d’embauche sur la base du sexe et de l’âge), le tribunal rappelle sur la question du cumul que l’indemnisation du dommage matériel et moral est forfaitaire en application des deux lois et du choix de la partie demanderesse sur ce point : le dommage est à tout le moins partiellement distinct sous l’angle moral puisque le comportement dénoncé porte atteinte à deux caractéristiques personnelles différentes. Ne pas cumuler les dommages constitue en outre et en soi une discrimination puisque le demandeur qui s’est notamment vu refuser l’emploi en raison de son genre, qui est un critère discriminatoire, serait traité, à défaut de cumul, de la même manière qu’un candidat du même âge de sexe féminin qui n’aurait pas pu subir cette discrimination sur base du sexe.
Le fait que, selon les statistiques générales, il existerait une surreprésentation des femmes parmi les travailleurs bénéficiant d’un congé parental ne suffit pas à démontrer qu’un licenciement qui a pu être influencé par l’exercice d’un tel congé par une travailleuse constituerait en lui-même la démonstration d’une discrimination fondée sur le genre.
La notion de vie familiale au sens de l’article 8 de la CEDH ne couvre pas la situation des enfants majeurs appartenant à une famille dont l‘un des membres se verrait reconnaître une force majeure médicale. L’intéressé - en séjour illégal et devenu majeur - ne peut donc bénéficier d’une aide sociale équivalant au RIS cohabitant, l’assimilation de la force majeure médicale reconnue en l’espèce pour sa famille par le biais de son frère mineur ne pouvant lui profiter.
(RG inconnu)
Une distinction directe opérée sur la base de l’état de santé actuel ou futur ne peut être justifiée que dans trois hypothèses, étant (i) que celle-ci doit être objectivement justifiée par un but légitime et que les moyens de réaliser ce but soient appropriés et nécessaires (art. 7), (ii) qu’une telle distinction (directe ou indirecte) ne peut cependant constituer une discrimination prohibée au motif qu’elle est imposée par/ou en vertu d’une loi (art. 11 §1) et (iii) qu’il ne peut y avoir en cas de distinction (directe ou indirecte) une quelconque forme de discrimination s’il s’agit d’une mesure d’action positive (art. 10 §1).
Dès lors que la demanderesse apporte la preuve de faits permettant de faire présumer l’existence d’une discrimination sur la base de l’état de santé, il peut être conclu, même s’il n’y avait pas – au moment du licenciement – d’obligation de motiver celui-ci, que le C4 contient des éléments appuyant ces indices. La charge de la preuve est dès lors renvoyée à l’employeur, qui doit établir qu’il n’y a pas eu de discrimination. Cette preuve n’est pas apportée si l’employeur fait état d’éléments trop généraux (projet géré par l’intéressée, conjoncture en 2014 et situation financière de l’entreprise, problèmes de subsides).
L’article 20, § 3, de la loi du 10 mai 2007, qui prévoit que le président du tribunal peut, si cette mesure est de nature à contribuer à la cessation de l’acte incriminé ou à ses effets, prescrire l’affichage de sa décision tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des établissements du contrevenant ou des locaux lui appartenant, n’est pas applicable dans le cadre d’une procédure initiée devant le tribunal - et non devant son président selon les formes du référé - à l’effet, non pas de faire constater et cesser la discrimination, mais uniquement d’obtenir l’indemnisation du dommage subi du fait de celle-ci.
(Décision commentée)
L’obésité en tant que telle ne peut être considérée comme un handicap mais elle peut relever de celui-ci en fonction de circonstances données. Elle peut dès lors être protégée indirectement sur la base de ce critère. Le refus de procéder à des aménagements raisonnables est un acte de discrimination.
(Décision commentée)
L’injonction faite à l’employeur de cesser une pratique discriminatoire, assortie le cas échéant d’une astreinte, a le caractère d’une sanction. Les sanctions en la matière doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. A l’inverse de la publication dans plusieurs journaux nationaux et un autre régional - qui peut paraître disproportionnée (en l’espèce) -, peut être une sanction adéquate un affichage en extrait du jugement à un endroit bien visible de l’ensemble des personnes susceptibles de se trouver au siège social, et ce pendant un mois, affichage également assorti d’une sanction et élargi aux magasins de la société.
(Décision commentée)
La marge d’appréciation d’une administration lui permettant d’opter pour une interdiction générale de tout signe conventionnel est soumise à un contrôle de proportionnalité, qui doit être d’autant plus rigoureux qu’il porte atteinte à un droit fondamental. Est exigée la preuve d’un besoin social « impérieux » imposant dans celle-ci cette interdiction générale à la différence des autres administrations (qui relèvent en l’espèce de la fonction publique bruxelloise).
(Décision commentée)
Absences pour incapacité liée à une grossesse – discrimination directe
(Décision commentée)
Avant de licencier un travailleur atteint d’un handicap, l’employeur a l’obligation de mettre en place des aménagements raisonnables (voir exemples donnés dans la décision). La forme de la demande importe peu.
(Décision commentée)
Licenciement lié au handicap – renvoi à C. trav. Bruxelles, 9 janvier 2013 et à la jurisprudence de la CJUE
Cumul avec l’indemnité forfaitaire pour discrimination fondée sur le genre
(Décision commentée)
Participation à un mouvement de grève avec occupation – absence de motif grave – confirmé par C. trav. Bruxelles, 5 novembre 2009, R.G. 2009/AB/52.381
Le principe de non-discrimination peut-il être mis en oeuvre par une partie, qui ne se prétend pas discriminée, contre une partie qui pourrait l’être, mais ne se considère pas être effectivement victime d’une discrimination ?
(Décision commentée)
Discrimination à l’embauche sur la base de l’origine ethnique - action en cessation